Intervention de Alain Fauconnier

Réunion du 22 décembre 2011 à 14h45
Droits protection et information des consommateurs — Articles additionnels après l'article 10 bis K, amendement 170

Photo de Alain FauconnierAlain Fauconnier, rapporteur :

Les amendements qui viennent d’être présentés visent à apporter une réponse à un vrai problème – je dirais même à un vrai fléau ! –, celui du surendettement. Je tiens avant tout à souligner que, quelles que soient nos positions respectives sur l’opportunité de la création d’un fichier positif, aucun d’entre nous ne peut ignorer ou minorer ce problème ; nous connaissons tous des familles frappées par le surendettement qui se trouvent dans une grande détresse.

La question qui se pose au législateur est la suivante : la création d’un fichier national recensant les emprunts contractés par les particuliers est-elle une réponse pertinente à ce fléau ? Il me semble qu’un certain nombre d’interrogations limitent, aujourd’hui, la possibilité d’adopter un dispositif qui fasse l’objet d’un consensus.

Je rappelle brièvement qu’il a été décidé, lors de l’examen du projet de loi portant réforme du crédit à la consommation, dont M. Dominati, ici présent, était le rapporteur au Sénat, qu’un rapport sur la création d’un registre national des crédits serait remis au Gouvernement et au Parlement. Ce rapport, élaboré au sein d’un comité présidé par M. Emmanuel Constans, a été remis en août 2011 ; il émet un certain nombre de recommandations techniques concernant la mise en place de ce registre. Il est notamment indiqué que seule l’utilisation du numéro de sécurité sociale permettrait une utilisation fiable du fichier, l’identifiant FICOBA, ou fichier national des comptes bancaires et assimilés, tolérant des marges d’erreur incompatibles avec les finalités du registre.

La CNIL a évidemment émis de très vives critiques à l’encontre de l’utilisation du numéro de sécurité sociale. Il nous a été indiqué, lors de nos auditions, que l’identifiant FICOBA pouvait malgré tout suffire à fiabiliser le fichier. Il me paraît difficile, à ce stade, de trancher cette question précise dans un sens ou dans un autre.

Par ailleurs, d’autres questions ont également été soulevées depuis cet été. Au cours de la consultation publique lancée sur le rapport Constans, les associations de consommateurs ont pris position contre la création d’un tel registre. L’UFC-Que choisir indique ainsi dans sa contribution au débat public : « La loi Lagarde devrait, si elle est respectée par les professionnels, mettre un terme aux mauvaise pratiques dénoncées par l’UFC-Que choisir et limiter la distribution des crédits toxiques, omniprésents dans les dossiers de surendettement. »

Si tel était le cas, le coût de la mise en place d’un fichier positif pourrait être évité, au profit d’une simple amélioration du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, bien moins coûteuse. L’UFC-Que choisir indique, à cet égard, que le coût de la création du registre pourrait s’élever à plus de 600 millions d’euros, chiffre évoqué dans le cadre du comité Constans. L’objet de l’amendement de nos collègues centristes évoque un coût de 100 millions d’euros. Si le premier chiffre paraît très excessif, il s’agit, là encore, d’une question sur laquelle les sénateurs devraient pouvoir se faire une idée précise.

Les amendements qui nous ont été présentés posent une autre question : à qui faut-il ouvrir le droit d’accès au fichier ? Faut-il le limiter aux personnes qui contractent un emprunt, comme le proposent nos collègues du groupe du RDSE, ou l’ouvrir aux établissements de crédit, afin de favoriser la concurrence entre ceux-ci et faire baisser le coût du crédit, comme l’indique l’objet de l’amendement n° 170 rectifié ?

Compte tenu du fait que le comité Constans ne comportait que trois parlementaires, parmi lesquels M. Dominati, dont je salue le travail, il me semble essentiel que les sénateurs se saisissent des conclusions de ce comité afin de déterminer le meilleur dispositif possible. Un groupe de travail devrait donc être créé, réunissant des sénateurs appartenant à plusieurs commissions. Il pourrait remettre ses conclusions dans un délai très bref, afin de déterminer, au regard d’un premier bilan de la loi portant réforme du crédit à la consommation, dite « loi Lagarde », et de l’expertise du rapport Constans, quelle solution adopter pour lutter le plus efficacement possible contre le surendettement.

Après des débats très riches et nourris, la commission de l’économie a décidé de s’en remettre à la sagesse du Sénat sur ces trois amendements, estimant qu’un débat approfondi devait se tenir en séance publique et qu’il convenait de créer un groupe de travail sénatorial dans les plus brefs délais.

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