Elles se solderaient par la mort des 15 000 pêcheurs restants en France. Je le dis aussi simplement et aussi crûment que cela. Vous ne pouvez pas demander aux pêcheurs français de mettre en place des quotas individuels transférables et, en même temps, leur dire avec des trémolos dans la voix que vous êtes favorable au maintien de la pêche artisanale sur toutes les côtes françaises, du Nord jusqu’au Sud-ouest et à l’Aquitaine en passant par la Bretagne.
Je ne me vois pas dire aux pêcheurs de Saint-Jean-de-Luz, que je connais bien, ou aux pêcheurs de Fécamp, que je connais bien également, que nous allons maintenir une pêche artisanale et, dans le même temps, accepter des quotas individuels transférables en Europe. Si nous acceptons à Bruxelles des quotas individuels transférables, cela veut dire la mort de la pêche artisanale française au profit de la seule pêche industrielle. Jamais je ne m’y résoudrai !
De la même façon, vous ne pouvez pas leur dire zéro rejet. Il faut n’être jamais monté sur un bateau de pêche pour dire zéro rejet ! Il faut n’avoir jamais participé à une campagne de pêche pour penser que zéro rejet, c’est possible immédiatement sans donner le temps aux pêcheurs. Or c’est ce que propose Mme Damanaki et sur ce point, comme sur les autres, elle a tort.
Enfin, vous ne pouvez pas dire aux pêcheurs français que nous respectons et suivons les avis émis par les scientifiques lors des conférences internationales mais en essayant de trouver un bon équilibre entre les positions des uns et des autres, et, alors que ces scientifiques préconisent d’atteindre le rendement maximum durable en 2020, imposer la date de 2015 par une décision autoritaire, strictement politique et strictement idéologique. Allez donc dire aux pêcheurs que nous, les Européens, nous qui lavons toujours plus blanc que blanc, nous avançons l’échéance à 2015, comme cela, ils mourront cinq ans plus tôt !
Ce n’est pas acceptable !
S’agissant de la politique agricole commune, vous m’avez interrogé sur plusieurs points, que je vais reprendre.
Premièrement, il nous faut sauver le budget, sans quoi vous ne pourrez rien faire. Je rappelle que la proposition de la Commission était de baisser le budget de la PAC de 30 % en 2009, et que, à l’issue de deux ans de négociations, nous en avons obtenu le maintien, à l’euro près.
Deuxièmement, je suis favorable au « verdissement » de la PAC, mais encore faut-il qu’il soit plus simple, plus lisible, et surtout positif pour les paysans français et européens. Il ne s’agit pas de verdir la PAC pour les stigmatiser, mais il faut les encourager à adopter ces bonnes pratiques, notamment celles qui touchent aux prairies permanentes et au retournement de prairies, et en faisant preuve du minimum de pragmatisme dont a parlé Aymeri de Montesquiou.
Troisièmement, enfin, la PAC à laquelle je crois doit certes avoir un budget fort et prévoir un verdissement qui soit simple, mais elle doit aussi défendre une vraie régulation des marchés. Je me suis opposé, depuis le début, à la libéralisation des marchés agricoles. Quelles que soient les filières, nous avons besoin d’instruments de régulation et d’intervention sur les marchés. Dans le secteur viticole, par exemple, le jour où l’on aura supprimé les droits de plantation en Europe et que l’on verra pousser n’importe quel type de vignoble sur n’importe quel type de territoire, on aura mis fin à l’identité agricole européenne !