Quel est le schéma de financement ? Ces crédits iront au compte d'affectation spéciale des participations financières de l'État et de là à Oseo, établissement public, qui ne versera dans un premier temps que 500 millions à Oseo SA, laquelle dotera la nouvelle filiale Oseo Industrie, les 500 autres millions étant réservés en l'attente d'une entrée au capital d'Oseo industrie - celle de la Caisse des dépôts et consignations, qui a accepté la semaine dernière. Mais si ces crédits résiduels demeuraient à Oseo établissement public, rien n'est dit de leur utilisation.
Sur le fond, s'il est utile de créer, au profit de l'industrie, un outil simple et efficace regroupant les prestations d'Oseo et de CDC Entreprises, on voit pourtant mal l'intérêt du Meccano retenu : non seulement la nouvelle structure juridique fournit les mêmes prestations que celles qui existent, mais encore on démembre Oseo quand, il n'y a pas deux ans, on procédait à des regroupements. Le directeur général d'Oseo, François Drouin, que nous avons entendu l'année dernière, nous a dit qu'une recapitalisation était nécessaire, à hauteur d'un milliard. Mais qu'entend-on par soutien à l'industrie, quand on prévoit que les aides pourront aller aux entreprises quel que soit le nombre de leurs salariés ? C'est dire qu'une réflexion est vraiment devenue nécessaire quant à la vocation d'Oseo. Sans compter que les sommes allouées sont prélevées sur des programmes importants pour la compétitivité de notre économie - numérique, innovation, économie verte.
Que nous demande-t-on, en somme, avec ce projet de loi de finances rectificative, sinon de nous prononcer sur les propositions d'un candidat à la présidentielle ? J'en veux pour preuve la TVA dite sociale, qui est à l'origine de ce texte. Le sujet n'est pas nouveau pour nous, il est sur les étagères depuis 1993 et la commission des finances en a bien souvent discuté, à l'initiative de MM. Arthuis et Marini. Au reste, une part de TVA a déjà été affectée au financement de la protection sociale, en compensation des allègements généraux de cotisations (TVA brute sur les produits pharmaceutiques, sur le tabac), à quoi s'est ajoutée la TVA sur les boissons alcoolisées pour la compensation des exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires. Il en a été de même avec la réforme des retraites, pour toute une série de collectes, depuis celle des fabricants de lunettes jusqu'à celle des sociétés d'ambulance. Ce sont ainsi plus de 10 milliards de TVA qui se trouvent affectés à la sécurité sociale. On nous propose aujourd'hui d'y ajouter encore 13,2 milliards - j'y inclus le prélèvement social sur les revenus du patrimoine et les produits de placement. Si j'ajoute à cela les 5 milliards de la taxe professionnelle, on voit que le montant d'exonérations dont bénéficient les entreprises est loin d'être négligeable...
Troisième volet de la réforme : la fiscalité sur le patrimoine, dont le taux global serait porté à 15,5 % par une augmentation du prélèvement social sur les revenus patrimoniaux qui fait suite à deux augmentations en 2011, de 0,2 point en début d'année et de 1,2 point dans le collectif de septembre. Cette réforme n'est ni juste, ni compétitive. Elle n'est pas compétitive, car avec le prélèvement libératoire de 24 %, on arrive à un taux global de prélèvement de 39,5 %, loin de la zone de compétitivité. Elle n'est pas juste, parce qu'elle n'est pas proportionnelle, les petits épargnants étant touchés à l'égal des grandes fortunes.
Quel est l'impact des mesures proposées sur le solde public ? Aucun, puisque l'augmentation de la TVA et celle du prélèvement social viennent compenser la baisse des cotisations patronales famille - 3,6 milliards en 2012 et 13,2 milliards en année pleine. L'augmentation de TVA n'est donc pas une mesure de rendement, puisqu'elle est censée être neutre sur les comptes publics.
L'allègement des charges patronales est ciblé sur les salaires supérieurs au salaire médian puisque, augmentant progressivement entre 1 et 1,6 Smic, il est maximal entre 1,6 et 2,1 Smic avant d'aller s'amoindrissant pour s'annuler au-delà de 2,4 Smic. L'objectif annoncé est de créer 100 000 emplois en trois ans, grâce à un gain de compétitivité sur les prix. C'est là, à mon sens, une erreur de diagnostic, car c'est la compétitivité hors prix qu'il faut améliorer. Dans les secteurs exportateurs, les écarts de coûts salariaux entre la France et l'Allemagne ne sont pas significatifs. On s'obnubile sur les salaires, considérés comme un handicap...