Intervention de Élisabeth Lamure

Réunion du 20 décembre 2011 à 16h20
Droits protection et information des consommateurs — Discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Élisabeth LamureÉlisabeth Lamure :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, en premier lieu, je tiens à aborder un sujet lié à l'un des volets importants de la loi de modernisation de l'économie, la LME, datée de 2008 : la question des délais de paiement, sur laquelle je me permets d'insister en raison de la date butoir du 31 décembre prochain.

Nous savons aujourd'hui que le bilan de l'application des dispositions de la LME en la matière est particulièrement positif, puisque, en plafonnant les délais de paiement, cette loi a permis aux entreprises – tout particulièrement aux plus fragiles d'entre-elles – d'assurer une meilleure gestion de leur « poste client » et de dégager un surcroît de trésorerie pour investir. Cependant, certains secteurs particulièrement fragilisés par la crise économique et financière qui sévit depuis trois ans ont encore besoin, aujourd'hui, d'un accompagnement spécifique.

Les accords dérogatoires ont permis de ménager une transition en douceur pour certains secteurs dans lesquels les délais sont traditionnellement longs, à l'exemple du BTP. Or ces accords dérogatoires expirent dans quelques jours, c'est-à-dire le 31 décembre prochain.

Monsieur le secrétaire d'État, vous avez consenti une prolongation des accords dérogatoires dans certains secteurs très circonscrits, caractérisés par une saisonnalité marquée, comme celui des jouets. Nous vous remercions de cette ouverture.

Toutefois, aujourd'hui, je tiens à appeler votre attention sur la situation du secteur du bâtiment et des travaux publics, le BTP, en difficulté en raison du caractère unique de chaque commande et des délais non comptabilisés dans le règlement des factures de travaux.

Selon les rapports remis par l'Observatoire des délais de paiement en 2009 et 2010, les entreprises du bâtiment, du fait de la structure particulière de ce secteur, n'ont pu obtenir une diminution des délais de paiement de leurs clients non professionnels. Ces sociétés subissent donc un déséquilibre croissant entre, d'une part, des délais fournisseurs plus courts, et, de l'autre, des délais clients qui demeurent inchangés, voire qui s'allongent.

Le contexte économique a évolué depuis l'adoption de la LME et le secteur du BTP nécessite, partant, un traitement spécifique. Un ajustement législatif se révèle donc nécessaire.

Ainsi, il m'a paru souhaitable de compléter l'article 1er bis A afin de prendre en compte ces difficultés d'adaptation, particulièrement en cette période de crise. Or cet article a été supprimé par la commission au profit d'un autre véhicule législatif.

Cette disposition ouvrait la possibilité de conclure de nouveaux accords dérogatoires pour une durée limitée, et uniquement pour des secteurs très spécifiques présentant un caractère saisonnier particulièrement marqué. Elle prévoyait également des évolutions législatives nécessaires à la transposition de la directive du 16 février 2011 concernant la lutte contre les retards de paiement dans les relations commerciales.

Si, à mes yeux, le sujet traité trouve toute sa place dans le projet de loi visant à renforcer les droits, la protection et l'information des consommateurs – en effet, ce texte s'inscrit dans la droite ligne de la loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs et de la LME –, notre rapporteur a estimé qu'il s'inscrirait mieux dans le cadre de la proposition de loi de simplification du droit et des démarches administratives. Je me permettrai, en conséquence, de présenter un amendement lors de l'examen de la proposition de loi Warsmann, afin de compléter l'article 90 bis dans le sens que je viens d'évoquer.

Néanmoins, ce sujet devant être traité de toute urgence, c'est-à-dire avant le 31 décembre 2011 – il me semble que, sur ce point, nous sommes tous d'accord dans cet hémicycle – et la proposition de loi ne devant être examinée par le Sénat qu'au mois de janvier prochain, je vous saurais gré, monsieur le secrétaire d'État, de bien vouloir nous apporter une réponse rassurante au problème des délais de paiement des secteurs en difficulté, en particulier du BTP.

J'aborderai en second lieu, à mon tour, la question de l'introduction de l'action de groupe dans le projet de loi par le rapporteur pour avis de la commission des lois.

Pourquoi vouloir introduire une telle procédure de règlement des litiges de consommation, lourde, coûteuse et longue, alors qu'existent des méthodes alternatives beaucoup moins contraignantes et bien plus efficaces, comme les dispositifs de médiation existants ou la procédure de « clause abusive » proposée par le Gouvernement dans le cadre de ce projet de loi ?

Je rappelle que la loi du 1er juillet 2010, présentée par M. Novelli, a créé, auprès de l'Institut national de la consommation, une commission de la médiation de la consommation chargée de rédiger une charte des bonnes pratiques de la médiation. Ce document vient d'ailleurs d'être élaboré et vise à garantir l'efficacité des procédures de médiation, parmi lesquelles la gratuité du recours à la médiation pour les consommateurs ou encore l'impartialité des médiateurs.

Les consommateurs français ont de plus en plus souvent recours à la médiation pour régler leurs différends en matière de consommation, et les dispositifs de médiation ont déjà fait la preuve de leur efficacité, notamment dans les domaines des banques, des assurances, du transport et des communications électroniques.

À la demande du Gouvernement, le MEDEF et les fédérations professionnelles se sont engagés à mettre en place de nouveaux dispositifs de médiation dans plusieurs secteurs qui n'en disposent pas encore.

Une médiation sectorielle a été instituée dans le domaine de l'eau en octobre 2009, le champ de la médiation des communications électroniques a été élargi en janvier 2010, tandis que des médiations de branche sont opérationnelles depuis janvier 2011 dans les secteurs de la franchise et de la construction de maisons individuelles. Enfin, des travaux se poursuivent également dans les domaines de l'automobile et du tourisme.

Le Gouvernement a fixé pour objectif que tous les consommateurs qui le souhaitent, quel que soit le secteur considéré, puissent accéder à un médiateur d'ici au 1er juillet 2012.

En matière de consommation, les Français renoncent généralement à se présenter devant un juge pour un litige de consommation résultant d'une mauvaise exécution des obligations d'un professionnel et portant sur un faible montant. Ce type de litige exige des moyens de résolution proportionnés, efficaces et surtout rapides, qui n'obligent pas le consommateur à se rendre systématiquement devant la justice.

C'est la raison pour laquelle les consommateurs français ont recours à la médiation de manière croissante pour régler leurs différends en matière de consommation.

Le renforcement de la médiation, que nous soutenons avec nos collègues UMP de la commission de l'économie, ne peut s'opérer sans le développement de l'information fournie aux consommateurs sur l'existence et le fonctionnement des procédures de médiation. Tel est l'objet, à l'article 9, d'un amendement de mes collègues Pierre Hérisson et Gérard César, adopté par la commission, sauf erreur de ma part, à l'unanimité.

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