… qui frappe au point sensible, à savoir les profits suscités par cette activité.
Le maintien de l’interdiction constitue l’élément principal de la prévention de consommation de drogues.
Le niveau de consommation de produits licites comme l’alcool et le tabac, qui comptent respectivement 9, 7 et 11, 8 millions d’usagers réguliers, est sans commune mesure avec celui des drogues illicites. Le poids de l’interdit et la moindre disponibilité du produit qu’entraîne la répression peuvent ainsi expliquer le niveau relativement faible de consommation des drogues illicites au regard d’autres substances psycho-actives. D’ailleurs, la moitié des jeunes de dix-sept ans qui ne fument pas de cannabis déclarent que cette interdiction même les en dissuade. La dépénalisation enverrait bien entendu un signal désastreux.
Certes, cette proposition de loi ne porte pas précisément sur la dépénalisation ; toutefois, si la contraventionnalisation offre en apparence les avantages de la simplicité et de la rapidité, elle présente plusieurs inconvénients essentiels que je tiens à mentionner.
Tout d’abord, elle entrerait en contradiction avec le discours de fermeté tenu jusqu’à présent, le déclassement en contravention pouvant apparaître comme le prélude à d’autres déclassements. Le choix d’une contravention de troisième classe, peine maximum de 450 euros – l’amende se limitant en fait au montant forfaitaire de 68 euros si elle est acquittée dans les quarante-cinq jours – peut laisser supposer un amoindrissement du dispositif de sanctions. La consommation des stupéfiants serait ainsi placée sur le même plan que certaines infractions banales au code de la route.
Ici encore, le risque est d’ouvrir la voie à une remise en cause plus générale du principe même de la prohibition et de la lutte contre les trafics. Les sanctions actuelles – notamment les stages de sensibilisation, qui constituent un outil de prévention essentiel – sont financièrement plus coûteuses pour les usagers. L’établissement d’une contravention de troisième classe risquerait de fragiliser ce dispositif.
En outre, le texte n’opère aucune distinction entre les drogues et conduit à occulter la dimension sanitaire du dispositif législatif actuel. En effet, la peine de contravention paraît pour le moins inappropriée pour des produits tels que l’héroïne, la cocaïne ou la drogue de synthèse, y compris en cas de premier usage. En présence d’héroïne, l’injonction thérapeutique se révèle plus adaptée. Dans le cadre d’une contravention, l’agent verbalisateur sera conduit à renseigner un simple timbre-amende, là où une orientation vers un centre de soins se serait révélée plus opportune.
L’ensemble de la politique pénale et sanitaire s’en trouverait affaibli, sans gain clair en termes judiciaires ou en matière de santé publique.
De plus, une telle disposition empêcherait un traitement équilibré des cas, différencié selon l’âge du délinquant et les substances considérées et adapté au profil récidiviste ou toxicodépendant de l’usager.