Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est avec un plaisir certain que nous voyons revenir au Sénat la proposition de loi relative à l’établissement d’un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif. Je voudrais, à mon tour, affirmer le caractère consensuel d’une démarche parlementaire engagée ici même le 8 décembre dernier, soit quasiment un an après la transmission du texte au Sénat, la nouvelle majorité de notre assemblée faisant en sorte, je tiens à le préciser, de tenir les délais !
C’est d’ailleurs la même démarche consensuelle qui a présidé à l’adoption de la proposition de loi portant diverses dispositions d’ordre cynégétique, largement complémentaire de celle-ci. Qu’il me soit permis au passage de regretter le manque de fair-play manifesté par nos collègues députés, il y a quelques jours, à l’occasion de l’adoption de ce texte. Alors que les avancées permises par le Sénat étaient unanimement approuvées par les chasseurs, singulièrement par la Fédération nationale des chasseurs de France, ceux-ci ont fait superbement l’impasse sur le côté positif du travail sénatorial.
D’ailleurs, je me plais également à rappeler que le texte que nous examinons aujourd’hui a aussi été singulièrement amélioré par le Sénat. En effet, à l’issue de la première lecture par l’Assemblée nationale, il avait été largement contesté, et ce à juste titre, par les chasseurs, les tireurs sportifs, les collectionneurs et les armuriers. Il se devait de permettre la transposition de la directive européenne sur les armes à feu.
Les points litigieux concernaient des aspects majeurs de la proposition de loi, à savoir la classification des catégories d’armes et leurs conditions d’acquisition et de détention, ainsi que de leur transport. Le travail du Sénat a permis en quelque sorte de remettre les choses à l’endroit.
La définition des sanctions et de leurs destinataires dans le cadre de l’interdiction de la détention et du port d’armes a aussi été grandement modifiée par les sénateurs. Quant au statut des collectionneurs, il a enfin bénéficié de sérieuses avancées, alors qu’il menaçait de disparaître purement et simplement, tout comme, d’ailleurs, la pratique du tir sportif.
En deuxième lecture, l’Assemblée nationale a non seulement validé notre travail, mais l’a aussi conforté sur certains points.
J’ajoute, monsieur le ministre, que les avancées réalisées par la Haute Assemblée n’étaient pas uniquement dues, de façon monolithique, au travail des sénateurs de droite. Il ne vous aura pas échappé, à la lecture des amendements déposés, que quelques-uns d’entre eux, et non des moindres, étaient signés par des sénateurs de gauche !
C’est ainsi que les députés ont renforcé la cohérence de l’article 3, en rassemblant la catégorie des matériels et des armes, pour que l’application du principe d’interdiction et les dérogations y afférant soient uniformisées sous la catégorie générique A. Ils ont également affiné la rédaction de ce même article, afin de permettre, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, aux personnes physiques et morales d’acquérir et de détenir des matériels et armes aux fins de collection ou de tir sportif.
Par ailleurs, l’Assemblée nationale a reconnu que la liste des infractions pour lesquelles une inscription au bulletin n° 2 du casier judiciaire entraîne l’interdiction de détenir ou de porter une arme, telle qu’elle a été redéfinie par le Sénat, constituait un véritable progrès par rapport à sa propre rédaction, qui renvoyait plus à de grandes catégories qu’à des infractions précises.
Les députés ont aussi adopté un amendement déposé par le rapporteur du texte et tendant à rendre obligatoire la règle du prononcé des peines complémentaires restreignant la capacité d’acquérir et de détenir des armes pour les infractions non seulement de destructions volontaires dangereuses pour les personnes, mais aussi de détention de produits incendiaires ou explosifs en vue de commettre une telle infraction.
Concernant, enfin, l’article 32 relatif à l’incrimination, pour toutes les catégories d’armes, du port ou du transport d’armes sans motif légitime, les députés ont validé, tout en les précisant, les dispositions que nous avions mises en place, ainsi que l’a rappelé tout à l’heure le rapporteur. Sur proposition de leur rapporteur, ils ont en effet distingué le transport et le port des armes, alors que la rédaction sénatoriale les soumettait conjointement à la même condition de possession d’un permis de chasser, accompagné de la validation de l’année en cours ou de l’année précédente.
Le texte dont nous discutons aujourd’hui est donc précis : pour le transport d’armes, la détention d’un permis de chasser permet à son titulaire d’avoir un motif légitime pour transporter celles qui sont utilisées pour l’activité de chasse, sans qu’il soit toutefois exigé que ce permis soit accompagné de la validation de l’année en cours ou de l’année précédente.
Pour ma part, je considère que c’est tout à l’honneur des parlementaires, toutes tendances politiques confondues, monsieur le ministre, d’avoir soutenu et amendé un texte très attendu par les utilisateurs légaux et légitimes des armes à feu que sont les armuriers, les fabricants, les collectionneurs, les pratiquants de ball-trap, les tireurs sportifs et les chasseurs.
Nous avons délibérément voulu déconnecter – c’est un euphémisme ! – le travail que nous avons effectué d’un contexte politique particulier. Celui-ci n’obéit donc à aucune logique électoraliste.
Les positions que j’ai défendues en première lecture et que je continue à défendre sont celles que j’aurais mises en avant il y a un an, ou que je pourrais soutenir dans six mois. Elles sont le fruit de convictions, ainsi que d’un travail d’écoute, de réflexion et de concertation approfondi.
Ce texte fera, selon toute vraisemblance, l’objet d’un vote conforme, ce dont je me réjouis. Il donne satisfaction aux 2 millions de détenteurs légaux d’armes à feux recensés, tout en permettant de réprimer plus efficacement le trafic des armes et ceux qui violent la loi en y participant.
Monsieur le ministre, vous avez fait allusion à l’actualité récente, qui nous a conduits à déplorer la mort de plusieurs personnes sous le feu d’armes de guerre, dans le cadre soit de sordides règlements de compte, soit de braquages ayant mal tourné.
En tout état de cause, vous comprendrez aisément, mes chers collègues, que ce texte, même s’il renforce de manière précise et conséquente le volet pénal relatif à la détention et à l’utilisation d’armes prohibées, aura atteint les limites de ce que la loi peut produire en la matière. Chacun le sait, une personne résolue à attaquer un fourgon de la Brink’s avec une kalachnikov ne reculera pas devant un texte de loi, fût-il de quatre cents pages et très élaboré !