Monsieur Bérit-Débat, je souscris totalement à votre objectif, mais je voudrais essayer de vous convaincre de retirer votre amendement, car des discussions sont en cours avec les professionnels.
Vous le savez, nous avons d’ores et déjà prévu dans la loi de finances l’interdiction du paiement de l’or en liquide. Nous nous battons d'ailleurs pour que l’ensemble des pays de l’Union européenne nous suive sur ce point très important, afin d’éviter que des revendeurs n’écoulent la marchandise volée dans des pays frontaliers.
Nous assistons à une recrudescence des vols d’or et, malheureusement, des atteintes à la personne. Vous vous en souvenez, mesdames, messieurs les sénateurs, un bijoutier, Thierry Unik, a ainsi été lâchement assassiné à Cannes-la-Bocca il y a quelques semaines. J’ai eu l'occasion d’échanger avec sa famille, en particulier avec son frère.
Claude Guéant et moi-même nous sommes longuement entretenus avec les représentants de la profession pour expérimenter des dispositifs de sécurité, à la mise en place desquels j’ai pu assister sur le terrain.
Je tenais à vous faire part de l’avancée de nos discussions avec les organisations professionnelles. La recrudescence des braquages de bijouteries, en augmentation de 31 % en un an, montre qu’il est indispensable de réagir. Les professionnels nous ont fait part du développement des achats et ventes « itinérantes » effectués dans des hôtels ou dans des cafés. Nous cherchons des solutions pour éviter leur multiplication.
Nous devons également éviter que la communication publicitaire relative à l’achat et à la vente d’or, que vous avez évoquée, ne soit trop ambiguë pour les clients.
Je le répète : le manque de cohérence entre les législations européennes pose problème. Ainsi, en Belgique, les achats d’or peuvent être payés en liquide jusqu’à 5 000 euros. Nous venons d’interdire ces paiements en liquide en France, mais les voyous peuvent écouler la marchandise volée aux portes de notre pays.
Une ambiguïté demeure également quant aux dispositions portant sur le commerce des métaux ferreux et non ferreux et des bijoux d’occasion.
Le 12 décembre dernier, une réunion s’est tenue au ministère de l’économie avec les professionnels. Même si elle n’a pas été conclusive, elle a permis de réfléchir à des dispositifs qui pourraient être intégrés dans un texte de loi, afin d’apporter une réponse rapide à ces problèmes.
Nous explorons plusieurs pistes.
Tout d’abord, nous réfléchissons à l’extension aux bijoux de l’interdiction du marchandage et du colportage prévue pour l’or matière à l’article L. 342-1 du code monétaire et financier.
Ensuite, nous travaillons sur la définition des conditions de sécurité dans lesquelles devraient être réalisés les achats et ventes d’or et de bijoux.
Par ailleurs, nous évaluons la possibilité de demander aux bijoutiers d’accomplir leurs obligations d’information du registre de police sous forme de photographies, qui pourraient ensuite être partagées. En effet, nous le constatons, les registres, qui ont été rendus obligatoires, sont difficilement exploitables.
Enfin, nous sommes convenus avec l’ensemble des professionnels de réaliser un état des lieux de la législation existante sur le commerce de l’or et des bijoux, afin d’évaluer les difficultés d’application.
Nous travaillons avec les douanes et avec la direction des affaires juridiques du ministère de l’économie, ainsi qu’avec le ministère de l’intérieur, pour que ces pistes de réflexion débouchent sur des réponses concrètes.
L’amendement que vous avez déposé ne vise pas, en lui-même, à apporter des éléments nouveaux par rapport aux dispositions générales du code permettant d’ores et déjà de lutter contre les publicités portant atteinte aux intérêts des consommateurs. Monsieur Bérit-Débat, avec votre amendement, vous avez surtout souhaité, me semble-t-il, attirer l’attention sur les difficultés suscitées par le développement des ventes d’or. Je vous demanderai donc de bien vouloir le retirer.
Toutefois, je propose que vous soyez associé, avec les autres sénateurs qui le souhaiteront, à nos travaux sur la question. Je viens de vous indiquer les pistes – c’est d'ailleurs la première fois que je les rendais publiques – que nous suivons pour répondre aux attentes extrêmement fortes des professionnels.
En attendant – vous avez certainement pu le lire dans la presse, qui s’en est largement fait l’écho –, nous avons pris, Claude Guéant et moi-même, des mesures spécifiques en cette période de fêtes pour protéger les professionnels par une surveillance renforcée de la police, dont la présence doit avoir un effet dissuasif.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement.