Je suis directeur-adjoint d'une unité mixte de recherche de l'Inserm et de l'Université de Caen consacrée à la prévention des cancers, et je m'occupe plus particulièrement des facteurs des risques professionnels et environnementaux, dans le milieu agricole mais aussi chez les personnes exposées à l'amiante à partir notamment des registres des cancers.
En 1991, lorsque nous avons entamé nos travaux, des études épidémiologiques avaient déjà été publiées à l'étranger mais presque aucune en France. Les agronomes n'envisageaient guère que l'on se passe de pesticides, presque toutes les organisations professionnelles agricoles opposaient une fin de non-recevoir à nos propositions d'étudier ce milieu, et les pouvoirs publics s'étonnaient de notre intérêt pour cette question. Cette année-là a été publiée la directive 91/414/CE régissant l'homologation des pesticides au niveau européen, et l'on commençait à parler de réévaluer les anciennes molécules. Or nous n'étions pas même en mesure de savoir quels pesticides étaient utilisés en France, pas davantage en Basse-Normandie : l'Union des industries de protection des plantes (UIPP) ne nous a pas donné l'accès à leurs données hormis les tonnages.