Intervention de Nora Berra

Réunion du 21 février 2012 à 21h30
Recherches impliquant la personne humaine — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé :

Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à saluer le travail du Parlement et de la commission mixte paritaire, qui ont permis, après de longs débats fructueux et constructifs, d’aboutir à un texte qui s’est considérablement enrichi et qui est devenu consensuel.

Cette proposition de loi déposée sur l’initiative du député Olivier Jardé est ambitieuse. Elle vise à moderniser la législation concernant la recherche sur la personne et à harmoniser des textes qui manquaient parfois de cohérence.

Il s’agit de favoriser une recherche clinique de qualité, tout en s’assurant de la protection de la personne qui s’y prête.

Il est logique qu’un tel enjeu ait fait l’objet de nombreuses discussions, parfois passionnées, au sein des deux assemblées. Mais ces débats ont abouti à un texte équilibré, récemment voté à l’unanimité par les députés.

Il s’agit avant tout de donner un socle commun à toutes les recherches impliquant la personne humaine, en créant trois catégories de recherches dans un cadre unique, avec un socle réglementaire commun dont le pivot est l’avis obligatoire demandé à un comité de protection des personnes.

Au sein de l’ensemble « recherches sur la personne », le texte identifie trois grandes catégories de recherches : les recherches interventionnelles, les recherches qui ne comportent que des risques minimes et les recherches non interventionnelles, que l’on appelle aussi recherches observationnelles.

Dans chacune de ces catégories, vous avez voulu adapter l’encadrement réglementaire aux risques encourus par les personnes qui se prêtent à la recherche de façon souple et graduelle.

Les recherches interventionnelles, celles qui portent notamment sur les médicaments innovants, continuent bien évidemment de bénéficier de l’encadrement le plus exigeant : elles sont étroitement contrôlées par l’Agence nationale de sécurité du médicament, l’ANSM, en conformité avec la directive européenne de 2001, et soumises à l’avis du CPP.

Les recherches dites « à risques minimes » correspondent à l’ancienne catégorie de recherches « portant sur les soins courants », introduite en 2004, qui s’est révélée difficile à mettre en place. Son cadre est mieux précisé et les procédures sont simplifiées. Seul l’avis du CPP sera requis. Le consentement « libre et éclairé » doit être écrit, mais le CPP pourra autoriser une dérogation dans certains cas particuliers.

Enfin, les recherches observationnelles ou non interventionnelles entrent maintenant dans le périmètre de la loi.

Elles devront obligatoirement obtenir un avis favorable du CPP avant de pouvoir débuter, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent. L’existence désormais acquise de ce guichet unique va considérablement simplifier et clarifier cette catégorie de recherches.

En particulier, les CPP vérifieront que la protection des données individuelles sera bien respectée, évitant ainsi la redondance avec la Commission nationale de l’informatique et des libertés.

Pour ce type de recherches, le consentement n’est pas nécessaire, mais il existe une faculté d’opposition.

Il convient de souligner une autre avancée majeure de la proposition de loi pour ce qui concerne la recherche sur les échantillons biologiques.

Il s’agit de mettre un terme à l’insuffisante coordination, depuis 2004, entre les dispositions de la loi relative à la bioéthique et celles de la loi relative à la politique de santé publique.

C’est ainsi que la gestion des collections de produits biologiques conservées au laboratoire sera désormais assurée par le ministère de la recherche, et celle de l’obtention des prélèvements sur la personne et de leur consentement par les CPP.

La possibilité de réaliser des recherches génétiques sur des échantillons prélevés autrefois sur des patients décédés et qui n’avaient pu consentir à la recherche présente constituait une autre source permanente d’incompréhension et d’irritation de la part des chercheurs.

Là aussi, vous avez procédé de manière pragmatique, en proposant que le protocole soit soumis à un CPP, suivant d’ailleurs les recommandations d’un rapport du Conseil d’État.

Il s’agit là d’avancées propres à simplifier le déroulement de la recherche dans notre pays, tout en augmentant la sécurité des personnes qui s’y prêtent.

Autre point majeur, une Commission nationale des recherches impliquant la personne humaine a été créée par cette proposition de loi.

Cette commission impliquant des personnes issues des CPP et des personnalités qualifiées sera chargée de la coordination, de l’harmonisation et de l’évaluation des comités de protection des personnes, ce qui représente incontestablement une avancée.

Elle devra désigner les comités chargés d’examiner les projets de recherche. Elle devra par ailleurs remettre chaque année au ministre de la santé des recommandations concernant les conséquences, en matière d’organisation des soins, des résultats des recherches qui présentent un intérêt majeur pour la santé publique.

Enfin, la désignation sur un mode aléatoire d’un CPP a été souhaitée alors que, actuellement, le promoteur soumet son projet à l’avis d’un CPP qu’il choisit parmi les CPP existants au sein de l’interrégion d’exercice de l’investigateur principal.

Le CPP sera maintenant désigné par la Commission nationale de manière aléatoire au moment du dépôt du dossier par le promoteur.

Il s’agissait de renforcer l’indépendance des CPP. Il conviendra toutefois, pour ne pas pénaliser la recherche, de veiller à ce que ce processus n’allonge pas les délais de réponse d’un CPP lors de la soumission d’un projet.

Devant l’aboutissement d’une telle révision en profondeur des textes en vigueur, je ne doute pas que la recherche clinique s’en trouvera facilitée et la notoriété de la France dans ce domaine renforcée, cependant que seront préservés les droits des patients qui se prêtent à cette recherche.

Je vous renouvelle mes remerciements pour avoir mené à leur terme, dans les deux chambres, des travaux délicats concernant un domaine sensible. §

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