Intervention de Virginie Klès

Réunion du 13 décembre 2011 à 14h30
Service citoyen pour les mineurs délinquants — Rejet d'une proposition de loi en nouvelle lecture

Photo de Virginie KlèsVirginie Klès, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes donc appelés aujourd'hui à examiner en nouvelle lecture la proposition de loi visant à instaurer un service citoyen pour les mineurs délinquants. En dépit de ce que pourrait donner à croire son intitulé, ce texte, comme vous venez de le dire, monsieur le ministre, a en fait un double objet.

Il s’agit, d’une part, de créer 166 places dans les centres relevant de l’EPIDe pour l’accueil de mineurs délinquants. Je ne vois pas très bien en quoi cela correspondrait à instaurer un service citoyen pour les mineurs délinquants…

Il s’agit, d'autre part, au travers de l'article 6, introduit par le biais de l’adoption d’un amendement du Gouvernement lors de la première lecture à l’Assemblée nationale, de prendre en compte de récentes décisions du Conseil constitutionnel. Cet article peut, j’y insiste, être qualifié de « cavalier législatif », dans la mesure où il propose une organisation différente de la justice pénale des mineurs, sans que celle-ci ait fait l’objet d’aucune concertation avec les professions concernées, alors que l’objet de la proposition de loi n’a rien à voir avec l’organisation de la justice pénale des mineurs.

L’article 6 vise notamment à raccourcir certains délais de présentation des mineurs devant la justice, ce qui n’a pas non plus grand-chose à voir avec l’instauration d’un service citoyen pour les mineurs délinquants, ni avec la création de 166 places dans les centres relevant de l’EPIDe.

Comme en première lecture, aucun amendement n’a été déposé, en particulier par l’ancienne majorité sénatoriale. Cela ne laisse pas de m’étonner puisque, d’après nos collègues de droite, le texte n’était pas parfait et méritait d’être amendé.

En tout état de cause, la proposition de loi prévoit de placer des mineurs délinquants dans des centres relevant de l’EPIDe, quel que soit en fait le délit qu’ils auront commis. En effet, la mesure pourrait être décidée dans le cadre d’une composition pénale, d’un ajournement de peine ou d’une peine d’emprisonnement avec sursis accompagné d’une mise à l’épreuve. Que l’on puisse envisager de placer dans une structure fonctionnant selon le régime de l’internat mixte ouvert des mineurs délinquants sans trop se soucier de la nature des infractions commises me paraît surprenant et potentiellement dangereux.

Je rappelle que certains majeurs suivis par la PJJ sont aujourd'hui accueillis dans des centres relevant de l’EPIDe, avec des résultats des plus variables. Si ceux-ci sont plutôt bons et comparables aux résultats concernant d’autres majeurs non suivis par la PJJ lorsque les intéressés sont en phase post-sentencielle, c’est-à-dire après qu’ils ont été jugés, il n’en va pas de même quand ils sont en phase pré-sentencielle : les choses se passent alors presque toujours mal. Dans ce second cas, ils ont d’ailleurs, en général, été placés dans un centre relevant de l’EPIDe par les missions locales, sans que ce dernier ait forcément connaissance de leur parcours judiciaire.

Monsieur le ministre, vous nous avez dit que l’EPIDe était prêt à accueillir des mineurs délinquants : sans doute, mais à condition d’en avoir les moyens ! L’EPIDe a toujours clairement indiqué qu’il souhaitait disposer de quarante à quarante-cinq équivalents temps plein travaillé supplémentaires pour accueillir des mineurs délinquants, ne serait-ce que parce que, juridiquement, des moyens d’encadrement supplémentaires sont nécessaires. En effet, ce ne sont pas les mêmes personnels qui s’occupent de majeurs non délinquants ou en phase post-sentencielle et de mineurs délinquants en phase pré-sentencielle. Sans un renforcement de la formation, de l’encadrement et des moyens, l’EPIDe ne pourra assumer cette nouvelle mission dans de bonnes conditions.

À cet égard, je n’ai pas encore trouvé la moindre trace, dans le budget, des 8 millions d’euros annoncés. Vous nous expliquez aujourd'hui, monsieur le ministre, que cela est dû au fait que le texte n’est pas encore voté.

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