Intervention de François Marc

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 22 février 2012 : 1ère réunion
Bilan de l'expérimentation de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels — Contrôle budgétaire - communication d'étape de mm. françois marc et pierre jarlier

Photo de François MarcFrançois Marc, rapporteur spécial :

Le 18 janvier dernier, le Gouvernement transmettait au Parlement, avec plus de trois mois de retard, le rapport sur la révision des valeurs locatives professionnelles, prévu par l'article 34 de la loi de finances rectificative pour 2010 du 29 décembre 2010.

Nous avons immédiatement souhaité nous saisir de ce rapport en tant que rapporteurs spéciaux de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». En premier lieu, parce qu'il s'agit d'une question à la fois centrale pour les finances locales et ancienne puisque depuis plus de vingt ans, elle attend d'être traitée. En second lieu, parce que nous avions évoqué la nécessité de traiter des valeurs locatives lorsque nous avons débattu l'année dernière de la péréquation. Enfin, parce que pour aboutir, cette question nécessite un appui et un investissement particulier des sénateurs, représentant des collectivités territoriales, qui sont concernées au premier chef.

Bien entendu, il ne s'agit aujourd'hui que d'une communication d'étape dont l'objet est essentiellement informatif. Nous avons étudié le rapport établi par les services de l'Etat (la direction générale des finances publiques - DGFiP - en l'occurrence), nous avons rencontré ses auteurs qui ont très volontiers répondu à nos interrogations et nous avons pu mesurer leur implication très forte dans cette opération. Nous allons vous rendre compte des éléments qu'à ce stade nous avons rassemblés.

Au-delà, nous poursuivrons nos travaux et nos auditions pour vous présenter, à la fin du premier semestre, des propositions concrètes pour faire avancer ce dossier.

Notre présentation aujourd'hui se déroulera en quatre phases : un rappel de la situation existante et des choix retenus par la loi de finances rectificative pour 2010, une présentation de l'expérimentation qui s'est déroulée durant l'année 2011, puis un exposé des résultats de l'expérimentation et, enfin, un aperçu des questions soulevées et des initiatives qui pourraient être prises.

Quelques éléments rapides sur la situation existante, tout d'abord. Les valeurs locatives cadastrales servent d'assiette aux impôts directs locaux qu'ils soient anciens ou récemment institués. Elles sont utilisées ainsi pour le calcul de la taxe d'habitation et de la taxe foncière s'agissant des locaux d'habitation. Pour les locaux professionnels, elles sont la base de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de la cotisation foncière des entreprises (CFE) comme autrefois de la taxe professionnelle.

Ces valeurs locatives professionnelles ont aussi un impact direct sur la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM), la taxe sur les friches commerciales et, enfin, sur la répartition de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

Les 3,3 millions de locaux professionnels, contre 33 millions de locaux d'habitation, sont évalués selon plusieurs méthodes, régulièrement critiquées pour leur complexité et leur obsolescence, comme en 2009 par le rapport public annuel de la Cour des comptes.

Les locaux commerciaux sont évalués selon trois méthodes :

- pour les locaux loués au 1er janvier 1970, on utilise le montant stipulé dans le bail en 1970. Cette méthode concerne environ 5,5 % du parc ;

- pour les locaux non loués au 1er janvier 1970, l'évaluation s'effectue par comparaison aux immeubles types présentant des caractéristiques similaires (cette méthode concerne 93 % des locaux) ;

- à défaut, le local fait l'objet d'une appréciation directe par les services fiscaux sur la valeur vénale (1,5 % des locaux).

Pour les locaux industriels, la valeur locative est déterminée selon une méthode comptable à partir du prix de revient des différents éléments des immobilisations industrielles. Cette méthode assure que les valeurs retenues sont conformes à la réalité.

Toutefois, pour les entreprises sans bilan (soit moins de 10 % du total des entreprises), la valeur locative est fixée comme pour les locaux commerciaux.

Enfin, pour les locaux des professions libérales, la méthode d'évaluation est identique à celle utilisée pour les locaux d'habitation et repose sur la comparaison.

Pour finir de brosser le tableau, rappelons rapidement les règles de mises à jour de ces évaluations telles qu'elles sont prévues par les textes en vigueur.

Le code général des impôts prévoit une revalorisation annuelle, une actualisation tous les trois ans et une révision générale tous les six ans.

Ces obligations ont été diversement appliquées puisque si les lois de finances ou les lois de finances rectificatives successives ont bien prévu des revalorisations annuelles, la dernière actualisation date de 1980 sur la base des valeurs 1978.

Quant à la dernière tentative de révision générale, engagée par la loi du 30 juillet 1990, elle s'est soldée par un abandon et nos valeurs locatives cadastrales s'appuient donc sur la dernière révision effectuée en 1970.

Venons-en aux principes retenus par l'article 34 de la loi de finances rectificative pour 2010. Cet article pose les bases d'un nouvel exercice de révision générale qui tire les leçons de l'échec de 1990 et oriente le nouveau système à mettre en oeuvre.

Il présente cinq caractéristiques :

- le maintien d'un système fondé sur des valeurs locatives administrées. C'est le choix qui a été fait et qui exclut le passage à un système fondé sur les valeurs vénales ;

- le maintien du produit fiscal pour les communes. Il s'agissait bien sûr d'une condition de l'acceptabilité de la révision. Elle n'aura donc pas d'effet sur les recettes des collectivités, mis à part la hausse du produit de la taxe d'habitation dont nous reparlerons plus tard ;

- l'étanchéisation des locaux d'habitation et des locaux professionnels. C'est une des caractéristiques fondamentales de la révision 2011-2012. Pour chaque collectivité (commune, EPCI), un coefficient de neutralisation permet de conserver la proportion entre, d'une part, le montant global de TFPB acquitté pour les locaux d'habitation et, d'autre part, le montant global de TFPB acquitté pour les locaux professionnels et pour les locaux industriels ;

- des commissions locales décisionnelles. C'est un aspect essentiel de la nouvelle procédure. La loi a prévu la création de deux nouvelles commissions : la commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels, constituée en majorité de représentants des collectivités et d'EPCI, et la commission départementale des impôts directs locaux chargée de statuer sur les désaccords entre la commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels et une ou plusieurs commissions communales ou intercommunales. Ce qui est important, c'est que les commissions départementales, qui se verront soumettre les propositions des services fiscaux, auront un rôle décisionnel, notamment pour délimiter les secteurs, fixer les tarifs de chaque catégorie, classer les locaux et décider de l'application de coefficients de localisation ;

- une mise à jour annuelle et automatique via les déclarations annuelles de résultats. C'est une nouveauté de la révision « nouvelle formule ». En conséquence, cette révision générale devrait être la dernière et désormais les valeurs locatives suivront les évolutions du marché.

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