Intervention de Maurice Vincent

Réunion du 17 janvier 2012 à 14h30
Débat sur l'état des négociations internationales climatiques

Photo de Maurice VincentMaurice Vincent :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais apporter quelques réflexions complémentaires au débat sur trois points : le bilan de la conférence de Durban, déjà largement évoqué, la reconnaissance officielle du rôle des acteurs locaux, les actions menées par les collectivités territoriales.

La conférence de Durban peut faire l’objet soit d’une lecture positive – le bilan aurait pu être pire si aucun accord n’avait été signé et si aucun relais au protocole de Kyoto n’avait été trouvé –, soit d’une lecture beaucoup plus négative – il ne s’agirait que d’un accord a minima, obtenu à l’arraché, manifestement insuffisant en raison de l’absence de règles contraignantes et du peu d’engagement des États.

Quoi qu’il en soit, et chacun en a bien conscience, le temps presse. Une décennie risque d’être sinon gaspillée, du moins insuffisamment mise à profit au regard de l’ampleur des enjeux et de l’écart entre les conclusions de cette conférence et les résultats des travaux des négociateurs scientifiques du GIEC, lesquels tirent régulièrement la sonnette d’alarme sur l’urgence de l’action pour limiter le réchauffement climatique.

Malgré quelques progrès, il y a un certain nombre de blocages politiques à l’échelle internationale, blocages qui ne peuvent être sous-estimés.

Ainsi, les États-Unis restent hostiles à l’idée d’un nouveau traité contraignant. Ils ont également engagé un bras de fer avec la Chine afin de lui imposer les conditions de vérification de ses émissions de gaz à effet de serre, mesure à laquelle les pays émergents ne sont pas soumis.

Seule l’Union européenne, dont nous connaissons néanmoins les faiblesses institutionnelles, continue à jouer un rôle véritablement actif.

De surcroît, les intérêts des pays en développement sont toujours difficilement pris en compte.

Alors que la conférence « Rio+20 » s’esquisse, le bilan des négociations reste très insuffisant et la situation demeure extrêmement inquiétante.

J’en viens à la reconnaissance du rôle des acteurs locaux.

Au-delà des États, les acteurs locaux, dans les villes, les diverses communautés, les départements et les régions, sont très actifs et s’engagent concrètement pour faire avancer la situation.

À titre d’exemple, au mois de décembre dernier, Gregor Robertson, maire de Vancouver, a indiqué que sa ville continuerait à s’engager dans l’esprit du protocole de Kyoto, même si son pays s’est retiré des négociations. Et son action n’est pas isolée. De nombreux maires américains ont fait de même, au moment où le gouvernement Bush refusait toute négociation sur le climat.

Je rappellerai également l’engagement solennel, au mois de février 2009, de centaines de maires européens de dépasser, à l’échelon local, les engagements pris par les États. Ainsi, les 3 000 signataires de la convention des maires, qui représentent 131 millions d’habitants, se sont engagés à réduire de plus de 20 % sur leur territoire les émissions de CO2 d’ici à 2020 par rapport à 1990.

La reconnaissance de l’action des collectivités territoriales en matière de lutte contre le réchauffement climatique est légitime et nécessaire. C’est un enjeu non seulement politique et même symbolique, mais aussi financier.

Lors de la conférence de Cancún, l’association Cités et gouvernements locaux unis a notamment insisté sur les efforts qui devaient être faits pour soutenir financièrement l’action des pays en développement.

Au-delà de la déception qui a fait suite au sommet de Copenhague, de Cancún et de Durban, il faut souligner l’engagement des villes dans une démarche « onusienne » avec la création du « registre carbone », qui permet de suivre les actions menées en matière de lutte contre le réchauffement climatique par 51 villes regroupant 83 millions d’habitants.

En France, de nombreuses collectivités ont depuis longtemps engagé des stratégies d’atténuation du réchauffement et d’adaptation à ce phénomène, notamment dans les secteurs du bâtiment et des transports.

Les actions menées pour économiser l’énergie produisent des résultats écologiques, financiers – elles se traduisent, par exemple, par une baisse des factures pour les locataires – et sociaux, notamment dans le cadre la lutte contre la précarité énergétique.

Des investissements très importants ont également été réalisés dans le domaine des transports urbains et interurbains afin d’encourager un report modal des déplacements individuels vers les transports collectifs et « doux ». Les actions menées en faveur de l’intermodalité sont d’ailleurs largement répandues dans les collectivités.

Je voudrais maintenant revenir sur l’importance des réformes conduites en matière d’urbanisme et sur la nécessité de soutenir la limitation de l’étalement urbain, question qui relève des SCOT. Ce n’est pas toujours facile, notamment pour les maires des petites communes. Pourtant, ces éléments ont une importance majeure pour préparer l’avenir de façon sérieuse.

Les collectivités innovent. Je soulignerai, par exemple, les efforts de la ville de Nantes, qui a créé des forêts urbaines et a le projet de mettre en place une ceinture verte, ou encore ceux de Lyon. À Saint-Étienne, des stratégies pour préparer l’adaptation – hélas indispensable – au changement climatique sont dès maintenant mises sur pied.

Les collectivités françaises prennent donc leurs responsabilités et leur part dans les stratégies d’adaptation. En dépit des contraintes financières qui pèsent sur les uns et les autres, il est indispensable de soutenir leurs efforts ; mais, bien sûr, cette action ne sera pas suffisante et ne remplacera pas la nécessaire politique européenne dans laquelle je souhaite voir notre pays jouer un rôle moteur.

Au-delà, il s’agit de mettre en œuvre un modèle de développement pour privilégier une croissance verte dans les années à venir.

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