Ce choix stratégique permet au Gouvernement de contourner le dispositif obligatoire de consultation des partenaires sociaux créé par la loi Larcher et d’éviter un examen préalable du texte par le Conseil d’État. Cela a déjà été souligné en première lecture.
Pour mémoire, je rappelle que le Sénat, comme l’Assemblée nationale, a adopté des protocoles de consultation des partenaires sociaux sur toute proposition de loi entrant dans le champ de la négociation collective. En résumé, avant son inscription à l’ordre du jour, le texte doit être transmis aux organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives afin de recueillir leurs observations et de connaître leur intention d’engager ou non une négociation sur le sujet. Ce point est important. Les organisations consultées disposent alors de quinze jours pour faire connaître leurs intentions.
En l’espèce, il est clair que ces protocoles n’ont pas été respectés. Comment, d’ailleurs, auraient-ils pu l’être, dans la mesure où nous avons affaire à un texte de pure opportunité et de pure réactivité ? Encore une fois, c’est dans la précipitation et la volatilité – sans jeu de mot – du temps médiatique que l’on somme le Parlement de légiférer.
Nous refusons de nous prêter à cet exercice, qui manque aux procédures que nous avons nous-mêmes adoptées pour favoriser le dialogue social et ne nous laisse pas le temps nécessaire à la réflexion. Nous sommes, ici, devant un contre-exemple flagrant de ce que doit être le travail parlementaire.
Dans les faits, cette hyperréactivité a inutilement crispé les esprits et exacerbé les tensions. Tenter de faire adopter au pas de charge ce texte, en plein conflit social, pourrait être considéré comme une regrettable erreur. À moins que l’on ne veuille satisfaire la frange la plus conservatrice de l’opinion publique au détriment du dialogue social, des droits des salariés et d’une bonne législation, auquel cas, ce serait une faute.
Pour notre part, nous entendons favoriser et surtout respecter les partenaires sociaux dans leurs efforts pour revaloriser le statut et améliorer les conditions de travail de tous ceux qui concourent, directement ou non, au transport aérien.
Le champ d’application de ce texte est considérable : le transport aérien, au sens strict, compte près de 100 000 salariés et fait travailler 600 entreprises, dont Air France est la plus importante et la plus significative. J’y reviendrai.
Les activités de sûreté emploient 10 000 personnes environ. Les missions d’assistance les plus diverses visées par le texte donnent du travail à environ 4 000 ou 5 000 salariés.
Au total, nous parlons donc d’un bon millier d’entreprises, pour la plupart des sous-traitants, et de 120 000 salariés, dont beaucoup ont des contrats précaires et travaillent trop souvent dans des conditions déplorables.