Intervention de Serge Vinçon

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 15 mars 2006 : 1ère réunion
Outre-mer — Situation de la gendarmerie à saint-martin - Audition du général guy parayre directeur général de la gendarmerie nationale

Photo de Serge VinçonSerge Vinçon, président :

a remercié le directeur général de la Gendarmerie nationale d'avoir accepté cette audition, qui fait suite à l'émotion soulevée par le décès du gendarme Raphaël Clin, survenu le 12 février dernier dans l'île de Saint-Martin en Guadeloupe. Le récent déplacement du général Parayre, sur place, la semaine dernière, lui permettrait d'éclairer la commission sur les circonstances troubles qui ont entouré ce tragique événement. M. Serge Vinçon, président, a souhaité qu'au-delà de cet événement même, le directeur général puisse aborder la situation particulière des gendarmes dans les départements d'outre-mer, ou dans telle ou telle partie de ces départements, et les difficultés spécifiques auxquelles ils peuvent y être confrontés dans l'exercice de leur mission.

Le général Guy Parayre, évoquant les fortes répercussions médiatiques suscitées par le décès du gendarme Raphaël Clin, dans l'Ile de Saint Martin, a estimé que les événements devaient être replacés dans le contexte précis des faits.

Il a ainsi rappelé que, le 12 février, à 7 h 45, un jeune motocycliste, à l'occasion d'un « run » (rassemblement non organisé, non déclaré et non autorisé, de voitures et motards roulant à pleine vitesse), a heurté le gendarme, à une vitesse supérieure à 140 km/heure, sur la route qui relie la partie hollandaise de l'île à la partie française. C'est donc sur la base d'un homicide involontaire qu'ont été ouvertes l'enquête initiale et l'information judiciaire. Par ailleurs, a poursuivi le directeur général de la Gendarmerie nationale, selon des déclarations et témoignages concordants, des propos inacceptables à caractère racial ont été tenus sur les lieux de l'accident, où étaient rassemblées 150 à 300 personnes. Une seconde enquête a donc été ouverte sur ces faits. Une dizaine d'individus sont recherchés ; une personne a été arrêtée et a été placée, le 14 mars, sous contrôle judiciaire.

Il a ensuite évoqué la diffusion, dans les médias et auprès de plusieurs élus, de trois messages électroniques envoyés juste après l'accident. Le premier, émanant de l'épouse de M. Clin, exprimait le désespoir d'une jeune veuve de 31 ans ; les deux autres émanaient de gendarmes faisant part de leur émotion, en ajoutant toutefois des éléments, en partie inexacts, dénonçant une surcharge quotidienne de travail et mettant en cause leurs autorités hiérarchiques. Cette correspondance, initialement destinée à un cercle amical, avait ensuite été répercutée au-delà de ses premiers destinataires. Son contenu accréditait l'idée d'une coupure entre la Gendarmerie et la population, thèse contre laquelle le directeur général de la Gendarmerie nationale s'inscrivait en faux : le comportement d'une dizaine d'individus ne devait pas conduire à fustiger toute une population.

Le général Guy Parayre a ensuite précisé que le dispositif actuel de la gendarmerie à Saint Martin était conforme à l'organisation traditionnelle de l'arme. 110 militaires sont engagés au quotidien et sont ainsi répartis : un groupe de commandement de compagnie, deux brigades territoriales, à Marigot (21 gendarmes) et au Quartier d'Orléans (9 gendarmes) ; un peloton de surveillance et d'intervention ; une brigade de recherches ; une brigade nautique ; deux pelotons de gendarmerie mobile (36 gendarmes).

La gendarmerie, à Saint Martin, a poursuivi le général Guy Parayre, est très sollicitée et évolue dans un climat que la délinquance contribue à tendre. Il a rappelé que l'île abrite 40.000 résidents déclarés, originaires de quelque cent nations différentes et où une jeunesse, à majorité anglophone, souhaite souvent s'affranchir de la légalité française sur ce territoire binational où cohabitent deux législations différentes. Les principaux problèmes de l'île concernent la lutte contre l'immigration irrégulière, contre le trafic de stupéfiants et la délinquance. Une forte disparité caractérise les parties française et néerlandaise. Dans la partie néerlandaise, par exemple, les soins sont payants, il n'existe ni couverture maladie universelle, ni revenu minimum d'insertion et, sur le plan judiciaire, la garde à vue peut aller jusqu'à 28 jours. La partie française n'est pas exempte de problèmes, avec un chômage de 15 à 20 % qui va croissant et touche essentiellement les jeunes auxquels les employeurs n'accordent pas leur confiance. Dans ce contexte, les gendarmes, chargés de faire respecter la loi, se trouvent souvent en rupture avec ce qui a cours dans la zone néerlandaise de l'île, d'où certaines tensions avec une partie de la population, liées aux trafics de stupéfiants ou à l'immigration irrégulière.

Le général Guy Parayre a souligné que, d'une façon générale, dans les départements et territoires d'outre-mer, se retrouvaient certaines caractéristiques observées à Saint Martin : la pression migratoire, les trafics divers, le fort degré de violence dans la délinquance ou le contexte économique difficile. Aussi bien la gendarmerie, qui est le service de l'Etat le plus présent et le plus nombreux outre-mer, supporte-t-elle l'essentiel de cette pression, qui conduit l'arme à toujours rechercher une meilleure coopération avec les autres secteurs de l'Etat. La Gendarmerie nationale dispose cependant de ses atouts spécifiques que sont ses capacités d'adaptation, sa culture inter-services et interarmées et son aptitude à servir en tout temps et tout lieu.

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