Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur l’amiante, plus grosse affaire pénale et plus grande catastrophe sanitaire du siècle, avec, à l’horizon 2020, 100 000 morts annoncées en France et 500 000 dans le monde.
En effet, l’actualité en la matière est marquée par deux jugements qui remettent en cause les deux composantes de notre système de réparation.
Le premier jugement est l’arrêt rendu, le 27 octobre dernier, par la cour d’appel de Douai, laquelle a condamné dix-sept victimes à rembourser au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA, une partie importante de leur indemnisation.
Vous l’avouerez, cette décision met à mal le premier pilier sur lequel repose notre système de réparation : l’indemnisation collective.
La question n’est pas juridique, mais éthique : le Fonds d’indemnisation a pour objet d’indemniser les victimes, et non de les poursuivre. C'est la raison pour laquelle, avec d’autres élus, j’ai demandé au Gouvernement qu’il obtienne du FIVA une remise gracieuse des sommes réclamées.
Le second jugement est celui qui a été rendu hier par le tribunal de Turin, lequel a condamné deux responsables d’Eternit à seize ans de prison.
Cette décision remet en cause le second pilier de notre système de réparation : l’action judiciaire. En effet, en France, alors même que les données de l’affaire – y compris l’entreprise en cause – sont rigoureusement les mêmes qu’en Italie, l’instruction piétine depuis seize ans.
Le prétexte en est la loi Fauchon tendant à préciser la définition des délits non intentionnels. En réalité, de l’analyse même de Pierre Fauchon, qu’au Sénat nous connaissons bien, ce texte n’est pas un obstacle. Notre ancien collègue avait ainsi déclaré, devant la mission commune d’information sur le bilan et les conséquences de la contamination par l’amiante, que, « dans le cas de l’affaire de l’amiante, l’imprudence est du reste plus que caractérisée ».
Le seul obstacle véritable réside dans la faiblesse des moyens et dans le fonctionnement du pôle santé des parquets de Paris et Marseille.
C’est donc, ici encore, un problème non pas juridique, mais politique.
En conséquence, ma question est, elle aussi, politique. Elle est double : monsieur le ministre, le Gouvernement a-t-il demandé au FIVA de renoncer au remboursement des sommes qu’il réclame aux victimes de l’amiante, pour garantir à ces dernières la reconnaissance et la réparation qui leur reviennent ? Par ailleurs, a-t-il l’intention de donner au pôle santé les moyens d’accomplir sa mission d’instruction ? §