Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente du groupe de travail, mes chers collègues, à la conférence de Durban de décembre 2011, les grands émetteurs de CO2 de la planète ne se sont pas entendus pour réduire les émissions rapides à des niveaux conformes à la demande des scientifiques.
Ce n’est pas une surprise : deux ans après l’échec de Copenhague, le renforcement des engagements des États n’était pas sur la table de négociation de Durban.
C’est évidemment préjudiciable. Nous accumulons un retard qui rend bien plus difficile à atteindre l’objectif final d’une stabilisation du réchauffement aux alentours de plus 2 degrés, situation dont nous savons que des millions de personnes souffriront concrètement, mais aucun observateur sérieux ne pouvait s’attendre à un résultat aussi ambitieux lors de cette conférence.
Je suis donc convaincu qu’il ne sert à rien de ressasser cette déception, aussi profonde soit-elle, sinon à conforter la démobilisation des acteurs de terrain et des opinions publiques, dont le scepticisme se nourrit tant déjà des images déprimantes de négociations interminables menées par des délégués épuisés par l’accumulation des nuits blanches – Mme la ministre sait de quoi je parle…
Nous n’avons pas de plan B : la négociation multilatérale est la seule voie possible, même si elle est encore aujourd’hui obstruée par la superposition des intérêts et égoïsmes nationaux. Aussi importe-t-il peu de qualifier la conférence de Durban d’échec ou d’avancée significative. Il s’agit maintenant de s’investir résolument dans le contexte et le calendrier décidés en Afrique du Sud.
Il est vrai que nous n’avons pas sauvé la planète à Durban, mais nous disposons maintenant d’un cadre plutôt clair, d’un calendrier, d’un chemin « acté » pour rechercher un accord associant tous les grands pays émetteurs de gaz à effet de serre, ce qui n’allait pas de soi il y a encore quelques mois !
Des lignes ont bougé à Durban. Incapable de se faire respecter deux ans plus tôt, l’Europe a retrouvé un certain leadership. À ceux qui la croyaient hors jeu pour cause d’endettement de ses États membres, elle a répondu en abandonnant l’attitude de bon élève toujours prêt à en faire plus qui avait été la sienne à Copenhague, où elle avait proposé de s’engager à réduire ses émissions de 30 % d’ici à 2020 en échange d’un accord mondial. Cette fois, elle a montré les dents et menacé de saborder elle-même le protocole de Kyoto, qu’elle avait pourtant porté à bout de bras jusque-là.
Cette attitude a payé : rejointe par les petits États insulaires et les pays les moins avancés, elle a rallié à ses propositions près des trois cinquièmes des États présents, effaçant le souvenir de Copenhague, où les pays du Sud, regroupés dans le G77 et menés par la Chine, avaient fait bloc.
Interpellée par cette nouvelle coalition, la Chine a semblé hésiter à Durban. Si elle a finalement dit « oui » – non sans quelques ambiguïtés d’ailleurs –, c’est probablement pour éviter de se couper de ses amis du Sud, mais aussi sans doute par crainte, tout simplement, pourrait-on dire, du changement climatique. La Chine, en effet, est particulièrement fragile à cet égard, car très exposée aux conséquences du dérèglement du climat. Or son niveau d’émissions ne lui permet plus guère d’exciper d’une « responsabilité commune mais différenciée » qui remonterait aux premiers temps de la révolution industrielle et des canonnières à charbon sur le Yang-Tsé-Kiang.