Je tenais à vous en féliciter.
Le problème est de savoir si les dispositions que vous proposez sont réellement opérationnelles. Et c’est sur ce point que le Gouvernement s’interroge. Même s’il partage votre souci d’aller le plus loin possible, il souhaite rester dans des limites qui permettent réellement de lutter avec efficacité contre cette évasion.
Il importe de se doter d’outils légaux pour lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, mais encore faut-il que ces instruments soient opérationnels dans le cadre de procédures de contrôle qui ne dépendent pas seulement de la France.
La mesure proposée s’appliquera donc à un très petit nombre d’États et de territoires, compte tenu de la conclusion par la France de nombreuses conventions d’assistance administrative depuis 2009.
Par ailleurs, l’allongement à trente ans du délai de prescription se heurtera inévitablement à la question de la disponibilité de l’information. En droit interne, l’article 102 B du livre des procédures fiscales limite à six ans l’obligation pour le contribuable de conserver les documents ou pièces sur lesquels peuvent s’exercer les droits d’enquête et de contrôle de l’administration.
En outre, je le rappelle, car c’est intéressant, le contribuable bénéficie d’un délai contentieux identique au délai de reprise de l’administration. Concrètement, les dispositions prévues dans l’amendement donnent au contribuable lui-même un délai de trente ans, à compter de la proposition de rectification, pour formuler une réclamation contentieuse. À terme, il sera bien difficile de mettre en œuvre une prescription trentenaire.
En toute sincérité, il ne me paraît pas nécessaire de fixer un délai supérieur à dix ans pour être efficace. Le délai de reprise de dix ans me semble suffisant pour permettre à notre administration de mener des investigations lourdes, en direction d’un État ou d’un territoire coopératif ou non, et aligne de cette façon les cas de dissimulation d’actifs ou d’identité à l’international sur les cas de dissimulation d’actifs économiques en France. Nous avons ainsi un parallélisme des formes. Porter ce délai à trente ans risquerait de rendre toute opération quasi inopérante.
Madame la rapporteure générale, pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.