Intervention de Michel Mercier

Réunion du 31 janvier 2012 à 22h00
Exécution des peines — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Michel Mercier, garde des sceaux :

Je serai bref, puisqu’il est prévu que la séance soit levée à minuit.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je n’accepte pas qu’on nous reproche de promouvoir le « tout carcéral » avec ce texte.

Monsieur Lecerf, j'aurais aimé qu'on soulignât que c'est ce gouvernement qui, pour la première fois, a réduit le nombre des mineurs incarcérés. Car telle est la vérité ! Certes, mettre un mineur en prison coûte moins cher que de le placer en centre éducatif fermé, mais telle n’est pas la voie pour laquelle nous avons opté : clairement, le Gouvernement a fait le choix de rester fidèle au principe de l'ordonnance de 1945 et de payer le prix de la solution éducative, qui coûte toujours plus cher, je le répète, que la solution carcérale.

C'est aussi ce gouvernement qui, grâce à la loi du 14 avril 2011, a réduit le nombre de placements en garde à vue.

On nous fait également le procès de vouloir mettre tout le monde en prison. Notre pays compte à ce jour 56 000 places de prison, cependant que nos établissements pénitentiaires accueillent 10 000 personnes de plus. La loi pénitentiaire de 2009 a fait de l'encellulement individuel un principe, et c’est une bonne chose. Aussi, sur les 24 000 places qui vont être construites, 10 000 seront occupées par les détenus qui sont actuellement incarcérés en surnombre dans les établissements pénitentiaires.

Il n’a jamais été question de mettre 85 000 personnes en prison ! Ce chiffre est celui des décisions d’emprisonnement qui ne sont pas exécutées. Je le précise une nouvelle fois : parmi ces 85 000 condamnés, seuls 15 000 dont la condamnation est définitive exécuteront leur peine d’emprisonnement en établissement pénitentiaire ; tous les autres verront leur peine aménagée.

Monsieur Lecerf, vous nous dites que, selon les statistiques, un condamné ayant bénéficié d’un aménagement de sa peine est moins enclin à récidiver que celui qui a purgé l’intégralité de sa peine en prison. Mais c’est heureux ! En effet, telle est la logique même de la loi pénitentiaire. Je rappelle que c’est un juge qui décide d’un aménagement de peine, selon des critères tenant à la personnalité du condamné et à sa capacité à se réinsérer. Si la récidive était plus fréquente parmi ceux qui ont vu leur peine aménagée par un juge, ce serait un grave échec !

Madame Tasca, nous avons créé, entre 2007 et 2011, quelque 1 000 postes dans les services pénitentiaires d’insertion et de probation. Libre à vous de considérer que ce n’est pas suffisant – j'accepte tout à fait cette critique –, mais je n’admets pas que vous nous reprochiez de n’avoir rien fait, parce que c'est faux.

S’agissant de ces questions pénitentiaires, rien n’est jamais tout blanc ni tout noir. Épargnons-nous ces postures ! C’est ensemble que nous trouverons de vraies solutions. Lorsqu’a été examinée la loi pénitentiaire, je siégeais sur ces travées en tant que sénateur et j’ai voté ce texte. En tant que garde des sceaux, je n'ai nullement l'intention de le contrecarrer. Le texte que le Gouvernement soumet aujourd’hui à votre examen, mesdames, messieurs les sénateurs, s’inscrit dans la continuité de la loi pénitentiaire.

Lorsqu’ils prononcent des condamnations, les magistrats font leur travail et ne font qu'appliquer les lois pénales que le Parlement a votées. Ils n’en inventent point ! Aussi, ils méritent le respect.

Pour finir, je veux répéter aux deux oratrices du groupe écologiste que je ne suis pas pour le « tout carcéral » et qu’il n’est nullement dans mes intentions d’emprisonner tout le monde. À cet égard, je leur ferai observer qu'elles soutiennent une candidate qui n'a jamais hésité à mettre des gens en prison, même quand ils étaient de simples prévenus et qu’ils n'étaient pas encore condamnés. §Il faut faire attention à la cohérence de ses choix dans le temps !

La continuité dans l'action étant une nécessité, je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, à voter le présent texte dans sa rédaction initiale, qui, je le répète, se situe dans la droite ligne de la loi pénitentiaire.

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