Elle est le signe que la négociation n’a pas permis d’améliorer les salaires et les conditions de travail. Or il y a dans ces domaines beaucoup à faire pour tous ces salariés « invisibles », « travaillant dans l’ombre », qui sont indispensables au transport aérien.
La vraie responsabilité du législateur est de mettre en place toutes les obligations et tous les instruments de la négociation collective pour que le sort de ces personnels soit amélioré et qu’ils n’aient plus besoin de recourir à la grève.
Vous avez cru bon d’ajouter à votre texte un article selon lequel tout salarié qui décide de reprendre le travail doit en informer l’employeur vingt-quatre heures à l’avance, sous peine de sanctions disciplinaires. C’est évidemment un obstacle à la libre détermination des salariés reconnue par la loi. Nous avons déjà eu l’occasion de démontrer l’absurdité d’une disposition qui contraindrait des employés à rester en grève vingt-quatre heures de plus pour ne pas être sanctionnés, ce qui est totalement contre-productif.
Les députés de la majorité gouvernementale ont fini par mesurer l’erreur. Le texte a donc été complété par une petite phrase : « Cette information n’est pas requise lorsque la grève n’a pas lieu ou lorsque la prise du service est consécutive à la fin de la grève ».
Pour faire bonne mesure, vous introduisez aussi cette disposition dans la loi de 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs. Fort bien ! Mais quand la grève se poursuit, que se passe-t-il ? Encore une fois, cette disposition traduit une méconnaissance grave des relations du travail et du déroulement des conflits collectifs.
Vous avez introduit cette disposition pour empêcher que ne se reproduisent des comportements minoritaires, et regrettables, auxquels les grandes organisations représentatives n’ont aucune part. Ces comportements nuisent à la crédibilité des mouvements sociaux et exaspèrent les passagers auxquels ils portent parfois gravement préjudice.
Mais votre ajout au texte que nous examinons ce jour ne résout rien.
J’en vois l’aveu dans cette phrase significative de notre collègue député François Rochebloine, énoncée en désespoir de cause, après que l’inutilité de cet ajout lui eut été démontrée : « Eh bien, ils seront en grève, point barre ! » C’est un peu court, mais c’est le constat bien senti que le problème n’est pas résolu.
Mais ce n’est pas tout. Nous avons appris hier, notamment par la presse, que la direction d’Air France venait de signer un accord avec les organisations de pilotes de ligne.
Cet accord stipule que le planning du personnel navigant technique est stable et que toute modification doit faire l’objet d’un accord entre la compagnie et le navigant concerné. En clair, il n’y aura pas de réaffectation improvisée en cas de grève, et votre proposition de loi devient de facto sans aucun effet.