Intervention de Rémi Frentz

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 29 février 2012 : 1ère réunion
Diversité et accès aux études supérieures — Audition de M. Rémi Frentz directeur général de l'agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances acsé

Rémi Frentz, directeur général de l'agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (Acsé) :

L'accès des jeunes à l'enseignement supérieur constitue une de nos quatre priorités thématiques, avec l'éducation, la prévention de la délinquance et la santé. Nos actions sont conduites dans les quartiers sensibles et prioritaires de la politique de la ville (au nombre de 2 200, ayant fait l'objet de 500 contrats urbains de cohésion sociale (Cucs)).

Sur le plan budgétaire, l'éducation est notre première priorité ; nous la préservons en dépit d'un budget qui s'est considérablement réduit depuis deux ans. 80 millions d'euros sont ainsi consacrés au programme de réussite éducative. Il s'agit de promouvoir l'accès à un parcours d'excellence, condition de la réussite de l'insertion professionnelle et sociale des jeunes. C'est une question de justice, d'égalité des chances et même un symbole, afin qu'à potentiels comparables, certains jeunes ne se sentent pas exclus.

Notre programme phare, « cordées de la réussite », a été lancé en 2008 par le ministère en charge de la politique de la ville (au titre du programme budgétaire n° 147) et le ministère de l'enseignement supérieur. Il s'agit de labelliser des projets dans des lycées, voire des collèges, dans des quartiers prioritaires de la politique de la ville, avec un double objectif :

- informer et expliquer aux jeunes concernés les cursus et filières de l'enseignement supérieur ;

- accompagner des jeunes jusqu'au baccalauréat, pour remédier à leur défaut d'ambition car ils sont souvent inhibés par leur milieu social, familial ou culturel.

Comment fonctionne le programme ? Un établissement d'enseignement supérieur est considéré comme « tête de cordée », et « encorde » un certain nombre d'établissements secondaires. Ainsi, des étudiants issus de l'établissement « tête de cordée » accompagnent des élèves des établissements secondaires concernés, tout d'abord à travers l'organisation de journées portes ouvertes, mais surtout par la mise un place d'un tutorat.

Un étudiant de classe préparatoire aux grandes écoles ou d'une grande école offrira donc une aide à des élèves identifiés comme prometteurs. Au-delà d'une offre d'accompagnement scolaire, il peut aussi s'agir d'un soutien culturel, à travers des sorties au théâtre, au cinéma, de concerts, etc.

Permettez-moi de rappeler quelques chiffres.

En 2011, on comptait 312 cordées de la réussite, contre 250 l'année précédente. L'objectif fixé par le ministère était d'atteindre le chiffre de 300 « cordées de la réussite », on peut considérer qu'il est atteint.

Ces quelques 312 cordées de la réussite concernent 2 000 lycées et collèges, pour un total de 47 400 élèves dont 14 000 élèves ayant bénéficié du tutorat par 4 500 tuteurs ; 50 % des actions de tutorat ont été menées deux fois par mois au moins.

Le programme des « cordées de la réussite » est piloté par le ministère de l'enseignement supérieur ainsi que le ministère de la ville. L'objectif de ce dispositif étant d'accompagner des jeunes jusqu'au niveau requis pour les concours des grandes écoles ou des filières d'excellence, il ne s'agit évidemment pas de voie spécifique d'entrée, mais d'un idéal de méritocratie républicaine.

L'école de commerce ESSEC avait lancé, en 2003, le dispositif : « Une grande école, pourquoi pas moi ? » (PQPM), premier dispositif s'inscrivant dans ce que nous souhaitons réaliser.

Les « cordées de la réussite » représentent un dispositif massif qui ne couvre pas encore l'ensemble du territoire.

En parallèle, se sont créées de nombreuses classes préparatoires intégrées, comme à l'école de gendarmerie, les Instituts régionaux d'administration ou encore l'École nationale d'administration parmi d'autres. Nous avons soutenu et financé ces classes préparatoires intégrées aux écoles. A l'Institut national du patrimoine, cette classe préparatoire intégrée a concerné quinze jeunes, dont deux ont réussi le concours.

De plus, nous finançons aussi quelques grandes associations travaillant au même objectif. Ces associations sont souvent animées bénévolement par des hommes venus de l'entreprise ou des hauts fonctionnaires.

Parmi elles, nous travaillons avec « Réussir aujourd'hui » qui a organisé récemment un colloque sur l'accès des jeunes aux filières sélectives et mis en place des tutorats d'élèves, des séjours linguistiques et d'autres actions du même ordre. Nous soutenons aussi l'association Fratelli, avec une subvention de 32 000 euros cette année afin de contribuer à leur recherche de partenariats pour leurs « filleuls » de milieux modestes. L'association « Passeport avenir » a reçu 45 000 euros et travaille sur les difficultés d'accès au marché de l'emploi pour les étudiants ayant réussi leur concours et donc la réduction d'inégalités et de difficultés d'intégration.

La question se pose aujourd'hui de l'évaluation de ces dispositifs, avec une réflexion sur une auto-évaluation. Il semblerait opportun de mesurer l'impact du programme sur l'ambition du jeune à l'entrée du programme et en sortie.

De fait, je demande aux établissements « tête de cordée » d'assurer un suivi au moins pendant les six premiers mois - et dans l'idéal toute l'année - qui suivent le baccalauréat. Les étudiants concernés ressentent-ils un isolement social ou culturel ou non à ce moment-là ? Quels sont leurs résultats ?

Le budget total pour l'ensemble du programme des « cordées de la réussite » en 2010-2011 était de 8,7 millions d'euros et la part de l'Acsé était de 48 % de ce budget.

Ce programme consacre en moyenne 22 000 euros par an pour une cordée, soit une dépense moyenne de 250 euros par élève. Le financement médian d'une « cordée de la réussite » par l'Acsé est de 15 000 euros. La moitié des « cordées de la réussite » reçoivent plus de 15 000 euros de l'Acsé. Une cordée typique est financée environ à 66 % par l'Acsé.

Pour 2011-2012, notre apport budgétaire a été de 4,6 millions d'euros.

Une convention a été signée en 2011 entre l'Acsé et la Conférence des grandes écoles (CGE). Elle s'attache à trois axes principaux :

- élargir le réseau par l'accompagnement au montage de projets contribuant à l'ouverture sociale des grandes écoles. Tous les établissements membres de la CGE peuvent bénéficier d'une aide concernant des projets élargissant leur ouverture sociale. Il y en a eu deux cents en 2011, dont trente nouveaux. Nous avons co-financé ces projets ;

- travailler à l'« ouverture sociale » : la CGE a organisé cinq séminaires d'une journée, avec la participation active de l'Acsé, visant entre 50 et 80 personnes des grandes écoles, universités et classes préparatoires aux grandes écoles. C'est un lieu d'échange entre les acteurs du programme, où l'on diffuse des bonnes pratiques. 25 projets ont été présentés, exploités, exposés, diffusés. Nous avons aussi mis en place un séminaire de trois jours porté par l'école Centrale (Paris) et organisé par la CGE à l'égard de près de trois cents destinataires ;

- mettre à disposition de nouveaux outils, nouvelles ressources telles qu'un livre blanc de l'ouverture sociale des grandes écoles qui doit être actualisé.

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