Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’ensemble des moyens consacrés à la politique de l’immigration et du droit d’asile sont six fois supérieurs au bleu budgétaire sur lequel nous nous prononçons maintenant.
Dans le programme 303 « Immigration et asile », 32 millions d’euros sont utilisés pour reconduire les étrangers en situation irrégulière. Mais lorsque l’on sait qu’il y a parmi eux des enfants scolarisés et que l’on connaît les déchirements et les traumatismes que ces reconduites provoquent, on doit constater que l’usage de ces moyens est aujourd’hui parfois contestable.
Mais c’est votre politique du chiffre, monsieur le ministre. Les Français payent, les étrangers trinquent, et la France est humiliée par son propre comportement !
Le programme 301, prétendument de « Développement solidaire et migrations », est un outil du ministère de l’intérieur, qui n’a aucune vocation d’aide publique au développement. C’est pourtant ainsi qu’il est présenté dans le projet de loi de finances, et nous ne nous prononcerons donc pas sur celui-ci cet après-midi. Ses moyens sont pourtant mis en œuvre par le ministère chargé de l’immigration, sous votre responsabilité.
Le ministère de l’intérieur dispose de ces financements pour « acheter » les accords de gestion concertée des flux migratoires avec les gouvernements des pays d’origine. Ces 28 millions d’euros devraient être par principe réintégrés dans le programme 303 et leurs emplois plus précisément explicités.
L’Office français de l’immigration et de l’intégration, l’OFII, principal opérateur du ministère chargé de l’immigration, au budget de 175 millions d’euros, voit le montant de ses ressources fiscales plafonnées à 122 millions d’euros. Mais, dans le même temps, le Gouvernement a souhaité augmenter fortement les taxes dont doivent s’acquitter les étrangers pour leur séjour en France ! Ces taxes, dont le produit sera très significativement en hausse, financeront donc le budget général, sans aucune perspective d’amélioration des conditions d’accueil des étrangers dans les préfectures, qui sont aujourd’hui tout simplement indignes d’un État de droit.
Je me réjouis que l’amendement adopté par la majorité sénatoriale ait permis de limiter le processus scandaleux consistant à augmenter les taxes payées par les plus démunis, notamment les étudiants.
Je rappelle – je ne me fais malheureusement guère d’illusion sur le texte qui sera in fine adopté, une fois le projet de loi de finances réexaminé à l’Assemblée nationale et en commission mixte paritaire – que les dispositions voulues par le Gouvernement faisaient porter la taxe applicable aux étudiants étrangers devenant salariés de 85 euros à 340 euros !
Une telle disposition confortera les effets de votre circulaire du 31 mai 2011, que nous récusons fermement et qui durcit les conditions d’attribution de visa pour les étudiants souhaitant accéder à un statut professionnel en France.
Cette circulaire doit être abrogée, car elle constitue un détournement de l’article L. 311-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Elle fait d’ailleurs l’objet d’une requête en annulation devant la section du contentieux du Conseil d’État.
Plus de 6 000 étudiants étrangers se sont trouvés dans l’incapacité de bénéficier d’un titre de séjour pour tirer profit du savoir acquis dans nos établissements d’enseignement supérieur les plus prestigieux et le mettre en pratique en France, ce qui constitue pourtant un complément indispensable à leur enseignement. Cette perte immense pour notre pays, ses entreprises, ses universités et grandes écoles porte atteinte à la place de celles-ci dans le classement de Shanghai.
L’année 2011 est l’année Curie ; nous célébrons les cent ans du premier prix Nobel de Maria Sklodowska-Curie. Votre politique consiste à reconduire Maria Sklodowska, tout juste diplômée, à la frontière, l’empêchant d’apporter sa contribution immense à la science et à l’humanisme de notre pays !
C’est toujours votre politique du chiffre, monsieur le ministre. Les Français payent, les étrangers trinquent, et la France est humiliée par son propre comportement.
Monsieur le ministre, nous ne voterons pas votre budget, car nous désapprouvons totalement les choix politiques qu’il autorise. §