Intervention de Virginie Klès

Réunion du 13 décembre 2011 à 14h30
Service citoyen pour les mineurs délinquants — Question préalable

Photo de Virginie KlèsVirginie Klès, rapporteure :

Contrairement à ce qui a été souvent affirmé au cours de la discussion générale, le débat n’est absolument pas occulté, puisqu’il s’est tenu aujourd’hui pour la seconde fois, après avoir déjà eu lieu lors de la première lecture.

En matière de procédure, on nous reproche d’avoir déposé une motion tendant à opposer la question préalable, mais ce n’est pas nous qui décidons du recours à la procédure accélérée, de l’organisation du calendrier des travaux parlementaires ou des délais de transmission des textes entre l’Assemblée nationale et le Sénat. Nous en subissons pourtant les conséquences.

Amender un texte tel que celui qui nous est aujourd'hui soumis aurait nécessité plusieurs lectures, l’instauration d’une véritable navette parlementaire, ainsi qu’une large concertation tant avec les magistrats qu’avec le personnel de l’EPIDe. À l’instar de M. Jean-Pierre Michel, je pense que seul l’article 6 aurait mérité d’être amendé. Les articles précédents visent en fait non pas à instituer un service citoyen pour les mineurs délinquants, mais à créer pour eux 166 places au sein des centres relevant de l’EPIDe, lequel a une mission d’insertion, et non de rééducation.

Les autres reproches qui nous ont été adressés témoignent à mon sens d’une méconnaissance du rôle et du fonctionnement de l’EPIDe.

Monsieur le ministre, vous avez indiqué tout à l’heure que le Premier ministre aurait garanti que les moyens nécessaires seraient affectés à l’EPIDe pour assumer cette nouvelle mission, mais l’histoire de cet établissement est pavée de telles promesses : les « bleus » budgétaires n’ont jamais été respectés, Bercy ne se considérant pas engagé par ces derniers tant que les crédits n’ont pas été inscrits dans les programmes budgétaires. Or, en l’occurrence, que je sache, aucun euro supplémentaire n’a été inscrit nulle part ; au contraire, il est prévu que le budget de l’EPIDe diminue l’année prochaine.

Permettez-moi maintenant de relever un détail : au cours de la discussion générale, il a régulièrement été question « des » EPIDe. Or il n’existe qu’un seul établissement public d’insertion de la défense, dont dépendent plusieurs centres. C’est un détail, mais qui est souvent révélateur d’une méconnaissance de l’organisation de ce dispositif.

M. Bockel a évoqué la présence d’officiers et de sous-officiers dans le personnel de l’EPIDe, mais celui-ci ne compte que 40 % d’anciens militaires : il est donc vain d’imaginer que les jeunes seront encadrés par des militaires arborant de beaux uniformes ! L’EPIDe n’est pas un établissement militaire ; tous les métiers de l’éducation et de l’insertion sont représentés au sein de son personnel.

Par ailleurs, il est faux d’affirmer que le taux de réussite de l’EPIDe en matière de réinsertion des jeunes accueillis est de 80 % : il est de 50 % environ, ce qui est déjà énorme, comme le savent tous les professionnels de l’insertion. Il ne faut pas mentir !

Enfin, d’une façon plus générale, monsieur le ministre, que représentent 166 places au regard de l’ampleur du phénomène de la délinquance des mineurs aujourd’hui ? Ne vaudrait-il pas mieux renforcer les moyens de la protection judiciaire de la jeunesse et des centres éducatifs ouverts existants, au lieu d’affecter des crédits à un établissement dont la vocation n’est pas de rééduquer des mineurs délinquants ? Est-il opportun, surtout par les temps qui courent, de mélanger dans des internats ouverts des mineurs délinquants et des majeurs non délinquants ?

En 2008, l’objectif annoncé était de créer 20 000 places dans les centres relevant de l’EPIDe ; aujourd’hui, 2 000 places sont offertes, soit l’équivalent d’un lycée… Il serait temps de regarder la réalité en face et de cesser de gaspiller l’argent public en le saupoudrant pour financer des mesures destinées à servir de prétextes à des opérations de communication !

L’EPIDe est un bel outil, ne le cassons pas. C’est parce que nous y sommes attachés que nous avons redéposé une motion tendant à opposer la question préalable.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion