Et tout cela, sans la moindre justification. Car, comme les 35 heures l’ont amplement démontré, le partage du travail, cela ne marche pas, pas plus en période de croissance qu’en période de crise.
La raison en est simple : ce n’est pas en partageant la pénurie que l’on créera de la richesse ! De la même façon, ce n’est pas en alourdissant les charges ou les impôts qui pèsent sur les entreprises que l’on créera des emplois…
L’examen du projet de loi de finances pour 2012 par le Sénat l’a démontré, tous ceux qui refusent de faire porter l’effort d’abord sur les dépenses, tous ceux qui refusent de réaliser des économies et de parler de réformes, tous ceux-là condamnent notre pays à une cure d’austérité fiscale sans précédent, dont notre croissance ne se remettrait pas !
Mesdames, messieurs les sénateurs, la réalité est celle-ci : dans l’un des pays les plus imposés au monde, la hausse généralisée des impôts n’a pas d’avenir.
Le choix que vous avez fait d’un choc fiscal est donc insoutenable, à court terme comme à long terme.
Il est illusoire, en effet, de penser que vous pourriez augmenter les impôts d’une trentaine de milliards d’euros année après année : la France ne le supporterait pas !
Un jour ou l’autre, d’ailleurs, que vous le vouliez ou non, vous devriez faire face à cette évidence : le redressement de nos finances publiques suppose de réaliser des économies sur les dépenses… Vous ne pourrez pas ignorer éternellement cette nécessité !
Cette année déjà, vous auriez pu agir, dans le respect de l’article 40 de la Constitution. Vous pouviez redéployer certains crédits au sein des missions, faire des choix, bref, affirmer une stratégie.
Au lieu de cela, vous avez préféré rejeter purement et simplement les crédits de deux missions sur trois – oui, deux sur trois ! Résultat ? Le budget que vous avez adopté n’accorde par le moindre euro à l’enseignement, à la recherche, à la justice, à la sécurité ou à l’écologie…
En un mot, c’est un budget factice, un peu baroque, même, une sorte d’exercice de style qui apparaît profondément décalé.
Il est décalé d’abord par rapport aux enjeux du moment, mais il l’est aussi parce qu’il augmente les dépenses au bénéfice des seules collectivités locales, alors qu’il ne donne même pas à l’État les moyens de remplir ses missions essentielles ! (
Un tel choix, ni le Gouvernement ni l’Assemblée nationale ne peuvent y souscrire. Aujourd’hui, en effet, aucun acteur public ne peut se dispenser de participer à l’effort que nous demandons à tous les Français. L’État fait des économies, la sécurité sociale aussi : les collectivités locales ne peuvent pas se tenir à l’écart, pas plus qu’elles ne peuvent s’exonérer de cet effort collectif !
C’est pourquoi, avec l’accord des députés, nous avions prévu de demander aux collectivités locales une contribution de 200 millions d’euros à l’effort supplémentaire de réduction des déficits. Cette contribution, modeste, était très exactement proportionnelle au poids que pèsent, dans le budget de l’État, les dotations aux collectivités locales. Elle représentait une baisse de seulement un millième de la dépense publique locale !
Or cet effort, pourtant mesuré, a été jugé insoutenable par le Sénat, qui l’a remis en cause, avant de créer 450 millions d’euros de dépenses supplémentaires au bénéfice exclusif des collectivités locales… Rien, vraiment rien ne peut justifier une inégalité aussi flagrante et aussi radicale dans le traitement des acteurs publics !
Dois-je vous rappeler, mesdames, messieurs les sénateurs, qu’alors que l’État diminuait le nombre de ses fonctionnaires, les collectivités locales, de leur côté, ont continué de recruter plus de trente-sept mille agents par an ? Nous voyons le résultat : hors mesures de décentralisation, la masse salariale locale a augmenté de 4, 3 % par an entre 2006 et 2010, au lieu de 0, 9 % pour celle de l’État…
Je le dis très clairement, je suis prête à poser la question des normes, encore trop nombreuses, qui pèsent sur les collectivités locales comme autant de charges supplémentaires. Résoudre ce problème était tout l’objet de la proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités locales, présentée par Éric Doligé. Malheureusement, elle ne figure plus à l’ordre du jour de votre assemblée !