Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne souhaite pas m’étendre sur l’économie générale de ce texte ni même sur la TVA sociale ; mes collègues s’en sont chargés, démontrant que ces mesures sont injustes et inefficaces sur le plan macroéconomique.
Pour ma part, je serais tenté de dire que le seul test d’opportunité valable de cette mesure eût été un référendum ! Cette procédure est encensée par le candidat Sarkozy, mais, hélas, le président se garde bien d’y recourir ! Et pour cause : derrière la notion de compétitivité, c’est bien du troisième plan de rigueur qu’il s’agit. Osons simplement le dire !
Si, pour la France hexagonale, le Gouvernement fait semblant de masquer la rigueur par la suppression des cotisations patronales, pour les outre-mer, cette rigueur constitue bel et bien le fil rouge du collectif budgétaire.
En effet, le projet prévoit l’annulation de 25 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Il s’agit d’une tendance de fond, qui se poursuit depuis l’instauration du comité interministériel de l’outre-mer.
Entre 2010 et 2012, le budget de la mission « Outre-mer » a diminué de 49 millions d’euros pour les autorisations d’engagement et de 57 millions d’euros pour les crédits de paiement.
Dans la loi de finances pour 2012, le programme « Emploi outre-mer » se retrouve amputé de 48 millions d’euros en autorisations d’engagement par rapport à 2011. Le projet de loi de finances rectificative pour 2012 prévoit une baisse supplémentaire de 25 millions d’euros, portant la diminution des engagements de l’État à 73 millions d’euros en quatorze mois. Les crédits de paiement diminuent de manière similaire.
Au regard des fonctions de ce programme, ces diminutions sont aberrantes : la situation de l’emploi est partout sinistrée, les chiffres du chômage étant plus de deux fois supérieurs à ceux, déjà mauvais, de la métropole.
Le taux de chômage est de 20, 8 % en Martinique, 21 % en Guyane, 22, 6 % en Guadeloupe, 27 % à Mayotte et 28, 9 % à la Réunion, qui, depuis trois jours, se mobilise contre la vie chère.
Croyez-le, ce que le Gouvernement offre d’une main aux entreprises hexagonales au travers de l’article 1er de ce texte, il le soustrait aussitôt de l’autre main des programmes d’aide à la création d’emplois !
À l’heure du bilan de l’action gouvernementale, on constate un échec total en matière de formation et d’emploi, en outre-mer comme en métropole.
Il y a dans ce collectif un vrai plan de rigueur outre-mer qui ne dit pas son nom, dont les effets se traduisent aussi au-delà des crédits de la mission « Outre-mer ».
Ainsi prévoit-il l’annulation de crédits sur des postes que l’outre-mer partage avec l’ensemble du territoire, lesquels sont nécessaires au développement de certaines filières économiques.
Comment parler de soutien au développement endogène, de renforcement de la compétitivité pour des activités économiques comme celles, par exemple, du secteur primaire ?
Entre 2002 et 2010, la production de bovins en Guyane a baissé de 20 % et celle de porcins a chuté de 65 %.
Le cas de la riziculture est encore plus révélateur de l’échec d’un développement endogène : il y avait une production de 9 000 tonnes de riz en 2009, contre 1 900 tonnes au début des années 2000. Aujourd’hui, il n’y a plus de riz en Guyane ! La filière rizicole a disparu !
Et que dire de la pêche, premier poste d’exportation de la Guyane en dehors du domaine spatial : pour 4 200 tonnes de crevettes en 1998, un peu moins de 1 000 tonnes sont débarquées aujourd’hui !
Or, loin de soutenir ces filières, ce projet de loi de finances rectificative prévoit une baisse de 56 millions d’euros des crédits de paiement pour la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ».
Que l’on ose donc nous dire que cette amputation de crédits va favoriser la compétitivité de la production agricole ou la création d’emplois en Guyane !
Dès lors, je m’interroge sur la cohérence de l’action gouvernementale.
Soit la politique du Gouvernement est totalement incohérente, tant l’inadaptation est flagrante entre les constats faits et les réponses apportées, tant la valse est rapide entre les choix affichant un apparent soutien à nos économies et les coupes sévères et très réelles inscrites en lois de finances.
Soit elle est parfaitement cohérente, témoignant de la volonté constante et implacable de maintenir ces territoires dans le « mal-développement » et la dépendance, au mépris de l’équité républicaine, comme si, en définitive, ceux-ci étaient la sempiternelle variable d’ajustement des contraintes budgétaires de l’État.
Arrêtez donc de lancer régulièrement sur les marchés des catalogues de mesures spéciales pour les outre-mer ! Ce sont autant de publicités mensongères puisque leur obsolescence est parfois plus rapide que la parution de leurs décrets d’application ! Arrêtez de mentir aux Français, à tous les Français : dites simplement la vérité ! §