Intervention de Michel Mercier

Réunion du 7 décembre 2011 à 14h30
Premier usage illicite de stupéfiants — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous examinons cet après-midi la proposition de loi visant à punir d’une peine d’amende tout premier usage illicite de l’une des substances ou plantes classées comme stupéfiants. Ce texte est le fruit d’une réflexion menée dans le cadre d’une mission commune d’information de l’Assemblée nationale et du Sénat sur les toxicomanies.

Coprésidée par François Pillet et Serge Blisko, cette mission est revenue sur le texte fondateur, la loi du 31 décembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et à la répression du trafic et de l’usage illicite des substances vénéneuses.

Vous avez pu constater que les toxicomanies sont plurielles et connaissent une progression alarmante, pour ce qui concerne tant les produits consommés que les pratiques des usagers de drogues et les risques qu’ils encourent, qui semblent croissants.

Comme vous l’avez souligné, il est nécessaire que chacun, en particulier parmi les pouvoirs publics, tienne un discours clair et univoque réaffirmant la dangerosité des drogues et le caractère illicite de leur consommation.

Ainsi, pour entrer dans le vif du sujet, il ne peut être envisagé de dépénaliser leur usage, car cela constituerait une impasse éthique et juridique. Il convient, au contraire, de garantir une réponse pénale plus immédiate et donc plus efficace. Monsieur Barbier, je reconnais bien volontiers que vous ne proposez pas la dépénalisation des drogues. Si nos points de vue divergent sur certaines questions, nous sommes au moins d’accord sur ce point essentiel.

En la matière, vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur, nous disposons d’un arsenal législatif très complet.

Aux termes de l’article L. 3421-1 introduit dans le code de la santé publique par la loi du 31 décembre 1970, « l’usage illicite de l’une des substances ou plantes classées comme stupéfiants est puni d’un an d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende ».

L’usage de stupéfiants peut en outre être une circonstance aggravante d’autres infractions. Il en est ainsi lorsqu’il accompagne des violences, des faits de viol, d’agressions sexuelles et d’atteintes sexuelles sur un mineur de quinze ans.

La réponse pénale est très diversifiée. Elle présente non seulement un aspect répressif, mais aussi une dimension sanitaire.

Le premier de ces deux volets, outre le prononcé d’une peine d’emprisonnement ou d’amende, se décline selon trois autres modalités d’une sévérité croissante : le rappel à la loi, la composition pénale et – sa mention fera plaisir à M. le rapporteur – l’ordonnance pénale. Fort de son pouvoir d’appréciation de l’opportunité des poursuites, le parquet choisit la voie qui lui paraît la plus adaptée à la situation de l’intéressé.

La réponse sanitaire peut s’articuler à la réponse pénale par deux biais : le stage de sensibilisation aux dangers de l’usage de produits stupéfiants et l’injonction thérapeutique.

Les circulaires d’application qui se sont succédé depuis l’adoption de la loi du 31 décembre 1970 ont toutes préconisé un emploi modulé de cette large palette de dispositions. Ainsi, et vous l’avez très clairement rappelé, monsieur le rapporteur, s’agissant des majeurs, la circulaire Perben du 8 avril 2005 recommande un certain nombre de mesures que je n’énumérerai pas.

Plusieurs indicateurs soulignent d’ailleurs que cette politique porte ses fruits. La consommation de drogue en France reste très inférieure aux niveaux constatés dans les pays voisins, comme l’Espagne, l’Italie ou le Royaume-Uni. Ainsi, la cocaïne compte un million d’usagers réguliers en Grande-Bretagne, contre 250 000 en France, selon l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies, l’OFDT.

De même, la consommation de cannabis semble avoir atteint son point culminant dans notre pays et tend désormais à régresser, comme le souligne le même organisme. L’important fonds « drogue », alimenté par les biens saisis et confisqués, a ainsi cru de 1, 2 million d’euros à 21 millions d’euros de 2007 à 2011 : c’est la preuve de l’efficacité de la lutte contre le trafic de drogue, …

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