Il me revient de vous présenter nos recommandations. Je souhaite rappeler, en préambule, que nous avons élaboré ce rapport dans la perspective d'élargir le champ du débat et d'ouvrir plusieurs pistes de réflexion, donnant à chacun la possibilité de se déterminer. L'importance de la pratique du cumul des mandats et des fonctions électives en France nous a effectivement conduits à formuler quelques recommandations.
Certaines recommandations font consensus, notamment celles touchant à la liste des fonctions entraînant l'inéligibilité des candidats aux mandats locaux. Sur un plan purement formel, cette liste mérite d'être réactualisée. Les fonctions d'inspecteur des instruments de mesure ou d'inspecteur des manufactures de tabac, tombées en désuétude, sont à supprimer, tandis que les fonctions d'inspection dans les domaines de la santé ou des nouvelles technologies - directeur général de l'Agence régionale de santé, responsable de l'antenne départementale de celle-ci, ou encore directeur d'hôpital - sont, selon nous, à ajouter.
Seuls les représentants de certaines autorités administratives indépendantes, dont le défenseur des droits ou le défenseur général des lieux de privation de liberté, sont inéligibles aux mandats de conseillers généraux et régionaux. Ne faudrait-il pas étendre cette règle aux représentants de l'Autorité des marchés financiers ou de la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI) ?
Par cohérence, il conviendrait d'appliquer aux directeurs de cabinet des présidents d'EPCI et des futurs pôles métropolitains le même régime d'inéligibilité aux mandats locaux qu'aux membres de cabinet du président d'un conseil général ou d'un conseil régional.
Nous avons ensuite identifié des pistes pour restreindre le cumul des fonctions exécutives locales avec un mandat parlementaire, qui fait l'objet d'un rejet croissant de nos concitoyens, voire également d'élus locaux. L'objectif est aussi de limiter les situations de conflits d'intérêts, qui se sont multipliées avec la décentralisation. Prenons l'exemple d'un collègue qui serait maire, vice-président d'un conseil général, mais aussi d'une communauté urbaine et, pourquoi pas, d'une société d'économie mixte ; le danger est réel, pour lui et les collectivités territoriales qu'il administre.
Faut-il instaurer une règle stricte de non-cumul entre mandat parlementaire et mandat d'exécutif territorial ou la moduler en fonction d'un seuil démographique ? Pourquoi ne pas imaginer des approches différentes selon la taille des communes et des intercommunalités ?
Au regard du développement attendu de l'intercommunalité, il faut intégrer la présidence d'un EPCI à fiscalité propre dans la liste des mandats incompatibles avec un mandat national - inutile de faire référence aux pôles métropolitains, qui sont des intercommunalités au troisième degré. Cette proposition, qui revaloriserait cette fonction et augmenterait la disponibilité des parlementaires qui l'exercent, peut également être modulée en fonction d'un seuil démographique. Pour le bon fonctionnement de la démocratie locale, prévoyons la même mesure pour les élus locaux.
Si la délégation n'adoptait aucune de nos propositions, une position de repli consisterait à s'interroger sur la limitation des mandats dans le temps, à l'instar de la règle posée pour la présidence de la République depuis la réforme constitutionnelle de 2008. Dans le cas contraire, faut-il donner la possibilité d'exercer plus de trois fois le même mandat local ? La question est ouverte.
Enfin, nous vous soumettons sept pistes de réflexion, qui ne sont pas cumulatives. Premièrement, créer un organe de déontologie chargé d'examiner les régimes d'inéligibilité et d'incompatibilité, afin de garantir l'objectivité des critères existants et, le cas échéant, d'améliorer le régime juridique concerné. Deuxièmement, réactualiser la liste des fonctions entraînant l'inéligibilité des candidats aux mandats locaux. Troisièmement, inclure dans cette liste de nouvelles fonctions territoriales, afin de tenir compte des modifications de certaines fonctions induites par les différents textes portant réforme de la décentralisation. Quatrièmement, rendre inéligibles aux mandats de conseillers municipaux, généraux et régionaux, les membres de certaines autorités administratives indépendantes. Cinquièmement, fixer la même règle pour les membres de cabinet des présidents d'EPCI. Enfin, deux recommandations que je n'ose qualifier de majeures : intégrer les fonctions de président d'EPCI à fiscalité propre à la législation relative au cumul des mandats applicables aux parlementaires, idem pour les élus locaux.