Cela signifie qu’un non-résident fiscal qui détiendrait un portefeuille de valeurs mobilières, un immeuble de rapport, percevrait des dividendes, encaisserait des plus-values et des loyers non assujettis à la CSG.
Cette constatation me conduit à m’interroger – en réalité, c’est peut-être l’un des intérêts de cette initiative – sur la nature de la CSG : qu’en est-il d’un point de vue des principes fiscaux ? Qu’en est-il du point de vue du droit ? C’est là un vieux débat, aussi ancien que la création de la CSG en 1990.
La CSG est une imposition de toute nature et non une cotisation sociale.
Dans sa décision du 28 décembre 1990, confirmée dans une décision du 19 décembre 2000, le Conseil constitutionnel a en effet précisé que la CSG entrait dans la catégorie des « impositions de toutes natures » visées à l’article 34 de la Constitution.
C’est sur ce fondement qu’il a rejeté le moyen invoqué par les auteurs de la saisine, qui indiquaient que seules « les personnes susceptibles de bénéficier des prestations pour lesquelles elles cotisent » peuvent être assujetties à la CSG.
La réponse du Conseil constitutionnel a été claire : « considérant qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus les contributions instituées par les articles 127, 132 et 133 de la loi constituent des impositions et non des cotisations de sécurité sociale ; que, dès lors, le moyen invoqué est inopérant ».
Les personnes assujetties à la CSG ne bénéficient en effet d’aucune prestation de sécurité sociale en contrepartie de cette contribution, contrairement aux cotisations sociales, qui ouvrent par nature droit à prestations.
C’est bien cet argument qui prévaut en matière de déductibilité de l’impôt sur le revenu, mes chers collègues : actuellement, et tant que la mesure sur les retraites supplémentaires d’entreprises prévue par l’article 13 sexies du présent projet de loi n’a pas été adoptée, seules les cotisations sociales – et non les contributions sociales – sont déductibles de l’impôt sur le revenu. La déductibilité partielle de la CSG ne se justifie, je le rappelle, que par le fait que, en 1997, l’augmentation de cette dernière a eu pour contrepartie une diminution des cotisations sociales qui sont, elles, déductibles de l’impôt sur le revenu. Il me semble utile de rappeler ce fondement juridique.
Plus généralement, il est admis, me semble-t-il, que la création de la CSG constitue une mesure prise – et amplifiée dans le temps – dans le contexte d’une fiscalisation progressive du financement de la sécurité sociale. C’est là l’option de fond à laquelle nous devrons bien réfléchir dans les mois et les années à venir, mes chers collègues.
Contrairement aux revenus d’activité et de remplacement, aucun critère relatif à l’affiliation à un régime de sécurité sociale n’est prévu pour l’assujettissement à la CSG des revenus du patrimoine.
La seule condition, prévue par l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, que cet amendement vise à modifier, pour assujettir les revenus du patrimoine à la CSG est celle de la domiciliation fiscale en France du redevable.
Pour les revenus d’activité et les revenus de remplacement, il existe un double critère d’assujettissement, sous l’impulsion de la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes : la domiciliation fiscale en France du redevable et le fait d’être à la charge d’un régime obligatoire français d’assurance maladie. Ce second critère a été introduit a posteriori en 2001 pour tenir compte de la jurisprudence communautaire.
Au demeurant, si la loi française change, la jurisprudence communautaire changera. Il nous est tout à fait loisible de décider, comme tend à le prévoir l’amendement n° 104, que les personnes non résidentes fiscalement en France et percevant des revenus du patrimoine en France sont assujettis à la contribution sociale généralisée.
On ne ferait ici que s’aligner sur le droit fiscal général. En effet – je l’ai rappelé au début de mon intervention –, dans le domaine fiscal, les revenus du patrimoine de source française même perçus par des non-résidents sont soumis à l’impôt sur le revenu, de même d’ailleurs qu’à l’impôt de solidarité sur la fortune dans certaines conditions.
Quel est l’impact potentiel de la mesure que je préconise ? On me dit qu’elle concernerait 61 000 foyers fiscaux de non-résidents, de nationalité française ou étrangère.
Il s’agit là d’une question de droit fiscal. Lorsque, dans un même immeuble de rapport, tous les loyers perçus par les propriétaires sont calculés de la même façon, ils devraient être, me semble-t-il, assujettis aux mêmes prélèvements, dont la CSG, que les propriétaires soient ou non des résidents fiscaux français.
Cette petite niche rapporterait de l’ordre de 100 millions d’euros à la sécurité sociale, ce qui est toujours bon à prendre ! Madame la rapporteure générale, l’adoption d’une telle mesure permettrait de diminuer un peu le droit de partage ! §