Séance en hémicycle du 20 décembre 2011 à 14h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à quatorze heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique portant diverses dispositions relatives au statut de la magistrature.

Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l’article 12 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. le Premier ministre a transmis au Sénat, en application de l’article 67 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, les rapports sur la mise en application de la loi n° 2008-1091 du 28 octobre 2008 relative à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes et de la loi organique n° 2010-704 du 28 juin 2010 relative au Conseil économique, social et environnemental.

Acte est donné du dépôt de ces rapports.

Ces documents ont été transmis à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale et sont disponibles au bureau de la distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’ordre du jour appelle l’examen de trois projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.

Pour ces trois projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.

Je vais donc les mettre successivement aux voix.

Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République socialiste du Vietnam relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République socialiste du Vietnam relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure (projet n° 4, texte de la commission n° 198, rapport n° 197).

Le projet de loi est définitivement adopté.

Est autorisée l'approbation du protocole additionnel à l'accord relatif aux rapports intellectuels et artistiques du 19 décembre 1938 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République hellénique, signé à Athènes le 6 juin 2008, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant l’approbation du protocole additionnel à l’accord relatif aux rapports intellectuels et artistiques du 19 décembre 1938 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République hellénique (projet n° 466 [2010-2011], texte de la commission n° 47, rapport n° 46).

Le projet de loi est adopté.

Est autorisée la ratification de l'accord monétaire entre la République française et l'Union européenne relatif au maintien de l'euro à Saint-Barthélemy à la suite de son changement de statut au regard de l'Union européenne, signé à Bruxelles le 12 juillet 2011, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification de l’accord monétaire entre la République française et l’Union européenne relatif au maintien de l’euro à Saint-Barthélemy, à la suite de son changement de statut au regard de l’Union européenne (projet n° 134, texte de la commission n° 189, rapport n° 188).

Le projet de loi est définitivement adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture (projet n° 203, rapport n° 204).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les sénateurs, depuis 2010, la France avance sur le chemin du désendettement, un chemin qui passe d’abord et avant tout par un effort historique de maîtrise des dépenses publiques.

Vous avez pu le constater lors de l’examen du collectif budgétaire, nous avons d’ores et déjà pris un an d’avance sur l’objectif de réduction des dépenses de l’État que nous nous sommes fixé. Nous allons plus loin encore avec ce texte, qui prévoit 1, 5 milliard d’euros d’économies supplémentaires au sein de l’État.

Nous avons beaucoup travaillé avec les députés pour répartir ces efforts et continuer à sécuriser notre trajectoire. Le résultat, c’est un déficit de l’État réduit de 3 milliards d’euros à l’issue de l’examen du projet de loi de finances par l’Assemblée nationale, le solde négatif s’établissant désormais à 78, 8 milliards d’euros.

Ce budget atteste donc la détermination du Gouvernement et de sa majorité à poursuivre le redressement de nos finances publiques. En agissant ensemble en toute coresponsabilité, l’exécutif et l’Assemblée nationale ont démontré que la réduction des déficits était non seulement une nécessité absolue, mais aussi une priorité largement partagée.

C’est pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement regrette que la Haute Assemblée soit restée à l’écart de cette mobilisation d’intérêt national. Ce budget aurait pu et aurait dû être l’occasion de nous rassembler face à la crise.

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

L’examen de ce texte a bien au contraire mis en lumière l’ampleur des divergences qui séparent la majorité présidentielle de l’opposition, l’Assemblée nationale du Sénat.

Car ce sont bel et bien deux conceptions irréconciliables de la politique budgétaire qui se sont exprimées tout au long de nos débats. Vous avez choisi, mesdames, messieurs les sénateurs, de défaire plutôt que de faire, …

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

… en vous engageant sur une « autre voie », en réalité une impasse dont vous avez dévoilé la vraie nature, celle d’une hausse brutale et généralisée des impôts, d’un choc fiscal de 32 milliards d’euros…

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

… qui empêcherait tout rebond de la croissance et pèserait sur le pouvoir d’achat et l’emploi des Français.

Faire le choix d’une augmentation généralisée des impôts, avec pas moins de 42 taxes créées ou modifiées dans ce seul projet de loi de finances, qui s’ajoutent aux 17 taxes créées ou augmentées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, constitue, je le dis très clairement, un contresens radical, sur les plans tant budgétaire qu’économique.

Sur le plan économique, tout d’abord, si ces 42 taxes sont loin, très loin même de former un ensemble cohérent, elles ont un point commun : elles alourdissent comme jamais la charge fiscale pesant sur les entreprises, …

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

… des entreprises qui devraient à elles seules acquitter 20 milliards d’euros d’impôts supplémentaires en l’espace d’une seule année.

En restreignant aussi fortement la déductibilité des intérêts d’emprunt, vous avez également augmenté l’impôt sur les sociétés de 50 %.

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

L’effet immédiat d’une telle mesure serait de rendre plus difficile l’accès au crédit et de donner un coup de frein à l’investissement, ce même investissement qu’à gauche l’on dit vouloir favoriser grâce à une modulation, à la baisse ou à la hausse, de l’impôt sur les sociétés. Comprenne qui pourra !

La réalité, c’est que la seule modulation de l’impôt que vous connaissiez, mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité sénatoriale, c’est la modulation à la hausse, et pour toutes les entreprises, petites ou grandes !

Ne vous y trompez pas, ce choc fiscal, ce sont tous les Français qui en paieraient le prix. On n’augmente pas, comme vous l’avez fait, la fiscalité sur les entreprises sans toucher la croissance et détruire des emplois.

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Mme Valérie Pécresse, ministre. Que ce soit au travers des salaires ou des prix, les effets s’en feraient immédiatement sentir sur le pouvoir d’achat des Français, lequel serait également la première victime de votre mesure « anti-heures supplémentaires ». Car en remettant en cause la défiscalisation des heures supplémentaires, vous retireriez 450 euros par an aux 9 millions de Français qui travaillent plus pour gagner plus, bien souvent dans nos petites et moyennes entreprises !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Et tout cela, sans la moindre justification. Car, comme les 35 heures l’ont amplement démontré, le partage du travail, cela ne marche pas, pas plus en période de croissance qu’en période de crise.

La raison en est simple : ce n’est pas en partageant la pénurie que l’on créera de la richesse ! De la même façon, ce n’est pas en alourdissant les charges ou les impôts qui pèsent sur les entreprises que l’on créera des emplois…

L’examen du projet de loi de finances pour 2012 par le Sénat l’a démontré, tous ceux qui refusent de faire porter l’effort d’abord sur les dépenses, tous ceux qui refusent de réaliser des économies et de parler de réformes, tous ceux-là condamnent notre pays à une cure d’austérité fiscale sans précédent, dont notre croissance ne se remettrait pas !

Mesdames, messieurs les sénateurs, la réalité est celle-ci : dans l’un des pays les plus imposés au monde, la hausse généralisée des impôts n’a pas d’avenir.

Le choix que vous avez fait d’un choc fiscal est donc insoutenable, à court terme comme à long terme.

Il est illusoire, en effet, de penser que vous pourriez augmenter les impôts d’une trentaine de milliards d’euros année après année : la France ne le supporterait pas !

Un jour ou l’autre, d’ailleurs, que vous le vouliez ou non, vous devriez faire face à cette évidence : le redressement de nos finances publiques suppose de réaliser des économies sur les dépenses… Vous ne pourrez pas ignorer éternellement cette nécessité !

Cette année déjà, vous auriez pu agir, dans le respect de l’article 40 de la Constitution. Vous pouviez redéployer certains crédits au sein des missions, faire des choix, bref, affirmer une stratégie.

Au lieu de cela, vous avez préféré rejeter purement et simplement les crédits de deux missions sur trois – oui, deux sur trois ! Résultat ? Le budget que vous avez adopté n’accorde par le moindre euro à l’enseignement, à la recherche, à la justice, à la sécurité ou à l’écologie…

En un mot, c’est un budget factice, un peu baroque, même, une sorte d’exercice de style qui apparaît profondément décalé.

Il est décalé d’abord par rapport aux enjeux du moment, mais il l’est aussi parce qu’il augmente les dépenses au bénéfice des seules collectivités locales, alors qu’il ne donne même pas à l’État les moyens de remplir ses missions essentielles ! (

Un tel choix, ni le Gouvernement ni l’Assemblée nationale ne peuvent y souscrire. Aujourd’hui, en effet, aucun acteur public ne peut se dispenser de participer à l’effort que nous demandons à tous les Français. L’État fait des économies, la sécurité sociale aussi : les collectivités locales ne peuvent pas se tenir à l’écart, pas plus qu’elles ne peuvent s’exonérer de cet effort collectif !

C’est pourquoi, avec l’accord des députés, nous avions prévu de demander aux collectivités locales une contribution de 200 millions d’euros à l’effort supplémentaire de réduction des déficits. Cette contribution, modeste, était très exactement proportionnelle au poids que pèsent, dans le budget de l’État, les dotations aux collectivités locales. Elle représentait une baisse de seulement un millième de la dépense publique locale !

Or cet effort, pourtant mesuré, a été jugé insoutenable par le Sénat, qui l’a remis en cause, avant de créer 450 millions d’euros de dépenses supplémentaires au bénéfice exclusif des collectivités locales… Rien, vraiment rien ne peut justifier une inégalité aussi flagrante et aussi radicale dans le traitement des acteurs publics !

Dois-je vous rappeler, mesdames, messieurs les sénateurs, qu’alors que l’État diminuait le nombre de ses fonctionnaires, les collectivités locales, de leur côté, ont continué de recruter plus de trente-sept mille agents par an ? Nous voyons le résultat : hors mesures de décentralisation, la masse salariale locale a augmenté de 4, 3 % par an entre 2006 et 2010, au lieu de 0, 9 % pour celle de l’État…

Je le dis très clairement, je suis prête à poser la question des normes, encore trop nombreuses, qui pèsent sur les collectivités locales comme autant de charges supplémentaires. Résoudre ce problème était tout l’objet de la proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités locales, présentée par Éric Doligé. Malheureusement, elle ne figure plus à l’ordre du jour de votre assemblée !

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Rétablissez-la donc, madame la rapporteure générale !

Nous pouvons aborder ces questions ; mais il faut aussi que, dans le même temps, les collectivités locales deviennent des acteurs à part entière de la lutte contre les déficits.

Le fait est qu’aujourd’hui, mesdames, messieurs les sénateurs, il existe une seule stratégie crédible pour redresser nos finances publiques, et elle est très simple : priorité absolue aux économies sur les dépenses !

Les efforts, en effet, doivent peser d’abord sur l’État et les administrations, raison pour laquelle le projet de loi de finances pour 2012 entérine une baisse historique de 1, 5 milliard d’euros des dépenses de l’État.

Ces économies ont été décidées et réparties par le Gouvernement en toute coresponsabilité avec l’Assemblée nationale ; celle-ci a fait preuve d’une détermination et d’un courage auxquels je veux rendre hommage.

Tous les acteurs publics prennent leur part des efforts d’économies : l’État, bien sûr, qui continue de réduire son train de vie, mais aussi les opérateurs de l’État, appelés à contribuer davantage encore à la réduction des déficits publics. C’est ainsi que, par souci de bonne gestion, nous avons remis de l’ordre dans les taxes affectées, dont le dynamisme était parfois sans commune mesure avec les besoins réels des opérateurs de l’État…

Pour poursuivre et renforcer cet effort, mesdames, messieurs les sénateurs, notre méthode porte un nom très simple et très beau, celui de réforme.

Oui, ce sont nos réformes qui nous ont permis, dès cette année, de faire baisser les dépenses de l’État – fait sans précédent depuis 1945. Et ce sont elles, encore et toujours, qui garantiront le respect de notre trajectoire de retour à l’équilibre, laquelle repose majoritairement sur la maîtrise des dépenses publiques.

C’est la raison pour laquelle nous allons poursuivre la réforme de l’État au moyen de la révision générale des politiques publiques, la RGPP.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Demandez ce qu’on en pense dans l’Éducation nationale !

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Cette fameuse RGPP aura rapporté 15 milliards d’euros d’économies en 2013. Et d’ores et déjà, nous avons demandé à l’Inspection générale des finances de trouver des pistes d’action pour la période 2013-2016.

De même, pour poursuivre la maîtrise des dépenses sociales et tenir dans la durée l’objectif national de progression annuelle de 2, 5 % des dépenses d’assurance maladie, nous avons demandé aux deux inspections générales compétentes de nous aider à identifier de nouvelles sources d’économies.

Madame la rapporteure générale, la hausse des dépenses publiques n’a rien d’une fatalité ! Encore faut-il avoir le courage de lancer des réformes profondes, comme le non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique d’État…

Car personne, mesdames, messieurs les sénateurs, non, personne ne peut prétendre recruter de nouveaux fonctionnaires tout en réduisant les déficits, ni remettre en cause la réforme des retraites tout en ramenant nos finances publiques à l’équilibre…

Prétendre le contraire, c’est mentir aux Français ! D’ailleurs ces derniers comprennent bien que l’on ne se désendette pas en augmentant les dépenses : c’est une vérité de bon sens qu’ils vivent au quotidien.

La priorité des priorités, pour l’État comme pour tous les ménages, doit donc être de réaliser des économies. Les recettes peuvent seulement jouer un rôle complémentaire, et encore à la condition de satisfaire à deux principes clairs : l’équité et la compétitivité.

L’équité, tout d’abord, est au cœur du projet de loi de finances pour 2012, qui instaure une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus. Celle-ci, je vous le rappelle, est assise à la fois sur les revenus du travail et sur ceux du patrimoine. Jusqu’au retour à l’équilibre des finances publiques, nous demanderons un effort supplémentaire aux Français les plus aisés. J’ajoute que ceux-ci paieront au total trois fois : sur les plus-values immobilières, sur les revenus du patrimoine et sur les revenus du travail.

L’équité préside également à notre effort de réduction des niches fiscales et sociales.

Comme l’OCDE vient de le souligner une nouvelle fois, la meilleure manière de renforcer aujourd’hui la justice fiscale est non pas de créer des tranches supplémentaires d’imposition sur le revenu comme vous le proposez, madame la rapporteure générale, mais de faire converger les taux réels et les taux faciaux d’imposition en réduisant les niches, comme le Gouvernement s’y est employé.

Nous avons en particulier instauré un plafonnement global des avantages fiscaux liés à l’impôt sur le revenu : nous le revoyons d’ailleurs encore à la baisse dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012.

La progressivité de notre système d’imposition, c’est bien l’actuel gouvernement qui l’a restaurée, en donnant un coup d’arrêt historique à ce que l’on appelait pudiquement « l’optimisation fiscale » !

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : sous Lionel Jospin, mesdames, messieurs les sénateurs, un couple avec 1 million d’euros par an de ressources pouvait n’avoir rien à payer au titre de l’impôt sur le revenu, s’il choisissait les bonnes niches... Compte tenu du plafonnement global des niches, ce couple paiera au moins 340 000 euros d’impôt sur le revenu en 2012, contribution exceptionnelle comprise !

En redonnant de la progressivité à notre système fiscal, en alignant la taxation des revenus du capital sur celle des revenus du travail ou bien encore en mettant fin aux effets pervers de l’impôt de solidarité sur la fortune, le Gouvernement auquel j’appartiens a fait la réforme fiscale dont notre pays avait tant besoin.

Il suffit de comparer – mettons, au hasard, avec l’Allemagne… On s’aperçoit alors que, si les plus hauts revenus sont davantage taxés en France, les classes moyennes le sont moins : cela est juste et c’est ce que nous souhaitons.

Prétendre le contraire, c’est tout simplement avoir un quinquennat de retard !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

J’en viens au second maître mot de notre politique fiscale, la compétitivité.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

On voit les résultats sur notre commerce extérieur…

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

C’est au nom de la compétitivité que, face à la crise, nous avons fait le choix de préserver tous les dispositifs fiscaux et sociaux qui soutiennent la croissance et l’emploi : je pense en particulier aux aides à l’emploi à domicile ou aux allégements de charges sur les bas salaires, qui ont permis d’amortir partiellement le choc des 35 heures.

La baisse du coût du travail est en effet la clé du renforcement de la compétitivité et de la création d’emplois dans notre pays. C’est la raison pour laquelle, avec l’accord de l’Assemblée nationale, nous avons allégé les charges pesant sur l’emploi dans l’agriculture : nous avons voulu permettre à ce secteur de mieux résister à une concurrence internationale particulièrement intense.

Pour la compétitivité comme pour l’équité, les mots sont bien insuffisants ; seuls les actes comptent. Or nos actes me semblent parler d’eux-mêmes : nous avons supprimé la taxe professionnelle, qui pénalisait l’investissement des entreprises, cet impôt que Mitterrand qualifiait d’imbécile…

Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Nous avons aussi rénové le crédit d’impôt recherche pour donner un coup d’accélérateur à l’innovation qui prépare les emplois de demain.

Enfin, que ce soit en matière d’impôt sur les sociétés ou de TVA, nous avançons désormais sur la voie de la convergence fiscale avec l’Allemagne.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vergoz

En somme, nous sommes au fond du trou, mais tout va bien !

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Mme Valérie Pécresse, ministre. La convergence budgétaire et fiscale est en effet notre meilleure arme face à une crise qui nous impose de nous unir pour agir ensemble de manière coordonnée.

Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Converger signifie faire ce que font tous les pays de la zone euro, que leurs gouvernements soient de droite ou de gauche : commencer par maîtriser les dépenses publiques avant d’avoir recours, de manière réfléchie, cohérente et ciblée à la fiscalité. Tous les pays de la zone euro agissent ainsi !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Ils vont dans le mur ! Nous coulerons tous ensemble et vous serez contente !

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Dans ce contexte, si la France devait s’engager dans la voie divergente que le Sénat propose, elle se retrouverait isolée en Europe et sa crédibilité n’y survivrait pas !

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Pour toutes ces raisons, mesdames, messieurs les sénateurs, l’Assemblée nationale a fait le choix de rétablir le projet de loi de finances pour 2012 dans la version qu’elle avait adoptée en première lecture.

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Je dois dire que, aux yeux du Gouvernement, ce choix était le seul responsable, même si je reconnais que les débats au sein de la Haute Assemblée ont permis d’affiner et d’améliorer certaines dispositions du projet de loi de finances, par exemple en matière de péréquation entre les collectivités locales.

Mais, sur l’essentiel, notre désaccord est profond, sans doute trop profond pour être surmonté.

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Le Gouvernement en prend acte et le regrette, car la France aurait été plus forte si nous avions pu avancer ensemble sur le chemin du désendettement.

Aujourd’hui, il n’y a qu’une seule stratégie crédible, celle qui inspire le projet de loi de finances pour 2012, en ce qu’elle protège une croissance encore vulnérable, répartit équitablement entre les Français les efforts nécessaires et réduit les déficits.

C’est ce projet de loi de finances, marqué du double sceau de la crédibilité et de la justice, que le Gouvernement a l’honneur de vous soumettre aujourd’hui une dernière fois !

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – M. le président de la commission des finances et Mme Sylvie Goy-Chavent applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Monsieur le président, mes chers collègues, je constate que Mme la ministre, comme à son habitude, a adopté un ton de meeting électoral… Paroles ! Quant à moi, je m’en tiendrai aux actes, en m’attachant à mettre en évidence les ruptures qui existent entre les actes et le discours du Gouvernement.

Je tiens tout d’abord à rappeler que, depuis le débat sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, le 2 novembre 2011, nous aurons au total débattu pendant cent trente heures : nous avons donc eu le temps de confronter nos visions de la stratégie budgétaire, fiscale et économique que nous souhaitons pour la France et, je vous en donne acte, madame la ministre, elles sont très divergentes et certainement pas compatibles !

Aujourd’hui, mes chers collègues, il m’appartient en tant que rapporteure générale de vous présenter la position de la commission des finances après que la commission mixte paritaire, réunie le 12 décembre, n’est pas parvenue à trouver un texte commun sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2012.

Ce résultat n’est pas surprenant, compte tenu des divergences profondes qui opposent la majorité sénatoriale et la majorité gouvernementale dans le domaine des finances publiques.

Ces divergences sont résumées dans le texte de la motion n° I-1 tendant à opposer la question préalable, que la commission des finances a décidé de soumettre au Sénat. Permettez-moi de vous en exposer maintenant les principales.

D’abord, la trajectoire pluriannuelle construite par le Gouvernement repose sur des hypothèses de croissance surestimées. La confirmation nous en a été apportée par les dernières données que l’INSEE et l’Observatoire français des conjonctures économiques ont publiées : notre acquis de croissance pour 2012 sera négatif, laissant présager de très mauvais résultats, alors qu’il s’agira d’une année charnière dans la trajectoire pluriannuelle d’évolution des finances publiques.

Or le Gouvernement persiste à maintenir des hypothèses de croissance surestimées et des hypothèses d’évolution des dépenses publiques fantaisistes, mettant ainsi en péril la crédibilité des engagements européens de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

C’est donc qu’il faut tailler davantage et tout de suite dans les dépenses, n’est-il pas vrai ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Monsieur le président de la commission des finances, je considère, comme je le répète depuis le débat sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, que, sur la durée d’une législature, nous devrions trouver des marges de manœuvre réparties à parts égales entre les recettes et les dépenses.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Relisez-moi donc : cela vous sera certainement utile pour nourrir vos interventions !

La politique fiscale du Gouvernement se caractérise par une succession de mauvais choix.

Après avoir fragilisé les recettes publiques en début de quinquennat avec la loi TEPA et la réforme de la taxe professionnelle – je rappelle que cette dernière a coûté 5 milliards d’euros de déficit à nos finances publiques –, le Gouvernement taxe maintenant à tout-va, par des mesures de rendement sans cohérence, tout en continuant d’affirmer à l’opinion qu’il s’oppose à toute hausse généralisée des prélèvements obligatoires – le projet de loi de finances pour 2012 comme le projet de loi de finances rectificative reflètent parfaitement ces choix…

En ce qui concerne les dépenses, le décalage entre le discours et les actes est encore plus prononcé, madame la ministre. Le Gouvernement se décrit comme le champion de la maîtrise des dépenses, mais procède à des ouvertures de crédits en fin d’année. Surtout, le Gouvernement annonce qu’il se passera de l’autorisation du Parlement pour procéder à de nouvelles mesures d’économie en cours de gestion. Il préfère détourner de sa fonction la réserve de précaution, dont on sait très bien, au demeurant, qu’elle ne suffirait pas à financer un nouveau plan de rigueur.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Enfin, le Sénat doit s’inquiéter de la politique du Gouvernement visant à miner la relation entre l’État et ses territoires, dans une période où il faudrait au contraire susciter la confiance. C’est vrai surtout pour le soutien à la croissance et à l’économie, là où les collectivités locales jouent un rôle décisif.

Pour toutes ces raisons de fond, vous comprendrez, mes chers collègues, que la CMP ait échoué.

Cela étant, le Sénat aura apporté au texte définitif certaines dispositions utiles que je veux rappeler.

Dans le domaine de la fiscalité du patrimoine, nous avons permis deux avancées.

D’une part, nous avions proposé, à l’article 3 bis E, de déplafonner, en baissant le taux, les droits d’enregistrement en cas de cessions de parts de sociétés. Nous escomptions 930 millions d’euros de cette mesure. L’Assemblée nationale a repris à son compte l’idée du déplafonnement, mais a introduit un barème dégressif. Finalement, cette mesure devrait rapporter entre 150 et 200 millions d’euros.

D’autre part, nous avions proposé de maintenir à 1, 1 % le taux du droit de partage, qui devait brutalement doubler et passer à 2, 5 % au 1er janvier, afin de financer l’allègement massif de l’impôt sur la fortune. L’Assemblée nationale ne nous a pas suivis, mais elle a permis que les personnes en instance de divorce à la date de promulgation de la loi de finances rectificative de juillet se voient appliquer le taux de 1, 1 %, quelle que soit la date effective de leur divorce.

Dans le domaine de la fiscalité des entreprises, deux points sont également à signaler.

D’une part, l’initiative du Sénat concernant le régime des jeunes entreprises innovantes a été reprise par les députés dans le collectif budgétaire, dans une version certes atténuée.

D’autre part, la proposition de notre collègue David Assouline et de la commission de la culture tendant à créer, à l’article 5 bis G, une taxe sur les cessions de titres d’un éditeur de services de communication audiovisuelle a aussi été reprise, mais dans une version profondément modifiée par le Gouvernement.

Plusieurs initiatives du Sénat en faveur de l’outre-mer figurent également dans le texte définitif.

Ainsi, comme le préconisait notre collègue Georges Patient à l’article 5 quinquies, le régime de suspension de TVA pour les installations et matériels utilisés pour l’exploration du plateau continental est supprimé ; celui de l’exemption des droits de douane est en revanche maintenu.

Les exonérations sociales du bonus exceptionnel de 1 500 euros, que M. Paul Vergès souhaitait, à l’article 26 bis, proroger de trois ans, seront bien prorogées, mais seulement pour un an.

L’initiative de Georges Patient et du groupe socialiste destinée à régler, à l’article 52 octies, la question des agriculteurs exerçant sans titre en Guyane est reprise.

L’article 52 quinquies, introduit sur l’initiative de Serge Larcher et qui vise à remédier au détournement de procédure effectué par certaines entreprises jouant des niveaux de taxation différents entre la Guyane et la Martinique, a été retenu.

Plusieurs points sont aussi à relever dans le domaine de la fiscalité immobilière et du logement.

À l’article 41, un compromis a pu être trouvé entre la position initiale et la position du Sénat, exprimée après l’adoption d’un amendement de M. Vincent Eblé : le rabot du dispositif « Censi-Bouvard » prévu en 2012 sera assoupli pour certains logements en maintenant l’avantage fiscal au taux de 2012 pour les engagements immobiliers intervenus avant le 31 décembre 2012.

L’article 41 quater, issu d’une initiative de Thierry Repentin, qui prolonge de deux ans l’application d’un droit fixe de 125 euros au titre de la taxe de publicité foncière en faveur des organismes d’habitations à loyer modéré, sociétés anonymes de crédit immobilier et de leurs unions pour leurs acquisitions de logements conventionnés, a été retenu par l’Assemblée nationale.

À l’article 46 bis, s’agissant du prêt à taux zéro plus, ou PTZ+, les députés n’ont pas souhaité relever le montant de l’enveloppe « générationnelle » à 1, 2 milliard d’euros comme le souhaitait le Sénat, mais l’ont néanmoins portée de 800 à 840 millions d’euros. Ils ont en outre retenu la suggestion de notre collègue Thierry Repentin d’étendre le bénéfice du PTZ+ aux acquisitions de logements appartenant à un organisme d’HLM.

Enfin, il convient d’évoquer le débat sur les finances publiques, s’agissant notamment du dispositif de péréquation, sur lequel nos collègues François Marc et Pierre Jarlier avaient abondamment travaillé, à la suite de l’étude menée par le groupe de travail animé notamment par Charles Guené et Philippe Dallier sur le sujet.

Il me semble important de faire le point sur cette question, notamment pour ceux de nos collègues qui ne sont pas membres de la commission des finances.

L’Assemblée nationale a donné son accord au principe introduit par le Sénat d’un « indicateur de ressources élargi », qui résultait d’une proposition du groupe de travail de la commission des finances.

L’Assemblée nationale a retenu le principe d’un rapport annuel sur l’évolution des mécanismes de péréquation ; elle a en outre conservé certains des apports du Sénat quant à la définition du fonctionnement du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, à partir des contributions de nos rapporteurs François Marc et Pierre Jarlier.

Les députés ont notamment supprimé les strates au profit du système de prélèvement logarithmique introduit par la commission des finances, qui gomme les effets de seuil ; ils ont également exclu les 150 premières communes éligibles à la DSU-cible de tout prélèvement et réduit de 50 % le prélèvement des 100 communes suivantes qui sont éligibles à cette dotation – rappelons que le Sénat avait adopté un amendement du groupe socialiste visant à exonérer toutes les communes éligibles à la DSU-cible et à la DSR-cible.

Les députés ont également repris la modification de la pondération des critères de reversement adoptée par le Sénat à la suite d’un amendement de Pierre Jarlier, en majorant à 60 % le critère du revenu par habitant – les critères de l’effort fiscal et du potentiel financier étant pondérés à 20 % chacun.

L’effort fiscal pris en compte dans les reversements a été déplafonné, alors que le Sénat avait proposé de relever le plafond de 0, 9 à 1 par un amendement de la commission des finances.

L’Assemblée nationale a également conservé la disposition introduite par un amendement du président Philippe Marini, qui vise à exclure de tout reversement les collectivités dont l’effort fiscal est inférieur à 0, 5.

La répartition des prélèvements et des reversements s’effectuera en fonction des potentiels et non des produits fiscaux, comme l’a voté le Sénat en adoptant un amendement de la commission des finances.

Enfin, la clause de revoyure que nous proposions est maintenue, même si la date de remise du rapport du Gouvernement est reportée du 1er septembre au 1er octobre 2012.

Les deux autres modifications adoptées par le Sénat ont été rejetées : le plafonnement des prélèvements au titre du FPIC et du Fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France, le FSRIF, a été abaissé de 15 % à 10 % du potentiel fiscal et le revenu par habitant ne sera pas pondéré par le coût du loyer dans chaque région.

Enfin, à l’initiative du Gouvernement, l’Assemblée nationale a proposé de nouvelles modifications au mécanisme du FPIC : son montant est réduit à 150 millions d’euros en 2012 et n’atteindra 2 % des recettes fiscales du bloc communal qu’en 2016.

Par ailleurs, le nombre d’ensembles intercommunaux éligibles aux reversements est porté de la moitié à 60 % du total du nombre total de ces ensembles.

Les établissements publics de coopération intercommunale, ou EPCI, pourront, à la majorité qualifiée, modifier les modalités de prélèvement et de reversement des montants du FPIC entre l’EPCI et les communes membres, en prenant en compte les écarts de revenu par habitant et les insuffisances de ressources de chaque commune.

Si j’ai énuméré les apports auxquels le Sénat tenait et qui, pour partie seulement, ont été repris par l’Assemblée nationale, c’est parce que, madame la ministre, je réfute, et la majorité sénatoriale avec moi, ce que vous dites à l’envi, à savoir que le travail de cette majorité aura été purement virtuel. Ce n’est pas vrai, raison pour laquelle j’ai tenu à procéder à cette énumération sans doute fastidieuse, mais qui servira à l’information de nos grands électeurs.

La navette a été utile, puisqu’elle a permis de faire évoluer l’Assemblée nationale sur certains points, dont je concède toutefois qu’ils sont trop rares.

Cependant, la commission des finances a jugé qu’une nouvelle navette ne serait pas de nature à faire évoluer les positions, même si le Sénat rétablissait son texte à l’occasion de cette nouvelle lecture.

Elle a donc choisi de proposer au Sénat d’adopter une motion tendant à opposer la question préalable sur le dernier projet de loi de finances initiale présenté par la majorité sortante.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis le début de nos débats, tant en commission qu’en séance, nous avons dressé le bilan de cette majorité sortante : le constat d’échec est patent !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme l’on pouvait s’y attendre, la commission mixte paritaire réunie pour examiner le projet de loi de finances pour 2012 n’a pu parvenir à un accord sur un texte acceptable par les deux assemblées.

Ce désaccord ne nous inquiète pas, bien au contraire : il confirme que la majorité du Sénat a changé le 25 septembre dernier. Il est rassurant de constater que gauche et droite ne retiennent pas les mêmes options et que, dans le contexte actuel, l’orientation politique différente des deux assemblées ne peut que se traduire par des approches divergentes sur les questions des finances publiques et des choix budgétaires.

Les appels répétés à l’union nationale face à la crise sont un leurre, et votre politique constitue bien l’expression de choix clairs et partisans, madame la ministre.

Dans la logique qui anime le Gouvernement et les parlementaires de l’opposition sénatoriale, le projet de loi de finances pouvait fort bien se concevoir sur une ligne de partage entre réduction ou, pour le moins, maîtrise de la dépense publique, réduction du poids relatif des dépenses fiscales dans le produit de l’impôt et mise à contribution des collectivités locales, au travers d’un gel des dotations et de la création d’un dispositif de péréquation horizontale venant compléter la péréquation verticale des dotations de solidarité – on peut en effet se douter que ces dernières ne sont pas promises à la plus forte des évolutions dans les années qui viennent !

Ces orientations budgétaires visaient fondamentalement à prolonger l’effort de réduction des déficits, que la non-reconduction d’un certain nombre de dispositions mises en œuvre pour les seules années 2010 et 2011 rendait également plus aisée, de manière strictement comptable.

Dans son équilibre initial, le projet de loi de finances pour 2012 retenait la prévision d’un déficit approximatif de 80 milliards d’euros, somme largement corrigée par une hypothèse de croissance résolument optimiste que les plus récentes études de l’INSEE rendent désormais caduque, puisque nous devrions, d’ici à l’élection présidentielle, entrer dans une période de récession, s’il faut en croire ce que l’on nous annonce.

Il est fort probable d’ailleurs que cette récession a déjà commencé, et que le ralentissement de l’activité entraînera à son tour une contraction de l’emploi, en commençant par réduire le nombre de contrats de courte durée et l’emploi intérimaire, avant de provoquer une stagnation, sinon une baisse des recettes fiscales, laquelle ne sera bien entendu pas sans effets sur l’exécution du budget.

D’une certaine manière, cette récession annoncée et palpable constitue le point d’orgue d’un quinquennat présidentiel où nous aurons toujours couru après la croissance et l’activité, sans jamais rencontrer autre chose qu’une crise économique d’un tour nouveau.

Nous avons, pour notre part, toujours nié que la crise se serait déclenchée en 2008. La surchauffe financière de l’été 2008 et sa réplique actuelle, cette crise de la dette obligataire des États européens venus au secours de leurs secteurs financier et bancaire, ne sont pas le fait isolé d’une simple économie financiarisée qui se serait développée « hors sol », dans une espèce de quatrième dimension.

Elles ne constituent que la queue de la comète, mes chers collègues, la comète de la dérégulation des marchés financiers, que nous avons largement favorisée, en France, depuis les années quatre-vingt. Je pense en particulier à la loi bancaire de 1984, qui ne faisait que prolonger les ruptures de l’été soixante-neuf, quand Richard Nixon, président des États-Unis, suspendait la parité de l’or et du dollar pour financer, notamment, l’aventure vietnamienne.

Vous le voyez, mes chers collègues, nos maux ont des causes structurelles, mais aussi historiques. Souvenez-vous : en 1973, à quelques jours de distance, le ministre de l’économie et des finances d’alors, un certain Valéry Giscard d’Estaing, mettait un terme au droit du Trésor public de solliciter la « planche à billets » pour se refinancer, puis inventait l’un des plus remarquables produits financiers qui aient jamais été proposés à l’épargne publique, le fameux « 7 % » de janvier 1973 ! À l’époque, l’État émit pour 6, 5 milliards de francs, valeur 1973. Dans quel but ? Tout simplement pour compenser une moins-value de recettes fiscales liée à une certaine latence dans l’application et la généralisation de la TVA…

Souvenons-nous aussi qu’une bonne partie de l’emprunt Balladur de 1993 fut consacrée au financement de la suppression du fameux décalage d’un mois de la TVA !

L’avantage de ces petits rappels, c’est qu’ils nous montrent à l’envi que ce qui creuse les déficits publics réside fondamentalement dans la réduction des recettes fiscales, une réduction qui est devenue en quelque sorte la marque principale des politiques publiques depuis quelques années.

La majorité de gauche du Sénat a, dans sa grande sagesse, contrairement à ce que vous pouvez prétendre, madame la ministre, mis en évidence que la mobilisation de recettes fiscales nouvelles était l’une des conditions de la réduction des déficits et, surtout de l’engagement d’une nouvelle politique dans l’intérêt de notre pays et de nos concitoyens.

Oui, nous réaffirmons ici haut et clair qu’il existe bel et bien une autre politique.

Rendre toute son efficacité à l’impôt de solidarité sur la fortune, améliorer la qualité de notre impôt sur le revenu, supprimer une bonne part des dispositifs incitatifs qui polluent et pervertissent l’impôt sur les sociétés, tout cela était contenu dans le projet de loi de finances pour 2012 tel qu’il avait été voté par la majorité sénatoriale.

Que ces apports déterminants du travail sénatorial ne figurent aucunement dans le texte adopté par l’Assemblée nationale est sans doute regrettable, mais il ne doit pas nous faire oublier deux choses.

D’abord, il est finalement plutôt cocasse que ceux qui n’ont pas de mots assez forts pour vouloir réduire les déficits – comprenez le plus souvent en réduisant les dépenses publiques sans préciser forcément lesquelles, bien entendu – ont dû se remettre à l’ouvrage pour l’accroître de nouveau...

Ensuite, que deux conceptions des finances publiques aient finalement été exposées et validées par les deux assemblées constitue somme toute un élément clé du débat public.

Le vrai vote sur le projet de loi de finances pour 2012 n’a pas forcément lieu aujourd’hui, mes chers collègues. Il est même probable qu’il n’aura lieu dans le pays qu’entre avril et juin prochains, entre le premier tour de l’élection présidentielle et le second tour des élections législatives, c’est-à-dire que nous voterons aujourd’hui la motion tendant à opposer la question préalable déposée par la commission des finances sur le texte revenant de l’Assemblée nationale, en l’attente du jugement citoyen qui nous amènera à un travail de réécriture du texte aujourd’hui rejeté par le Sénat.

Et, comme le veut l’usage, je dis mille mercis aux fonctionnaires du Sénat, collaborateurs du groupe et assistants parlementaires, pour leur concours à la qualité de cette discussion enfin menée à son terme !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce dernier projet de loi de finances du quinquennat du Président Nicolas Sarkozy est le symbole de l’incohérence, de l’instabilité et de l’inefficacité qui ont caractérisé l’ensemble de ses politiques fiscales.

Lorsque notre Haute Assemblée a débuté l’examen de ce projet de loi en première lecture, le Gouvernement semblait consacrer tous ses efforts au maintien du triple A pour notre pays. Or, ce triple A, si sacré, est aujourd’hui en bien mauvaise posture.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Non, mais vous nous dites que ce n’est pas grave, alors nous pouvons conserver le moral !

Monsieur le président de la commission des finances, je considère, comme beaucoup aujourd'hui, que nous sommes financièrement morts, physiquement vivants, politiquement… nous ne savons pas encore, mais vous entretenez l’espoir en estimant que, en matière politique, seule la mort physique est irrémédiable !

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

J’ai de l’espoir, mais pas dans le projet de budget que vous défendez.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Après l’annonce, le 5 décembre dernier, d’un placement « sous surveillance négative » de la France ainsi que de quatorze autres membres de la zone euro, par l’agence Standard & Poor’s, c’est l’agence Fitch qui a abaissé vendredi dernier la perspective de notre note, qui passerait de « stable » à « négative ».

Je ne tiens pas à m’attarder ici sur le « diktat » de ces agences, mais il conviendrait cependant de s’interroger pour savoir exactement si ce que l’on dit aux Français est une réalité ou si nous sommes des vendeurs d’illusions…

On nous annonce presque quotidiennement la très probable et prochaine dégradation de notre triple A, la seule inconnue étant le nombre de crans dont la France serait dégradée. Le Gouvernement a d’ailleurs changé de discours pour minimiser les effets d’une telle dégradation. Ce retournement semble pour le moins surprenant.

Cette dégradation aurait ainsi, comme le signale le directeur général de l’Agence France Trésor, des conséquences extrêmement lourdes et il déclarait récemment que « ceux qui prétendent qu’il ne se passera rien le jour où la France perdra son triple A se trompent complètement ». Il estime qu’une dégradation d’un cran de notre note représenterait un surcoût financier important. Et il ajoute : « Une perte de la note aurait des conséquences sur le reste de la zone euro et sur tous les émetteurs français, même les entreprises privées. »

Cette probable dégradation du triple A français tombe au mauvais moment, d’autant plus que l’INSEE a annoncé vendredi dernier que la France était entrée en récession.

Pour 2012, les économistes s’accordent sur un risque de récession, même sans aggravation de la crise des dettes souveraines. En revanche, le défaut de l’Italie, par exemple, plongerait très probablement toute la zone euro, non pas dans une phase de récession mais dans une véritable dépression.

Tout cela est alarmant.

Or, force est de constater que les accords survenus jusqu’à présent au niveau européen, sous l’impulsion du couple franco-allemand, n’ont pas permis de résoudre la question des risques tant d’aggravation de la crise des dettes souveraines que de la contagion. Et, pendant ce temps, la zone euro a besoin d’urgence de retrouver le chemin vertueux de la croissance.

En outre, l’incohérence des hypothèses sous-jacentes adoptées par le Gouvernement pour le projet de loi de finances pour 2012, renforce encore le manque de crédibilité de ce texte. Le Gouvernement a déjà lui-même révisé ses hypothèses de croissance à la baisse, les ramenant de 1, 75 % à 1 %. Or celles-ci continuent d’être soumises à d’importants aléas. Les prévisions de l’OCDE, publiées le 28 novembre dernier, prévoient une croissance de 0, 3 %.

Le Gouvernement ne semble pas s’inquiéter outre mesure de ces perspectives de croissance très alarmantes. Les plans de rigueur successifs qui nous sont présentés marquent l’absence d’une stratégie cohérente. Surtout, nous plongeons notre pays et l’opinion publique dans un climat de profonde incertitude, néfaste pour la croissance.

L’Observatoire français des conjonctures économiques, dans une estimation datant d’octobre, donc avant le « plan Fillon II », a estimé que les politiques restrictives prises par le gouvernement français réduiront la croissance de 1, 6 point en 2012.

S’il est nécessaire de redresser les finances publiques, il est indispensable de ne pas prendre des mesures qui affecteraient la croissance à long terme, comme j’ai eu l’occasion de le dire précédemment.

À ce propos, la suppression, que l’on peut considérer comme injuste et parfois même irresponsable, de la taxe professionnelle constitue une remise en cause inacceptable de l’autonomie financière des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Or ce sont ces collectivités territoriales qui soutiennent l’investissement dans notre pays…

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

… et il faut savoir – c’est une cote mal taillée – que 75 000 euros d’investissement correspondent à un emploi, de sorte que si, dans une collectivité, on réduit les investissements de 20 millions d’euros, cela correspond à 300 chômeurs de plus…

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

… et cela, le Gouvernement ne semble pas le mesurer. C’est ainsi qu’il y a une baisse injuste et injustifiée des concours de l’État aux collectivités.

Je souhaiterais d’ailleurs ici ouvrir une parenthèse.

Il y avait jusqu’à aujourd'hui une redevance sur les concessions hydro-électriques. En l’état actuel du droit, un sixième de cette redevance est reversé, à juste titre, aux communes sur le territoire desquelles coulent les cours d’eau utilisés. Alors que les députés avaient supprimé cette part réservée aux communes en première lecture, le Sénat, dans sa sagesse, l’avait rétablie en adoptant des amendements déposés par plusieurs membres de notre assemblée. Les députés, en nouvelle lecture, sont revenus à leur rédaction initiale tout en précisant que, dans le cas des plus petites installations, les communes pourraient recevoir une partie des recettes, fixée au maximum à un sixième de la redevance.

Je regrette personnellement que la volonté du Sénat et, surtout, les principes qui nous avait guidés dans cette démarche, n’aient pas été respectés.

Enfin, et c’est le plus important aujourd'hui, la France a besoin d’une réforme fiscale globale et courageuse pour répondre à la crise et retrouver la croissance.

La version du projet de loi de finances pour 2012 adoptée en première lecture par le Sénat avait le mérite de ne pas affaiblir les collectivités territoriales, d’introduire plus de justice sociale et fiscale et, enfin, de tirer les enseignements de la crise financière, notamment en introduisant une taxe sur les transactions financières, à laquelle les membres de mon groupe sont particulièrement attachés, comme ils le sont à l’impôt sur le revenu, qui doit conserver le caractère progressif dont il est doté depuis sa création, au début du XXe siècle.

En l’absence d’une perspective de conciliation entre nos deux assemblées, la majorité du groupe du RDSE apportera donc son soutien à la motion tendant à opposer la question préalable présentée par notre rapporteure générale.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget pour 2012 sur lequel nous allons nous exprimer au terme de cette nouvelle lecture, après l’échec de la commission mixte paritaire, sera peu ou prou celui qu’a voté l’Assemblée nationale en première lecture.

Peu de modifications du Sénat ont, en effet, été retenues par les députés, le débat principal portant sans doute sur le seul apport important du Sénat, au-delà des clivages partisans, concernant tout particulièrement la péréquation horizontale.

Sur ce sujet, nous pouvons regretter que les députés n’aient pas retenu comme critère de répartition du Fonds national de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales le revenu moyen pondéré par un coefficient – de 1, de 0, 8 ou de 0, 6 – permettant de prendre en compte le coût du logement.

C’était une idée défendue notamment par notre collègue Philippe Dallier, auquel, en la circonstance, je souhaite rendre hommage.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Nous nous félicitons néanmoins du maintien de la clause de revoyure au 1er septembre 2012, qui était la condition pour qu’une majorité accepte ici la mise en œuvre dès 2012 de la péréquation, qui ne saurait être repoussée ad vitam aeternam.

J’étais de ceux qui, tout en reconnaissant les interrogations que suscitaient les simulations dont nous disposions, ne souhaitaient pas que, face aux difficultés rencontrées, nous différions une fois encore la mise en œuvre de ce principe ; je souhaite également rendre hommage à notre collègue Charles Guené à cet égard.

Cette mise en œuvre ne se fera néanmoins qu’à hauteur de 150 millions d’euros en 2012, …

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

… au lieu des 250 millions d’euros prévus initialement, pour atteindre le milliard d’euros en 2016, avec des ajustements possibles dans le cadre de la clause de revoyure.

Cette application plus progressive doit permettre d’atténuer l’impact du prélèvement en 2012, qui pourrait poser effectivement problème pour certaines communes contributrices, malgré les ajustements opérés au Sénat et à l’Assemblée nationale.

Nous nous félicitons également du maintien par les députés de la pondération du potentiel financier agrégé à hauteur de 20 %, du revenu moyen à hauteur de 60 % et de l’effort fiscal à hauteur de 20 %, alors que l’Assemblée nationale avait initialement pondéré le PFIA à hauteur de 40 %, le revenu moyen à hauteur de seulement 40 % et l’effort fiscal à hauteur de 20 %.

La prise en compte plus importante du revenu moyen nous était, en effet, apparue pertinente, afin de mieux prendre en compte les charges sociales pesant sur les communes et, d’une façon plus générale, les charges supportées par les communes et les intercommunalités.

Les députés ont également accepté l’exclusion du bénéfice du FPIC des ensembles intercommunaux ou des communes isolées dont l’effort fiscal est inférieur à 0, 5. En effet, ceux-ci ne sauraient être aidés et bénéficier de la péréquation sans avoir un minimum utilisé leur outil fiscal pour percevoir des recettes.

Par ailleurs, les 150 premières communes éligibles à la DSU-cible seront exonérées de prélèvement, leur EPCI prenant en charge le montant de ce prélèvement. C’était, là aussi, un point important.

En outre, la suppression des strates est bien confirmée en raison des effets de seuil constatés aux entrées et aux sorties. Ainsi que l’a souligné Mme la rapporteure générale, ces strates sont remplacées par l’application d’un coefficient logarithmique, qui vient pondérer la population de chaque ensemble intercommunal, afin de prendre en compte l’accroissement de la richesse avec la taille de la collectivité.

Quant aux autres mesures substantielles proposées par notre assemblée, elles ont quasiment toutes été rejetées par les députés, étant, pour l’essentiel, soit des mesures visant à supprimer des articles – autrement dit des mesures de « détricotage » du texte du Gouvernement par la majorité sénatoriale –, soit des propositions tendant à créer de nouvelles taxes – plus de 30 – ou de nouvelles niches fiscales, 17 au total.

Valider un choc fiscal de 30 milliards d’euros, dont 20 milliards d’euros pour nos seules entreprises, qui subissent déjà de plein fouet la crise économique, est irresponsable au regard de la situation actuelle. Mais nul n’est dupe : l’exercice n’était qu’affichage politique, puisqu’il demeurait totalement virtuel, le dernier mot revenant à l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Je peux comprendre que la majorité sénatoriale ne partage pas les choix du Gouvernement et exprime son point de vue. Pour autant, je regrette que vous ayez privilégié l’affirmation d’une opposition systématique, chers collègues.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

… la recherche d’un échange aurait permis au pays, à la classe politique et au Sénat de sortir grandis.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Comment le Sénat peut-il être crédible en votant un budget excédentaire, alors que vous refusez, dans le même temps, les dépenses, qui sont sans doute, à vos yeux, insuffisantes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Peut-être auriez-vous préféré alourdir les prélèvements obligatoires, dont vous regrettez, par ailleurs, qu’ils augmentent dans les proportions que l’on sait ?...

Mes chers collègues, cet affichage n’est pas anodin dans le contexte qui est le nôtre et compte tenu de la crise que nous traversons, surtout sous le regard des agences de notation.

Nous ne pouvons donc que déplorer le manque d’unité nationale sur des sujets essentiels, alors que la crise perdure et que les mois prochains seront encore autant d’épreuves que notre pays devra traverser, et ce quelle que soit la majorité qui sera élue.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

La motion tendant à opposer la question préalable que vous avez déposée en est une illustration : elle démontre votre refus d’aborder le débat de façon courageuse et lucide.

Le refus obstiné de la gauche de notre pays de voter la règle d’or témoigne de ce regrettable manque d’unité. Or le manque d’unité nationale renvoie au manque de gouvernance européenne, par ailleurs tant décrié par la gauche.

Pourtant, jamais autant de progrès n’auront été accomplis en aussi peu de temps dans la zone euro, sous l’égide du Président de la République française et de la Chancelière allemande.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Si la France devait voir sa note dégradée, ce n’est pas tant le pays qui serait sanctionné – d’autres, tels que l’Autriche, la Finlande, le Luxembourg, les Pays-Bas, voire l’Allemagne, le seraient aussi dans la foulée – que les lacunes en matière de gouvernance de la zone euro et de l’Europe.

La gauche en France aurait beau jeu de faire porter la responsabilité d’une éventuelle perte du triple A sur le Président de la République, qui n’a pourtant eu de cesse d’être au feu pour essayer d’éteindre l’incendie, …

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

… mais il est vrai qu’elle est plus prompte à gloser qu’à faire de véritables propositions.

Le directeur de campagne de M. Hollande est-il crédible lorsqu’il déclare, parlant de l’action du Président de la République, qu’elle menace depuis cinq ans la signature de la France ? Tout ce qui est excessif est insignifiant, …

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

… et toutes ces caricatures ne constituent pas un gage de crédibilité…

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

… de la part de ceux qui aspirent à gouverner demain notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Dégrader les notes des pays membres de la zone euro reviendrait à élever de nouveaux obstacles – certes, ils ne sont pas infranchissables, mais il n’en reste pas moins des obstacles ! – sur le chemin de la résorption de la crise de la dette sur lequel la zone euro s’est pourtant bien engagée.

Les agences de notation qui prendraient cette responsabilité n’avaient pourtant pas vu venir la crise des subprimes aux États-Unis, ce qui prouve que leur mode de fonctionnement mériterait d’être revu…En tout cas, la création d’une agence de notation publique européenne indépendante est indispensable.

Dans ce contexte, et pour les raisons que j’ai évoquées, il apparaît donc essentiel, pour le groupe UMP, de voter, dans la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, le projet de loi de finances qui nous est aujourd'hui soumis en nouvelle lecture.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous voici de nouveau réunis après 130 heures de débats budgétaires et financiers, et ce dans un contexte très original.

En effet, c’est sans doute la première fois depuis de nombreuses années que l’on examine un projet de budget dont les paramètres ont à ce point évolué depuis la présentation de ce texte au mois de septembre dernier.

Les chiffres sont connus : un déficit de plus de 80 milliards d’euros, c’est-à-dire 362 milliards d’euros de dépenses pour 274 milliards de recettes. En 2012, la France devra donc emprunter sur les marchés financiers 180 milliards d’euros pour financer son déficit et le service de la dette existante. C’est dire si le socle est particulièrement important.

Or, en l’espace de trois mois, la situation s’est profondément dégradée, ainsi que l’a rappelé Mme la rapporteure générale, du point de vue tant de la conjoncture économique et, plus particulièrement de la croissance, que des conditions financières générales.

Au demeurant, le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur a annoncé ce matin que le déficit du commerce extérieur explosera cette année, passant de 51 milliards d’euros en 2010 à 70 ou 75 milliards d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Excusez du peu ! Cela correspond à une augmentation de 50 % en un an ! Dans ce domaine aussi, on voit où en est la France…

Je veux souligner également la dégradation accélérée de la conjoncture générale, avec l’entrée en récession de plusieurs économies occidentales. L’économie d’endettement et de spéculation est aujourd'hui en train de montrer qu’elle est au « bout du rouleau », et les sommets européens ne parviennent pas à rétablir la confiance.

Bref, le diagnostic n’est guère rassurant, quoi que vous en disiez, madame la ministre, et nous ne pouvons pas vous rejoindre sur au moins un de ses éléments.

En effet, madame la ministre, vous avez indiqué, dans votre intervention liminaire, le répétant même à deux reprises, qu’il n’y avait pas d’alternative à la politique conduite par le Gouvernement. Selon vous, il n’y a qu’une solution, celle que le Gouvernement a adoptée !

S’il existe encore une démocratie parlementaire dans notre pays, permettez-nous de vous présenter nos propositions, comme nous nous y sommes employés durant plusieurs semaines.

Vous nous avez accusés de vouloir défaire plutôt que de faire ! Je regrette cette analyse, car nous avons formulé des propositions et fait voter un certain nombre d’amendements, tous plus réalistes les uns que les autres

Mme la ministre fait une moue dubitative.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Nous avons ainsi créé des recettes supplémentaires à hauteur de 11 milliards d’euros.

Nous avons opéré un tri plus ambitieux des dépenses fiscales improductives, car les niches fiscales sont, selon nous, une source à exploiter.

Nous avons manifesté notre souci d’une plus grande solidarité dans l’effort que doit aujourd'hui consentir notre pays, en prévoyant une plus grande progressivité des impôts, notamment de l’impôt sur le revenu, avec la création d’une tranche supplémentaire.

De même, dans un souci de solidarité, nous avons souhaité activer des leviers de croissance. C’est ainsi que nous avons proposé une revalorisation de la prime pour l’emploi.

Nous avons préconisé une plus grande justice fiscale à l’égard des PME, en votant un dispositif visant à solliciter plus les très grands groupes.

Nous avons favorisé les collectivités outre-mer, notamment au travers de quelques dispositifs plus spécifiques. D’ailleurs, certains d’entre eux ont été préservés par les députés.

Nous avons fait voter un certain nombre d’amendements pour le logement.

Enfin, nous avons présenté diverses propositions en faveur des collectivités locales et territoriales.

À cet égard, je regrette, madame la ministre, que le Gouvernement et la majorité des députés ne partagent pas notre point de vue selon lequel les collectivités doivent être des partenaires actifs dans le redressement du pays. Les différentes mesures que nous avions proposées pour revaloriser les dotations et favoriser la péréquation verticale n’ont pas eu l’heur de plaire au Gouvernement, ni à la majorité des députés.

Dans ces conditions, et en considération des 120 amendements votés – c’est considérable ! – aux conséquences budgétaires significatives, la question posée était simple : alors que les membres du Gouvernement en appellent à l’unité nationale autour de la règle d’or et qu’ils invitent le pays à se mobiliser et les collectivités à se serrer les coudes, votre perception des propositions émanant du Sénat allait-elle évoluer ? Le Gouvernement était-il prêt à anticiper cette fameuse règle d’or en acceptant certaines des propositions que nous lui avions soumises ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La réponse, nous l’avons obtenue : c’est une fin de non-recevoir qui nous a été opposée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Nos propositions, ils n’en veulent pas ! C’est une opération de communication !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Permettez-moi de vous le dire, mes chers collègues, cet appel à l’union sacrée n’en est pas un ! Il ressemble plutôt à un coup d’épée dans l’eau.

Vous avez rejeté systématiquement les propositions que nous avons formulées dans un esprit constructif. Ne nous dites donc pas qu’il s’agissait pour nous de défaire plutôt que de faire ! Tout ce qui émane de l’opposition est, à vos yeux, irrecevable ! En réalité, votre appel à l’union sacrée ne tient pas la route !

Vous avez conclu votre propos, madame la ministre, en disant que nous avions un quinquennat de retard, une expression qui vaut la peine d’être entendue…

Mais, à considérer le quinquennat qui s’achève bientôt, un chiffre est marquant, qui se suffit d’ailleurs à lui seul comme élément de diagnostic pour toute la période : 500 milliards d’euros de dettes supplémentaires ! Tel est le bilan du fameux quinquennat de Nicolas Sarkozy, madame la ministre !

Pour notre part, nous aurions préféré pouvoir relancer la machine économique et financière de notre pays sans avoir à supporter ce lourd fardeau, qui pèsera demain sur les épaules du gouvernant qui aura à assumer la charge de la France.

Je terminerai mon intervention en tirant deux enseignements.

Premièrement, la loi organique relative aux lois de finances a incontestablement prouvé ses limites.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

En effet, nous n’avons pas été en mesure de faire un travail très construit sur les dépenses du fait de toutes les difficultés de procédure qui nous en ont empêchés.

Deuxièmement, le travail d’évaluation et de simulation a également montré ses limites.

Le Parlement – en tout cas, le Sénat – n’a pas été en mesure de travailler dans de bonnes conditions. Cela prouve, d’une façon plus criante encore, la nécessité pour notre pays d’avoir une agence de chiffrage et d’évaluation indépendante, à l’instar de ce qui s’est fait récemment dans d’autres pays européens. Cela nous permettrait, me semble-t-il, de pouvoir travailler dans de meilleures conditions.

Mes chers collègues, le Sénat s’est attelé à cette construction pendant des heures, des jours et des nuits depuis un peu plus d’un mois. Ce travail n’ayant pas porté ses fruits, puisqu’il n’a pas eu l’heur de plaire au Gouvernement, nous serons favorables à la motion tendant à opposer la question préalable qui nous sera présentée tout à l'heure par Mme la rapporteure générale.

Incontestablement, deux logiques s’affrontent, et le diagnostic du Gouvernement diffère aujourd'hui du nôtre.

Dans les prochains mois, c’est un projet pour l’avenir de la France qui sera débattu devant le pays. Cela nous conduira à énoncer d’une façon encore plus ambitieuse les différentes propositions que nous avons pu émettre à l’occasion de cette discussion budgétaire.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

: c’est le propre des fins de sessions et le fruit de la répétition des mêmes propos, des mêmes thèses, des mêmes oppositions, des mêmes incompatibilités, des mêmes certitudes.

Mes chers collègues, il s’agit là de la traduction tout à fait naturelle de ce que sont nos institutions ; il n’y a pas lieu de s’en étonner.

Toutefois, au-delà du débat général, que nous n’allons pas à nouveau reprendre, il est bon de souligner que, si le Sénat, dans sa majorité, s’est opposé aux principales options de ce budget, il n’en a pas moins fait correctement son travail sur toute une série d’aspects du projet de loi de finances, certes moins au centre de la stratégie budgétaire et financière. À tel point que, comme l’a rappelé Mme le rapporteur général, dix-neuf articles importants du texte résultent de nos délibérations ! Cela traduit un accord complet ou partiel de l’Assemblée nationale sur nos propositions.

Je voudrais bien sûr remercier toutes celles et tous ceux qui ont participé à ce travail, mais plus encore nos collègues de l’Assemblée nationale, et tout spécialement le rapporteur général, mon ancien homologue Gilles Carrez. En effet, même si la commission mixte paritaire n’a pas travaillé comme il serait souhaitable qu’elle le fasse, même si nous n’avons pas examiné, disposition par disposition, vote par vote, les positions respectives de chacune des deux chambres du Parlement, il n’en reste pas moins que, dans la nouvelle délibération de l’Assemblée nationale, le travail du Sénat a été pris en compte, pas autant que nous l’aurions voulu, naturellement, mais très correctement.

Je pense en particulier à l’exemple de la péréquation horizontale des budgets locaux, à laquelle nous accéderons un jour, dans un monde meilleur §et sur laquelle nous avons amplement délibéré.

Mes chers collègues, les délibérations du Sénat sur ce sujet ont été extrêmement utiles : elles nous ont permis de mettre le doigt sur ce qui faisait mal, que nous siégions d’un côté ou de l’autre de l’hémicycle. Nous avons pu le faire grâce aux simulations que l’on nous a adressées, même si ce fut tardivement.

Ainsi, nos collègues députés, qui, en première lecture, n’avaient pas pu approfondir la question, ont pu s’appuyer sur les échanges que nous avons eus tant en commission qu’en séance publique. Nos délibérations ont, en quelque sorte, semé le doute dans leur esprit… Ayant eux-mêmes approfondi le sujet, ils sont arrivés à un dispositif transitoire qui, s’il n’est pas idéal, est tout à fait défendable.

Madame le ministre, j’en viens maintenant aux sujets de fond et sur nos responsabilités dans une aussi difficile période.

Puisque nous sommes en fin d’année et qu’il s’agit de ma dernière intervention dans l’hémicycle pour l’année 2011, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. … je me hasarderai, avec l’accord de mes collègues, à formuler quelques vœux.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Ces vœux s’adressent au Gouvernement, qui a la charge de l’exécutif, sous l’autorité du Président de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur Baylet, que l’on apprécie ou non le chef de l’État, l’intérêt des Français et celui de notre pays est que nous arrivions à faire notre chemin le mieux possible dans les premiers mois de l’année 2012.

M. Jean Bizet et Mme Sylvie Goy-Chavent approuvent.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La pire des politiques, c’est la politique du pire ; c’est le dénigrement de soi-même, le dénigrement de son propre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

C’est la mise en évidence de toutes nos faiblesses, de toutes nos difficultés, de toutes nos maladresses. Or personne n’est à l’abri de faiblesses, de difficultés, de maladresses : elles sont inévitables !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

M. Jean-Louis Carrère. Pourquoi vous dénigrer ?

Rires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Mes chers collègues, je me permets simplement d’exprimer le vœu que l’on laisse agir ce gouvernement, compte tenu de la période, particulièrement difficile.

Les perspectives électorales des prochains mois n’excusent pas tout !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… ces illusions dont il faudrait sortir très vite !

Nous sommes à la veille d’élections tout à fait décisives : il n’est de l’intérêt de personne de contracter des accords factices ou de provoquer des rencontres de hasard. Nous sommes bien d’accord sur ce point !

Toutefois, nous devons tous être conscients que la situation que l’on trouvera le 1er juillet prochain, quels que soient alors les responsables, quel que soit alors l’exécutif, ne sera pas meilleure que celle d’aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Il faudra la prendre en main avec énergie, avec le sens des décisions et sans perdre trop de temps dans les compromis internes et les réglages entre tendances ou entre formations, chacune devant recevoir son lot de consolations ou de satisfactions.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Mes chers collègues, nous voyons, dans le fonctionnement même de notre excellente Haute Assemblée, que, pour la nouvelle majorité, la voie est étroite si elle veut être crédible : vous le savez, et nous l’observons avec intérêt, une majorité complexe, une majorité plurielle, ce n’est pas simple à faire vivre !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur Carrère, ne simplifiez pas tout à l’excès ! Nous sommes dans un vieux pays, qui vit ses contradictions ; vous les vivez comme je les vis.

Je formule donc le vœu qu’en 2012, quelles que soient les convictions que chacun défendra, nous sachions éviter de dénigrer notre pays, de lui créer des difficultés artificielles à côté des difficultés, bien réelles, qui sont les siennes, et que nous ayons tout simplement le sens de l’intérêt général.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Personne n’a le secret du programme ou de la nouvelle stratégie fiscale qui contentera tout le monde, qui dynamisera la croissance, qui fera progresser l’équité, qui résoudra tous les problèmes et satisfera toutes les corporations.

Chacun sait que la solution pour demain nécessite beaucoup d’énergie, beaucoup de discernement, beaucoup d’équité.

Chacun sait que, vivant dans un monde imprévisible à un degré jusqu’alors inédit, nous avons tous droit à l’erreur.

Au terme de ces travaux, je veux donc simplement que nous sachions nous traiter respectivement avec la bonne foi que nous méritons, au détriment des attitudes toutes faites, des promesses vaines, des certitudes sans lendemain, lesquelles ne feront que renforcer nos fragilités et rendre encore plus redoutables les écueils qui sont devant nous.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je suis saisi, par Mme Bricq, au nom de la commission, d'une motion n°I-1.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement du Sénat,

Considérant que le projet de loi de finances pour 2012 s’inscrit dans une programmation pluriannuelle privée de signification, puisque reposant sur une hypothèse de croissance des dépenses publiques peu crédible et non étayée ;

Considérant que l’empilement des mesures de rendement qui a caractérisé les dernières lois financières trahit l’absence de stratégie gouvernementale en matière de prélèvements obligatoires et confirme la nocivité des principales réformes fiscales conduites depuis 2007 ;

Considérant que les habituelles ouvertures de crédits sollicitées par le Gouvernement en fin d’exercice manifestent l’insincérité de ses prévisions budgétaires et contrastent fâcheusement avec ses engagements de maîtrise de la dépense ;

Considérant que le Gouvernement, en prétendant réaliser des économies grâce à la réserve de précaution, détourne de sa vocation une procédure destinée à respecter l’autorisation parlementaire, et non à s’en dispenser ;

Considérant que la baisse injustifiée des concours de l'État aux collectivités territoriales, ajoutée aux conséquences de la réforme de la taxe professionnelle sur l’équilibre des finances locales, mine la confiance qui prévalait entre l’État et les territoires ;

Considérant que le projet de loi de finances pour 2012 est dépourvu de substance, la plupart des mesures dites « de redressement » étant soumises au Parlement à la faveur de projets de loi de finances rectificative examinés dans la précipitation ;

Considérant que l’Assemblée nationale est revenue en nouvelle lecture sur la plupart des votes du Sénat ;

Le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2012, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture (203, 2011-2012).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à Mme la rapporteure générale, auteur de la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai présenté dans la discussion générale les motifs pour lesquels nous avons déposé cette motion tendant à opposer la question préalable. Qu’il me suffise de vous inviter à la voter.

Debut de section - PermalienPhoto de François Trucy

M. François Trucy. Le Gouvernement trouve la motion « relativement défendable » !

Rires sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

Je profite de cette prise de parole pour remercier tous les sénateurs de leur assiduité, de leur ténacité ainsi que de ce qu’ils ont apporté aux débats budgétaires qui nous ont occupés ces trois derniers mois.

Je pense notamment à la question délicate que Philippe Marini a de nouveau évoquée, celle de la péréquation, …

Debut de section - Permalien
Valérie Pécresse, ministre

… et notamment de la péréquation horizontale, qui a donné lieu sur ces travées à beaucoup de débats et qui nous a permis in fine d’aboutir à une solution à mes yeux plus porteuse d’équité entre les communes et, en tout cas, plus prudente.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de tous ces apports !

Je rappelle toutefois que le Gouvernement est contre la motion.

M. le président de la commission des finances applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Joseph Stiglitz résume d’une formule les politiques menées par les dirigeants européens depuis quelques années : « On s’est contenté de déplacer les fauteuils sur le pont du Titanic ».

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

En somme, Mme la ministre nous a expliqué que le Sénat avait déplacé les fauteuils un peu trop à gauche, et qu’il fallait les repousser vers la droite. Toutefois, elle ne nous a rien dit du cap pris par le Titanic ni de sa destination…

Pour Mme la ministre, le Sénat aurait établi un budget fictif : l’est-il plus que celui qui est proposé par le Gouvernement, s’agissant notamment du taux de croissance qu’il suppose et de l’impact des décisions budgétaires qu’il contient sur la croissance et sur les rentrées fiscales ? Tout à l'heure, nous en avons évoqué les effets, à savoir la dégradation de la balance commerciale. Quant à la suppression de la taxe professionnelle, elle devait, je le rappelle, nous libérer de toutes ces contraintes…

Le budget que nous avons construit serait décalé par rapport aux nécessités du moment, affirme Mme la ministre, avec toute l’autorité de sa fonction. Mais que sont ces « nécessités du moment » ? S’agit-il de réduire l’endettement ou de diminuer le chômage ? Pour parler en termes keynésiens, qui faut-il choisir, les rentiers ou les travailleurs ?

Exclamations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Quoique Mme la ministre ait déclaré le contraire, cela fait au moins deux politiques possibles !

On a soutenu aussi, avec assurance, et compétence, qu’il était normal que les collectivités territoriales prennent leur part de l’effort.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Mais quand les a-t-on consultées sur la politique qui a été menée ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Pour combien pèsent les collectivités territoriales dans la dégradation de nos finances publiques ?

On leur reproche d’avoir embauché 37 000 personnes, mais préféreriez-vous que l’on ait créé 37 000 chômeurs, voire 700 000, comme durant le quinquennat ?...

Visiblement, cela ne tient absolument pas debout.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

C’est votre argumentation qui ne tient pas debout !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

En conséquence, vous l’aurez compris, le groupe du RDSE s’associera à la motion tendant à opposer la question préalable.

Personnellement, cependant, je suis quelque peu frustré, car le travail fait en première lecture n’a pas été repris par les députés, alors que des avancées avaient été obtenues, s’agissant en particulier des collectivités territoriales et du Fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales.

L’Assemblée nationale est ainsi revenue sur l’accord que nous avions difficilement arraché ici même et a ramené de 250 millions à 150 millions d’euros la péréquation pour la première année. Ces quelques économies devraient, me semble-t-il, satisfaire le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Il était dit que la nuit du 20 décembre ne serait pas celle du 4 août !

Curieux de voir la tournure que pourrait prendre le débat, j’ai déposé un amendement pour rétablir ce montant de 250 millions d’euros, qui me paraît tout de même le minimum du minimum ; mais l’amendement ne sera vraisemblablement même pas examiné.

Exclamations sur plusieurs travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Par ailleurs, j’aurais souhaité que l’on puisse compléter la liste des exonérations en ajoutant aux collectivités éligibles à la DSU-cible celles qui sont éligibles à la DSR-cible, comme le Sénat l’avait prévu initialement. Cela a disparu à l’Assemblée nationale ! On a pensé à la dotation de solidarité urbaine, c’est très bien ; on aurait pu aussi penser à la dotation de solidarité rurale.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je veux dire à quel point je me sens frustré à l’issue de ce débat : à l’heure où notre économie entre en déflation, les véritables problèmes ne sont pas traités !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Marc Massion, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Au demeurant, les arguments motivant le vote de cette motion tendant à opposer la question préalable ont été parfaitement présentés par Mme la rapporteure générale et par François Marc.

Si j’interviens à cet instant du débat, c’est parce que, par certains de vos propos, madame la ministre, chers collègues de l’opposition sénatoriale, vous avez parfois donné l’impression de vouloir nous faire passer pour de mauvais Français, …

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

… sous prétexte que nous ne souscrivions pas au projet de budget présenté par le Gouvernement et adopté par l’Assemblée nationale.

Ayant siégé dans ce même hémicycle entre 1997 et 2002, je ferai un bref rappel, parlant sous le contrôle de M. Marini, qui était alors rapporteur général du budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

À l’époque, la majorité du Sénat était de droite. Quel sort croyez-vous qu’elle réservait aux projets de budget présentés par le Gouvernement Jospin et adoptés par la majorité de gauche de l’Assemblée nationale ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Deux années de suite, la droite, au Sénat, a présenté un « contre-budget », pour reprendre le terme employé alors. Il s’agissait non pas d’améliorer le texte, mais d’en proposer un autre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Et nous pourrions citer bien d’autres exemples. Souvenez-vous des lois de décentralisation !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

M. Marc Massion. Mes chers collègues, la démocratie permet l’expression de deux logiques : nous avons chacun la nôtre. Nous l’avons répété au cours des 130 heures de débat, la majorité de gauche au Sénat n’entend pas faire la même politique que vous. Nous sommes ainsi un certain nombre à regretter que nos amendements n’aient pas été davantage pris en considération par l’Assemblée nationale, car nous avons fait loyalement notre travail !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix la motion n° I-1 tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de finances pour 2012.

Je rappelle en outre que le Gouvernement a émis un avis défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici le résultat du scrutin n° 78 :

Le Sénat a adopté.

En conséquence, le projet de loi de finances pour 2012 est rejeté.

Bravo ! et applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC. – Exclamations sur plusieurs travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Mes chers collègues, avant d’aborder la suite de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs. (projet n° 12, texte de la commission n° 176, rapport n° 175 et avis n° 158).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation

Mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, cher Alain Fauconnier, madame le rapporteur pour avis, je veux, en présentant ce projet de loi, dire que le Gouvernement entend apporter des réponses concrètes aux nouvelles attentes et aux besoins inédits des consommateurs.

Ce texte, qui n’est pas une cathédrale législative, n’a pas la prétention de tout régler. Loin des grands débats dogmatiques, il se veut pragmatique et repose sur une conviction profonde : l’amélioration du quotidien des Français et la protection des consommateurs doivent rester un sujet de consensus, à l’abri des affrontements idéologiques et des querelles partisanes.

C’est la raison pour laquelle je tiens, avant toute chose, à rappeler la richesse, la sérénité, la qualité des débats que nous avons eus lors de l’examen du projet de loi à l’Assemblée nationale. En commission des affaires économiques, puis en séance publique, nous avons été à l’écoute de toutes les propositions, quelle que soit leur origine, et nous avons ainsi enrichi le texte.

Je me réjouis, d’ailleurs, que ce projet de loi, qui s’inscrit dans le prolongement de l’action du Gouvernement initiée depuis le début du quinquennat, n’ait pas servi de prétexte pour remettre en cause les textes votés depuis 2007 – par exemple, la loi de modernisation de l’économie, la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, la loi portant réforme du crédit à la consommation ou même la loi portant nouvelle organisation du marché de l’électricité.

Les acteurs économiques ont plus que jamais besoin de stabilité juridique en ces temps difficiles où règne l’incertitude. La crise économique est multiforme.

Depuis trois ans, je vais à la rencontre des acteurs économiques trois fois par semaine, sur tout le territoire, et je puis vous dire que ces acteurs économiques luttent, bien décidés à gagner cette bataille contre la crise. En même temps, ils attendent de nous, certes, des dispositifs de financement mais aussi de la stabilité juridique.

Je tiens à remercier votre commission. En effet, s’il y a des points de désaccord sur un certain nombre de sujets assez essentiels, vous n’avez pas franchi les lignes rouges que nous nous étions fixées, ne remettant pas en cause l’ensemble de ce texte. Si la majorité sénatoriale avait fait ce choix, le projet de loi aurait été bloqué et ce sont les Français, les consommateurs, qui en auraient été les premières victimes.

Vous l’aurez compris, j’aspire à ce que l’examen de ce projet de loi se déroule dans le même état d’esprit de dialogue constructif qu’à l’Assemblée nationale.

Devant les députés, alors que la majorité du Sénat avait changé, j’avais moi-même dit que je voulais privilégier un examen constructif. Pour nous permettre un débat approfondi, j’avais refusé l’engagement de la procédure accélérée sur ce texte.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Malgré la proximité des échéances électorales de 2012, j’espère que, grâce à cette tradition républicaine qui place le Sénat au-dessus des considérations politiciennes, nous pourrons avoir ce débat ; nous le devons aux Français.

Le devoir collectif qui s’attache à la défense et à la protection des consommateurs, au cœur de l’action du Gouvernement depuis le début du quinquennat, est un sujet sur lequel chaque parlementaire est attendu dans notre pays. En renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs, nous n’œuvrons pas seulement au rééquilibrage des relations en faveur du consommateur partout où elles se font à son détriment, nous restaurons également une relation de confiance entre les consommateurs et les professionnels. Or c’est le meilleur moyen d’encourager et de soutenir la consommation qui, chacun le sait parfaitement dans cet hémicycle, est le principal moteur de l’économie française.

En ces temps de crise sans précédent depuis le krach boursier de 1929, nous savons, les uns et les autres, que nous devons tout faire pour empêcher que la consommation des ménages ne fléchisse.

Il ne saurait donc être question d’adopter des mesures qui pénaliseraient la consommation. Il ne saurait davantage être question d’adopter des mesures qui pénaliseraient nos entreprises et menaceraient l’emploi dans notre pays, ce qui serait irresponsable.

C’est donc la recherche de l’équilibre qui nous a guidés depuis le début de cette discussion et qui, je l’espère, nous permettra, à l’occasion de l’examen de ce texte, d’améliorer la rédaction initiale du Gouvernement tout en ayant en permanence en tête la nécessité de défendre la croissance, donc, de défendre la consommation, donc de protéger les consommateurs.

Pour élaborer ce projet de loi, j’ai pris pour méthode de me placer résolument du côté des consommateurs pour « coller » au mieux à leurs attentes et à leurs demandes.

Je suis parti du « baromètre des plaintes » élaboré chaque année par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF. L’année dernière, 92 500 réclamations ont ainsi été déposées, qui traduisent la réalité que vivent nos compatriotes.

Pour bâtir ce projet de loi, j’ai étudié ces plaintes, réalisé des entretiens de terrain avec les acteurs locaux, organisé des rencontres publiques, chaque semaine, avec des acteurs économiques, engagé un dialogue avec les associations de défense des consommateurs et les acteurs économiques.

Au regard de tous ces éléments structurants, j’ai élaboré un ensemble de mesures concrètes sur les sujets qui touchent aux dépenses contraintes : le logement, l’énergie, la santé et les télécommunications.

Ces dépenses contraintes ne représentaient, dans les années soixante, que 13 % des dépenses totales des ménages, contre 30 % environ aujourd’hui, soit le tiers de celles-ci. J’ajoute que, pour les ménages modestes, la proportion peut même grimper jusqu’à 80 %.

Il est donc très important de se pencher sur cette question, d’autant plus que, depuis le début de la crise, la France est le seul pays dans lequel le pouvoir d’achat s’est maintenu, et a même augmenté, comme en attestent les chiffres de l’INSEE, ainsi que les comparaisons établies à l’échelon européen. Pourtant, chaque fois que nous les rencontrons, nos compatriotes nous font part de leurs inquiétudes. Ils estiment que leur pouvoir d’achat a stagné, voire baissé.

Un tel sentiment s’explique aisément : la part des dépenses contraintes, qui sont indolores parce qu’elles s’effectuent par virement ou prélèvement automatique, a augmenté dans le budget des ménages. Le « reste à vivre » des Français a donc tendance à se rétrécir. Il est essentiel – et tel est l’objectif de ce texte – d’aider les Français à reprendre le dessus sur ces dépenses.

Vous le savez, les dépenses liées aux télécommunications, c’est-à-dire à l’internet et à la téléphonie mobile, n’existaient pas, ou si peu, il y a quelques années.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État

Aujourd’hui, l’omniprésence de ces outils, désormais indispensables à notre quotidien, exige de mieux armer les consommateurs et de renforcer la transparence et la mobilité de ce secteur. En effet, un chômeur qui se présente à Pôle emploi, par exemple, doit donner son numéro de portable.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État

Cette évolution nous oblige à trouver des solutions concrètes.

Lorsque j’étais député, en 2008, j’avais fait voter le principe du tarif social pour le téléphone portable. Il aura fallu que j’entre au Gouvernement pour que ce dispositif soit mis en place. C’est désormais chose faite.

Je vous propose d’appliquer la méthode à laquelle j’avais pensé à l’époque – Jean-Claude Lenoir s’en souvient !

M. Jean-Claude Lenoir acquiesce.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État

Tout à l’heure, lors d’un déjeuner auquel M. le rapporteur n’a malheureusement pu participer, j’ai invité les sénateurs présents à se rendre, comme je l’ai fait, dans les commissions de surendettement.

Ceux d’entre vous qui ont assisté à la réunion d’une commission de surendettement dans leur département ont pu prendre la mesure des difficultés que rencontrent les Français. C’est tout à fait éclairant ! On s’aperçoit alors que certains outils, que l’on aurait eu tendance à choisir, car ils semblent a priori constituer des réponses de bon sens, sont décalés par rapport la réalité que vivent nos concitoyens.

Nous en débattrons à propos du fichier positif, plusieurs amendements ayant été déposés sur l’article du texte y afférent. Il importe, en légiférant – chacun doit en prendre conscience –, de coller à la réalité quotidienne des gens et de bannir les mesures d’affichage. C’est ainsi que j’ai bâti ce projet de loi. Donner l’impression que l’on règle une difficulté au détour d’une loi, c’est facile ; je propose plutôt, quant à moi, que nous nous attaquions, sur tous ces sujets, à la racine des problèmes.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État

Je le répète, les télécommunications sont devenues un outil pour l’intégration sociale, et même parfois pour la vie familiale.

Un chiffre illustre, à lui seul, cette emprise croissante : le taux de pénétration mobile a, selon l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes, l’ARCEP, dépassé les 100 %, ce qui signifie que nombre de foyers sont suréquipés en matériel téléphonique.

En moyenne, chaque Français dispose désormais d’au moins un téléphone portable. Selon le baromètre de la DGCRFF, le secteur des télécommunications reste le deuxième en termes de réclamations formulées par les clients. Le nombre de ces dernières s’élevait à plus de 16 800 en 2010, soit 18 % de l’ensemble des réclamations. Grâce aux actions prévues dans la loi Chatel de 2008, ce pourcentage est en baisse. Le présent texte permettra de réaliser d’autres avancées considérables en matière de protection des consommateurs.

La transparence et la mobilité de ce secteur doivent encore être améliorées. Pour dynamiser la concurrence, le projet de loi prévoit ainsi le déverrouillage gratuit des téléphones trois mois après leur achat. De même, une offre mobile sans engagement devra être proposée aux consommateurs. Il leur reviendra ensuite de s’engager sur vingt-quatre mois ou de choisir une offre sans engagement.

J’ai également tenu à renforcer la défense des publics vulnérables : ce projet de loi permettra de lutter contre la fracture numérique sociale.

J’aimerais revenir sur un amendement adopté par la commission de l’économie.

Vous avez décidé, mesdames, messieurs les sénateurs, d’interdire aux fournisseurs l’emploi du terme « illimité » dans les publicités vantant les mérites de leurs forfaits. Selon moi, il s’agit d’une fausse bonne idée ; c’est une solution d’affichage inefficace.

Vous ne mettrez pas un terme à cette pratique en supprimant le mot « illimité » ! La langue française est suffisamment riche pour contourner cette disposition. Les opérateurs inventent même des mots nouveaux et proposent d’ores et déjà des forfaits « illimythics ». Croyez-moi, en la matière, ce ne sont pas les idées qui manquent.

Le choix opéré en commission, contre mon avis, et sur lequel nous reviendrons lors de l’examen des amendements, ne règlera pas ce problème. Nous devons tous éviter de proposer des mesures d’affichage ; il nous faut au contraire faire preuve, à l’égard des consommateurs, donc de nos compatriotes, de réalisme et d’efficacité.

S’agissant par ailleurs de la problématique du logement, un travail très constructif a été accompli au travers de ce texte, d’abord à l’Assemblée nationale, y compris avec les membres de l’opposition d'ailleurs, ensuite au sein de la commission de l’économie du Sénat. Des points ont été améliorés. Je regrette, en revanche, que certains amendements tendent à affaiblir la protection des consommateurs, mais nous y reviendrons.

Les frais liés au logement représentent près de 30 % des dépenses des ménages et, surtout, près de 80 % de leurs « dépenses contraintes ». Il était donc normal de travailler en priorité sur ce sujet.

Protéger les Français contre toute forme d’abus et garantir fermement leurs droits dans ce domaine doit être notre priorité. L’enjeu n’est pas simplement la maîtrise du budget et des dépenses. Dans le cadre de la problématique sociale du logement, nous devons plus que jamais faire preuve de vigilance, afin d’éviter certaines dérives.

Le projet de loi rend ainsi possible l’ajustement du loyer au profit du locataire si la surface louée est fausse ou manquante. Ce dispositif existe pour les propriétaires ; il était sain et juste d’en faire également bénéficier les locataires. La procédure de contestation de la surface est calquée sur celle qui existait déjà pour les copropriétés.

La nécessité de mieux protéger les locataires a particulièrement retenu l’attention de l’Assemblée nationale, qui a décidé, à l’unanimité, d’en finir avec les demandes abusives de documents, comme la photo d’identité ou l’attestation de l’employeur : les agents de la DGCCRF seront ainsi habilités à contrôler et sanctionner les manquements à cette disposition.

Certains sénateurs de la commission de l’économie, notamment ceux qui appartiennent à la majorité sénatoriale, étaient dubitatifs en ce qui concerne ce dispositif. Pourtant, j’y insiste, il est très important de l’adopter.

De même, une députée socialiste, Marie-Lou Marcel, avait proposé que le bailleur ne puisse plus exiger que la personne se portant caution pour le locataire soit expressément membre de sa famille. Cette proposition était une réponse très concrète à des abus fréquemment constatés par la DGCCRF.

Je regrette le recul de la commission de l’économie du Sénat sur ce point, car c’était un pas important en faveur du rééquilibrage des rapports entre locataires et propriétaires, une véritable mesure sociale et de bon sens. Je rappelle d'ailleurs que c’était l’idée d’une députée de l’opposition... Je ne doute pas que nous pourrons, dans le cours de nos débats, trouver une solution de nature à protéger plus efficacement les locataires. Je le souhaite en tout cas de toutes mes forces.

Permettez-moi maintenant d’aborder un sujet qui touche à l’avenir de l’économie française et des pratiques de consommation des Français : le commerce électronique. Ce texte, en effet, a aussi pour objet de favoriser l’adaptation de notre pays à des mutations profondes de l’économie française.

Vous le savez, le commerce électronique connaît une croissance véritablement spectaculaire dans notre pays : le secteur devrait réaliser un chiffre d’affaires supérieur à 37 milliards d’euros en 2011, contre 31 milliards d’euros en 2010. J’ajoute que les ventes sur internet ont progressé de 23 % entre le troisième trimestre de 2010 et le troisième trimestre de 2011. Ce mouvement concerne tous les consommateurs et tous les territoires.

Depuis mon entrée au Gouvernement, je l’ai souvent répété : il est nécessaire de mener une action cohérente et continue pour accompagner le formidable développement du e-commerce et garantir la confiance dans ce secteur. Nous devons nous assurer que son développement ne s’accompagne pas de pratiques trompeuses pour le consommateur, ou déloyales pour le commerce traditionnel. La DGCCRF a en effet reçu près de 11 000 plaintes à ce sujet en 2010, soit 12 % du total des réclamations.

Le projet de loi prévoit donc de mieux protéger les cyber-acheteurs. Ainsi, les pénalités versées au consommateur en cas de non-respect du délai légal de remboursement après rétractation ont été augmentées par l’Assemblée nationale et la commission de l’économie du Sénat.

De même, le délai de remboursement des sommes versées en cas de rétractation du consommateur a été réduit, ce qui permet d’anticiper la transposition de la directive « Droits des consommateurs », formellement adoptée par le Parlement européen et le Conseil européen le 25 octobre dernier.

Par ailleurs, pour renforcer la protection des consommateurs en matière de démarchage téléphonique, nous avons rendu obligatoire, avec vos collègues de l’Assemblée nationale, le dispositif Pacitel, qui permet aux consommateurs qui le souhaitent de s’inscrire sur une liste afin de ne plus être démarchés téléphoniquement.

Cette liste d’opposition, lancée en septembre dernier, rencontre un véritable succès populaire, puisque 550 000 Français ont d’ores et déjà inscrit près de 1 million de numéros sur lesquels ils ne souhaitent plus être contactés. Même le président de la commission de l’économie du Sénat s’y est inscrit, comme il l’a dit à ceux d’entre vous qui émettiez des doutes sur l’efficacité du dispositif.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Ce dispositif simple, plébiscité par les consommateurs, lancé dans le cadre d’une démarche partenariale avec les acteurs économiques, permet, tout en protégeant les consommateurs, de préserver sur notre territoire près de 100 000 emplois.

Je le dis solennellement à chacun d’entre vous présent dans cet hémicycle, notamment à vous, madame le rapporteur pour avis : ne prenons pas le risque – comme la commission de l’économie au détour d’un amendement visant à supprimer ce dispositif et à le remplacer par une obligation de recueillir le consentement des consommateurs –, de remettre en cause ces 100 000 emplois. Cela ne résoudrait pas le problème auquel sont confrontés nombre de consommateurs, y compris lorsque ceux-ci souhaitent bénéficier du service après-vente offert par certains opérateurs.

Je le rappelle, notre pays doit aujourd'hui faire face à une crise économique mondiale. Un certain nombre de nos compatriotes craignent de perdre leur emploi. Or, au détour d’un amendement, alors même qu’un dispositif protège déjà à la fois les consommateurs et l’emploi, on voudrait faire adopter une mesure qui surprotège les consommateurs bien au-delà de leurs souhaits et qui, dans le même temps, sacrifie l’emploi.

Je ne souhaite pas que l’emploi d’un certain nombre de nos concitoyens soit mis en cause. Je le dis avec beaucoup de solennité, et j’aurai l'occasion de le répéter lors de l’examen des articles : ce serait à la fois déraisonnable et extrêmement inquiétant pour des dizaines de milliers de Français. Ce n’est pas parce que l’amendement en cause a été adopté en commission qu’il est interdit aux uns et aux autres de réfléchir et de prendre la mesure de l’impact que pourrait avoir un tel dispositif.

J’ai également souhaité que le présent projet de loi accorde une large place à la richesse des savoir-faire et des productions artisanales de notre pays. Hier, je me trouvais dans la Creuse, avec vous, madame Nicoux, avec Jean Auclair et nombre d’autres élus. Nous avons rencontré les tapissiers d’Aubusson, ainsi que de nombreux autres artisans. Voilà quelques jours, je suis allé dans le Cantal. Monsieur le rapporteur, je me suis également rendu dans l’Aveyron, où j’avais annoncé la création du présent dispositif. Je veux dire à quel point le « fabriqué en France » constitue une force pour notre économie et pour notre pays. D’ailleurs, le Président de la République en a fait une priorité depuis 2009.

A été ainsi mis en place – sans que vous ayez été consultés, mesdames, messieurs les sénateurs, car aucune mesure législative n’était requise – le label « origine France garantie », qui, aujourd'hui, concerne une quarantaine de produits et une quinzaine de marques. Bientôt seront visés une centaine de marques et environ cinq cents produits.

En revanche, il était indispensable de passer par l’intermédiaire d’une loi pour étendre le dispositif de « l’indication géographique protégée », qui a sauvé les produits alimentaires de notre pays, qu’il s’agisse du saint-nectaire, du brie de Meaux…

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

De la même façon, nous allons pouvoir protéger les produits artisanaux et industriels, qu’il s’agisse du couteau Laguiole, des faïences de Gien, des émaux de Briare, des tapisseries d’Aubusson…

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Des calissons d’Aix, des bêtises de Cambrai !

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Et l’on peut multiplier les exemples !

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

J’ajoute pour votre information, mesdames, messieurs les sénateurs, que le dispositif, une fois adopté, fera partie de la loi française ; il sera un élément constitutif de notre législation relative à la protection des savoir-faire.

Dans le même temps, j’ai impulsé une démarche de dématérialisation des informations sur les produits. J’ai demandé au Conseil national de la consommation, que je préside et qui regroupe, comme vous le savez, des représentants des entreprises et des associations de défense des consommateurs, de me faire des propositions au mois de janvier ou de février prochain.

En effet, nous voulons nous orienter vers la création d’une carte d’identité des produits qui permettra aux consommateurs, grâce aux codes barres et aux flashcodes, d’en connaître l’origine.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Grâce à ces deux labels et au dispositif proposé, nous serons en mesure d’offrir aux consommateurs de notre pays ce qu’ils veulent, c'est-à-dire la qualité française. En effet, les deux tiers d’entre eux considèrent, avec raison, que les produits fabriqués en France sont de meilleure qualité que les autres.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Par ailleurs, 75 % d’entre eux affirment être prêts à payer plus cher des produits réalisés dans notre pays. Or force est de constater qu’ils sont face à une jungle. Ainsi, des étiquettes portent la mention « 100 % français », qui ne correspond à rien du tout, car chacun a bien compris l’intérêt de faire croire que ses produits étaient fabriqués en France.

Avec ces dispositifs, nous pourrons mettre fin à cette situation, mieux informer les consommateurs et protéger nos savoir-faire.

Toutes les réponses que nous tâchons d’apporter ensemble aux problèmes quotidiens des Français n’auraient que peu d’efficacité sans un dispositif de contrôle et de sanction refondé.

Le texte, tel qu’il avait été voté à l’Assemblée nationale, allait dans ce sens et me paraissait équilibré. Je regrette donc que la commission de l’économie ait décidé d’introduire l’action de groupe dans le droit français.

Mme Nathalie Goulet fait un signe de protestation.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

J’entends déjà certains d’entre vous me dire que je fais aujourd'hui partie du Gouvernement et non plus du Parlement… Toutefois, je tiens à vous rappeler qu’une crise est survenue depuis 2008. Et il n’est pas interdit d’étudier les conséquences qu’a eues un tel dispositif sur l’économie des pays qui l’ont mis en place.

Pour ceux qui douteraient encore de la réflexion que j’ai engagée et de ma volonté de trouver le dispositif le plus efficace possible, je rappellerai un autre élément : dans un livre que j’ai écrit avant mon entrée au Gouvernement, j’ai indiqué que, même si j’avais défendu cette mesure, je pensais préférable de réfléchir à d’autres moyens plus efficaces, plus protecteurs des consommateurs et moins dangereux pour l’économie, la croissance et l’emploi. C'est la raison pour laquelle j’ai proposé dans le présent projet de loi un certain nombre de dispositions.

Que chacun ici en soit conscient, les actions collectives coûtent chaque année 1, 5 point de PIB aux États-Unis. Aujourd'hui, dans un contexte de crise économique, la France peut-elle se permettre de prendre un tel risque et même de perdre 1 point ou 0, 5 point de croissance ? De telles actions conduisent 15 % des entreprises à licencier et 8 % d’entre elles à fermer des installations. J’ajoute que 45 % des entreprises américaines, de toutes tailles, dépensent aujourd’hui plus de 1 million de dollars par an en contentieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Mme Nathalie Goulet. C’est bien pour les avocats !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

De surcroît, la longueur des procédures donne un caractère particulièrement chronophage et inopérant à ce type de recours. En moyenne, les procédures se déroulent sur plus de deux ans ; dans certains cas, elles peuvent durer dix ans.

Alors que j’ai évoqué à l’instant les États-Unis, certains se demandent peut-être pourquoi je n’ai pas cité les pays européens ayant adopté un tel dispositif. Prenons donc le cas du Portugal, où une récente action engagée contre des opérateurs téléphoniques s’est achevée au bout de quatre ans. À titre de comparaison, la médiation aboutit généralement en moins de six mois, parfois en deux, trois ou quatre mois.

Enfin, mesdames, messieurs les sénateurs, sachez que, dans la majorité des cas, les gains retirés par les consommateurs sont infimes, notamment au regard des coûts de procédure suscités. Cela conduit très souvent à de véritables aberrations : j’ai en tête l’exemple d’un plaignant allemand qui risque de supporter des frais de plus de 8 000 euros, alors que le montant de sa plainte s’élève à 5 000 euros. Quel comble ! In fine, même si l’action qu’il a intentée lui donne raison, un consommateur doit parfois payer plus que le montant de la réparation escompté.

Je veux vous rappeler que le Gouvernement a souhaité privilégier des solutions plus adaptées pour réparer et faire cesser rapidement les préjudices subis par les consommateurs, reposant, d’une part, sur le développement et la généralisation de la médiation, et, d’autre part, sur la modernisation des pouvoirs de la DGCCRF. Le dispositif de sanctions administratives est ainsi modernisé. Le projet de loi permet également de mieux protéger les consommateurs contre les clauses abusives.

Ce dispositif était demandé par toutes les associations de consommateurs. Il a d’ailleurs parfois fait craindre dans les autres ministères, notamment à la Chancellerie, que l’on ne fasse adopter un mécanisme du même type que celui de l’action de groupe.

Toutefois, aux termes du mécanisme que je vous propose d’introduire dans notre droit, lorsqu’une clause sera jugée abusive et supprimée d’un contrat à la suite d’un jugement, elle sera également abrogée dans tous les contrats identiques conclus par des consommateurs avec le professionnel concerné. C’est l’assurance de faire cesser le préjudice pour l’ensemble des consommateurs visés.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Pour ce qui concerne la réparation, madame le rapporteur pour avis, moins le préjudice dure, plus le consommateur est heureux. Lorsque, à l’issue d’une action de quatre ans, la réparation ne couvre même pas les frais judiciaires engagés, le consommateur n’a absolument rien à y gagner.

Je vous demande aux uns et aux autres de peser le pour et le contre d’un tel dispositif et de ne pas céder à la facilité que représente l’affichage.

Tel qu’il a été voté à l’Assemblée nationale, le projet de loi offre une protection suffisante, adéquate et efficace aux consommateurs. Il prévoit des sanctions et accorde à la DGCCRF un nouveau pouvoir d’injonction et de sanction administrative lui permettant de réagir tout de suite et lui évitant d’intenter de longues actions qui laissent courir le préjudice subi par le consommateur.

Pour conclure

Marques d’impatience sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Je pense, en particulier, à l’article 1er du présent projet de loi, relatif aux relations contractuelles entre franchiseurs et franchisés dans la grande distribution.

Pour répondre aux inquiétudes non seulement des acteurs de la franchise, mais aussi des indépendants, les députés, après de longues auditions, ont trouvé des points d’équilibre, qui préservent l’esprit originel du texte, à savoir le renforcement de l’information et de la concurrence dans ce secteur, sans pour autant fragiliser les modèles économiques. Revenir sur la possibilité de tacite reconduction, fixer une durée maximale des conventions d’affiliation de six ans, envisager une entrée en vigueur trop brutale des conventions d’affiliation, comme l’a voulu la commission et comme le prévoyait d’ailleurs le texte initial du Gouvernement, risque de remettre en cause l’équilibre trouvé et de pénaliser les acteurs économiques et, en fin de compte, les consommateurs.

Je pense également à l’adoption de certaines mesures anticoncurrentielles – totalement inadaptées à notre économie de marché – d’encadrement des prix de l’électricité, du gaz ou encore des loyers. Gérard Cornu a eu l’occasion de dire à quel point ces dispositifs étaient intrinsèquement dangereux pour le marché de la location, notamment. Dans le passé, lorsqu’ils ont été appliqués, ils ont eu des effets négatifs.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

D’ailleurs, mesdames, messieurs les sénateurs, quel gouvernement a supprimé l’encadrement des loyers ? Qui était alors Premier ministre ? C’était Lionel Jospin !

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Il a alors considéré, à juste titre, que le dispositif avait eu des effets négatifs, comme chacun le sait dans cet hémicycle.

Il faut se garder de la tentation de recourir aux solutions du passé, qui ont fait la preuve de leur échec. Si l’encadrement des loyers n’avait pas échoué, j’imagine que le gouvernement de Lionel Jospin aurait reconduit la mesure au lieu de l’abandonner…

Je souhaite profondément que nous réussissions à surmonter ces désaccords – sur Pacitel, sur l’action de groupe, sur l’encadrement des prix – et à revenir au texte d’équilibre adopté par l’Assemblée nationale, tout en y conservant, évidemment, l’ensemble des améliorations que vous avez apportées, mesdames, messieurs les sénateurs, sur quelque travée que vous siégiez.

De nombreux amendements ont été adoptés en commission ; beaucoup d’entre eux, y compris certaines propositions du groupe socialiste ou du groupe CRC, ont reçu un avis favorable du Gouvernement. J’ai agi ainsi dans un souci d’efficacité, au service des consommateurs.

Pour chaque secteur du droit de la consommation que nous examinerons dans le cadre de ce projet de loi, les positions que j’affirmerai viseront toujours à défendre l’intérêt des consommateurs.

Je soutiendrai, au nom du Gouvernement, celles de vos propositions qui permettent réellement – loin de toute volonté de faire de l’affichage ou de raconter des histoires – d’améliorer la situation du consommateur. En revanche, je m’opposerai à toutes les mesures qui provoqueraient exactement l’inverse de l’effet recherché, en m’appuyant sur les exemples du passé, qui sont nombreux – dans notre pays, bien sûr, mais pas seulement –, à montrer combien l’encadrement des prix et des loyers est un outil inefficace, qui obtient des résultats diamétralement opposés à ceux qui sont visés.

Comme je l’ai été en commission – son président ici présent en conviendra –, je continuerai d’être à l’écoute de toutes les suggestions, qu’elles proviennent des sénateurs de gauche ou des sénateurs de droite.

En effet, les consommateurs attendent de nous des réponses à leurs problèmes, et non l’étalage de nos divergences idéologiques. Je souhaite donc que chacun respecte cette démarche, qui a été celle du Gouvernement ainsi que, pour l’essentiel, de la commission, à laquelle je veux rendre hommage, c'est-à-dire la recherche de mesures efficaces pour protéger au quotidien nos compatriotes.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’objet du projet de loi que nous examinons aujourd’hui est de renforcer les droits, la protection et l’information des consommateurs. Comment ne pas souscrire à un tel objectif ?

Voilà pourquoi la commission de l’économie a travaillé dans un esprit constructif, en constituant un groupe de travail composé de sénateurs de toutes sensibilités politiques, dont certains ont assisté, à mes côtés, à une cinquantaine d’auditions.

Voilà pourquoi, également, notre commission a souhaité déléguer à la commission des lois l’examen de plusieurs articles relevant de sa compétence exclusive, sur lesquels notre collègue Nicole Bonnefoy reviendra dans un instant.

Voilà pourquoi, enfin, notre commission a adopté 129 amendements au projet de loi, dont 30 émanant de l’opposition sénatoriale.

Toutefois, aborder ce texte dans un esprit constructif ne nous dispense pas de le replacer dans un contexte plus global. En effet, l’adoption de mesures visant à renforcer les droits des consommateurs n’a de sens que si celles-ci se traduisent par une amélioration concrète. Or deux éléments viennent contredire la volonté affichée par le Gouvernement en la matière : la faiblesse du pouvoir d’achat, d’une part, et la réduction des moyens de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, d’autre part.

Toutes les réformes économiques conduites au cours du quinquennat ont appréhendé la question du pouvoir d’achat principalement sous l’angle de la dépense et des prix, comme si la hausse de la concurrence suffisait à faire baisser les prix et donc à augmenter le pouvoir d’achat. Ce fut le cas, notamment, de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, dite « LME », ou de la réforme du crédit à la consommation.

Malheureusement, le recours à cet unique levier – la baisse des prix – n’a pas permis de restaurer le pouvoir d’achat des Français. Comme l’avait montré le rapport sur le bilan de la LME rédigé par notre collègue Élisabeth Lamure au nom de la commission de l’économie, l’impact de cette loi sur les prix reste difficile à déterminer. En effet, aucune étude économique n’a mis en évidence de manière claire la baisse des prix attendue de la politique de concurrence. Je citerai quelques chiffres pour vous en convaincre, mes chers collègues : après un recul de 0, 6 % en 2008 et de 0, 2 % en 2010, et une quasi-stagnation en 2009 et 2011, le pouvoir d’achat des ménages devrait baisser de 0, 3 % en 2012.

Le Gouvernement affirme qu’il souhaite, avec ce projet de loi, s’attaquer aux dépenses contraintes. Il est en effet urgent de le faire – j’ai bien entendu vos propos, monsieur le secrétaire d'État –, puisque ces dépenses, qui représentaient environ 20 % du budget des ménages en 1979, constituent désormais 48 % du budget des ménages pauvres. De ce fait, les gains éventuels de pouvoir d’achat des travailleurs situés en bas de l’échelle des revenus sont de plus en plus accaparés par ces dépenses.

De même que la faiblesse du pouvoir d’achat, l’affaiblissement de la DGCCRF risque de priver d’effet les mesures incluses dans ce projet de loi. À cet égard, il existe une contradiction entre la volonté affichée de renforcer les droits du consommateur et la réduction des moyens de l’administration chargée de faire respecter ces droits.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Je rappelle que, entre 2008 et 2012, ses effectifs ont baissé de 15 % et que, entre 2006 et 2010, le nombre de ses contrôles a diminué de 13 %. Dès lors, on ne peut que s’interroger sur sa capacité à assumer les nouvelles missions que lui confie le présent projet de loi.

Dans ce contexte, le projet de loi n’apporte qu’une réponse partielle et tardive. Passé de 11 à 56 articles à la suite de son examen par l’Assemblée nationale, il aborde désormais les sujets les plus divers, des ventes au déballage de fruits et légumes jusqu’aux antennes-relais, en passant par les soins esthétiques.

De nombreuses mesures vont dans le bon sens, monsieur le secrétaire d'État, comme le renforcement des droits des locataires, l’amélioration de la transparence en matière de téléphonie mobile ou encore la protection du nom des collectivités.

En réalité, mes chers collègues, ce texte est critiquable non par ce qu’il contient, mais par ce qu’il ne contient pas.

Exclamations ironiques sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

La commission propose donc de transformer ce projet de loi en le complétant par trois volets : des mesures ambitieuses pour réduire les dépenses contraintes ; un dispositif d’action de groupe à la française pour améliorer l’effectivité des droits des consommateurs ; enfin, des dispositions fortes relatives au crédit à la consommation, que nous examinerons prochainement.

S’agissant des dépenses contraintes, j’ai identifié trois postes de dépenses essentiels pour le pouvoir d’achat des Français, qui mériteraient par conséquent de faire l’objet d’une approche plus volontariste.

Le premier poste est le logement. La commission a adopté un amendement visant à freiner la hausse des loyers à la relocation. En effet, cette hausse rend illusoire, notamment dans les « zones tendues », le droit au logement pourtant consacré par la loi. Alertés par les associations de consommateurs sur les « honoraires exorbitants » réclamés par certaines agences, nous avons adopté un amendement tendant à plafonner les frais d’agence.

Le deuxième poste crucial est l’énergie. La commission a adopté un amendement ayant pour objet de garantir aux consommateurs l’accès à un volume minimal d’électricité et de gaz à un coût très réduit. Cette mesure, qui présente un double avantage, social et environnemental, nous paraît d’autant plus urgente qu’une décision récente du Conseil d’État a conduit le Gouvernement à annoncer une augmentation de près de 5 % des tarifs réglementés du gaz à partir du 1er janvier 2012. L’instauration concomitante d’une tarification progressive permettrait donc de réduire l’impact d’une telle mesure sur les ménages modestes.

Le troisième poste est la téléphonie mobile. La commission a adopté un amendement visant à contraindre les opérateurs à distinguer, sur chaque facture, la part du coût de l’abonnement et celle de l’amortissement du téléphone. Cette disposition permettra aux abonnés de connaître l’affectation de leurs dépenses en services de communications électroniques mobiles, et de mieux comparer les différentes offres concurrentes.

Outre ces mesures sur les dépenses contraintes, la commission a adopté, sur l’initiative de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteure pour avis de la commission des lois, une mesure importante destinée à renforcer l’effectivité des droits des consommateurs : la création d’une action de groupe à la française. Sans m’étendre sur ce sujet que notre collègue développera, je me félicite de l’adoption de ce dispositif, qui permettra d’indemniser enfin, de manière juste et effective, des préjudices qui, aujourd’hui, n’ouvrent droit à aucune réparation.

Enfin, il me semble indispensable que le projet de loi aborde des questions auxquelles il n’a pas encore été apporté de réponse satisfaisante, notamment la prévention du surendettement des ménages. C’est pourquoi j’accueillerai favorablement un certain nombre d’amendements déposés sur ce sujet, que nous examinerons dans les prochains jours.

J’en viens à nos propositions de modification du projet de loi qui nous a été transmis. Dans un esprit constructif – je le répète –, la commission a conforté les avancées que ce texte comportait, s'agissant notamment de l’optique-lunetterie, sur l’initiative de notre collègue Gérard Cornu.

En revanche, la commission a supprimé certaines modifications contestables adoptées par l’Assemblée nationale.

Elle a ainsi rétabli, à l’unanimité, le mandat exclusif que les députés avaient remis en cause.

Elle a également réécrit l’article 1er du projet de loi relatif aux conventions d’affiliation dans le secteur de la grande distribution alimentaire. Après avoir pris connaissance d’un avis émis par l’Autorité de la concurrence, qui soulignait le très faible taux de changement d’enseigne des magasins dans la grande distribution, le Gouvernement avait intégré à son projet de loi un certain nombre de préconisations visant à supprimer les obstacles juridiques au changement d’enseigne. Cependant, à la suite de réactions très vives dans le secteur de la grande distribution, les députés ont affaibli le texte ; ils l’ont même, sur certains points, vidé de sa portée.

La commission a donc réécrit l’article 1er afin de rapprocher son texte des préconisations de l’Autorité de la concurrence. J’espère que, au sein de la Haute Assemblée, le consensus le plus large pourra prévaloir sur ces questions.

En conclusion, mes chers collègues, si toutes ces avancées sont intégrées au projet de loi, nous pourrons être fiers du texte que le Sénat adoptera, car il sera porteur d’une grande ambition pour améliorer concrètement, comme vous le souhaitez, monsieur le secrétaire d'État, la vie de nos concitoyens.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, consommer davantage n’est pas une fin en soi. Ce qui importe, c’est de consommer mieux et, pour cela, il faut être bien informé, être protégé des comportements abusifs de certains professionnels et, surtout, pouvoir avoir confiance en l’acte de consommation.

La loi intervient donc pour protéger les consommateurs, en imposant un certain nombre d’obligations aux professionnels, afin de rééquilibrer les relations structurellement inégales entre les uns et les autres. C’est la vocation même du droit de la consommation.

La protection la plus efficace du consommateur a donc été mon souci constant en tant que rapporteur pour avis, quand bien même elle peut susciter dans certains cas des contraintes ou des coûts supplémentaires pour les entreprises. C’est en effet le consommateur qui est en position de faiblesse et c’est donc lui qu’il convient de protéger, a fortiori en période de crise économique.

Ce projet de loi de plus de cinquante articles comporte des dispositions très diverses. La commission de l’économie a délégué à la commission des lois l’examen au fond de neuf articles qui relevaient de sa compétence. La commission des lois a également examiné dans son avis dix-sept articles, de sorte qu’elle s’est prononcée sur la moitié du texte, en étant bien sûr soucieuse de la cohérence juridique des dispositifs proposés, en particulier en matière juridictionnelle.

Je dois dire que le projet de loi ne m’a pas paru complètement abouti et cohérent à cet égard, ce qui a justifié un certain nombre d’amendements de la commission des lois que la commission de l’économie a bien voulu adopter et intégrer dans le texte.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Elle en a aussi rejeté !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Je tiens d’ailleurs à remercier mon collègue Alain Fauconnier pour son sens du dialogue et de l’écoute.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Bravo, monsieur le rapporteur !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Nous avons réellement pu travailler de concert, mon rôle étant, bien sûr, de faire état des préoccupations propres à la commission des lois.

L’une des principales innovations du texte est la création de sanctions administratives prononcées par la DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Ces sanctions interviendraient principalement à l’encontre de pratiques ne faisant l’objet d’aucune sanction pénale ou entraînant seulement des contraventions.

Je tiens à souligner que, contrairement aux chiffres fournis par l’étude d’impact du projet de loi, les manquements des professionnels au droit de la consommation sont poursuivis. En 2009, plus de 3 000 condamnations pour des infractions aux règles de la protection économique des consommateurs et 1 500 en matière de sécurité et de conformité des biens et services ont ainsi été prononcées.

La seule justification recevable des sanctions administratives est celle de la réactivité et de l’efficacité de la mesure. Permettre à la DGCCRF, qui mène l’enquête et dresse le procès-verbal de l’infraction, de prononcer une amende administrative donne plus de poids à son contrôle et lui permet de mieux jouer son rôle d’autorité régulatrice des pratiques commerciales et de la protection des consommateurs.

Malgré, je l’admets, une réticence initiale, motivée par la perte de la force symbolique attachée à la sanction pénale prononcée par le juge, j’estime que la création de sanctions administratives est, dans son principe, justifiée. La question qui continue, en revanche, à se poser est celle des modalités retenues.

En effet, les sanctions administratives n’obéissent pas au même régime que les sanctions pénales. En particulier, les garanties apportées au justiciable sont moindres dans le cadre d’une procédure administrative que dans celui d’une procédure pénale. Or il ne faudrait pas que, demain, la répression administrative des manquements au droit de la consommation soit plus sévère que la répression pénale actuelle de ces mêmes manquements alors que les garanties sont moindres. Il faut trouver un équilibre entre l’exigence d’une sanction efficace des infractions au droit de la consommation et celle du respect des droits des professionnels condamnés.

Ainsi, sur l’initiative de la commission des lois, le texte étend désormais aux amendes administratives les règles de cumul applicables aux amendes pénales. En dessous de 3 000 euros, les peines d’amendes pourraient se cumuler sans limite. En revanche, au-delà de 3 000 euros, les peines d’amendes ne pourraient se cumuler que dans la limite du montant maximum de l’amende encourue, conformément à ce que prévoit l’article 132-4 du code pénal. De même, nous avons veillé à respecter la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le cumul, pour une même faute, d’une sanction pénale avec une sanction administrative : la somme des deux amendes doit être inférieure à l’amende maximale encourue.

Pour garder une forme de publicité de la sanction, la commission des lois a proposé que les sanctions administratives fassent l’objet d’une publication. En effet, il convient d’alerter les consommateurs sur le manquement d’un professionnel. La condamnation pénale est publique ; rien ne justifie que la sanction administrative soit cachée.

En principe, les sanctions administratives peuvent être contestées devant le juge administratif. L’Assemblée nationale a toutefois prévu que, par exception, les sanctions relatives aux clauses abusives et aux manquements à l’obligation d’information du consommateur fassent l’objet d’un recours devant le juge judiciaire. Il s’agissait de conserver à ce dernier, juge naturel du droit de la consommation, sa compétence pour ces contentieux particuliers. Cette exception est pertinente. Toutefois, elle pose des problèmes d’articulation des contentieux, sources d’inextricables difficultés. Nous avons donc proposé un mécanisme pour remédier à cette faiblesse.

J’ai aussi constaté que, s’il renforce les pouvoirs d’enquête de la DGCCRF et lui ouvre de nouvelles actions, telle que la possibilité de saisir le juge judiciaire pour qu’il ordonne le blocage d’un site internet, le texte aurait pour effet de permettre à cette direction de saisir le juge de manquements qu’elle n’a pas le droit de constater par procès-verbal. Nous avons donc veillé à mettre en conformité le champ d’application de ces nouvelles dispositions et celui des missions de la DGCCRF.

Monsieur le secrétaire d'État, l’attribution de ces nouvelles prérogatives suppose que la DGCCRF soit en mesure de les exercer. Or le moins que l’on puisse dire est que les crédits de fonctionnement et les effectifs de cette direction, tant en administration centrale que dans les services déconcentrés, ont beaucoup diminué ces dernières années. Il existe sans doute des limites à la capacité de faire plus avec moins.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Le projet de loi renforce également la lutte contre les clauses abusives, de trois manières.

Premièrement, obligation est faite au juge de déclarer non écrite une clause dont le caractère abusif apparaît au cours des débats.

Deuxièmement, la DGCCRF et les associations de consommateurs se voient donner le droit de saisir le juge pour qu’il déclare non écrite dans tous les contrats identiques passés par le même professionnel une clause abusive. La décision du juge s’imposerait donc à tous les contrats. Seul un nombre limité de tribunaux spécialisés aurait ce pouvoir, afin de limiter le risque de divergences de jurisprudence.

Troisièmement, sera sanctionnée d’une amende administrative la présence dans un contrat d’une clause abusive inscrite sur la « liste noire » des clauses abusives.

Ces dispositions sont utiles et conformes à nos engagements européens en matière de lutte contre les clauses abusives.

La commission des lois a également examiné les dispositions concernant la vente à distance et le démarchage, qui s’inspirent très clairement d’une proposition de loi adoptée en 2010 par nos collègues députés.

Ces méthodes de vente sont toutes deux caractérisées par un même élément : elles ne se déroulent pas au sein d’un établissement commercial, avec la présence d’un consommateur et d’un professionnel face à face. Elles nécessitent une protection renforcée du consommateur, car celui-ci soit ne voit pas le produit qu’il achète, soit se trouve confronté à un vendeur qu’il n’a pas sollicité. Ces deux types de ventes s’accompagnent d’ailleurs, pour cette raison, d’un droit de rétractation.

Une directive du 25 octobre 2011 est venue, très récemment donc, moderniser le droit en matière de contrats à distance et de contrats dits « hors établissement ». La commission a proposé de transposer quelques-unes de ses dispositions plus protectrices que notre législation avant décembre 2013, échéance prévue pour la transposition, notamment en prévoyant le passage de sept à quatorze jours du délai de rétractation. Quelques dispositions de cette directive sont d’ailleurs déjà transposées dans le projet de loi. Inutile donc d’attendre que le Gouvernement demande à être habilité à procéder par ordonnance à la transposition dans les dernières semaines avant l’expiration du délai...

Le projet de loi crée aussi une dérogation à l’interdiction de la prise de paiement jusqu’à l’expiration du délai de rétractation, prévue pour le démarchage, au bénéfice des ventes en réunion à domicile. Pour assurer l’unité juridique du régime des ventes par démarchage et, surtout, pour préserver l’efficacité de la protection du consommateur, car on sait dans quel contexte psychologique ce type de ventes a lieu, je vous proposerai, mes chers collègues, de supprimer cette dérogation.

La question de l’instauration d’un délai de rétractation pour les contrats conclus dans les foires et salons est beaucoup revenue au cours de mes auditions. Après analyse, il apparaît que le droit communautaire n’autorise pas l’instauration d’un tel délai dans ce cas, ce qui me donne l’occasion de rappeler au Gouvernement le problème que soulèvent de façon récurrente les directives en matière de consommation : elles imposent en général une harmonisation complète, c’est-à-dire qu’elles interdisent de prévoir dans la loi nationale une protection de niveau supérieur. C’est problématique, notre droit de la consommation faisant partie des plus protecteurs de l’Union européenne.

Monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement doit être plus vigilant sur ce point lors des négociations européennes : ce n’est pas parce qu’il y a un marché unique qu’il faut un droit uniforme en matière de protection des consommateurs.

Pour les contrats passés lors des foires et salons, la commission des lois a donc proposé d’instituer une obligation d’information du consommateur sur l’absence de droit de rétractation assortie d’une sanction administrative.

Enfin, le projet de loi crée un dispositif original, que la commission a souhaité réécrire tout en conservant sa finalité, pour lutter contre les phénomènes du type de ceux qui ont été constatés lors de la faillite de la CAMIF : les consommateurs continuent à payer pour des commandes qu’ils ne recevront jamais ! Il s’agit ici de donner à la DGCCRF un pouvoir particulier d’injonction pour ordonner la suspension de toute prise de paiement par l’entreprise de vente à distance, de façon limitée dans le temps ; si l’entreprise honore la commande, le paiement peut intervenir.

Le projet de loi concerne aussi l’amélioration des relations entre bailleurs et locataires. Il modifie divers aspects de la loi du 6 juillet 1989 sur les rapports locatifs : conditions d’établissement de l’état des lieux, conditions de restitution du dépôt de garantie ou encore création d’une action en diminution de loyer inspirée de l’action en diminution de prix prévue par la loi Carrez sur les lots de copropriété.

Outre les modifications déjà proposées par la commission des lois, je présenterai deux autres amendements sur ces dispositions pour tenir compte des débats qui ont eu lieu en commission de l’économie.

Enfin, la commission des lois a décidé, à l’unanimité, de combler une lacune de notre droit en introduisant l’action de groupe, fondée sur l’adhésion volontaire, dans ce projet de loi.

Ce texte, présenté comme ayant pour objet de renforcer la protection des consommateurs, passait en effet à côté de son sujet en s’abstenant de prévoir la seule mesure qui permet d’assurer le respect intégral des droits des consommateurs et qui ne crée pas d’autre droit que celui de faire valoir le sien.

En effet, dans une société de consommation de masse, lorsqu’ils font face à la faute d’un professionnel, le plus fréquemment les consommateurs subissent un préjudice d’un montant trop faible pour les inciter à saisir le juge alors que, collectivement, le préjudice est considérable. Le contrevenant tire ainsi un bénéfice indu de la faute qu’il a commise sans crainte d’être inquiété, en toute impunité donc, car le coût et le tracas de la procédure judiciaire sont dissuasifs.

Je crois, mes chers collègues, que nous sommes tous ici contre l’impunité pour ceux qui ne respectent pas la loi. Je sais cependant que je ne parviendrai pas à convaincre ceux d’entre vous qui sont hostiles par principe à ce type de recours collectif. En revanche, je voudrais apporter des réponses et des éclaircissements à ceux qui, légitimement, s’inquiètent des éventuelles conséquences de cette procédure sur nos entreprises, a fortiori dans une période de crise économique.

Je rappelle tout d’abord que nous avons repris les conclusions des travaux très approfondis que Richard Yung et notre ancien collègue Laurent Béteille ont entrepris sur ce sujet au nom de la commission des lois. En analysant précisément les dérives des actions collectives à l’étranger, notamment aux États-Unis, ils ont pu concevoir des garanties et des garde-fous qui nous protégeront de ces dérives.

La première de ces garanties est la procédure civile française, au sein de laquelle ce dispositif s’inscrit pleinement, ainsi que les règles déontologiques de la profession d’avocat.

Ainsi, le dispositif ne comporte pas de dommages et intérêts punitifs, lesquels sont à l’origine du montant colossal des indemnisations aux États-Unis. Il n’autorise ni honoraires au résultat ni faculté pour l’avocat d’introduire une action sans être mandaté, de financer son action à crédit ou encore de faire du démarchage pour trouver des clients. Enfin, n’est introduit dans notre droit aucun des éléments de procédure « à l’américaine », discovery ou opt-out par exemple, qui permettent des chantages au procès et à l’indemnisation, portent atteinte à l’image des entreprises et peuvent conduire celles-ci à la faillite.

Tout d’abord, des associations de consommateurs bénéficiant d’un agrément spécial joueraient le rôle de filtre.

Ensuite, pour éviter les procès indus, la procédure s’organiserait en deux phases.

Dans un premier temps, le juge statuerait sur le principe de la responsabilité de l’entreprise à partir des quelques cas-types qui lui auront été soumis.

Ce n’est que dans un second temps, une fois que la faute du professionnel aura été reconnue par le juge, qui pourra ordonner des mesures de publicité à la charge du professionnel, que les consommateurs lésés pourront se joindre à l’action et demander à être indemnisés.

Le dispositif consacre l’opt-in et écarte l’opt-out : ne seront parties à l’action que ceux qui y auront adhéré volontairement, ce qui encadrera le montant des indemnisations.

Le juge examinera alors la recevabilité des demandes des consommateurs désirant se joindre à l’action et proposera une indemnisation. Le cas échéant, l’entreprise pourra suggérer une médiation, avec l’accord du juge, afin que les consommateurs soient remboursés plus rapidement.

L’ensemble de ces garanties constituent une assurance contre toutes les dérives de la procédure de l’action de groupe qui, ainsi conçue, permettra de parachever la protection du consommateur organisée par le droit français.

J’ajoute que l’enjeu n’est pas seulement national : il est important de disposer d’un modèle français de l’action de groupe qui puisse inspirer le futur modèle européen et éviter que nous soit imposée une procédure inconciliable avec nos principes.

Il me semble que, si l’on accepte le principe de l’action de groupe – je sais que vous êtes sensible à la nécessité d’étudier la question, monsieur le secrétaire d'État, car, comme vous me l’avez dit vous-même en réunion de commission, il n’est pas interdit de réfléchir –, le meilleur dispositif, techniquement et juridiquement, est celui qu’a proposé la commission des lois et qu’a approuvé la commission de l’économie.

Enfin, le projet de loi aborde également de très nombreux autres sujets qui intéressent la commission des lois. Je n’en citerai que quelques-uns : le droit des assurances, les prérogatives des maires en matière de ventes au déballage, ou encore la législation funéraire.

M. le président de la commission des lois acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Je conclurai en insistant sur trois sujets.

Tout d’abord, le projet de loi prévoit d’incriminer la revente avec bénéfice de billets de manifestation sportive, culturelle et, désormais, commerciale. Il s’agit de punir ceux qui font profession de revendre à prix d’or des billets qu’ils ont achetés en masse. Ce dispositif est pertinent et conforme aux travaux que la commission des lois a déjà conduits.

Ensuite, le projet de loi donne à toute collectivité territoriale le droit de faire opposition à l’enregistrement d’une marque reprenant son nom ou ses signes distinctifs à des fins commerciales. Le dispositif proposé répond à une véritable difficulté, même si sa portée sera limitée dans les faits. Il permettra au moins à la collectivité d’agir rapidement et préventivement, alors que, actuellement, elle ne peut le faire qu’après l’enregistrement de la marque.

Enfin, en ce qui concerne la protection contre le démarchage téléphonique, le projet de loi se borne à légaliser le dispositif Pacitel, mis en place par les professionnels du secteur. La commission des lois a suggéré de reprendre la proposition de loi de notre collègue Jacques Mézard, adoptée à l’unanimité par le Sénat au mois d’avril dernier. En effet, la nécessité de s’inscrire par Internet sur la liste d’opposition Pacitel écartera de facto les personnes âgées, celles qui sont les plus vulnérables à ce type de démarchage. On nous répète que notre dispositif menace des centaines de milliers d’emplois dans les centres d’appel.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Monsieur le secrétaire d'État, j’attends encore une évaluation sérieuse de son impact... De quels emplois parlez-vous ? Des centrales d’appel délocalisées au Maroc, en Tunisie ou ailleurs ?

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

En France, 100 000 emplois seront touchés. Je rappelle que c’est celui qui propose un dispositif qui doit en mesurer l’impact !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Mme Nicole Bonnefoy, rapporteure pour avis. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, vous pouvez le constater, la commission des lois s’est fixée comme ligne de conduite de conserver dans ce texte ce qui accroît véritablement l’information et la protection des consommateurs, d’en supprimer ce qui les affaiblit ou ce qui y déroge sans motif légitime et d’y ajouter ce qui les renforce. C’est aussi le sens des quelques amendements que je présenterai au nom de la commission, laquelle a émis un avis favorable à l’adoption de ce projet de loi.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Évelyne Didier.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je tiens à féliciter d’emblée M. le rapporteur et Mme le rapporteur pour avis du remarquable travail qu’ils ont effectué. Je salue également l’ouverture des auditions à toutes les sensibilités du Sénat.

Voilà plus de cent ans, le Parlement adoptait la loi sur la répression des fraudes dans la vente des marchandises et des falsifications des denrées alimentaires et des produits agricoles, promulguée le 1er août 1905. Dans son exposé des motifs, Jules Méline expliquait que des « fraudes, provoquées par la soif des gains excessifs et favorisées par la concurrence de plus en plus acharnée qui a amené la baisse générale des prix et par la crédulité du public [...] nuis [aient] à la fois aux consommateurs et aux intérêts généraux du pays ».

Le législateur organisait en conséquence un système de répression des tromperies et des falsifications en raison de leurs effets économiques, sanitaires et sociaux. Dans le même temps, il instituait un contrôle scientifique des produits alimentaires avec la création d’un corps de contrôle, ancêtre de la DGCCRF. Lorsqu’on lit les comptes rendus des débats parlementaires, on s’aperçoit que, même si les techniques de vente ont évolué avec la production et la distribution de masse, mais aussi avec les nouvelles technologies, les problématiques d’hier et d’aujourd’hui sont similaires.

Si la loi de 1905 était avant tout un texte de régulation entre producteurs et commerçants, elle posait la question de la sécurité sanitaire et de la qualité des produits en raison des fraudes sur le lait et le vin. Au XXe siècle et au début du XXIe siècle, la sécurité sanitaire des produits dans le domaine alimentaire, mais également médical, leur qualité et leur innocuité pour le consommateur ne sont toujours pas pleinement assurées ; l’affaire du Mediator, ou celle des prothèses mammaires défectueuses, en atteste.

C’est pourquoi nous partageons la préoccupation du Gouvernement de renforcer les droits, la protection et l’information du consommateur, et ce dans tous les domaines abordés par le projet de loi.

Cependant, le texte gouvernemental, même si la procédure législative l’a enrichi, reste en deçà de nos exigences pour garantir une véritable protection du consommateur, et ce pour deux raisons principales. D’une part, il s’inscrit dans un projet politique global de libéralisation de l’économie, d’augmentation de la pauvreté et de diminution du pouvoir d’achat de la grande majorité de nos concitoyens. D’autre part, l’effectivité des avancées en termes d’information et de protection du consommateur – délai de rétraction, clause abusive, délai d’engagement en matière de téléphonie, etc. – est relativisée par la perte de puissance des outils de contrôle de ces droits.

Sur ce projet global de libéralisation de l’économie, je formulerai trois séries de remarques.

En premier lieu, garantir des droits au consommateur, c’est avant tout lui permettre de consommer et, de surcroît, des produits de qualité. Or, monsieur le secrétaire d'État, contrairement à ce qui a été affirmé, ce texte ne conduira pas à une relance par la consommation, car il manque l’essentiel, à savoir le pouvoir d’achat.

Je rappelle que, au troisième trimestre 2011, le chômage a encore augmenté et que, d’après les travaux de l’Observatoire des inégalités, la pauvreté ne cesse de croître depuis 2002. En 2009, plus de 8 millions de personnes vivaient avec moins de 954 euros par mois. Comment consommer dans ces conditions ? Dans le même temps, les dépenses contraintes représentent 48 % du budget des ménages les plus fragiles.

À ce sujet, je rappellerai ici l’effet de « double peine » que subissent les personnes aux revenus les plus modestes et qu’a souligné Martin Hirsch dans un article récent du Monde. Ainsi, en matière de téléphonie, ne pouvant assumer financièrement un forfait, ces personnes ont le plus souvent recours aux cartes prépayées, dont la tarification à la minute est plus chère. De même, en matière de logement, elles ne peuvent occuper que des petites surfaces, dont les loyers sont beaucoup plus chers au mètre carré. Malheureusement, ce schéma se reproduit dans de nombreux autres postes de dépenses contraintes.

Finalement, pour reprendre les propos de Martin Hirsch, c’est « comme si les personnes les plus modestes payaient une TVA supplémentaire ». C’est pourquoi, afin que les consommateurs jouissent des droits qui leur sont reconnus par le projet de loi, nous considérons essentiel de mettre en œuvre une politique de revalorisation des faibles revenus, qui, de notre point de vue, passe notamment par une augmentation du SMIC à 1 700 euros brut mensuels.

En second lieu, comme en témoigne l’article 1er relatif aux conventions d’affiliation, le Gouvernement considère toujours que la concurrence est la solution pour régler à la fois la question du déséquilibre des relations commerciales et celle du pouvoir d’achat. Ainsi, faciliter le changement d’enseigne devrait entraîner mécaniquement une baisse des prix. En réalité, on occulte encore une fois le problème du déséquilibre dans les relations commerciales, celui de la concentration des centrales d’achat et des distributeurs.

On le constate, la concurrence libre et non faussée ne garantit pas la baisse des prix. Il suffit de lire le dernier rapport de l’Observatoire des prix et des marges ou les nombreuses études des associations de consommateurs. Je pense à celle, récente, de l’UFC-Que Choisir sur le lait et le poulet. Il est donc urgent d’encadrer les marges de l’industrie agroalimentaire et de la distribution, qui se font au détriment des producteurs et des consommateurs. Nous déposerons un amendement visant à instaurer un coefficient multiplicateur sur les produits alimentaires. L’alimentation recouvre également des enjeux de santé publique. On comprend les limites d’une politique fondée exclusivement sur la baisse des prix et qui n’assure pas une alimentation de qualité accessible à tous.

En troisième lieu, le projet de loi impose la figure du consommateur plutôt que celle de l’usager. Il oublie les principes de service public et de solidarité, qui sont au cœur de notre projet de société.

L’article 2 du projet de loi, qui traite du logement et des liens entre bailleurs et locataires, a été sensiblement amélioré. Toutefois, les auteurs de cet article font une lecture encore trop restrictive des problèmes que rencontrent nos concitoyens pour se loger. Nous avons déposé des amendements visant à interdire les expulsions locatives pour ceux qui ont été reconnus prioritaires au titre de la loi DALO, à prévoir le retour de la rétroactivité des aides personnalisées au logement, le relèvement du plafond pour l’accès au logement social, le relèvement de la surface minimale permettant de considérer un logement comme décent.

Cependant, force est de constater que la crise actuelle du logement ne pourra se résorber que lorsque le financement public du logement public sera à la hauteur des besoins – ils sont évalués aujourd'hui à 900 000 habitations – et que l’on revalorisera les aides à la pierre. Il est vrai que, sur le sujet du logement, nos divergences sont grandes ; la ministre du budget nous l’a rappelé en proposant de prélever de l’argent destiné au relogement d’urgence pour… financer les gilets pare-balles de la police municipale !

J’en viens aux autres postes de dépenses contraintes.

La disposition qui est prévue à l’article 5 et qui instaure une tarification sociale de l’internet ne nous paraît pas suffisante au regard du prix excessif envisagé, de l’ordre de 23 euros. Nous reviendrons sur cette question lors de la discussion des articles.

Sur l’énergie, là encore, nos divergences sont fortes. En témoignent les dernières déclarations de François Baroin, qui dit « préserver » le pouvoir d’achat en augmentant les tarifs réglementés du gaz de 4, 4 %. Comprenne qui pourra...

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Dans ce contexte, l’article 4 relatif au contrat de fourniture d’électricité ou de gaz naturel, qui impose de nouvelles obligations aux fournisseurs, semble loin de répondre au problème du droit d’accès à l’énergie. C’est pourquoi nous présenterons un amendement visant à modifier la formule tarifaire des prix réglementés du gaz. Nous proposerons également d’interdire les coupures de chaleur pendant la trêve hivernale.

J’évoquerai maintenant le volet relatif aux outils d’information et de contrôle garantissant la protection des consommateurs.

Tout d’abord, si le projet de loi renforce le droit du consommateur à l’information afin qu’il obtienne les renseignements nécessaires pour faire un choix éclairé, le Gouvernement abandonne l’un des principaux outils d’information, le journal indépendant 60 Millions de consommateurs, qui fait partie intégrante de l’Institut national de la consommation, donc du service public d’information.

Cette information sera réelle si un autre droit fondamental est renforcé, le droit à l’éducation du consommateur, qui permet à celui-ci d’acquérir le savoir et les compétences nécessaires pour choisir les biens et services en connaissance de cause. Or cette composante de la protection des consommateurs est aujourd'hui absente.

Ensuite, le projet de loi prétend renforcer les pouvoirs de la DGCCRF. J’ai déjà eu l’occasion de souligner ici que, après cinq ans de révision générale des politiques publiques, cette administration est aujourd’hui sinistrée. Elle a vu, année après année, ses crédits et ses effectifs baisser. Les gains de productivité mis en avant par le Gouvernement se sont traduits par une dénaturation des missions de contrôle et d’enquête des agents.

De plus, la dépénalisation à laquelle procède le projet de loi, qui remplace des amendes pénales par des amendes administratives pour sanctionner les professionnels, nous laisse quelque peu dubitatifs. En effet, avec ce système, les professionnels échappent à ce qu’ils craignent le plus, à savoir la publicité par affichage ou la publication de leurs condamnations. Nous veillerons à y remédier.

Enfin, nous sommes très favorables à l’action de groupe, qui a été depuis trop longtemps retardée, principalement en raison de l’opposition forte du MEDEF.

Tel qu’il est proposé par la commission des lois, ce dispositif nous semble suffisamment encadré pour éviter les dérives à l’américaine. Par ailleurs, nous souhaitons l’élargir à l’ensemble des préjudices, qu’ils soient matériels, corporels ou moraux. Nous proposerons un amendement tendant à ouvrir le périmètre de l’action de groupe à d’autres contentieux que ceux de la concurrence et de la consommation. Je pense ici aux contentieux financiers, bancaires, boursiers, de santé, environnementaux.

En effet, comme une partie de la société civile et des professionnels de la justice, nous considérons que la défense des consommateurs passe à la fois par le renforcement de la police de la consommation et par un accès à la justice renforcé. §

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, comment pourrait-on contester le bien-fondé d’un projet de loi visant à renforcer les droits, la protection et l’information des consommateurs ? Cet objectif est bien évidemment louable, et il convient de saluer la volonté du Gouvernement de s’atteler à cet ouvrage, en se fondant sur les plaintes reçues par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes au cours de l’année 2010.

Cependant, à l’instar de M. le rapporteur, il convient de s’interroger sur certains aspects de la politique du Gouvernement qui semblent contredire l’objectif visé. Je mentionnerai simplement le paradoxe qui consiste à vouloir renforcer les droits des consommateurs, en élargissant notamment les champs de compétence de la DGCCRF et en renforçant son pouvoir de justice administrative, alors que les moyens financiers et humains de cette direction ont été substantiellement réduits par le Gouvernement ces dernières années.

Il suffit de se reporter à la discussion que nous avons eue dernièrement à ce sujet, lors de l’examen par la Haute Assemblée de la mission « Économie », pour comprendre le malaise qui résulte de ce choix politique. La DGCCRF est une institution indispensable pour garantir l’effectivité des droits des consommateurs. On ne peut donc que s’inquiéter de la réduction de ses moyens, qui a conduit inexorablement à une véritable chute des contrôles, de l’ordre de 13 % entre 2006 et 2010 ! Ce choix de politique économique du Gouvernement paraît donc éminemment contradictoire avec l’affirmation d’une volonté sans faille de renforcement de la protection du consommateur.

Néanmoins, M. le rapporteur a souligné très justement sa volonté de travailler dans une logique « constructive », et je l’en remercie. Je tiens d’ailleurs à saluer son excellent travail, ainsi que celui de Mme le rapporteur pour avis de la commission des lois.

La commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire a modifié de façon substantielle le texte voté par l’Assemblée nationale, en visant toujours le même objectif : mieux garantir les droits des consommateurs et leur effectivité.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous partageons tous la volonté de mieux protéger les consommateurs. Le RDSE attache une attention particulière à cet objectif, car il s’agit aussi d’une question de justice et d’équité.

Or certaines dispositions du texte, tel qu’il a été adopté à l’Assemblée nationale, pouvaient paraître insuffisantes ou incomplètes, voire contraires à l’esprit qui sous-tend ce projet de loi.

Il en est ainsi de certaines mesures prévues à l’article 2, substantiellement modifié en première lecture par l’Assemblée nationale. Nos collègues députés avaient notamment vidé de sa substance le mandat exclusif des agents immobiliers, qui, comme l’a très bien souligné notre rapporteur, ne pose pas de problème en tant que tel, et dont la remise en cause pourrait même être moins favorable aux consommateurs. En revanche, cette relation contractuelle méritait d’être mieux encadrée pour garantir les droits des clients. C’est chose faite, grâce à un amendement adopté en commission.

De même, la dépénalisation du défaut de déclaration préalable auprès de la préfecture, par toute agence immobilière souhaitant ouvrir une succursale, ne constituait nullement une avancée pour les droits des consommateurs. C’est pourquoi la commission de l’économie est revenue sur cette disposition adoptée à l’Assemblée nationale.

L’adoption en commission des autres amendements portant sur l’article 2, qui ont pour objet le secteur immobilier, l’hébergement collectif des personnes âgées et les services à domicile, a permis de renforcer les droits des locataires, notamment grâce aux dispositions relatives à l’état des lieux, aux frais d’huissiers de justice ou au délai de préavis dans les « zones tendues ».

Plusieurs de mes collègues du RDSE présenteront des amendements à cet article en séance publique, afin de renforcer l’effectivité de certaines mesures, telles que la majoration du solde du dépôt de garantie en cas de non-restitution de celui-ci, au-delà du délai légal de deux mois. D’autres amendements déposés par des membres de notre groupe visent à mieux protéger les usagers du secteur social et médico-social.

Les auteurs de ce projet de loi ont souhaité se concentrer sur les dépenses dites « contraintes », qui représentent une part croissante du budget des ménages, notamment des plus modestes.

Cependant, comme l’a très bien souligné M. le rapporteur, la définition de ce type de dépenses donnée par le projet de loi n’est pas satisfaisante. Ce texte porte en effet davantage sur des « dépenses non arbitrables » que sur des dépenses contraintes qui, stricto sensu, sont pré-engagées en vertu d’un contrat ou d’un abonnement. Ces dernières, qui constituaient un cinquième seulement du budget des familles à la fin des années soixante-dix, en représentaient près de la moitié, pour les plus pauvres, en 2005.

Cette augmentation fulgurante de la part des dépenses contraintes explique ce paradoxe, qui conduit les ménages à sous-évaluer de plus en plus leur pouvoir d’achat, par rapport aux mesures objectives de ce dernier.

L’intention est donc tout à fait louable qui vise à limiter le poids de ces dépenses dans le budget des ménages. La commission de l’économie a d’ailleurs adopté de nombreux amendements pour aller plus loin en ce sens. À cet égard, je me réjouis des avancées proposées par la commission en matière de contrats d’électricité et de gaz naturel.

Je salue notamment l’adoption de l’article 4 ter, instaurant une tarification progressive de la fourniture de gaz et d’électricité. Cette mesure est d’autant plus importante après la décision récente du Conseil d’État suspendant le gel des tarifs réglementés de gaz, qui menace très directement les budgets d’un grand nombre de foyers déjà en difficulté.

M. le rapporteur a insisté, en commission de l’économie, sur trois postes de dépenses qui devaient faire l’objet de mesures encore plus ambitieuses : le logement, l’énergie et la téléphonie mobile.

Concernant le logement, comme je l’ai déjà dit, l’essentiel a été fait en commission. Avec certains membres de mon groupe, nous déposerons simplement des amendements visant à apporter de petites améliorations ou des compléments au texte de la commission.

Pour l’électricité et le gaz, il nous semble que la commission a déjà adopté des mesures essentielles.

Enfin, pour la téléphonie mobile, plusieurs sénateurs du groupe RDSE proposeront deux amendements visant à limiter la durée des engagements des abonnements, qui nous semble excessive.

J’en viens maintenant aux mesures transversales, contenues dans le deuxième chapitre de ce projet de loi, ayant pour but de mieux protéger et informer le consommateur et de promouvoir une consommation de qualité.

Là encore, nous ne pouvons qu’apporter notre soutien à ces objectifs.

L’extension de la protection des indications géographiques aux produits non alimentaires nous semble être une excellente disposition, même si celle-ci peut encore faire l’objet de quelques améliorations, notamment d’une meilleure harmonisation avec le droit des marques. C’est l’objet d’un amendement défendu par plusieurs membres du groupe RDSE, sur l’initiative d’Anne-Marie Escoffier.

Je tiens également à saluer l’amendement déposé par Mme le rapporteur pour avis de la commission des lois, qui a permis d’intégrer à l’article 8 ter les dispositions contenues dans la proposition de loi de Jacques Mézard et de plusieurs membres du RDSE visant à renforcer les droits des consommateurs en matière de démarchage téléphonique, adoptée à l’unanimité par le Sénat, le 28 avril dernier. Ce texte est en effet plus protecteur pour le consommateur que le dispositif Pacitel mis en œuvre par le Gouvernement.

En effet, il tend à prévoir que l’abonné devra donner son consentement exprès pour l’utilisation de ses données personnelles à des fins de prospection par un tiers au contrat, …

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Ce dispositif est destructeur d’emplois !

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

… alors que Pacitel repose sur la faculté laissée à l’usager de refuser tout démarchage téléphonique en s’inscrivant sur une liste. Ce dernier dispositif, qui suppose une démarche volontaire et la maîtrise de l’information et d’internet, n’est donc pas réellement protecteur pour l’ensemble des consommateurs.

Les membres du RDSE souhaitent aborder cette discussion en séance publique de manière positive et constructive. Les amendements que nous défendrons visent à rendre encore plus effective la protection des consommateurs, qui nous est particulièrement chère.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste-EELV. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

M. Gérard Cornu. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux d’abord souligner tout l’intérêt de ce projet de loi, qui se place résolument du côté des consommateurs. Je tiens, au nom du groupe UMP, à saluer l’initiative de M. le secrétaire d’État Frédéric Lefebvre, en charge, notamment, du commerce et de la consommation

Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. C’est du cirage de qualité !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Il s’est en effet référé au baromètre des réclamations des consommateurs établi chaque année par la DGCCRF, qui a notamment enregistré, pour la seule année 2010, près de 92 500 réclamations.

Sans trop entrer dans les détails, je précise que ces plaintes concernent essentiellement quatre secteurs qui, à eux seuls, les concentrent à plus de 70 %. Il s’agit de la commercialisation des produits non alimentaires dans le cadre de la vente à distance et du commerce électronique, de la communication-téléphonie, des travaux et réparations à domicile et, enfin, du secteur transports et véhicules.

Ce texte s’inscrit dans le prolongement du travail déjà accompli par le Gouvernement, notamment au travers de la loi du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, dite « loi Chatel », dont j’ai d’ailleurs eu l’honneur d’être le rapporteur devant la Haute Assemblée, de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, dite « loi LME », dont Élisabeth Lamure, ici présente, a été rapporteur pour le Sénat, ou encore de la loi du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l’électricité, dite « loi NOME ».

Ce projet de loi vient donc en complément des textes précédents, car il vise davantage à faciliter leur mise en œuvre qu’à bouleverser les dispositifs n’ayant pas encore eu le temps de produire tous leurs effets.

Il prend en compte les évolutions contemporaines des comportements de consommation dans notre pays. En effet, il était nécessaire d’adapter le droit aux nouvelles technologies, aux nouveaux modes de consommation et aux nouvelles formes de commerce.

Ce texte vise précisément à rendre effectif le droit existant, moyennant des adaptations, les manquements à l’application du droit à la concurrence et du droit de la consommation n’étant, à l’heure actuelle, pas toujours sanctionnés.

Il faut donc saluer le renforcement des missions de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF. En effet, de nouveaux pouvoirs, notamment d’injonction et de sanction administrative, doivent faciliter le travail des agents de contrôle.

L’acteur économique sera ainsi incité à faire cesser sa mauvaise pratique, mais il ne le sera guère à porter la question au contentieux.

Lors d’une première lecture à l’Assemblée nationale particulièrement constructive, le texte s’est naturellement enrichi et il couvre désormais de nombreux autres domaines, ce qui peut être de nature à nuire à la compréhension d’ensemble, comme c’est souvent le cas dans cette matière. La seconde lecture sera l’occasion d’y remédier.

C’est donc un texte largement consensuel qui nous est arrivé de l’Assemblée nationale. Nous aurions aimé qu’il le restât !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Ce n’est malheureusement plus le cas depuis son passage en commission, bien que nous ayons apprécié la création, proposée par M. le rapporteur et M. le président de la commission de l’économie, du groupe de travail destiné à associer les groupes politiques aux auditions préparatoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

À cet égard, je voudrais saluer la faculté d’écoute et la qualité du travail de M. le rapporteur, ainsi que des fonctionnaires du secrétariat de la commission de l’économie. Elle nous a permis, notamment, de maintenir le mandat exclusif des agents immobiliers.

Aujourd’hui, avec mes collègues du groupe UMP, nous déplorons qu’un tel projet de loi, dont l’unique objet est la protection et l’information des consommateurs, sans aucune arrière-pensée politique, ait justement pris un tour très politique, avec, notamment, l’introduction d’éléments très symboliques, qui marquent l’étendue du clivage entre nos formations.

M. le rapporteur a ainsi fait adopter, en commission, le principe de l’encadrement des prix des loyers, qui seraient bloqués dans les zones dites « tendues », sur le modèle du mécanisme d’encadrement de la hausse du prix du gaz et de l’électricité.

Il s’agit là, sans doute, d’un test pour le programme socialiste, puisque l’on a appris que ces idées viennent d’être reprises par le candidat Hollande.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Mme Évelyne Didier. M. Cornu est un sénateur qui ne fait pas de politique !

Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Voilà, du moins, qui éclaire quelque peu l’orientation du parti socialiste.

C’est peu de dire que ces propositions, intégrées au texte, ne nous satisfont pas. Nul n’est besoin de rappeler la nature archaïque de toute politique d’encadrement des prix et des loyers.

De telles propositions ne sauraient non plus satisfaire le consommateur. La préconisation du blocage des loyers dans les « zones tendues » est ainsi – on peut déjà le dire, même si l’on y reviendra – irréaliste et contre-productive pour le locataire que l’on entend protéger.

Les propriétaires ne feront plus de travaux dans les logements et investiront ailleurs. Mes chers collègues, voilà ce qui se passera si cette mesure de blocage est maintenue dans le texte ! Il s’agit là d’une première fausse bonne idée. Qui plus est, de telles mesures de blocage peuvent se révéler incompatibles avec le droit de la concurrence et les conventions européennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Nous aurons l’occasion d’en discuter, puisque j’ai déposé, avec l’ensemble des membres du groupe UMP, plusieurs amendements visant à revenir au texte initial.

J’en viens, enfin, à l’introduction, dans le texte de la commission, du principe de l’action de groupe. Outre qu’un sujet aussi lourd ne saurait être introduit fugitivement, par la bande, au travers d’un amendement, cette introduction ne me paraît pas souhaitable, et ce pour plusieurs raisons.

Les droits des consommateurs doivent être garantis, notamment le plus important d’entre eux : le droit à réparation en cas de préjudice causé par le comportement fautif du professionnel. Néanmoins, l’action de groupe n’est pas la solution. Elle est une procédure judiciaire lourde, coûteuse et, de surcroît, extrêmement longue, qu’affectionnent, il est vrai, surtout les avocats.

Il s’agit, en fait, là encore, d’une fausse bonne idée pour les consommateurs.

Dans un contexte de crise économique, au vu des dérives constatées dans bien des pays, l’action de groupe peut constituer une menace pour notre économie, pour nos entreprises et, au bout du compte, pour nos emplois.

Le projet de loi privilégie des solutions à mon sens plus adaptées pour réparer les préjudices subis par les consommateurs. Nous avons évoqué la modernisation et le renforcement des pouvoirs de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ; j’y ajouterai le développement et la généralisation de la médiation.

En effet, les procédures de médiation remplissent tout à fait leur rôle et ont déjà largement fait la preuve de leur efficacité dans de nombreux domaines : les banques, les assurances, le transport ou les communications électroniques.

J’évoquerai, enfin, l’introduction d’un dispositif efficace : celui de « clause abusive ». Ainsi, lorsqu’une clause sera jugée abusive et supprimée d’un contrat, elle disparaîtra de tous les contrats identiques conclus par des consommateurs avec le professionnel concerné. Cette avancée majeure rend l’action de groupe totalement inopportune. Vous l’aurez compris, je proposerai, en conséquence, un amendement de suppression de l’article 12.

En conclusion, mes collègues du groupe UMP et moi-même estimons que la démarche du Gouvernement est vertueuse et qu’elle mérite d’être soulignée et soutenue, dans la mesure où le projet de loi est le fruit de discussions et de consultations avec les consommateurs, les professionnels et les acteurs de l’économie française.

Toutefois, nous sommes en désaccord avec un certain nombre de dispositions qui ont été introduites par la commission et qui détournent ce texte de son objet initial. Aussi, monsieur le rapporteur, ne pourrons-nous plus le voter en l’état, à notre grand regret, à moins que, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

… de même que vous avez accepté d’intégrer dans le texte de la commission mes propositions relatives à l’optique-lunetterie, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

M. Gérard Cornu. … ce dont je vous remercie, vous soyez d'accord pour adopter ceux de nos amendements qui auront reçu un avis favorable du Gouvernement !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Cela nous laisse quelque espoir.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le nombre des articles du projet de loi que nous allons examiner a subi une forte inflation.

En effet, le projet initial comportait 11 articles issus des doléances des consommateurs recueillies par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. L’Assemblée nationale l’a complété de quelque 45 articles supplémentaires et la commission des affaires économiques et du développement durable l’a encore profondément remanié, puisque 129 amendements ont été adoptés, dont une petite dizaine ont été présentés par le groupe de l’Union centriste et républicaine.

Entre le logement, la téléphonie mobile, Internet, les ventes à distance, les actions de groupe et, je l’espère, monsieur le secrétaire d'État, la protection des consommateurs contre le risque de surendettement – nous aurons un débat sur ce point – les sujets sont variés. Toutefois, ils ont un dénominateur commun : l’amélioration de la transparence de l’information et de la protection des consommateurs.

Thème cher du droit communautaire, la protection du consommateur s’allie parfaitement à un autre objectif visé par le Gouvernement : la défense du pouvoir d’achat des Français. À cet égard, le texte cible à juste titre les dépenses contraintes des ménages, celles sur lesquelles il est difficile de rogner. Parmi elles, on peut retenir la protection du locataire face à des charges parfois non justifiées et des frais d’agence éventuellement exorbitants.

En matière de téléphonie mobile, le projet de loi présente quelques mesures permettant d’améliorer l’information du consommateur sur ses factures. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite rappeler que, en termes de prix des télécommunications, la vraie protection tient d’abord à l’ouverture à la concurrence de ce secteur, car la définition d’un cadre clair constitue la condition sine qua non de l’exercice de la concurrence. On n’a pas nécessairement besoin de lois pour faire baisser les prix : un cadre concurrentiel réel et lisible peut suffire.

Rappelons-nous que les trois opérateurs principaux de téléphonie mobile se sont entendus pendant des années pour maintenir artificiellement des prix élevés, parmi les plus hauts d’Europe. Puis, la quatrième licence 3G a été attribuée à Free. Cet opérateur, comme il l’a fait pour Internet, promet une baisse radicale du prix des forfaits. Les offres à bas coûts et sans engagement se sont d’ailleurs multipliées ces derniers mois, anticipant l’arrivée de ce nouvel acteur.

N’en déplaise aux opposants au libéralisme, le marché concurrentiel joue donc son rôle en matière de baisse des prix. Il faut l’encourager et l’approfondir.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Je me félicite de l’adoption en commission des amendements centristes visant à opérer une distinction entre vente de terminaux et forfaits.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

De même, j’espère que l’interdiction du simlockage, inefficace contre le vol, sera adoptée par notre assemblée.

L’État n’est pas en reste et doit créer un cadre pour protéger les plus faibles contre les risques que comportent certaines pratiques commerciales déviantes. À ce titre, la plupart des dispositions qui améliorent la transparence de l’information au consommateur sont, selon moi, nécessaires.

Bien entendu, il faut veiller à ne pas vouloir « tout border », au risque de déresponsabiliser les consommateurs ! En ce sens, le rôle de la loi est subtil, car il consiste à protéger les plus faibles sans assister tout le monde, ni, bien évidemment, museler les acteurs économiques. Un tel équilibre est difficile à trouver ! Toutefois, l’examen en commission a permis certaines avancées non négligeables pour y parvenir.

Ainsi, en matière de téléphonie mobile, plusieurs amendements vont dans ce sens. Je pense à l’obligation de transparence entre le coût du forfait et celui du terminal ou à la nécessaire transparence pour permettre de comparer les offres mobiles, demandée par notre collègue Jean-Jacques Lasserre.

Dans le secteur bancaire, les amendements de notre collègue Henri Tandonnet sur le détail entre capital et intérêts lors du solde d’une créance vont aussi dans le sens d’une meilleure transparence de l’information délivrée au consommateur. Du reste, il n’y a pas que les centristes qui ont œuvré à l’amélioration en commission du texte, loin de là ! Je tenais à le dire.

Je salue un certain nombre d’avancées proposées par notre rapporteur sur le thème de la transparence, notamment s'agissant des marges dans le secteur agroalimentaire. C’est une idée que nous avions énergiquement défendue l’année dernière, lors de l’examen de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.

Il en va de même pour la transparence en matière immobilière et la protection du locataire vis-à-vis de pratiques abusives qui ont proliféré grâce à un marché de l’immobilier très tendu.

D’autres avancées sur la protection des consommateurs peuvent, en outre, être mentionnées à ce stade de l’examen du projet de loi, notamment en direction des plus fragiles.

Les amendements de ma collègue Valérie Létard, par exemple, visent à prendre en compte les enfants majeurs dans les surcharges de loyers, pour adapter utilement notre législation à la réalité du chômage des jeunes et du logement cher.

En revanche, certaines propositions adoptées en commission me semblent inopportunes.

Pensant protéger le locataire par rapport au bailleur, plusieurs membres du groupe UCR estiment que les mesures d’encadrement des loyers, comme l’encadrement des frais d’agence immobilière, ne sont pas opportunes. Il en est de même pour l’article additionnel relatif à la progressivité des tarifs de l’électricité et du gaz. C’est une fausse bonne idée !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

De plus, elle est superfétatoire, en raison de l’existence du tarif social du gaz et de l’électricité, et à l’heure où les tarifs règlementés sont anormalement bas par rapport au coût réel de production. J’ai donc déposé un amendement pour supprimer cette disposition.

Enfin, monsieur le secrétaire d'État, lorsque l’on parle de la protection du consommateur, je regrette que l’on devienne frileux sur l’une des questions essentielles et urgentes en la matière : la protection du consommateur face au risque de surendettement.

Je n’entrerai pas dans le détail de mon argumentaire en la matière ; je soulignerai seulement que cette mesure est urgente face à la progression du surendettement en France : plus de 700 000 personnes sont concernées, et l’encours des dettes qui ne peuvent pas être remboursées atteint 6 milliards d’euros. La création d’un fichier positif assainit les conditions d’octroi du crédit à la consommation, sans l’assécher.

Monsieur le secrétaire d'État, j’espère que le Sénat pourra se vanter de transmettre à l’Assemblée nationale un texte comprenant notre proposition juste et équilibrée dans ce domaine. Je regrette que la discussion des trois amendements de notre collègue Valérie Létard relatifs au surendettement n’ait pas eu lieu en commission. Nous l’aurons donc dans l’hémicycle !

Voilà, mes chers collègues, les quelques points que je souhaitais exposer devant vous à titre liminaire, avant d’entrer dans le détail des différentes dispositions du projet de loi.

Applaudissements sur les travées de l ’ UCR et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, on dit que le diable se niche dans les détails, et le texte dont nous allons débattre à partir d’aujourd’hui en est la preuve dans bien des cas.

En effet, en déposant ce projet de loi, Gouvernement semblait viser un objectif frappé au coin du bon sens. Il s’agissait, comme l’indique le titre de ce texte, de renforcer les droits, la protection et l’information du consommateur, volonté louable dont on voit mal comment on pourrait ne pas la partager.

Cependant, si l’objectif affiché est évident, il apparaît très rapidement que les moyens proposés pour l’atteindre ne sont pas tous à la hauteur de ce que l’on pourrait espérer. C’est donc plus en fonction des moyens proposés dans ce texte que par rapport à la fin visée qu’il faut nous prononcer.

À cet égard, je le dis d’emblée, il était nécessaire de renforcer la protection du consommateur dans un certain nombre de domaines. C’est pourquoi le groupe socialiste a choisi, dès l’examen en commission, de travailler à enrichir le texte ; la tâche n’était pourtant pas aisée.

En effet, à bien y regarder, ce projet de loi est d’abord et avant tout un catalogue de dispositions et de mesures d’inégale importance. Ainsi, on passe de la grande distribution à l’immobilier, puis aux télécommunications – Internet et téléphonie –, à l’énergie, à l’optique, à l’origine géographique des produits, à la restauration, à la vente à distance, au crédit, et j’en passe !

Cet inventaire que Prévert n’aurait pas renié n’est pas satisfaisant. En effet, monsieur le secrétaire d’État, les dispositions proposées soit ne vont pas assez loin, soit sont orientées par une logique dont on peut contester le bien-fondé.

Trop souvent, le texte part du postulat selon lequel c’est encore et toujours la concurrence qui devra améliorer le pouvoir d’achat. Or il n’est plus à démontrer que la libéralisation d’un marché n’est pas, en tant que telle, un gage pour le consommateur. La grande distribution est un exemple caricatural de ce point de vue. En effet, on a créé un Observatoire des prix et des marges chargé de surveiller, en travaillant maintenant sur les marges brutes et nettes, l’évolution des prix dans les grandes surfaces.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

L’énergie est un autre exemple marquant. Qu’il s’agisse de l’électricité ou du gaz, on sait bien que les factures des usagers vont exploser dans les années à venir. Ce projet de loi est donc un texte en trompe-l’œil. Le logement, par exemple, mériterait un texte qui soit entièrement consacré à cette question – nous nous y emploierons demain ! – et qui traiterait des conditions d’accession à la propriété et, plus globalement, de la garantie d’accès au logement.

Cependant, je l’affirme au nom du groupe politique que je représente, monsieur le secrétaire d’État : j’admets que votre texte comporte quelques avancées.

Certes, tant sur le fond que sur la forme, on ne peut se satisfaire de ce projet de loi : tout d’abord, le calendrier retenu est insatisfaisant. Ensuite, et surtout, le Gouvernement rejette encore et toujours les dispositions centrales de la protection des consommateurs.

Néanmoins, si ce texte n’est pas parfait, loin s’en faut, il a au moins un mérite : celui d’exister. Nous nous en sommes donc servis comme d’un point de départ pour protéger plus largement les Français et leur pouvoir d’achat.

Nous estimons que, aujourd’hui, certains biens, comme le logement, ou certains services, comme l’accès à internet ou à la téléphonie mobile, doivent pouvoir être garantis à tous.

Nous considérons également que l’État doit assumer plus largement son rôle de prescripteur dans un certain nombre de domaines : il en va ainsi de la téléphonie mobile. Bien entendu, nous devons veiller à ce que les opérateurs n’usent pas de leur position dominante pour rendre les clients captifs. Cependant, il nous faut également tenir compte des impératifs de santé publique liés aux ondes magnétiques.

Enfin, nous estimons que, dans plusieurs domaines, la législation doit aller plus loin. Dans ce cadre, je souligne que les travaux en commission ont permis d’opérer des avancées substantielles, et je remercie à ce titre nos deux rapporteurs, Alain Fauconnier et Nicole Bonnefoy : je songe, notamment, aux dispositions relatives au recours collectif.

Monsieur le secrétaire d’État, il me semble important que, par votre intermédiaire, le Gouvernement accepte enfin le principe de cette procédure, comme vous le souteniez vous-même par le passé.

Toutefois, si les travaux en commission ont permis d’accomplir quelques progrès, ces avancées me semblent encore insuffisantes. C’est pourquoi nous présentons plusieurs amendements sur ce texte.

Certains d’entre eux sont, sous un certain angle, aussi symboliques que nécessaires, notamment concernant la prévention des expulsions locatives. D’autres tendent à tenir compte de phénomènes nouveaux face auxquels il convient d’agir au plus vite, notamment via la réglementation pour ce qui concerne la publicité pour la vente d’or par correspondance.

Dans un autre registre, il est également indispensable de clarifier les offres en matière de téléphonie mobile et d’internet. Il s’agit, en effet, de garantir le pouvoir d’achat des Français en leur donnant les moyens de mieux s’orienter dans le maquis des offres et des engagements. Toutefois, il faut surtout leur garantir, pour un coût raisonnable, un accès à des services que l’évolution de la société rend aujourd’hui, qu’on le veuille ou non, totalement indispensables.

Par ailleurs, il faut absolument y voir plus clair sur certaines pratiques, telle que la vente de pièces détachées automobiles. Nous sommes tous soucieux de préserver notre industrie. Toutefois, comment admettre que le prix des mêmes pièces détachées soit jusqu’à 30 % moins élevé en Belgique qu’en France ?

Nous proposerons donc que le Gouvernement remette un rapport sur ce thème et crée – pourquoi pas ? – un observatoire des prix et des marges consacré aux pièces de rechange. Dès lors, nous pourrons nous prononcer en toute connaissance de cause sur cette question.

Enfin, il est primordial d’encadrer beaucoup plus strictement l’accès aux crédits à la consommation.

Renforcer les droits des consommateurs, ce n’est pas seulement leur donner les moyens d’être mieux informés a priori ou de pouvoir contester plus efficacement a posteriori : c’est également considérer que certaines pratiques ne sont tout simplement pas acceptables.

Nous savons tous aujourd’hui que, face aux difficultés quotidiennes, une solution consiste à faciliter l’accès aux crédits à la consommation.

Toutefois, je rejette cette idée selon laquelle il faudrait consommer toujours plus et s’endetter chaque jour davantage pour rembourser ses dettes. En effet, une telle logique conduit à des situations préoccupantes et souvent dramatiques. Les précédents orateurs l’ont déjà souligné : aujourd’hui, le surendettement frappe des centaines de milliers de Français.

Nous proposerons donc de lutter contre ce phénomène à travers plusieurs amendements, tendant tout d’abord à abaisser le plafond du taux d’usure et ensuite à créer un crédit social inférieur à 3 000 euros.

Ces considérations me conduisent à évoquer un dernier sujet avant de conclure : la prévention du surendettement.

Afin d’endiguer ce fléau, nous sommes nombreux sur ces travées à considérer qu’il est nécessaire de créer un répertoire national des crédits aux consommateurs. Je suis conscient que cette solution soulève d’importantes questions en termes de collecte des données et qu’aucun consensus ne se dégage à ce sujet actuellement. Nous en avons longuement débattu en commission.

Néanmoins, comment accepter qu’une personne puisse aujourd’hui souscrire dix, quinze ou vingt crédits, souvent à des taux usuraires, et doive ainsi rembourser des sommes colossales sans qu’aucun garde-fou existe, mettant en danger l’équilibre d’une famille et conduisant parfois à des gestes irrémédiables ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Mes chers collègues, nous devons agir. Aussi, afin d’harmoniser les positions de chacun, nous vous proposerons de créer un groupe de travail ouvert à tous, afin que nous puissions nous appuyer sur les données existantes pour formuler des solutions consensuelles sur un sujet aussi grave.

Je tiens à conclure cette intervention sur ce point, afin de vous montrer, monsieur le secrétaire d’État, que nous avons fait le choix de nous emparer de votre texte pour aller au-delà des propositions que vous avez énoncées. J’espère à présent que le Gouvernement fera lui aussi un effort d’ouverture pour renforcer plus encore la protection des consommateurs.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en premier lieu, je tiens à aborder un sujet lié à l’un des volets importants de la loi de modernisation de l’économie, la LME, datée de 2008 : la question des délais de paiement, sur laquelle je me permets d’insister en raison de la date butoir du 31 décembre prochain.

Nous savons aujourd’hui que le bilan de l’application des dispositions de la LME en la matière est particulièrement positif, puisque, en plafonnant les délais de paiement, cette loi a permis aux entreprises – tout particulièrement aux plus fragiles d’entre-elles – d’assurer une meilleure gestion de leur « poste client » et de dégager un surcroît de trésorerie pour investir. Cependant, certains secteurs particulièrement fragilisés par la crise économique et financière qui sévit depuis trois ans ont encore besoin, aujourd’hui, d’un accompagnement spécifique.

Les accords dérogatoires ont permis de ménager une transition en douceur pour certains secteurs dans lesquels les délais sont traditionnellement longs, à l’exemple du BTP. Or ces accords dérogatoires expirent dans quelques jours, c’est-à-dire le 31 décembre prochain.

Monsieur le secrétaire d’État, vous avez consenti une prolongation des accords dérogatoires dans certains secteurs très circonscrits, caractérisés par une saisonnalité marquée, comme celui des jouets. Nous vous remercions de cette ouverture.

Toutefois, aujourd’hui, je tiens à appeler votre attention sur la situation du secteur du bâtiment et des travaux publics, le BTP, en difficulté en raison du caractère unique de chaque commande et des délais non comptabilisés dans le règlement des factures de travaux.

Selon les rapports remis par l’Observatoire des délais de paiement en 2009 et 2010, les entreprises du bâtiment, du fait de la structure particulière de ce secteur, n’ont pu obtenir une diminution des délais de paiement de leurs clients non professionnels. Ces sociétés subissent donc un déséquilibre croissant entre, d’une part, des délais fournisseurs plus courts, et, de l’autre, des délais clients qui demeurent inchangés, voire qui s’allongent.

Le contexte économique a évolué depuis l’adoption de la LME et le secteur du BTP nécessite, partant, un traitement spécifique. Un ajustement législatif se révèle donc nécessaire.

Ainsi, il m’a paru souhaitable de compléter l’article 1er bis A afin de prendre en compte ces difficultés d’adaptation, particulièrement en cette période de crise. Or cet article a été supprimé par la commission au profit d’un autre véhicule législatif.

Cette disposition ouvrait la possibilité de conclure de nouveaux accords dérogatoires pour une durée limitée, et uniquement pour des secteurs très spécifiques présentant un caractère saisonnier particulièrement marqué. Elle prévoyait également des évolutions législatives nécessaires à la transposition de la directive du 16 février 2011 concernant la lutte contre les retards de paiement dans les relations commerciales.

Si, à mes yeux, le sujet traité trouve toute sa place dans le projet de loi visant à renforcer les droits, la protection et l’information des consommateurs – en effet, ce texte s’inscrit dans la droite ligne de la loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs et de la LME –, notre rapporteur a estimé qu’il s’inscrirait mieux dans le cadre de la proposition de loi de simplification du droit et des démarches administratives. Je me permettrai, en conséquence, de présenter un amendement lors de l’examen de la proposition de loi Warsmann, afin de compléter l’article 90 bis dans le sens que je viens d’évoquer.

Néanmoins, ce sujet devant être traité de toute urgence, c’est-à-dire avant le 31 décembre 2011 – il me semble que, sur ce point, nous sommes tous d’accord dans cet hémicycle – et la proposition de loi ne devant être examinée par le Sénat qu’au mois de janvier prochain, je vous saurais gré, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir nous apporter une réponse rassurante au problème des délais de paiement des secteurs en difficulté, en particulier du BTP.

J’aborderai en second lieu, à mon tour, la question de l’introduction de l’action de groupe dans le projet de loi par le rapporteur pour avis de la commission des lois.

Pourquoi vouloir introduire une telle procédure de règlement des litiges de consommation, lourde, coûteuse et longue, alors qu’existent des méthodes alternatives beaucoup moins contraignantes et bien plus efficaces, comme les dispositifs de médiation existants ou la procédure de « clause abusive » proposée par le Gouvernement dans le cadre de ce projet de loi ?

Je rappelle que la loi du 1er juillet 2010, présentée par M. Novelli, a créé, auprès de l’Institut national de la consommation, une commission de la médiation de la consommation chargée de rédiger une charte des bonnes pratiques de la médiation. Ce document vient d’ailleurs d’être élaboré et vise à garantir l’efficacité des procédures de médiation, parmi lesquelles la gratuité du recours à la médiation pour les consommateurs ou encore l’impartialité des médiateurs.

Les consommateurs français ont de plus en plus souvent recours à la médiation pour régler leurs différends en matière de consommation, et les dispositifs de médiation ont déjà fait la preuve de leur efficacité, notamment dans les domaines des banques, des assurances, du transport et des communications électroniques.

À la demande du Gouvernement, le MEDEF et les fédérations professionnelles se sont engagés à mettre en place de nouveaux dispositifs de médiation dans plusieurs secteurs qui n’en disposent pas encore.

Une médiation sectorielle a été instituée dans le domaine de l’eau en octobre 2009, le champ de la médiation des communications électroniques a été élargi en janvier 2010, tandis que des médiations de branche sont opérationnelles depuis janvier 2011 dans les secteurs de la franchise et de la construction de maisons individuelles. Enfin, des travaux se poursuivent également dans les domaines de l’automobile et du tourisme.

Le Gouvernement a fixé pour objectif que tous les consommateurs qui le souhaitent, quel que soit le secteur considéré, puissent accéder à un médiateur d’ici au 1er juillet 2012.

En matière de consommation, les Français renoncent généralement à se présenter devant un juge pour un litige de consommation résultant d’une mauvaise exécution des obligations d’un professionnel et portant sur un faible montant. Ce type de litige exige des moyens de résolution proportionnés, efficaces et surtout rapides, qui n’obligent pas le consommateur à se rendre systématiquement devant la justice.

C’est la raison pour laquelle les consommateurs français ont recours à la médiation de manière croissante pour régler leurs différends en matière de consommation.

Le renforcement de la médiation, que nous soutenons avec nos collègues UMP de la commission de l’économie, ne peut s’opérer sans le développement de l’information fournie aux consommateurs sur l’existence et le fonctionnement des procédures de médiation. Tel est l’objet, à l’article 9, d’un amendement de mes collègues Pierre Hérisson et Gérard César, adopté par la commission, sauf erreur de ma part, à l’unanimité.

M. Gérard César acquiesce

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

La médiation est donc à mes yeux la meilleure des solutions pour compenser les préjudices subis par le consommateur, d’autant plus que – le Gouvernement s’y est engagé – des dispositifs de médiation seront étendus à tous les secteurs de la consommation dans quelques mois.

Dans ce cadre, pourquoi vouloir introduire l’action de groupe dans notre droit ? Il s’agit d’une procédure extrêmement coûteuse pour la société comme pour les entreprises. En outre, dans un contexte de sortie de crise, elle paraît aujourd’hui inopportune.

De plus, il s’agit d’une procédure très longue, je le répète : le déroulement d’un procès dure en moyenne plus de deux ans, et certaines class actions s’étendent même sur plus de dix ans, contre seulement trois mois pour les procédures de médiation.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Très juste !

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Les gains de ces longues procédures collectives sont relativement faibles pour les consommateurs plaignants et, en réalité, celles-ci profitent surtout aux cabinets d’avocats.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Le consommateur a donc tout intérêt à s’appuyer sur la médiation.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Par ailleurs, le projet de loi qui nous est présenté tend à moderniser et à renforcer les moyens d’action des agents de la répression des fraudes, ce que nous approuvons sans réserve.

Enfin, le texte prévoit qu’une clause abusive supprimée dans un contrat doit également l’être dans tous les contrats identiques conclus par des consommateurs avec le professionnel concerné. Il s’agit là d’une avancée majeure pour la mise en œuvre effective des droits des consommateurs. C’est pour l’ensemble de ces raisons qu’introduire l’action de groupe dans le droit français ne semble absolument pas justifié ; je ne pourrai, pour ma part, que m’y opposer.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Mme Élisabeth Lamure. En conclusion, si nous nous sommes réjouis que les travaux de l’Assemblée nationale en première lecture aient débouché sur l’adoption d’un texte consensuel, nous ne pouvons que regretter que la commission de l’économie et la commission des lois du Sénat aient politisé celui-ci par l’introduction de mesures à effet d’annonce. C’est franchement dommage, et mes collègues du groupe UMP et moi-même déplorons que M. le rapporteur ait choisi de donner à ce projet de loi une orientation partisane, alors que nous aurions pu adopter l’attitude constructive qui a prévalu à l’Assemblée nationale tout au long des travaux de la première lecture, ainsi d’ailleurs que lors des auditions menées par le groupe de travail au Sénat.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

M. Charles Guené remplace M. Thierry Foucaud au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon propos portera sur les dispositions permettant de renforcer la protection des consommateurs en matière de communications électroniques.

Le texte du Gouvernement comportait quelques mesures de nature à améliorer les relations entre les consommateurs et les opérateurs. Pour respecter le temps qui m’est imparti, je me bornerai à évoquer l’exemple de la disposition de l’article 5 visant à donner une base légale à la signature de conventions entre l’État et les opérateurs pour la mise en place d’un tarif social de l’internet à haut débit au bénéfice de personnes éprouvant des difficultés financières.

Les travaux de l’Assemblée nationale ont permis d’enrichir le texte, avec des mesures permettant notamment d’améliorer la concertation locale au sujet des projets d’implantation de relais de téléphonie mobile. Les réactions suscitées par ce type d’installations, les incertitudes quant aux conséquences de leur fonctionnement pour la santé requièrent en effet toute notre vigilance. Nous devons, dans toute la mesure du possible, encourager le dialogue entre les opérateurs, les collectivités et les riverains.

Le texte a, en outre, été largement amendé par notre rapporteur, Alain Fauconnier, qui a tenu à le préciser et à l’étoffer.

Si le groupe socialiste se félicite de ces avancées, il n’en demeure pas moins qu’il reste encore une marge d’action pour renforcer la protection des consommateurs en matière de communications électroniques. Nous proposerons donc au Sénat d’adopter divers amendements de nature – à notre sens – à rendre les relations entre les consommateurs et les opérateurs plus équilibrées.

Quelles sont nos principales propositions ?

Il est indispensable de mieux informer les utilisateurs sur leur consommation. En conséquence, nous demandons que tout fournisseur de services mette gratuitement en place un dispositif d’alerte systématique et de blocage des services de communications électroniques.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

C’est très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

La durée d’engagement est une question dont nous avons déjà eu à discuter à de nombreuses reprises. La durée d’engagement standard de vingt-quatre mois nous paraît trop longue ; il nous semble que retenir une durée de douze mois serait plus pertinent.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

C’est moins bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Avec une durée d’engagement plus courte, le consommateur serait moins contraint. Il pourrait changer d’opérateur plus facilement et faire ainsi coïncider plus étroitement l’offre à ses attentes, lesquelles sont susceptibles d’évoluer dans le temps.

Par ailleurs, il nous paraît essentiel de préciser ce que l’on entend par « illimité ». Il n’est pas acceptable que des offres dites illimitées ne le soient pas vraiment. C’est une question de transparence et de clarté à l’égard du consommateur, qui doit être informé avec précision des services dont il bénéficie en fonction de ce qu’il paye.

Nous présenterons un amendement d’appel visant à rappeler que le code des postes et communications électroniques prévoit la signature de conventions pour la mise en place d’un tarif social dans la téléphonie mobile, disposition législative non encore véritablement appliquée à ce jour.

Nous souhaitons aussi que les questions de santé publique soient mieux prises en compte. Ainsi, sur l’initiative de notre collègue Laurence Rossignol, nous proposerons de rendre obligatoire l’affichage du DAS sur les terminaux de téléphonie, afin que les utilisateurs soient sensibilisés aux conséquences de l’exposition aux champs de radiofréquences. Dans cette même perspective, nous demandons qu’une réflexion soit menée sur la mutualisation de l’utilisation des installations, afin de limiter l’exposition aux champs électromagnétiques.

Enfin, en vue de permettre que l’information des collectivités en matière d’installation d’antennes relais soit la meilleure possible, le groupe socialiste souhaite que les opérateurs fournissent, à l’appui de leur projet, un dossier complet justifiant du choix de l’implantation envisagée.

Ces propositions sont en phase avec un certain nombre de demandes des associations de consommateurs, demandes qui nous semblent totalement légitimes.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est d’un sujet de société dont nous débattons en cette fin de journée.

Tous les Français sont concernés par ce projet de loi, qui suscite parmi eux une attente d’autant plus forte que c’est de leur vie quotidienne dont il est question.

Le texte présenté par le Gouvernement ne me semblait pourtant pas à la hauteur de l’enjeu, puisqu’il ne comportait que dix articles, réunissant vingt-cinq mesures.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Ne soyez pas désagréable !

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

Vingt-cinq mesures, c’était trop peu, et si le Gouvernement avait réellement eu la volonté d’engager la réflexion sur la manière de soutenir une consommation ambitieuse dans notre pays, il aurait présenté son projet de loi dans des délais moins réduits.

En effet, ce texte porte sur des domaines essentiels pour la vie quotidienne des Français : réseaux de distribution alimentaire, logement, communications électroniques, énergie, commerce électronique, respect du droit des consommateurs… Dans ces secteurs, c’est bien une refonte complète de notre législation qui est nécessaire ; quelques mesures isolées ne suffisent pas.

Les députés l’ont bien compris, puisque cinq cents amendements ont été déposés à l’Assemblée nationale. Vous avez reconnu, monsieur le secrétaire d’État, qu’il s’agissait là non pas de créer une situation de blocage, mais bien d’améliorer le texte, qui compte aujourd’hui une quarantaine d’articles supplémentaires.

Nous avons, nous aussi, ajouté notre pierre à l’édifice, avec l’excellent travail du rapporteur et celui de notre groupe. Plus de deux cent dix amendements doivent maintenant être examinés, ce qui prouve qu’il reste encore des améliorations à apporter pour que ce projet de loi constitue un véritable coup de pouce à la consommation des Français. Dans la période que nous traversons, ce ne serait probablement pas inutile !

Nous le savons, la crise touche de plein fouet les ménages. Nous subissons encore les effets sociaux de la crise financière et économique de 2008, qui a profondément modifié les comportements des consommateurs.

Auparavant, l’alimentation était le premier poste de consommation des ménages. Au cours de la dernière décennie, la structure de notre consommation s’est modifiée, ce qui traduit à la fois de nouvelles tendances mais aussi de profondes mutations de notre société.

Le logement constitue aujourd’hui le principal poste de dépenses, puisque les ménages y consacrent près d’un tiers leurs ressources. Au regard des effets sociaux engendrés par la crise, la question du logement est donc particulièrement prégnante et exige de notre part une vigilance accrue.

Cette croissance de la part du logement dans le budget des Français montre que les dépenses « contraintes » augmentent, ce qui exacerbe les tensions sur le pouvoir d’achat. De plus, les charges liées au logement pèsent proportionnellement davantage dans le budget des plus modestes de nos concitoyens.

C’est pourquoi j’ai été, avec d’autres, soucieux d’approfondir les mesures de ce projet de loi portant sur le logement. Nous devons protéger les consommateurs contre les pratiques abusives qui, malheureusement, ne font que se multiplier avec l’avancée de la crise. La tension sur le marché immobilier est telle que certains n’hésitent pas à recourir à des pratiques répréhensibles, qui défavorisent encore davantage les personnes les plus en difficulté.

Je pense par exemple à l’état des lieux, qui est particulièrement propice aux escroqueries. Une nouvelle pratique consiste en effet à effectuer un état des lieux très succinct à l’entrée dans le logement, mais très pointilleux à la sortie, par l’intermédiaire d’une société prestataire. Ainsi, si le locataire n’a pas été vigilant à son entrée dans le logement, il peut se voir facturer toutes sortes de travaux et de réparations qui ne lui incombent pas.

Les agences immobilières n’hésitent pas, en outre, à facturer abusivement ou de manière prohibitive des prestations telles que l’établissement de l’état des lieux, l’envoi de certains documents administratifs ou la rédaction du contrat de bail.

Quant à la location meublée, elle connaît depuis de nombreuses années un franc succès auprès des bailleurs, en raison de son très faible encadrement juridique, ainsi que de son régime fiscal particulièrement attrayant. Cependant, la pratique quotidienne engendre de réelles difficultés pour les locataires, qui se trouvent souvent démunis.

En effet, aucun réel garde-fou n’a été mis en place pour cette forme de location. Cela induit une grande précarité pour les locataires de logement meublé, confrontés à des propriétaires dont certains n’hésitent pas à profiter des lacunes de la loi. J’ai donc souhaité, avec mes collègues, harmoniser le régime de la location meublée avec les principes de la loi du 6 juillet 1989, notamment pour plafonner à deux mois le montant du dépôt de garantie, pour établir la liste des documents qui n’ont pas à être demandés au locataire et pour que soit remise à celui-ci une liste claire et précise des réparations auxquelles il pourrait être tenu.

J’attacherai une importance particulière à ce que les différents amendements allant dans ce sens soient adoptés par le Sénat.

En conclusion, je considère que ce texte profondément remanié – je pense notamment aux dispositions relatives à l’action de groupe – peut nous donner les moyens d’apporter de réelles améliorations dans la vie quotidienne de nos concitoyens, particulièrement en cette période difficile. C’est donc avec satisfaction que nous le voterons, sous réserve de l’adoption de nos amendements. À la veille de Noël, ce serait ma foi un joli cadeau pour tous les Français !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui regroupe, sans véritable cohérence, un ensemble de mesures disparates, d’importance très inégale. On parle souvent de projets de loi « fourre-tout » : en voici un bel exemple !

Se préoccuper des droits des consommateurs est pourtant fort louable. Ce texte, modifié, comporte d’ailleurs un certain nombre d’avancées au bénéfice de nos concitoyens, terme bien plus noble que celui de consommateurs, aujourd’hui entré dans le langage courant mais qui réduit l’être humain à sa fonction économique dans une société de consommation, voire de surconsommation.

N’oublions pas que, selon l’INSEE, plus de 8 millions de personnes dans notre pays, soit 13 % de la population, vivent à la limite ou en dessous du seuil de pauvreté.

À l’avenir, un texte visant à la mise en œuvre d’un nouveau projet de société devra restaurer les droits fondamentaux des citoyennes et des citoyens : droit au logement opposable effectif, droit au travail, droit à la protection sociale, droit à un niveau de vie suffisant, droit à l’éducation, droit à la santé, droit à la culture, droit humain fondamental de vivre dans la dignité, dont sont aujourd’hui privés certains de nos compatriotes. Dans cette perspective, il faudra revenir sur l’accord général sur le commerce des services.

Pour l’heure, j’aborderai deux aspects du présent projet de loi qui me paraissent essentiels : le dispositif d’encadrement des loyers, d’une part, la lutte nécessaire contre le gaspillage et l’obsolescence programmée des biens de consommation, d’autre part.

La situation actuelle du logement en France est particulièrement grave. En effet, 3, 6 millions de ménages sont mal logés ou sans logis, 600 000 enfants étant concernés par ce problème. Ces chiffres sont édifiants ! Le logement, qui doit être un lieu de réconfort, est devenu un facteur de précarisation majeur.

Dans le même temps, nous sommes confrontés à une pénurie de logements, surtout dans les zones dites tendues, ainsi qu’à un coût élevé du logement, problème aggravé par la persistance de la spéculation immobilière. Les loyers, qui ont atteint un sommet historique, doivent être encadrés ; ils ne sauraient augmenter indéfiniment.

Un travail important d’amendement a été réalisé, en commission, sur cette question centrale, dans un esprit que je tiens à saluer. Déterminer des loyers de référence différents selon les secteurs pour les premières locations et les relocations est une bonne chose, mais, quand la situation le réclame, il faut se donner les moyens de faire baisser la pression sur le marché et, pour cela, intervenir sur les niveaux de loyers.

L’intervention publique pourra conduire à une baisse des loyers allant jusqu’à 20 % : c’est l’objet de l’article 2 bis AA du projet de loi. J’aurai l’occasion de revenir, dans la suite de la discussion, sur ce dispositif, ainsi que sur le rééquilibrage des rapports entre bailleur et locataire.

Un autre enjeu essentiel en vue d’un changement de modèle de consommation est la lutte contre l’obsolescence programmée, afin de consommer moins et mieux des biens plus durables.

L’obsolescence programmée est une véritable stratégie de raccourcissement de la durée de vie des produits, notamment électriques et électroniques, mise en œuvre dès la conception de ceux-ci. Dans la suite de nos débats, je détaillerai davantage cette démarche et je présenterai une mesure visant à la combattre. De fait, dans la plupart des cas, les appareils sont jugés obsolètes avant même d’être apportés chez le réparateur ou mis au rebut. Les fabricants conjuguent diverses techniques destinées à rendre les appareils irréparables. Notre proposition vise à faire passer le délai de garantie du constructeur de deux ans à cinq ans.

Notre société occidentale, dite de consommation, a fait son temps. Livrée à la loi du marché, elle a aujourd’hui atteint ses limites, en laissant de côté une fraction grandissante de la population, ce qui est tout à fait inadmissible. Le projet de loi que nous examinons aujourd’hui, s’il a le mérite d’exister, s’apparente à un rafistolage, alors qu’il conviendrait de mettre en œuvre une profonde réforme sociétale.

Je conclurai en évoquant une œuvre de Stéphane Hessel et d’Edgar Morin, Le Chemin de l’espérance : voilà un beau cadeau de Noël ! Dans cet ouvrage, ils osent en appeler à l’ouverture d’une voie politique de salut public. En matière de consommation, ils proposent de créer un office public de la consommation visant à promouvoir l’enseignement de la consommation citoyenne, à veiller à la qualité des produits et à contrôler les publicités.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

« Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit. » Si Lacordaire avait vécu à la fin du xxe siècle ou au début du xxie siècle, il aurait probablement pu ajouter qu’entre le marketing et le consommateur, c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit. Aujourd’hui, nous tentons précisément d’affranchir le consommateur par la loi.

Pour les libéraux, le droit de la consommation est un exercice improbable et compliqué, qui vise à protéger le faible, l’« abusable », tout en assurant la pérennité et le développement sans limite d’un modèle économique fondé sur le consumérisme.

La limite physique et temporelle du droit de la consommation, c’est d’une part l’inventivité du marketing, d’autre part l’extension du champ de la marchandisation, qui a transformé les usagers en clients, et le dogme de l’ouverture à la concurrence, qui a amené non pas, comme on l’avait promis, une baisse des tarifs, mais une multiplication des offres dissimulant habilement la captivité des clients, que la libre concurrence devait précisément affranchir de l’enfermement du monopole.

Monsieur le secrétaire d’État, vous avez parlé de la crise financière mondiale que nous traversons actuellement comme si cette crise n’était pas aussi celle de l’épuisement d’un modèle consumériste, qui repose sur la production d’une profusion de biens de consommation et dont la finalité implicite est de vendre n’importe quoi à n’importe qui, au mépris des besoins des individus et des règles sociales, sanitaires, environnementales et morales les plus élémentaires.

L’économie consumériste est violente, immorale et dangereuse.

Elle est violente, car elle est fondée sur l’illusion de la satisfaction immédiate du désir. Elle crée l’illusion de l’évitement de la frustration, alors que, in fine, elle ne fait qu’aggraver et renforcer celle-ci, engendrant dans nos sociétés des comportements dangereux.

Elle est immorale, car elle bafoue l’autorité parentale. J’ai souvent entendu le Gouvernement et sa majorité prétendre vouloir restaurer l’autorité parentale, en jetant l’opprobre sur les parents défaillants à cet égard. Mais une société qui tolère que, dans les hypermarchés, des produits destinés aux enfants soient présentés autour des caisses, ce qui conduit ces derniers, transformés en prescripteurs de consommation, à harceler leurs parents occupés à faire la queue pour payer leurs achats, n’est pas une société qui renforce l’autorité parentale et qui aime la famille.

Exclamations ironiques sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Une telle société détruit au contraire l’autorité parentale par la consommation.

L’économie consumériste est dangereuse, enfin, car elle est fondée sur la dissimulation, parfois même sur le mensonge, en particulier s’agissant des menaces sanitaires induites par la mise sur le marché de certains produits.

Sur ce plan, je ne peux croire que les fabricants de téléphones mobiles, d’aspartame ou de composants de prothèses mammaires n’aient jamais eu de doutes sur la dangerosité de leurs produits quand ils les ont mis sur le marché ! Ils sont dans la dissimulation ou le déni !

Plusieurs de nos collègues ont évoqué la nécessité de « trouver le juste équilibre », mais les forces en présence sont totalement déséquilibrées. Alors que les industriels et les distributeurs disposent de moyens financiers considérables pour défendre leurs intérêts et considèrent que la conquête de parts de marché ne tolère aucun obstacle, les consommateurs ne peuvent compter que sur le législateur pour poser patiemment des limites, des verrous, des protections.

Bien sûr, la malice des marchés est grande, mais notre confiance dans la loi l’est encore plus. Selon vous, monsieur le secrétaire d’État, si nous interdisions les forfaits illimités, les opérateurs de téléphonie mobile trouveraient sans doute le moyen de contourner une telle interdiction : peut-être, car c’est la force du capitalisme et du marché que de s’adapter à tout instant aux règles nouvelles, mais c’est la force du législateur que de s’adapter sans cesse au marché, non pas pour s’y soumettre, mais pour l’encadrer et le réguler. Le marché a confiance en lui ; ayons confiance en nous : à flexible, flexible et demi !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Je tiens tout d’abord à saluer à mon tour le travail de M. rapporteur. En commission, chacun a pu mesurer sa volonté d’œuvrer de manière constructive. J’ai d’ailleurs fait preuve du même esprit constructif en émettant un avis favorable sur une trentaine des amendements qu’il a présentés. Ils sont de nature, me semble-t-il, à améliorer le texte du Gouvernement, qui a déjà été amendé par l’Assemblée nationale.

S’agissant en particulier du mandat de vente exclusif, cette question n’avait pas été réglée à l’Assemblée nationale, où le rapporteur du texte avait soutenu un amendement visant à supprimer la clause pénale. La solution d’équilibre et de compromis qui a été adoptée à l’unanimité par la commission de l’économie du Sénat permettra de lever les inquiétudes sur une éventuelle remise en cause du mandat exclusif tout en renforçant la transparence quant aux moyens employés par le mandataire pour mener à bien la mission à lui confiée. Le consommateur doit être mieux protégé, car nous savons bien qu’un certain nombre de professionnels utilisaient le mandat exclusif à seule fin de geler le marché à leur profit, sans remplir leur part du contrat.

Par ailleurs, M. le rapporteur, M. Tropeano et Mme Lamure ont mis l’accent sur la question des moyens alloués à la DGCCRF. Cet organisme, comme l’ensemble des services de l’État, a certes vu ses effectifs réduits, mais il n’en est pas moins efficace pour autant, au contraire !

Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Vous devriez réduire encore ses effectifs ! Il serait encore plus efficace !

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Souriez si vous voulez ! Pour ma part, je tiens à rendre hommage aux fonctionnaires de la DGCCRF, qui ont eu à assumer une réorganisation conduite dans le cadre de la RGPP, démarche très critiquée mais qui fera économiser à l’État 15 milliards d’euros à l’horizon 2015.

La réorganisation et la modernisation des compétences de la DGCCRF prévues par ce projet de loi renforceront son efficacité. Au total, 82 % des effectifs de la DGCCRF sont affectés aux enquêtes, cette proportion restant constante par rapport à 2010. Quant aux suites données aux contrôles, elles sont mieux ciblées.

Le remplacement de sanctions pénales par des amendes administratives permettra un gain de temps grâce à l’allégement de la rédaction administrative et à la réduction du temps consacré au suivi des contentieux en liaison avec le parquet.

La sanction du non-respect d’une injonction administrative permettra de diminuer le nombre de procès-verbaux, plus coûteux en temps.

En réduisant le temps consacré par les fonctionnaires aux procédures, on leur permet de concentrer leurs efforts sur les missions qui les passionnent et de répondre ainsi aux attentes des consommateurs. Certains d’entre vous ont peut-être du mal à le comprendre, mais on peut, grâce à une meilleure organisation, être plus efficace avec moins d’effectifs. J’y reviendrai au cours du débat.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Madame Bonnefoy, monsieur Tropeano, à propos de PACITEL, je répète qu’il s’agit de 100 000 emplois localisés en France, et non en Tunisie ou ailleurs. Il ne serait donc pas raisonnable, dans la situation actuelle, de faire peser une menace, pour des raisons d’affichage, sur un dispositif qui fonctionne et de mettre en péril 100 000 emplois dans notre pays. Vous m’avez invité à réaliser l’étude d’impact du dispositif que vous présentez, madame Bonnefoy, mais ce n’est pas à moi que cette tâche incombe ! J’ai fait réaliser les études d’impact de mes propositions, faites-en autant pour les vôtres : cela me semble être de bonne politique !

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Vous disposez de collaborateurs en mesure de faire ce travail. Quoi qu’il en soit, votre proposition n’est pas raisonnable et je m’y opposerai avec la plus grande énergie. Sacrifier des emplois n’est pas acceptable dans la situation que nous connaissons.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Le dispositif PACITEL, dont chacun sait l’efficacité, protège les consommateurs. On peut vouloir encore l’améliorer, mais il convient de sauvegarder l’emploi.

Madame Didier, j’ai noté que vous souhaitiez étendre le champ de l’action de groupe. Étant opposé à cette dernière, je ne pourrai évidemment qu’être défavorable à votre amendement tendant à cette fin.

Cela étant, nous avons des points d’accord sur d’autres sujets, notamment celui du logement. Ainsi, vous aviez salué, en commission, l’action de la Confédération nationale du logement : j’ai œuvré avec beaucoup de détermination, en lien avec la DGCCRF, pour que cette association de défense des consommateurs qui, pour un certain nombre de raisons, avait conclu des partenariats ne respectant pas la législation, puisse conserver son agrément. La CNL pourra donc poursuivre son action, qui est reconnue dans tout le pays.

En matière de logement, le Gouvernement est bien entendu parfaitement ouvert à l’idée de protéger les locataires et les acteurs qui leur viennent en aide : c’est un objectif d’intérêt général. Il faut toutefois respecter un équilibre entre les intérêts des locataires et ceux des bailleurs, sauf à mettre en péril l’offre de logement en décourageant l’investissement locatif. Or la mise en œuvre d’un encadrement des loyers romprait cet équilibre, comme l’avait d’ailleurs très bien compris Lionel Jospin en son temps.

Je tiens à saluer l’intervention de Gérard Cornu, qui a été le rapporteur de nombreux textes relatifs à la consommation et a beaucoup travaillé au côté de M. le rapporteur à l’examen du présent projet de loi. La réflexion constructive qu’il a menée avec la commission de l’économie a débouché sur des améliorations, même s’il a pu regretter l’adoption d’amendements dont l’inspiration est très éloignée des principes que nous défendons. Je ne doute pas que, au cours de la discussion des articles, nous pourrons revenir à des positions plus raisonnables.

Monsieur Dubois, je me félicite de ce que nous ayons pu trouver un certain nombre de terrains d’entente, notamment pour ce qui concerne, dans le secteur de la téléphonie mobile, l’amélioration de la transparence et de l’information des consommateurs et le renforcement de la concurrence, grâce en particulier à l’arrivée prochaine d’un nouvel opérateur. Ces évolutions contribuent activement à faire baisser les prix de la téléphonie mobile, devenue un outil indispensable.

En revanche, je ne partage pas votre point de vue au sujet du simlockage, c’est-à-dire du verrouillage du téléphone. Nous aurons l’occasion d’y revenir. Le projet de loi prévoit de ramener de six à trois mois la durée de ce verrouillage. Cette proposition, que la commission de l’économie a rejetée, me semble pourtant raisonnable et propre à assurer un équilibre satisfaisant entre les intérêts des consommateurs et la nécessité de lutter contre la fraude et le vol. Remettre en cause cet équilibre se retournerait contre les consommateurs.

En ce qui concerne le fichier positif, Mme Létard connaît bien cette question pour avoir siégé dans des commissions de surendettement de son département du Nord, l’un des plus touchés par ce phénomène. Ceux qui travaillent quotidiennement sur les dossiers de surendettement nous disent que les crédits souscrits sont la cause du surendettement dans 1 % des cas seulement. Dans tous les autres, les difficultés résultent d’un accident de la vie, par exemple un divorce ou une perte d’emploi. L’existence d’un fichier positif n’apporterait aucune solution dans de tels cas, puisque les personnes concernées étaient parfaitement en mesure de faire face au remboursement de leur crédit au moment où elles l’ont souscrit.

La question du surendettement doit faire l’objet d’un examen approfondi sous tous ses aspects, et pas seulement celui des libertés publiques. Pour ma part, je réfléchis depuis longtemps à la mise en place du fichier positif. Le Gouvernement n’ayant pas voulu recourir à la procédure accélérée pour l’examen de ce projet de loi, nous aurons le temps d’étudier en profondeur cette question importante. Le groupe socialiste-EELV a proposé tout à l’heure la création d’un groupe de travail à cette fin ; une telle initiative est bienvenue, à l’instar de celle qu’ont prise les présidents des commissions des lois et des affaires économiques de l’Assemblée nationale.

Monsieur Bérit-Débat, je vous remercie d’avoir pris acte des avancées permises par le projet de loi.

L’amendement que vous avez déposé au sujet de la réglementation des publicités en matière de vente d’or ne me paraît pas nécessaire, car il est déjà satisfait par une disposition du code de la consommation.

Toutefois, je suis conscient que la réglementation en matière de ventes d’or doit être renforcée. C’est pourquoi j’ai installé le 12 décembre dernier un groupe de travail au sein duquel l’ensemble des professionnels du secteur sont représentés. Je suis convaincu que nous pouvons améliorer le dispositif prévu par le projet de loi.

Mme Lamure a soulevé la question des délais de paiement. Leur réduction représentait un enjeu majeur avant l’adoption de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, la LME.

Je rappelle que certains secteurs ont bénéficié d’accords dérogatoires afin de leur permettre de s’adapter de manière progressive à l’évolution de la législation. La sortie de ces accords dérogatoires, fixée au 1er janvier 2012, était un point important aux yeux du Gouvernement. M. Lorenzi en a fait un sujet central du rapport de l’Observatoire des délais de paiement remis en avril 2011. Tous les secteurs qui participent aux travaux de cet organisme, en particulier celui du bâtiment, ont entériné le principe de la fin des dérogations à compter du 1er janvier prochain.

Dans son rapport, l’Observatoire des délais de paiement a toutefois recommandé au Gouvernement de prévoir des mesures d’accompagnement, notamment en développant des outils financiers appropriés et en assurant la promotion des bonnes pratiques. J’ai travaillé avec OSÉO pour que ces outils puissent être opérationnels dès le 1er janvier prochain.

Certains secteurs économiques exposés à une saisonnalité marquée de l’activité, comme ceux du jouet ou de la jardinerie, souhaitent pouvoir disposer de davantage de temps pour s’adapter aux nouvelles règles, mais la proposition de loi relative à la simplification du droit et à l’allègement des charges administratives semble plus adaptée pour ce faire que le présent projet de loi. C’est donc à bon droit que la commission a supprimé les dispositions tendant à cette fin.

À l’inverse, certains secteurs, notamment celui du bâtiment, ont exprimé le souhait que les délais de paiement de leurs clients soient plus fortement encadrés, y compris pour le règlement des acomptes.

S’il n’est pas envisageable de rouvrir l’ensemble de ce débat, je veux vous assurer de ma détermination à renforcer les contrôles menés par la DGCCRF. En 2012, celle-ci procédera à environ 1 500 contrôles d’entreprises de tout type pour vérifier qu’il n’y a pas d’abus. Il est tout à fait possible, madame Lamure, de limiter à trente jours les délais de paiement pour les clients par la voie contractuelle.

Il va de soi que ces contrôles de la DGCCRF ne viseront pas des entreprises appartenant à des secteurs qui seraient en train de négocier un accord tendant à prolonger la phase d’adaptation aux dispositions de la LME. Je souhaite en outre que, dans la majeure partie des cas, ces contrôles aient une vocation éducative.

Enfin, j’indique à M. Teston que le dispositif d’alerte et de blocage systématique dont il appelle de ses vœux la mise en place apparaît de nature à renforcer la protection des consommateurs. Je serai donc favorable à son amendement.

Je souhaite que nous abordions la discussion des articles dans l’esprit constructif qui a présidé aux travaux de l’Assemblée nationale et à ceux de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire du Sénat : il y va de l’intérêt de nos compatriotes !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et sur certaines travées de l’UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

Chapitre Ier

Mesures visant à instaurer plus de concurrence sectorielle au service des consommateurs dans divers secteurs de la consommation courante

I. – Le livre III du code de commerce est complété par un titre IV ainsi rédigé :

« TITRE IV

« DES RÉSEAUX DE DISTRIBUTION ALIMENTAIRE

« Art. L. 340-1. – I. – Une convention d’affiliation est un contrat, conclu entre, d’une part, une personne physique ou une personne morale de droit privé regroupant des commerçants, autre que celles mentionnées aux chapitres V et VI du titre II du livre Ier, ou mettant à disposition les services mentionnés au premier alinéa de l’article L. 330-3 et, d’autre part, toute personne exploitant pour son compte ou pour le compte d’un tiers au moins un magasin de commerce alimentaire de détail au sens de l’article L. 340-2. Conclue en sus de tout autre contrat pouvant exister par ailleurs entre les parties, elle comprend des clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice par cet exploitant de son activité de commerçant.

« Lorsqu'une convention d’affiliation est obligatoire en application du premier alinéa de l'article L. 340-2 :

« – toute stipulation comprise dans un contrat conclu entre les deux parties faisant obstacle à la mise en jeu des stipulations énoncées par ladite convention est réputée non écrite ;

« – il ne peut être dérogé par voie contractuelle à ses stipulations que par modification de cette même convention.

« II. – La convention d’affiliation prend la forme d’un document unique. Les stipulations applicables du fait de l’affiliation y sont regroupées selon des rubriques définies par un décret pris après avis de l’Autorité de la concurrence.

« Le projet de convention est remis à l’exploitant au moins deux mois avant sa signature, à peine de nullité de la convention d’affiliation.

« La convention naît de la signature du projet de convention par les deux parties.

« III. – La convention d’affiliation fixe notamment :

« 1° Les conditions de l’affiliation et de la participation au groupement ;

« 2° Les conditions d’utilisation des services commerciaux apportés à l’exploitant, en particulier des services d’approvisionnement et d’usage des marques et enseignes ;

« 3° Le fonctionnement du réseau ;

« 4° Les conditions de renouvellement, cession et résiliation des contrats régissant les relations commerciales découlant de l’affiliation ;

« 5° Les obligations applicables après rupture des relations d’affiliation.

« La durée de chacun de ces engagements doit être précisée dans la convention d’affiliation. Le terme final de cette convention est expressément précisé.

« Cette convention s’applique sous réserve des règles statutaires et décisions collectives adoptées conformément aux lois relatives aux associations, aux sociétés civiles, commerciales ou coopératives. Ces règles statutaires ne peuvent toutefois faire obstacle aux dispositions du présent article et des articles L. 340-2 à L. 340-6.

« Art. L. 340 -2. (Non modifié) – La convention d’affiliation définie à l’article L. 340-1 est obligatoire lorsque l’exploitant gère au moins un magasin exerçant une activité de commerce de détail non spécialisé en libre service et dont le chiffre d’affaires hors taxes, hors carburant, provient pour plus du tiers de la vente de produits alimentaires.

« Un décret, pris après avis de l’Autorité de la concurrence, définit, en tant que de besoin, les secteurs d’activité pour lesquels et les seuils de surface et de chiffre d’affaires en deçà desquels il peut être dérogé à cette obligation.

« Art. L. 340-3. – I. – Les conventions d’affiliation dont la signature est obligatoire en application du premier alinéa de l’article L. 340-2 ne peuvent être conclues pour une durée supérieure à six ans.

« Ces conventions ne peuvent être renouvelées par tacite reconduction.

« Lorsque l’une des parties n’entend pas renouveler la convention d’affiliation obligatoire au terme de celle-ci, elle doit en informer l’autre partie en respectant un délai de préavis. Ce délai est fixé à proportion de la durée de la convention d’affiliation à raison d’un mois par année d’affiliation et ne peut être supérieur à six mois.

« II. – À l’exception du contrat de bail commercial, dont la durée est régie par l’article L. 145-4 et sans préjudice des obligations mentionnées au 5° du III de l'article L. 340-1, aucun contrat, conclu dans le cadre de la convention d’affiliation, ne peut produire d’effets au-delà du terme final mentionné à l’avant-dernier alinéa du III de l’article L. 340-1.

« Art. L. 340 -4. – Lorsqu’une convention d’affiliation prévoit le versement de sommes constituant une condition préalable à l’établissement ou au renouvellement de la relation commerciale, le document unique mentionne la possibilité d’acquitter ces sommes soit en totalité au moment de la signature du contrat, soit en plusieurs versements, les versements dus au titre de la dernière année ne pouvant excéder 20 % du total de ces sommes. En cas de non-respect du présent article, les sommes dues à ce titre ne sont, d’ordre public, exigibles que dans la limite de 10 % par an de leur montant nominal initial, tel qu’il figure dans la convention d’affiliation.

« Art. L. 340 -5. – I. – Toute clause ayant pour effet, après l’échéance ou la résiliation d’une convention d’affiliation, de restreindre la liberté d’exercice de l’activité commerciale de l’exploitant qui a précédemment souscrit cette convention d’affiliation dans les conditions prévues à l’article L. 340-1 est réputée non écrite.

« II. – Ne sont pas soumises au I les clauses dont la personne qui s’en prévaut démontre qu’elles remplissent les conditions cumulatives suivantes :

« 1° Elles concernent des biens et services en concurrence avec ceux objets de la convention d’affiliation ;

« 2° Elles sont limitées aux terrains et locaux à partir desquels l’exploitant exerce son activité pendant la durée de la convention d’affiliation ;

« 3° Elles sont indispensables à la protection du savoir-faire substantiel, spécifique et secret transmis dans le cadre de la convention d’affiliation ;

« 4° Elles n’excèdent pas un an après l’échéance ou la résiliation de la convention d’affiliation.

« Art. L. 340-6. – Dans les contrats relatifs à l’achat ou la vente d’un bien immeuble ou d’un fond de commerce dont l’une des parties exploite un commerce de détail visé au premier alinéa de l'article L. 340-2, est réputée non écrite toute stipulation prévoyant :

« 1° Un droit de préemption ou de préférence portant sur le rachat du bien immeuble ou du fonds de commerce objet de la vente au bénéfice du vendeur, d’une société qui contrôle ou qui est contrôlée par le vendeur, ou d’un tiers qui est en relation contractuelle avec le vendeur ;

« 2° Une limitation de l’exercice de l’activité d’exploitation du commerce de détail dans le bien immeuble objet de l’achat ou de la vente s’ajoutant à celles mentionnées le cas échéant dans le bail ou dans la convention d’affiliation définie à l’article L. 340-1. »

II. – Le présent article s’applique aux contrats conclus à compter d'un an après l'entrée en vigueur de la présente loi.

Les contrats établissant une relation d’affiliation entrant dans le champ visé au premier alinéa de l’article L. 340-2 du code de commerce conclus antérieurement au délai visé au premier alinéa du présent II sont remplacés, dans un délai de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, par une convention d’affiliation et, le cas échéant, par des contrats subséquents à cette convention, conclus dans les conditions fixées par le présent article.

Passé le délai de trois ans visé à l’alinéa précédent, à défaut de conclusion, dans le respect des règles fixées aux articles L. 340-1 à L. 340-6 du même code, d’une convention d’affiliation, chaque partie peut mettre fin à une relation d’affiliation entrant dans le champ d’application du I de l’article L. 340-2, sans que lui soient opposables les accords, clauses ou contrats antérieurement conclus. Cette résiliation intervient à l’expiration d'un délai de deux mois compté de la notification à l’autre partie de la nécessité de se mettre en conformité avec les dispositions du présent article.

Pour les contrats visés à l’article L. 340-6 du même code conclus antérieurement au délai visé au premier alinéa du présent II, les dispositions dudit article s'appliquent dans un délai de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Comme l’a indiqué M. Fauconnier dans son rapport, l’intensification de la concurrence est certes un levier d’action qu’il ne faut pas négliger dans la lutte contre la vie chère. Toutefois, cela reste insuffisant.

L’article 1er du projet de loi, comme toutes les réformes économiques menées au cours de ces cinq dernières années, se fonde sur l’idée que l’accroissement de la concurrence entraîne la baisse des prix, donc la hausse du pouvoir d’achat.

Je ne dis pas que cette démarche est absurde, mais elle n’est pas le remède à toutes les difficultés, loin de là.

Force est d’ailleurs de constater que les lois récemment adoptées – la LME, la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche ou la loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation – n’ont pas produit les effets annoncés…

À lui seul, le renforcement de la concurrence ne suffit donc pas à faire progresser le pouvoir d’achat.

On peut en outre s’interroger sur certaines mesures du présent projet de loi, au moment où l’on constate un net affaiblissement des moyens de la DGCCRF.

Je salue cependant la volonté du rapporteur de la commission de l’économie et de la rapporteure pour avis de la commission des lois d’enrichir le projet de loi en vue de faire baisser les dépenses contraintes liées au logement, à l’énergie ou à la téléphonie mobile.

De la même manière, je me réjouis de l’introduction par la rapporteure pour avis de la commission des lois de mesures visant à renforcer les droits des consommateurs par l’instauration d’un dispositif rendant possibles les actions de groupe.

Cela étant, si le levier de la concurrence n’est pas un outil universel – il s’avère même plutôt fragile –, il ne faut pourtant pas le négliger. C’est pourquoi j’apprécie, monsieur le rapporteur, que vous vous soyez appuyé, dans votre analyse de l’article 1er, sur les recommandations de l’Autorité de la concurrence.

Qui n’a constaté une forte dégradation du pouvoir d’achat ces dernières années ? La loi du 1er juillet 1996 sur la loyauté et l’équilibre des relations commerciales, dite loi Galand, la loi du 1er août 2003 pour l’initiative économique, dite loi Dutreil, la loi du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, dite loi Châtel, et la LME n’y ont rien changé : la baisse des prix a toujours été remise à plus tard…

Reconnaissons que le pouvoir d’achat dépend des prix, mais aussi et surtout des revenus. Or c’est également là que le bât blesse ! Autrement dit, l’augmentation du pouvoir d’achat ne repose pas uniquement sur la baisse des prix ; elle suppose surtout une meilleure répartition des richesses ! §À ce sujet, monsieur le secrétaire d’État, je vous renvoie aux propos qu’a récemment tenus Martin Hirsch.

En commission, nous avons soutenu, monsieur le rapporteur, votre volonté de prendre en compte, dans cet article 1er, les préconisations de l’Autorité de la concurrence. Celle-ci avait constaté, dans un avis rendu en 2010, que les contrats d’affiliation auxquels la grande distribution a recours pour empêcher les commerces affiliés de changer d’enseigne étaient fort complexes et, surtout, très opaques. Ils représentent un frein à la concurrence, qui devrait donc maintenant disparaître.

Les clauses d’arbitrage figurant dans certains contrats, qui rendent le règlement des litiges avec les enseignes trop coûteux pour les commerçants indépendants, constituaient un autre problème à résoudre.

Il convenait également de régler la question de la durée des conventions d’affiliation, qui, par le passé, pouvaient être conclues pour trente ans. C’est peu dire qu’une telle durée était excessive, d’autant que ces conventions faisaient l’objet d’une tacite reconduction. Nous approuvons donc la proposition de retenir une durée de six ans, qui correspond à celle des baux commerciaux. Nous approuvons aussi l’interdiction de la tacite reconduction, qui constitue un frein au changement d’enseigne.

La mise en application du dispositif de l’article 1er doit intervenir dans un délai d’un an pour les nouveaux contrats et de trois ans pour les contrats en cours.

En conclusion, cet article est bienvenu. Il tend à créer un nouveau titre dans le code du commerce, relatif aux conventions d’affiliation entre un commerçant indépendant et un réseau de distribution, et à lever ainsi les obstacles à la mobilité que l’on pouvait constater.

Le travail en commission a été bénéfique, même si le présent texte peut encore être bonifié par l’adoption d’amendements.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à Mme Évelyne Didier, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’article 1er, relatif aux conventions d’affiliation, semble presque hors sujet dans un texte portant sur la protection des consommateurs, sauf à considérer, comme le fait le Gouvernement, que la concurrence libre et non faussée peut avoir un effet de modération des prix. Nous ne partageons pas cette thèse… Il suffit d’ailleurs de lire le rapport de notre collègue Élisabeth Lamure sur le bilan de l’application de la loi LME pour se convaincre qu’il n’en est rien.

On se souvient également que l’UFC-Que Choisir avait indiqué, dans un communiqué datant du 19 février 2009, que les prix alimentaires avaient augmenté de 5, 7 % au cours des dix-huit derniers mois et que, en dépit de la chute des prix agricoles constatée depuis dix mois, les prix pratiqués en rayons étaient stables.

Devant ce constat de l’échec relatif du jeu de la concurrence, devant l’incapacité des législations successives à réguler les relations commerciales, à protéger les producteurs et les consommateurs, à garantir un revenu décent aux agriculteurs, à préserver les commerces de proximité, à protéger le pouvoir d’achat des consommateurs, vous comprendrez que nous soyons pour le moins dubitatifs quant à un éventuel effet positif de la mise en œuvre de l’article 1er du présent projet de loi sur le niveau des prix.

Outre que nous ne croyons pas que la concurrence entre enseignes soit une réponse suffisante à la question de la baisse du pouvoir d’achat, nous avons de surcroît constaté une certaine réticence des députés de la majorité à se conformer strictement aux recommandations pourtant très claires de l’Autorité de la concurrence. Le rapporteur du présent texte a proposé à la commission des affaires économiques quatre amendements visant à récrire l’article 1er afin de rapprocher le plus possible son dispositif de l’avis émis par l’Autorité de la concurrence. Cette démarche nous semble logique si l’on veut éviter que cet article n’ait d’autre portée qu’un simple affichage.

Au-delà de l’opposition de fond que je viens d’exprimer, je voudrais faire deux remarques.

Tout d’abord, si l’on veut réellement faciliter les changements d’enseigne, il faudra régler la question de l’encadrement des prises de participation des groupes dans le capital des sociétés d’exploitation de leurs magasins affiliés, qui leur confèrent, on le sait, une minorité de blocage.

Ensuite, sur un certain nombre de points, l’article 1er nous semble manquer de clarté.

En premier lieu, son alinéa 10 prévoit que « la convention naît de la signature du projet de convention par les deux parties ». Cela signifie que la signature du document engage immédiatement l’affilié, ce qui limite considérablement la portée de l’allongement du délai de réflexion. Cette disposition nous semble constituer une régression par rapport à l’article L. 330-3 du code de commerce, qui prévoit que la remise du document d’information précontractuel contenant le contrat d’affiliation ne peut valoir signature du contrat d’affiliation lui-même, donc engagement.

En deuxième lieu, l’alinéa 18 prévoit que le contrat d’affiliation « s’applique sous réserve des règles statutaires et décisions collectives adoptées conformément aux lois relatives aux associations, aux sociétés civiles, commerciales ou coopératives » ! Cela signifie que les groupes d’indépendants organisés sous forme associative, de coopérative ou de société civile ou commerciale pourront déroger à la loi ou s’en affranchir… Est-ce à dire, monsieur le secrétaire d’État, que les trois réseaux de distribution organisés sous ces formes, à savoir Intermarché, Système U et Leclerc, pourront édicter en interne des règles contrevenant à la loi ? On nous a fait remarquer, à juste titre, que si les affiliés de ces trois groupes ne bénéficiaient pas des dispositions de la loi, ils seraient discriminés par rapport aux affiliés des groupes Carrefour, Auchan et Casino, qui eux en bénéficieront. La seule « contrainte » qui continuera de peser sur Intermarché, Système U et Leclerc sera de respecter les articles L. 340-4, L. 340-5 et L. 340-6 du code de commerce, qui traitent de la durée des contrats, de la non-concurrence et du paiement des droits d’entrée. C’est bien peu !

En troisième lieu, s’agissant des dérogations aux clauses de non-concurrence post-contractuelles, il ressort des alinéas 26 à 30 de l’article 1er que l’affiliant aura l’obligation de prouver que les quatre conditions cumulatives lui permettant de rendre opposable à l’affilié une clause de non-concurrence post-contractuelle sont effectivement remplies. On comprend bien que l’affiliant ne sera pas mis en difficulté à propos des conditions de temps, de lieux d’activité ou de type de biens et services vendus ; en réalité, seule la condition de protection du savoir-faire pourra amener une limitation des dérogations à la qualification de clause abusive.

Pour conclure, l’article 1er de ce projet de loi ne nous semble pas constituer un dispositif de nature à empêcher les puissants groupes de la grande distribution d’entraver les changements de réseau en fin de contrat d’affiliation. J’en veux d’ailleurs pour preuve le fait que, depuis un certain temps, nous ne les entendons plus !

Nous ne parviendrons pas à apporter une réponse satisfaisante à la domination, sur les marchés français et européen, des grandes centrales d’achat si ce système persiste. Il est temps de concevoir d’autres formes de commerce et d’échange, qui garantiraient à la fois une juste rémunération du travail, des prix abordables pour les consommateurs et la qualité des produits.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Mes chers collègues, plus de deux cents amendements ont été déposés sur ce projet de loi. Ce nombre imposant est sans doute à la mesure de l’intérêt que vous portez à ce dernier, mais nous n’avons a priori pas l’intention de consacrer la soirée du réveillon à son examen ! Par conséquent, je demande à chacun d’être concis dans ses interventions, afin que nous puissions achever la discussion du texte au plus tard dans la nuit de jeudi.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L'amendement n° 164 rectifié, présenté par MM. Lasserre et Dubois, Mme Létard et MM. Deneux, Capo-Canellas, Maurey, Merceron et Tandonnet, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Toute clause compromissoire figurant dans la convention et visant à soumettre obligatoirement à l'arbitrage les litiges nés de son exécution est réputée non écrite. »

La parole est à M. Jean-Jacques Lasserre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lasserre

De très nombreux contrats de franchise prévoient le recours obligatoire à l'arbitrage pour le règlement des conflits entre franchiseur et franchisés. La clause d’arbitrage, inspirée par des modèles de contrats de franchise internationaux, s’est ainsi généralisée pour les contrats de franchise, alors même qu’elle apparaît inadaptée et surdimensionnée pour les réseaux franco-français.

En effet, la procédure arbitrale contractuelle se révèle, dans les faits, trop onéreuse à mettre en œuvre, les honoraires des arbitres se chiffrant à plusieurs dizaines de milliers d’euros et la clause d’arbitrage prévoyant souvent que ces frais doivent être avancés par le demandeur à l’action.

En outre, la procédure arbitrale est très lourde et contraignante, qu’il s’agisse du choix de l’arbitre, des délais de mise en œuvre ou de la multiplication des recours en annulation des conventions d'arbitrage.

De surcroît, le recours contraint à l'arbitrage limite, voire empêche, l'accès aux juridictions compétentes. Il s’agit pourtant d’un droit fondamental et protégé par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Cet amendement vise à interdire les clauses soumettant obligatoirement à l’arbitrage les litiges relatifs à l’exécution de la convention d’affiliation.

L’Autorité de la concurrence a souligné, dans son avis, que les ruptures anticipées de contrat entre têtes de réseau et magasins indépendants donnent lieu à des procédures contentieuses coûteuses, notamment lorsqu’est prévue une clause d’arbitrage.

Il paraît préférable de laisser aux parties le choix, en cas de litige, de recourir ou non à l’arbitrage. En conséquence, l'avis de la commission est favorable.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

La série d’amendements adoptés par la commission de l’économie a rompu l’équilibre qui avait été trouvé à la suite de longues discussions. Le dispositif, dans sa rédaction actuelle, menace le modèle économique des indépendants. L’adoption du présent amendement aggraverait encore les choses.

J’observerai d’abord que la loi de modernisation de l’économie a introduit la notion de déséquilibre significatif.

Ensuite, le dispositif de cet amendement porte fortement atteinte à la liberté contractuelle. Il paraît impossible d’interdire le recours à une procédure d’arbitrage.

Enfin, je souligne que l’arbitrage permet bien souvent une résolution rapide des litiges, ce qui évite un recours parfois inutile aux tribunaux. Il me semble que personne ici n’a envie d’allonger encore les délais nécessaires pour obtenir réparation, ni d’alourdir le travail de la justice.

Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je voterai cet amendement, qui vise non pas à interdire le recours à l’arbitrage, mais simplement à prohiber qu’il soit rendu obligatoire dans les contrats. Les cocontractants doivent à mon sens pouvoir choisir librement soit de recourir à un arbitrage – nous en avons eu des exemples flamboyants récemment ! –, soit de saisir les tribunaux.

En matière d’équilibre, j’ajoute que la centrale sera sans doute plus à même que le franchisé de choisir un « bon » arbitre… En tout cas, il faut faire confiance à nos tribunaux et à la liberté contractuelle.

L'amendement est adopté.

L'article 1 er est adopté.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L'amendement n° 15 rectifié, présenté par M. Doublet, Mme Lamure et MM. Laurent, Belot, Buffet, Revet et Bécot, est ainsi libellé :

Après l'article 1er bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 111-21 du code de la construction et de l'habitation, il est inséré un article L. 111-21-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 111-21-1. - Le maître de l'ouvrage qui conclut un marché de travaux privé visé au 3° de l’article 1779 du code civil doit payer chaque mois les travaux exécutés par l’entrepreneur sur la base des demandes de paiement mensuelles présentées par ce dernier conformément aux dispositions contractuelles.

« Les délais de paiement convenus pour les acomptes mensuels et le solde ne peuvent en aucun cas dépasser trente jours à compter de l’émission de chaque demande de paiement. Ce délai maximal de paiement ne s’applique pas à l’acompte à la commande, lequel est payé selon les modalités prévues au marché.

« En cas de retard de paiement, l’entrepreneur a le droit de suspendre l’exécution des travaux quinze jours après une mise en demeure de payer restée infructueuse. En outre, les retards de paiement ouvrent droit pour l’entrepreneur au paiement des intérêts moratoires sans qu’un rappel soit nécessaire ; le taux des intérêts moratoires est le taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de dix points de pourcentage.

« Sont nuls et de nul effet, quelle qu'en soit la forme, les clauses, stipulations et arrangements qui auraient pour effet de faire échec aux dispositions du présent article.

« Ces dispositions sont applicables aux contrats de sous-traitance régis par la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance.

« Ces dispositions ne s’appliquent pas aux contrats de construction de maisons individuelles régis par les articles L. 230-1 et suivants. »

La parole est à Mme Élisabeth Lamure.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Cet amendement a trait aux délais de paiement dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. Il tend à imposer au maître d'ouvrage de payer l’entrepreneur au fur et à mesure de l’exécution des travaux, et ce dans un délai de trente jours.

L’amendement vise également à organiser la sanction des retards de paiement, en donnant expressément à l’entrepreneur le droit de suspendre l’exécution de ses travaux après une mise en demeure de payer restée infructueuse pendant un délai de quinze jours.

Il a enfin pour objet de rendre ces dispositions applicables aux contrats de sous-traitance, en excluant toutefois de leur champ les contrats de construction de maisons individuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Même s’il renvoie à une réelle préoccupation, cet amendement n’a pas de lien direct avec l’objet du texte, à savoir la protection des consommateurs, puisqu’il a trait au paiement des entrepreneurs.

Par ailleurs, son adoption nécessiterait une concertation approfondie avec les entrepreneurs du bâtiment et les maîtres d’ouvrage : il faudrait notamment s’assurer que le délai prévu est suffisant pour permettre au maître d’ouvrage de vérifier l’état d’avancement du chantier, la qualité des travaux et la détermination des montants dus.

Voilà pourquoi la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Le Gouvernement est lui aussi défavorable à cet amendement, d’autant que, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, une proposition de loi relative à la simplification du droit traitant justement de ces questions de délais de paiement sera bientôt soumise à la Haute Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Je veux bien que cet amendement soit de nouveau présenté lors de la discussion de la proposition de loi Warsmann, mais sera-t-il alors accepté ? Il s’agit simplement de permettre un aménagement en faveur du secteur du BTP, d’autant que la période dérogatoire se termine le 31 décembre 2011.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Cela ne changera rien, puisque cette loi ne sera pas adoptée avant cette date !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’amendement n° 15 rectifié est retiré.

L'amendement n° 16, présenté par M. Laurent, Mme Lamure et MM. Doublet, Belot et Milon, est ainsi libellé :

Après l'article 1er bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 443-1 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le 3° est complété par les mots : « à l’exception de ceux visés au 4° du présent article » ;

2° Le 4° est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il en est de même des eaux-de-vie soumises aux droits de consommation et régies par des accords interprofessionnels. »

La parole est à Mme Élisabeth Lamure.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Il s’agit de permettre aux professionnels du secteur des eaux-de-vie, qui se sont engagés dans une démarche interprofessionnelle impliquant toute la filière, d’être soumis au droit commun en matière de délais de paiement, quel que soit le produit.

En effet, la réglementation actuelle est plus restrictive, puisque les délais de paiement applicables aux boissons alcooliques passibles des droits de consommation doivent être inférieurs à trente jours après la fin du mois de livraison.

Cette disposition vise à encourager le maintien, voire le développement, des structures interprofessionnelles du secteur vitivinicole, afin qu’elles puissent contribuer à une meilleure gestion du marché.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Pour les mêmes raisons qu’à propos de l’amendement précédent, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Cet amendement pourra-t-il lui aussi être représenté lors de la discussion de la proposition de loi Warsmann ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Madame Lamure, adopter ou non cet amendement aujourd’hui ne changera rien au calendrier, car ce texte ne sera pas adopté définitivement avant le 31 décembre.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Dans ces conditions, je retire l’amendement, monsieur le président.

L’article L. 462-3 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est précédé de la mention : « I. – » ;

1° bis §(nouveau) À la première phrase du premier alinéa, les références : « 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne » sont remplacées par les références : « 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne » ;

2° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’avis de l’Autorité peut être accompagné de toutes pièces du dossier concernant les pratiques mentionnées au premier alinéa, à l’exclusion des pièces élaborées ou recueillies au titre du IV de l’article L. 464-2. » ;

« II. – L’Autorité peut être invitée par les juridictions à les éclairer sur toute question relative aux pratiques anticoncurrentielles définies aux articles L. 420-1, L. 420-2 et L. 420-5 ainsi qu'aux articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. »

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L'amendement n° 5, présenté par M. Hyest, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Les comparaisons habiles faites entre l’Autorité de la concurrence et l’Autorité des marchés financiers ne me paraissent pas complètement pertinentes, les cas n’étant pas les mêmes et l’AMF pouvant être appelée à déposer des conclusions. Le code de commerce pose des règles qui me paraissent suffisantes : pourquoi en rajouter, au risque de créer progressivement un droit tout à fait artificiel, très éloigné du droit civil ?

Il me semble extrêmement dangereux de se lancer dans de telles innovations juridiques, qui ne présentent pas toutes les garanties nécessaires en matière de litiges. Le dispositif actuel, qui permet la consultation de l’Autorité de la concurrence, est à mon sens largement suffisant.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

L’article 1er bis crée une procédure d’amicus curiae pour l’Autorité de la concurrence, pouvant être mise en œuvre à la demande d’une juridiction souhaitant être éclairée sur une question générale de droit de la concurrence et de pratiques anticoncurrentielles. Elle complétera la possibilité déjà existante, pour une juridiction, de demander un avis à l’Autorité de la concurrence sur un dossier particulier.

Cette procédure est prévue pour l’Autorité des marchés financiers et fonctionne de manière satisfaisante, sans qu’il y ait motif de s’en plaindre. Elle existe donc déjà dans notre droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Elle ne peut, en outre, être utilisée qu’à la demande expresse d’une juridiction, et non sur l’initiative de la seule autorité.

Cette nouvelle procédure ne doit pas être une source d’inquiétude pour les entreprises. Elles pourront en tout état de cause faire valoir devant le juge leur point de vue sur les éléments d’éclairage apportés par l’Autorité de la concurrence.

Les droits de la défense sont donc parfaitement respectés, et il n’y a aucune raison de douter du sérieux de l’Autorité de la concurrence.

Je demande à notre collègue Jean-Jacques Hyest de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Ce qui est certain, c’est que la situation actuelle est extrêmement complexe. Tout ce qui peut tendre à une simplification me séduit donc a priori, mais j’entends l’argument de Jean-Jacques Hyest selon lequel il ne s’agit pas exactement du même dispositif que pour l’AMF.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Je m’en remets à la sagesse du Sénat sur cette question.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.

L'article 1 er bis est adopté.

L’article L. 462-7 du code de commerce est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Le délai mentionné au troisième alinéa est suspendu :

« 1° Lorsque l’ordonnance délivrée en application de l’article L. 450-4 fait l’objet d’un appel ou lorsque le déroulement des opérations mentionnées au même article fait l’objet d’un recours, tant que le premier président de la cour d’appel compétent n’a pas rendu son ordonnance et, s’il y a lieu, tant que la Cour de cassation n’a pas rendu son arrêt en cas de pourvoi contre ladite ordonnance ;

« 2° Lorsque la décision de l’Autorité fait l’objet d’un recours en application de l’article L. 464-8, tant que la cour d’appel de Paris et, s’il y a lieu, la Cour de cassation n’ont pas rendu leur arrêt. »

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L'amendement n° 30, présenté par Mme Bonnefoy, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéas 2 à 4

Rédiger ainsi ces alinéas

« Le délai mentionné au troisième alinéa est suspendu jusqu'à la notification à l'Autorité de la concurrence d'une décision juridictionnelle irrévocable :

« 1° Lorsque l'ordonnance délivrée en application de l'article L. 450-4 fait l'objet d'un appel ou lorsque le déroulement des opérations mentionnées au même article fait l'objet d'un recours ;

« 2° Lorsque la décision de l'Autorité fait l'objet d'un recours en application de l'article L. 464-8. »

La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Debut de section - Permalien
Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État

Mme le rapporteur pour avis a critiqué tout à l’heure la rédaction du texte du Gouvernement et le travail accompli par l’Assemblée nationale, manifestement insuffisant à ses yeux, d’où sa volonté de récrire le présent article.

Cependant, cet amendement est moins précis que la rédaction de l’Assemblée nationale, puisqu’il ne mentionne pas qu’il s’agit de la décision de la cour d’appel du ressort du juge qui a autorisé l’opération de visite et de saisie, ni que le pourvoi en cassation interrompt également la prescription.

Compte tenu de ces imprécisions, le Gouvernement préfère la rédaction actuelle de l’article, qui va dans le même sens.

L'amendement est adopté.

L'article 1 er ter est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt-et-une heures quarante.