Intervention de Jean-Yves Leconte

Réunion du 20 février 2012 à 15h00
Agents contractuels dans la fonction publique — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord saluer le rôle de notre rapporteur, Mme Tasca. Elle a assuré, pour le Sénat, le suivi de ce projet de loi, qui balaye nombre de sujets relatifs à notre fonction publique, et a permis d’en améliorer le contenu, dans un esprit de dialogue avec l’Assemblée nationale, le Gouvernement et les syndicats.

Cette démarche témoigne du profond attachement de tous à la fonction publique, et particulièrement des membres de la majorité sénatoriale.

Au demeurant, et cela m’éloignera quelque peu de l’esprit de consensus qui a prévalu jusqu’à présent dans ce débat, cette démarche me semble de nature à disqualifier les propos de la ministre de l’écologie et du développement durable, Nathalie Kosciusko-Morizet, qui évoquait la « chasse aux sorcières » et « la purge » que les socialistes avaient l’intention de mener si jamais, par bonheur, ils l’emportaient aux élections d’avril, mai et juin prochains.

Au contraire, notre position sur ce texte prouve concrètement que, lorsqu’il s’agit de gérer la fonction publique, nous sommes bien loin des attaques caricaturales que nous avons pu entendre ces derniers jours. Mais il est aussi de notre devoir de pointer un certain nombre de dysfonctionnements, imputables à certains hauts fonctionnaires, qui ont souvent intéressé la presse et, parfois aussi, la justice.

Il ne faut pas mélanger notre attitude générale vis-à-vis de la fonction publique et ces cas particuliers.

Cet esprit de consensus qui a prévalu lors de l’examen de ce texte devrait permettre d’éviter de prendre la fonction publique en otage à l’occasion de la campagne électorale.

Attendu par les syndicats, ce projet de loi s’appuie sur un protocole signé voilà un peu moins d’un an. Malheureusement, la volonté d’aboutir avant la fin de la législature, dans quelques jours, nous a conduits à devoir être très économes en débats, et nous a parfois donné le sentiment de jouer un peu au notaire d’un accord entre le Gouvernement et les syndicats, plutôt que d’assurer un rôle législatif complet.

D’ailleurs, en dépit de notre volonté de permettre la promulgation aussi vite que possible de cette loi pour que ledit accord puisse entrer en application, nous n’avons pas pu échapper à un certain nombre de cavaliers, qui avaient déjà été proposés lors de l’examen du texte par le Sénat, qui ont été adoptés par l’Assemblée nationale et qui seront finalement validés aujourd’hui, dans un esprit de responsabilité, puisqu’il convient, globalement, d’accepter ce projet de loi.

Toutefois, nous devons rappeler d’abord sur le fond que mettre un terme à la précarité est une question de dignité et d’efficacité pour tous les agents, dans leur engagement professionnel, mais aussi dans leur vie privée, afin qu’ils puissent mener une vie normale et travailler sans que pèse sur eux tous les jours cette épée de Damoclès qui les empêche d’être concentrés sur leur tâche.

Ce projet de loi a un certain nombre d’effets pervers.

Monsieur le ministre, puisque vous avez, dans un esprit de concertation, mené ce projet de loi à terme durant un an, il conviendra que vous-même et vos successeurs veillent à tous les effets pervers que nous avons pu pointer lors de ce débat. En effet, en voulant lutter contre la précarité, on crée, on le voit déjà – je l’ai souligné lors de la discussion générale en première lecture –, un certain nombre d’effets pervers. Ainsi, à la fin d’un contrat, la fonction étant toujours nécessaire, certaines administrations changent de personne exclusivement pour empêcher le passage d’un CDD à un CDI.

Sur ce sujet, nous devons avoir des engagements précis du Gouvernement et vous devez, en tant que ministre de la fonction publique, assurer que l’ensemble des départements ministériels auront, de ce point de vue, une politique très claire.

Cet accord ne doit pas empêcher l’État d’avoir une meilleure gestion des ressources humaines, d’assurer un suivi de carrière, une progression et des formations à l’ensemble de ses contractuels. Ce n’est pas toujours le cas aujourd’hui et la situation n’est pas réglée dans ce texte. C’est une question d’efficacité et d’engagement de l’ensemble des personnes qui travaillent dans la fonction publique.

Par ailleurs, au-delà des effets pervers que je viens de citer, je prendrai deux exemples de mes regrets.

Le premier est que ce texte ne soit pas allé aussi loin que la loi Sapin de 2000 dans les titularisations. Je pense ici, en particulier, aux enseignants travaillant dans le réseau de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, et ce alors que nous aurions eu besoin de ces voies de titularisation pour stabiliser un certain nombre de nos établissements, qui manquent aujourd’hui de titulaires.

Le second est qu’il faudra aussi veiller, dans un certain nombre de ministères, je pense singulièrement au ministère des affaires étrangères, à ce que la loi qui va permettre des titularisations et des CDIsations de contractuels ne laisse pas de côté les personnes détachées sur contrat d’une administration et travaillant dans un autre ministère, lesquelles pourraient, en raison de cette loi, être défavorisées par rapport aux personnes qui seraient titularisées aujourd’hui.

Enfin, si ce vote in fine, malgré toutes mes critiques, sera positif, c’est d’abord parce qu’il salue une méthode de négociation, d’échange avec les syndicats.

Bien entendu, j’ai exprimé des regrets : le premier est d’avoir dû attendre quasiment un an avant la discussion en séance publique §et d’avoir dû, au dernier moment, travailler très vite pour que ce texte soit validé avant la fin de la législature.

Je voterai ce texte avec l’ensemble de mon groupe, en espérant qu’il sera promulgué rapidement afin de répondre aux attentes qu’il a suscitées. §

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