Intervention de Catherine Morin-Desailly

Réunion du 13 février 2012 à 15h00
Réforme des ports d'outre-mer — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de la réforme portuaire de 2008, les ports ultramarins n’ont pas été pris en considération, en raison de la disparité de leurs statuts. Il est vrai que, à l’exception de celui de la Guadeloupe, les grands ports ultramarins étaient tous concédés à des CCI, alors qu’il existait déjà en métropole des ports autonomes.

Pourtant, cette réforme a été essentielle pour le développement de nos infrastructures portuaires, à l’heure où 90 % du commerce mondial se fait par voie maritime. La France a des atouts qu’elle sous-exploite et pour lesquels elle sous-investit, mais le déclassement des ports français n’est pas une fatalité. Aussi les réformes structurelles et de gouvernance ne peuvent-elles qu’annoncer une amélioration de leur activité et de leur compétitivité.

Le groupe de l’Union centriste et républicaine est donc tout à fait favorable à l’extension de l’application des principes de la réforme de 2008 aux ports ultramarins. Je suis persuadée qu’une clarification de la gestion et des responsabilités favorisera une meilleure réactivité et une plus grande compétitivité dans la concurrence mondiale qui prévaut au sein du secteur du transport maritime.

Le présent projet de loi est donc bienvenu. Le seul regret que nous formulerons tient au fait que l’on ait attendu quatre ans pour mettre les ports d’outre-mer au diapason de ceux de métropole. On aurait en effet dû les intégrer dans le mouvement de modernisation portuaire engagé en 2008, quitte à prendre des mesures législatives différentes de celles qui sont applicables en métropole, comme l’autorise l’article 73 de la Constitution.

Je pense notamment aux modalités d’exploitation des outillages et à la composition du conseil de surveillance, les CCI ayant outre-mer un poids un peu plus important qu’en métropole dans les instances de gouvernance. Les spécificités inhérentes à la situation locale justifient des adaptations.

Cependant, je reconnais que le nouveau statut de ces ports reste, sur certains points, largement dérogatoire de celui des ports maritimes métropolitains, ce qui justifie un traitement « à part ». Le choix de maintenir les infrastructures portuaires au niveau des établissements publics nationaux, et non locaux, est une illustration de la différence majeure qui existe entre le nouveau statut des ports ultramarins et celui des ports métropolitains. Mais pouvait-on se permettre de « perdre » quatre ans, pendant lesquels la compétitivité des ports ultramarins n’a cessé de se dégrader ? Nous ne le croyons pas.

Il était opportun de moderniser la gouvernance des ports ultramarins au regard de leur situation stratégique et de la nécessité de tirer profit du dynamisme du commerce maritime international, transitant notamment par le canal de Panama. Les nombreuses difficultés de gestion sévissant dans les ports ultramarins imposaient, en outre, de rééquilibrer la composition des organes de gouvernance et de clarifier leurs missions.

Je tiens à saluer le soutien unanime des membres de la commission mixte paritaire à la création, sur l’initiative du Sénat, d’observatoires des prix et des revenus dans les outre-mer, dont la mission est étendue à l’analyse des coûts de passage portuaire. Ils constitueront un élément d’analyse et de suivi pertinent de la compétitivité des ports ultramarins, ainsi qu’un gage de transparence de leur gestion.

L’habilitation du Gouvernement à procéder par voie d’ordonnances à la transposition de six directives représente le second aspect essentiel de ce texte.

La commission de l'économie du Sénat avait supprimé les articles introduits par voie d’amendements gouvernementaux lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale. La méthode consistant à recourir à des cavaliers législatifs afin de transposer des directives à la veille de l’expiration du délai prévu est très discutable. Je ne suis donc pas surprise que la majorité sénatoriale s’y soit opposée. Pour autant, je salue leur réintroduction dans le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire, car la transposition de ces directives revêt une importance capitale. Elles visent à faciliter la libre circulation des marchandises au sein du marché intérieur de l’Union ; je pense notamment à celle qui tend à créer un espace maritime sans barrières et à réduire la charge administrative pesant sur les compagnies maritimes.

De même, la directive relative au déploiement de systèmes de transport intelligents et d’interfaces avec d’autres modes de transport vise à favoriser la mise en place de services interopérables dans l’ensemble de l’Union européenne. C’est une chance à saisir pour nos services de transport et de logistique. La mise en œuvre de cette directive devrait stimuler la construction, en France et dans les autres pays de l’Union, d’infrastructures multimodales de transport.

La politique des transports de marchandises est un enjeu crucial pour les prochaines décennies, d’un point de vue non seulement économique, mais aussi écologique. On ne pourra substituer à la route d’autres modes de transport que si l’on dispose de systèmes intelligents et d’interfaces performantes.

Outre l’intérêt au fond qu’il y a à transposer ces directives, je souligne que la France, eu égard à l’état de ses finances publiques, n’a actuellement pas les moyens de payer des amendes à Bruxelles pour défaut de transposition des directives.

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