La fusion des deux dispositifs, qui était réclamée par le FMI et par certains États membres de l’Union européenne – dont la France, d’ailleurs –, aurait permis au MES de disposer d’une capacité totale de prêt de l’ordre de 940 milliards d’euros, soit un montant proche des 1 000 milliards d’euros, somme, en général, considérée comme nécessaire pour assurer la crédibilité de ce dispositif.
Certes, les chefs d’État et les ministres vont discuter lors du prochain Conseil européen, mais j’ai appris cet après-midi que la réunion au cours de laquelle devait être précisément abordée l’augmentation des ressources du MES avait été reportée. La question ne sera donc même pas évoquée à la fin de cette semaine, cela sans doute à cause des fortes pressions exercées par la délégation allemande. On le voit bien, le gouvernement allemand considère que donner « trop », c’est encourager tous les « pays du Club Méditerranée », puisque c’est ainsi que certaines les appellent, à ne pas prendre les mesures structurelles nécessaires. C’est la raison pour laquelle on n’augmente pas les ressources du MES, mais, dans le même temps, je l’ai dit, on envoie le message inverse…
À défaut de voir sa capacité d’intervention renforcée, le MES devra se tourner vers le FMI en cas de nécessité, d’où le relèvement du plafond des prêts bilatéraux accordés par la France à celui-ci, solution tout de même assez étonnante. Que nous soyons amenés à apporter nos fonds au FMI et non au dispositif européen est un paradoxe que je ne parviens toujours pas à m’expliquer ! Le Conseil européen, qui plaidait pour apporter ces fonds au MES, s’est d’ailleurs longuement opposé à cette solution.
De mon point de vue, la création d’un véritable fonds monétaire européen passe nécessairement par l’adossement du MES à la Banque centrale européenne. On a évoqué une licence bancaire, mais, si celle-ci fait fuir les Allemands, on peut trouver une autre solution pour accéder aux liquidités de la BCE.
Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous commentiez ce point, en particulier que vous expliquiez pourquoi la France a abandonné cette proposition lors de la négociation du traité.
Autre observation : le MES est insuffisant pour résoudre la question de la dette et remettre l’économie européenne sur la voie de la croissance. Comme l’ont dit plusieurs de mes collègues du groupe socialiste, et d’autres groupes aussi d’ailleurs, il ne suffira pas à stabiliser durablement la zone euro, car il ne constituera pas un outil de dernier ressort.
D’autres mécanismes permanents de solidarité seront nécessaires.
Première proposition : la mise en place du MES devrait, me semble-t-il, ouvrir la voie – et, je l’espère, précède une décision en ce sens – à une mutualisation partielle des dettes souveraines.
Parmi différentes solutions qui me paraissent envisageables, des économistes ont formulé une proposition qui me paraît intéressante. Elle consisterait à distinguer la partie de la dette inférieure à 60 % du produit intérieur brut, conformément à la règle que nous nous sommes donnée à nous-mêmes, c'est-à-dire à la règle de Maastricht, partie qui serait mutualisée et bénéficierait de taux intéressants, de la partie allant au-delà de ce taux, qui correspond à ce qu’on appelle les « dettes rouges » et que chaque État devrait gérer à ses propres conditions de marché.
Deuxième proposition : je l’ai dit, à défaut d’attribuer une licence bancaire au MES, il conviendrait au moins de faire de la Banque centrale européenne un prêteur en dernier ressort. L’obstacle juridique n’est pas insurmontable. Michel Rocard a ainsi récemment suggéré que la BCE prête à des établissements publics de crédit aux mêmes taux que ceux qui sont pratiqués pour les banques commerciales.
Troisième proposition : les efforts pour stabiliser les marchés obligataires de la zone euro doivent être accompagnés de mesures pour relancer la croissance économique. Là est l’essentiel : nous devons créer des emplois, faire baisser le chômage, relancer les investissements, accroître les exportations, ce dernier point concernant singulièrement la France, dont on connaît le déficit commercial.