Tous ces amendements ont trait à un sujet très important, à savoir la réforme des moyens syndicaux, sur lequel nous avons souhaité travailler avec les organisations concernées.
Nous sommes convenus, dans le cadre d’un relevé de conclusions, qu’un principe guiderait désormais la mise à disposition de tels moyens : à périmètres constants, moyens constants. Je rappelle qu’il s’agit d’un outil essentiel pour faire vivre la démocratie sociale dans ses différentes instances. Nous sommes également convenus, après un long débat, de la nécessité d’introduire de la transparence dans l’utilisation de ces moyens, et ce dès la première mise à disposition comme dès le premier euro. Je sais qu’un débat s’est déroulé à l’Assemblée nationale aujourd’hui même, notamment sur cette question.
En tout cas, il faut nous féliciter d’être parvenus à ce relevé de conclusions. Nous avons débattu de cette réforme pendant de longs mois avec les organisations syndicales représentatives. Aucun gouvernement ne s’était attaqué à ce problème depuis pratiquement les années quatre-vingt. Il était temps d’agir, de privilégier la transparence et de définir un cadre stabilisé en matière de mises à disposition.
Le Gouvernement est très attaché à la démocratie sociale. Il était donc légitime que les organisations syndicales aient l’assurance de disposer des moyens de fonctionner, afin de faire vivre les instances de concertation dans l’ensemble de la fonction publique.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai également souhaité que le sujet soit réglé avant les élections professionnelles, qui se sont déroulées le 20 octobre dernier et pour lesquelles plus de 3 millions d’agents se sont rendus aux urnes en vue de choisir leurs représentants et leurs délégués dans la fonction publique d’État et dans la fonction publique hospitalière.
Si nous avions attendu l’issue des élections, nous aurions évidemment pris le risque que les syndicats censés sortir victorieux de cet exercice de démocratie sociale impriment leur rythme. Or, sur ce sujet, j’ai pu constater des divergences très marquées entre les différentes organisations, selon leur histoire et leur importance. Nous avons donc considéré qu’il fallait tenir compte, dans le cadre d’une telle mise à disposition de moyens, de la représentativité et de ce pluralisme syndical dont nous sommes les héritiers. Nous avons trouvé sur ce point un facteur d’équilibre avec l’ensemble des organisations syndicales.
Des représentants ont donc été élus dans plus de 5 000 instances de dialogue social, conséquence directe de l’adoption de la loi du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique. Je veux d’ailleurs saluer l’excellent rapport de M. Vial sur cette loi, qui nous a beaucoup aidés à réformer la représentativité en la fondant sur le fait démocratique. C’est une révolution, en tout cas dans la démocratie sociale.
Il y a donc eu, je le répète, une intense concertation. J’ai remis aux organisations syndicales, le 29 septembre dernier, un relevé de conclusions dont les syndicats ont « pris acte ». Nous sommes allés aussi loin que possible dans la convergence de vues.
Je vous rappelle les principes retenus : d’une part, à périmètre constant, moyens constants ; d’autre part, un principe de transparence sur la mise à disposition et l’utilisation de ces moyens, auquel j’étais personnellement attaché. Il ne s’agit nullement d’inquisition, mais de s’assurer que les moyens mis à disposition sont bien consacrés à l’exercice de la démocratie sociale. Le projet de loi comporte d’ailleurs un article spécifique sur ce point, inspiré des travaux de votre collègue Mme Procaccia, dont je tiens à saluer la clarté et la finesse d’analyse.
Cette réforme permet donc de simplifier les catégories de moyens. Dans la fonction publique de l’État et dans la fonction publique hospitalière, je le répète, la traduction de ce relevé de conclusions est de nature réglementaire. En revanche, chacun le sait, pour la fonction publique territoriale, une partie des règles appartient au domaine de la loi : tel est l’objet des amendements n° 85, 86, 87 et 91, que je soumets à la Haute Assemblée.
Un point particulier me semble devoir être souligné s’agissant de la fonction publique territoriale : outre le fait que cette réforme intervient à moyens constants, elle ne doit pas conduire à des transferts de charges entre les collectivités et les centres de gestion, ces derniers jouant un rôle particulier en la matière. Nous y avons veillé.
Par ailleurs, l’axe 4 du relevé de conclusions traite des garanties devant être apportées aux représentants syndicaux dans le déroulement de leur carrière. Le Gouvernement a souhaité aborder ce point avec les organisations syndicales, notamment offrir de nouvelles perspectives à des personnes qui se sont engagées pendant plusieurs années au service de leurs collègues. Ainsi un leader syndical s’apprête-t-il à mettre un terme à ses fonctions après treize ans passés à la tête d’une grande confédération. Ces personnes doivent être accompagnées. Si nous voulons avoir des partenaires sociaux de qualité, les agents ne doivent pas être pénalisés dans leur avancement.
Aujourd’hui, comme vous le savez, le statut de la fonction publique prévoit que les agents bénéficiant d’une décharge à temps plein avancent au taux moyen de leur corps ou de leur cadre d’emploi. Il faut assouplir cette règle pour qu’elle puisse également profiter à des agents ayant une décharge à temps partiel. Il est souhaitable qu’une partie des représentants des agents puisse conserver une activité professionnelle dans les services pour ne pas perdre le contact avec la réalité du terrain.
Les amendements n° 88, 89 et 90 prévoient cette évolution dans chacune des trois fonctions publiques en renvoyant à un décret en Conseil d’État le soin de déterminer, à l’issue de la concertation qui doit se poursuivre avec les organisations syndicales, la quotité du temps de travail ouvrant le bénéfice de cet avancement moyen. Nous vous invitons à les adopter.
Je saisis l’occasion de vous dire combien j’ai apprécié la solidité et l’engagement des organisations syndicales. Elles auraient pu céder, à la veille des élections, à la facilité de la démagogie. Elles ont souhaité assumer leurs responsabilités, avec un grand sens de l’engagement. Je tiens vraiment à saluer devant vous l’élaboration de ce relevé de conclusions, qui n’est pas un accord compte tenu des positions très divergentes des syndicats.
En tout cas, nous avons beaucoup travaillé à rechercher des voies de convergence. Je rappelle qu’aucun gouvernement, depuis les années quatre-vingt, ne s’était consacré à la question centrale des moyens attribués à la démocratie sociale et de son corollaire, la transparence dans la mise à disposition de moyens publics pour l’exercer.
Ce relevé de conclusions fait honneur à la conception du dialogue social que nous partageons, en dehors duquel il n’y aurait que des chemins de traverse, dans un monde confronté à des mutations, avec une fonction publique qui devra s’adapter, être accompagnée, ce qui implique l’existence de syndicats représentatifs, qui aient les moyens d’apporter leur concours sans pénaliser ceux qui se mettent à la disposition de ce dialogue.
C’est dans cet esprit, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous vous proposons ces amendements.