Les facteurs explicatifs sont pluriels : psychologiques, sociologiques et économiques... Les aspects psychologiques sont difficiles à démêler des aspects sociaux. S'agissant des premiers, se pose d'abord la question de l'estime de soi. On constate que les individus, en particulier pendant l'enfance et l'adolescence, peuvent avoir une mauvaise estime de soi en raison de leur apparence physique. Les seconds aspects, d'ordre sociologique, concernent les questions d'intégration, de séduction. Des enquêtes convergentes révèlent la stigmatisation des personnes dont l'apparence physique n'est pas dans la norme et qui sont donc susceptibles d'être victimes de moqueries ou de faits de harcèlement. Les enquêtes de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) ont permis de constater que la taille et le poids constituent le premier motif, déclaré par les Français, de moquerie, de mise à l'écart ou de refus d'un droit, à égalité avec le motif tiré des noms et prénoms. Entre dix et dix-neuf ans, tranche d'âge pendant laquelle l'on dénombre le plus de moqueries, la taille et le poids représentent le premier motif de discrimination pour 57 % des personnes interrogées.
En ce qui concerne la vie professionnelle en général et l'accès à l'emploi en particulier, l'Observatoire des discriminations a mené des études dont les résultats sont inquiétants car ils démontrent les impacts discriminatoires de l'apparence physique et notamment du visage. Dans les enquêtes européennes, l'apparence physique est le quatrième motif de discrimination déclaré. Au troisième rang arrive l'âge, ce qui explique que les individus cherchent à combattre les stigmates du vieillissement par tous les moyens. Ces stigmates apparaissent ainsi comme une importante cause de discrimination, avant même le handicap.
Les enquêtes effectuées pour le compte du Défenseur des droits, de l'ancienne Halde et du Bureau international du travail (BIT) sur les discriminations dans le domaine du travail montrent que l'apparence physique est le troisième motif déclaré par les Français dans la fonction publique, le cinquième dans le secteur privé... Les tests sur les CV avec photos confirment sans erreur possible que dès le stade du recrutement, une personne au visage en surcharge pondérale, disgracieux ou dissymétrique est victime de discrimination. J'utilise également des mesures de stéréotypes sur le modèle des tests d'association implicite développés aux Etats-Unis. Ces tests montrent l'étendue des stéréotypes et des préjugés négatifs. Sans même aborder les questions du licenciement et des écarts de salaires, nous voyons que l'enjeu de l'apparence physique est important pour l'accès et le maintien dans l'emploi.
Il y a enfin la question du corps parfait et de la volonté de correspondre aux modèles promus par la publicité dans tous les médias. Dans ce domaine, l'effort des annonceurs est limité et les progrès sont très lents.