Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’agriculture, faut-il le souligner, est un secteur économique majeur pour notre pays.
Trois missions lui incombent : nourrir nos concitoyens, préserver nos paysages et contribuer à la spécificité de notre identité au sein de l’Europe.
À ce titre, elle mérite un soutien appuyé et volontaire des pouvoirs publics.
J’ajouterai que notre agriculture, par sa diversité et sa compétitivité, aura un rôle clé à jouer pour répondre, demain, au défi alimentaire mondial.
Vous le savez, mes chers collègues, la demande de nourriture va inéluctablement et fortement augmenter au fil des décennies à venir. Aussi, il faut préparer les grandes nations agricoles, dont nous sommes, à produire plus, beaucoup plus, mais aussi mieux, bien mieux que nous ne l’avons fait auparavant quand les exigences de qualité et de sécurité sanitaire étaient moindres.
Chaque jour, on compte sur terre 200 000 personnes de plus à nourrir. Selon les projections démographiques de l’ONU, nous serons au moins 9 milliards d’individus à l’horizon 2050.
Nous sommes là face à un véritable défi, qui s’inscrit de surcroît dans le contexte d’un dérèglement climatique de plus en plus avéré. C’est pourquoi, pour parvenir à assumer l’expansion de la demande alimentaire, la production agricole devra augmenter entre 70 % et 100 %.
Dans ces conditions, parce que la mondialisation est dans notre assiette, la France doit conserver son potentiel agricole.
L’agriculture française doit absolument rester dynamique afin d’être en mesure de contribuer à relever le défi alimentaire mondial et ainsi tirer parti de cette perspective sur le plan économique, avec l’appui de la PAC, naturellement, une PAC sachant concilier les impératifs de compétitivité avec les particularités nationales.
Je souhaite, monsieur le ministre, qu’elle soit discutée dans ce sens avec fermeté à Bruxelles avant d’être finalisée pour la période 2014–2020.
Car il s’agit aussi de faire vivre les agriculteurs français, qui, toujours disposés à s’adapter aux grandes mutations, ne sont pas pour autant récompensés à la hauteur de leur investissement.
Développer la production agricole, c’est d’abord et avant tout encourager les exploitants. Nous savons que les agriculteurs n’exercent pas un métier simple ; beaucoup d’entre eux doivent affronter des aléas qui remettent parfois en cause toute une vie de travail.
À cet égard, il est donc essentiel de maintenir les outils qui permettent de lutter contre la déprise agricole, de former les jeunes exploitants, de pallier les crises conjoncturelles ou les accidents climatiques, d’offrir des débouchés vraiment rémunérateurs.
Dans cette perspective, monsieur le ministre, je regrette vivement que les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » enregistrent une baisse par rapport à la loi de finances initiale pour 2011.
Nos collègues rapporteurs l’ont souligné : les autorisations d’engagement ont diminué de 0, 47 % et les crédits de paiement, de 1, 93 %. Malgré l’abondement de la mission lors de son examen à l’Assemblée nationale, l’agriculture n’est pas soutenue à la hauteur des enjeux que je viens d’évoquer à l’instant.
Naturellement, les finances publiques sont contraintes, mais prenons garde de laisser l’agriculture rater le train de la mondialisation, comme ce fut le cas pour des pans entiers de notre industrie.
Je vous donne acte, monsieur le ministre, de votre souci de reconduire, au même niveau qu’en 2011, les principaux dispositifs de soutien au maintien de l’activité agricole, notamment dans les zones difficiles. Je pense notamment à la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante, qui bénéficiera de 165 millions d’euros, à la prime herbagère agroenvironnementale, dont les contrats seront prolongés jusqu’en 2014, à la poursuite des plans de développement des filières initiés cette année ainsi qu’aux exonérations de charges sociales, particulièrement pertinentes pour un secteur riche en main-d’œuvre.
Je voudrais d’ailleurs rebondir sur ce dernier point pour signaler, après notre collègue Joël Bourdin, que le rapport Guillaume, qui mesure la performance des niches fiscales, juge efficaces la majorité de celles qui concernent l’agriculture. C’est une bonne nouvelle qui doit inciter le Gouvernement, monsieur le ministre, à aller chercher des économies ailleurs, dans les secteurs où les effets d’aubaine sont légion.
J’ai toutefois aussi beaucoup de regrets, car certains instruments me semblent sous-dotés.
La gestion des crises et des aléas climatiques ne concentre que 2 % des crédits du programme 154 « Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires ». Ils ont été rabotés au titre du plan d’économies supplémentaires du 24 août 2011.
Est-ce bien raisonnable, alors que nous savons malheureusement que, chaque année, l’agriculture sera fatalement confrontée à une crise sanitaire, économique ou climatique ?
Je suis d’autant plus inquiet que le dispositif d’assurance récolte tel qu’il a été redéfini par la loi de modernisation agricole n’est toujours pas suffisamment incitatif pour les agriculteurs. Je comprends bien les difficultés liées à la question de la réassurance publique, mais, au nom du principe de solidarité, il me semble possible de parvenir un à système satisfaisant à la fois pour les agriculteurs, pour les assureurs et pour les contribuables.
Enfin, mes chers collègues, n’oublions pas les agriculteurs d’hier, qui n’ont pas ménagé leurs efforts pour apporter leur pierre au modèle agricole français.
Vous le savez, monsieur le ministre, nous sommes nombreux sur ces travées à attendre un geste en faveur des retraites agricoles, dont le niveau est encore très faible pour la plupart des pensionnés, qui ont consacré toute une vie de travail au difficile et noble métier de paysan.
Voilà, mes chers collègues, les quelques remarques que je souhaitais faire sur ce budget, que la majorité des membres du RDSE ne soutiendront pas.