Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, au centre de détention de Salon-de-Provence, un homme de 61 ans, incarcéré depuis cinq ans, était systématiquement soumis à une fouille à nu à l’issue de chacune de ses visites au parloir.
Ce détenu à la conduite irréprochable a obtenu le 19 août dernier la suspension de ces fouilles corporelles intégrales systématiques, par ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille.
Constatant qu’un tel régime de fouilles n’était pas justifié par des raisons de sécurité, le magistrat a estimé que l’administration pénitentiaire avait porté « une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale de l’intéressé […] de ne pas subir de traitement inhumain ou dégradant ».
Si nous pouvons nous féliciter de cette décision de justice, l’inquiétude reste forte s’agissant de la persistance de la pratique de fouilles corporelles systématiques et, je le précise, injustifiées, qui sont interdites, notamment par les textes internationaux et par la loi française.
L’article 57 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 pose en effet un principe de proportionnalité, en exigeant que la nature et la fréquence des fouilles soient « strictement adaptées [aux] nécessités [de la sécurité] et à la personnalité des personnes détenues », ainsi qu’un principe de subsidiarité, qui ne permet les fouilles intégrales que « si les fouilles par palpation ou l’utilisation des moyens de détection électronique sont insuffisantes ».
Or, dans le mémoire produit en défense devant le tribunal administratif de Marseille, le ministère de la justice conclut que, au motif que « la zone des parloirs est un lieu sensible, car un point de contact entre les personnes détenues et leurs visiteurs », il paraît justifié « que soient organisées des fouilles de personnes détenues à leur retour » des parloirs.
Madame la secrétaire d'État, permettez-moi de juger inquiétant, voire dramatique, qu’une telle volonté de non-application des dispositions prévues par la loi en matière de fouilles provienne du ministère de la justice.
Le Conseil d’État a jugé, le 9 septembre 2011, qu’une fouille corporelle intégrale répétée à la sortie de chaque parloir autorisé impose à l’intéressé une contrainte grave et durable.
Il convient de noter également que certains personnels de surveillance, qui travaillent dans des conditions extrêmement difficiles, dénoncent, eux aussi, le caractère à la fois dégradant et souvent inutile des fouilles corporelles intégrales.
Face aux témoignages non seulement de détenus mais aussi de surveillants, relayés à plusieurs reprises par l’Observatoire international des prisons, je souhaiterais connaître les intentions réelles du Gouvernement concernant la persistance de ces pratiques.