Dans son dernier rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale remis au mois de septembre 2011, la Cour des Comptes déplore la redondance des aides accordées par l’État, les collectivités territoriales et l’assurance maladie en matière de lutte contre la désertification médicale. Elle souligne leur coût important et s’interroge sur leur efficacité.
En effet, alors que la France n’a jamais compté autant de médecins – plus de 216 000 –, des territoires entiers connaissent un dramatique phénomène de désertification médicale, qui touche particulièrement les territoires ruraux. Ainsi, le département de l’Eure dont je suis l’élu est le moins bien doté en termes de médecins, avec une densité de 101, 2 médecins généralistes en exercice pour 100 000 habitants, dont plus d’un tiers sont âgés de plus de cinquante-cinq ans, contre 226, 9 à Paris.
Les causes de ce phénomène, qui touche aussi certains quartiers périphériques de grandes agglomérations, sont multiples et connues : féminisation de la profession, baisse de l’intérêt pour l’exercice libéral, faible attractivité de la médecine générale, augmentation de la demande de soins, ...
Cette situation est doublement inacceptable. D’une part, elle aggrave les inégalités dans l’accès aux soins entre nos concitoyens : selon le lieu où l’on habite, le droit à la santé n’est pas le même, ce qui est tout à fait contraire au pacte républicain de notre pays qui, justement, repose sur l’égalité. D’autre part, elle entraîne une surconsommation manifeste de soins dans les zones surmédicalisées. À ce titre, je m’étonne que le Président de la République, dans son discours de Bordeaux du 15 novembre dernier intitulé « Préservation de notre modèle social et lutte contre les fraudes à la sécurité sociale », n’ait pas évoqué ce sujet.
Dès le mois de mai 2009, lors de l’examen du projet de loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, j’ai défendu devant la Haute Assemblée des amendements visant, comme le recommande la Cour des comptes, à réguler l’installation des médecins. Force est de constater qu’ils n’ont été soutenus ni par la droite ni par la gauche, à quelques exceptions près...
Au mois d’avril 2011, lors de l’examen de la proposition de loi dite « Fourcade », j’ai rappelé ma conviction selon laquelle tenter de régler le problème de la désertification médicale uniquement par des mesures incitatives était une démarche coûteuse et inefficace.
La Cour des Comptes n’affirme pas autre chose quand elle souligne qu’« une action publique efficace en faveur d’une meilleure répartition géographique apparaît comme une exigence impérieuse ». C’est pourquoi elle recommande une révision de l’avenant n° 20 à la convention médicale pour, a minima, moduler la prise en charge des cotisations sociales des médecins, y compris ceux déjà installés, en fonction de leur répartition territoriale et plafonner les aides perçues.
Aussi, j’aimerais connaître le coût des mesures dites incitatives mises en place tant par l’État que par les collectivités territoriales ou par l’assurance maladie ainsi que leur retour sur investissement. Par ailleurs, je souhaiterais savoir quelles suites le Gouvernement entend donner à ce très intéressant rapport de la Cour des comptes.