Tout cela ne doit pas nous faire oublier l’essentiel, à savoir la situation de la zone euro.
Le programme de « prise en pension » à trois ans de la Banque centrale européenne a incontestablement permis de ramener le calme sur les marchés. Cette accalmie est bienvenue, mais rien ne garantit que la tempête ne soufflera pas à nouveau si les dirigeants européens ne se montrent pas à la hauteur des enjeux. Nous en reparlerons mardi prochain, lorsque nous examinerons les deux traités relatifs au Mécanisme européen de stabilité.
Cependant, ce projet de loi de finances rectificative aborde d’ores et déjà la mise en œuvre des décisions prises par les États de la zone euro, en permettant le versement des deux premières tranches de la dotation en capital de la France, qui explique la dégradation du déficit budgétaire constaté dans ce collectif. Il ne constitue que le premier de plusieurs versements, dont le montant total atteindra 16, 3 milliards d’euros.
Il faut toutefois garder à l’esprit que s’ajoutent à ces 16, 3 milliards d’euros de capital « appelé », dont le versement est certain, 126 milliards d’euros de capital « appelable », que la France s’engage, par le traité, à verser en cas de besoin.
Ce capital appelable du MES, dont la commission a débattu hier avec le directeur du Trésor, s’apparente à bien des égards à une garantie de l’État, dont la loi organique relative aux lois de finances prévoit qu’elle ne peut être accordée que par une loi de finances. C’est d’ailleurs au travers d’une loi de finances qu’a été accordée la garantie de l’État aux émissions du Fonds européen de stabilité financière, le FESF.
Par conséquent, si le Parlement décidait de ratifier le traité sur le MES en l’absence d’une « disposition miroir » inscrite dans une loi de finances, il permettrait que le seul fondement juridique interne de l’octroi de garantie soit un projet de loi de ratification, et non une loi de finances. La conformité à la LOLF du projet de loi de ratification serait discutable. J’imagine que le Gouvernement a mesuré la responsabilité qu’il prend à cet égard en élaborant ce projet de loi de finances rectificative…
Le MES constitue un mécanisme permanent de soutien aux États en difficulté en cas de menace pour la stabilité de la zone euro. Il est encore sous-dimensionné et ne peut se refinancer auprès de la Banque centrale européenne, mais il représente un attribut fort de la solidarité européenne. Malheureusement, il a été instrumentalisé, pour des raisons de politique intérieure, par la Chancelière allemande et le Président de la République, qui ont conçu le traité sur la stabilité, la coopération et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire, le TSCG.
Toutefois, étant d’un naturel optimiste, je veux croire que cette initiative franco-allemande véritablement contre-productive et prise sur une base intergouvernementale en court-circuitant le processus communautaire sera renégociée et connaîtra, en tout état de cause, le même sort que la précédente, …