Intervention de Dominique Gillot

Réunion du 13 février 2012 à 15h00
Exploitation numérique des livres indisponibles du xxe siècle — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Dominique GillotDominique Gillot :

Il s’agit simplement de permettre, au bout de dix ans, une gratuité de licence non exclusive pour les bibliothèques publiques, qui auront le droit de mettre à disposition de leurs usagers abonnés, sous forme numérique, les ouvrages devenus indisponibles dont les ayants droit ne se seraient pas manifestés et dont elles détiennent un exemplaire dans leur fonds. On voit bien que si cette mesure représente une avancée pour la lecture publique, qui est une compétence des collectivités locales, elle ne touchera qu’une partie somme toute minime des œuvres inscrites au catalogue numérisé.

Par ailleurs, il avait été obtenu, lors de la première lecture, en total accord avec l’auteur de la proposition de loi et Mme la rapporteure, que les revenus « irrépartissables » de la société de gestion collective soient essentiellement dédiés à la promotion de la lecture publique. Je me félicite du maintien par l'Assemblée nationale de cette disposition. Elle permettra de soutenir des actions ciblées d’animation dans ces lieux de lecture publique que sont les bibliothèques, qui deviennent aujourd'hui des lieux de lien social et de progrès partagé, d’accès aux livres pour des publics éloignés de la culture, de promotion de la lecture et de l’écriture, de renforcement du lien entre l’auteur et le lecteur.

C’est une avancée, mais il faudra que le législateur se penche sur la situation des bibliothèques publiques, qui constituent de véritables « troisièmes lieux », pour reprendre un concept anglo-saxon, favorisant la rencontre, la mixité, alors que les lieux de rencontre traditionnels disparaissent. Eu égard aux risques d’isolement que fait peser le développement des technologies numériques sur les pratiques collectives, il faudra conforter le rôle irremplaçable des bibliothèques publiques. Les opinions exprimées par les membres de la commission mixte paritaire nous y encouragent.

Sur la question des œuvres orphelines, le législateur a fait un grand pas en avant, puisque le texte en présente une définition. L’article 1er bis reprend celle qui avait été adoptée à l’unanimité par la commission de la culture, lors des débats du 28 octobre 2010 sur la proposition de loi relative aux œuvres visuelles orphelines et modifiant le code de la propriété intellectuelle. Elle tient néanmoins compte de la rédaction attendue de la proposition de directive européenne sur certaines utilisations autorisées des œuvres orphelines, afin de permettre de revenir sur la qualification d’œuvre orpheline lorsque l’un des titulaires des droits au moins a été retrouvé.

Outre ces avancées, l'Assemblée nationale a appuyé la volonté du Sénat de mettre en œuvre un suivi de l’application de la future loi – c’était l’une de nos préoccupations lors de la première lecture –, en confiant cette mission à la Commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits. Nous nous satisfaisons de cette disposition, même si nous souhaitions qu’un commissaire du Gouvernement soit nommé à cette fin.

Monsieur le président, mes chers collègues, avec cette proposition de loi, le Sénat a su prouver, au rebours de certains préjugés, qu’il savait comprendre son époque et prendre la mesure des enjeux liés à la modernité. En prenant en compte les intérêts des bibliothèques publiques, qui relèvent des collectivités territoriales, nous nous sommes fait les porte-parole des territoires que nous représentons.

Sénateurs et députés ont su conjuguer des points de vue complémentaires, même si le calendrier nous a obligés à travailler vite pour respecter l’urgence qu’il y avait à légiférer.

Grâce à des échanges fructueux et à des débats constructifs au sein des deux assemblées puis en commission mixte paritaire, nous sommes parvenus à un résultat très satisfaisant. Le travail, l’ouverture d’esprit et la précision de notre rapporteur, Bariza Khiari, doivent être salués, de même que l’attention et la volonté de conciliation de l’auteur de cette proposition de loi, Jacques Legendre.

L’adoption d’un tel texte honorera notre démocratie. Parce que les circonstances l’exigeaient, les sénateurs et les députés, toutes sensibilités politiques confondues, unis dans une même vision de l’intérêt général, ont adopté unanimement le texte d’un parlementaire UMP, dont une sénatrice socialiste a été le rapporteur, en bravant parfois l’avis du Gouvernement.

Nous pouvons être fiers de ce travail accompli au bénéfice de la culture, du partage de la connaissance et de la lecture publique, qui fait de la France un précurseur dans ce domaine. C’est avec enthousiasme que mon groupe votera le texte résultant des travaux de la commission mixte paritaire. §

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