Intervention de Jacques Delpla

Mission commune d'information Agences de notation — Réunion du 27 mars 2012 : 1ère réunion
Table ronde sur la pertinence du modèle et de la méthodologie des agences de notation

Jacques Delpla :

Pourquoi a-t-on besoin des agences de notation ? Parce que des milliers de titres de dettes sont émis chaque année, dont les investisseurs n'ont pas les moyens d'apprécier eux-mêmes la qualité. Sans agence de notation, le marché financier ne pourrait plus fonctionner et l'on devrait se contenter d'un modèle bancaire dont on connaît les limites. Mais lorsqu'Adrian Blundell-Wignall dit que les barrières à l'entrée tiennent au besoin de crédibilité, je ne peux que rappeler que les trois grandes agences ont massivement failli. Que dirait-on si on maintenait en fonction les régulateurs après un accident nucléaire, au motif qu'ils sont là depuis quinze ans ?

Que faut-il ne pas faire ? Sans doute ce que propose Michel Barnier, à savoir interdire la notation des dettes souveraines des pays « en détresse », c'est à dire sous programme. La belle affaire ! Dans la mesure où le rating permet d'évaluer un risque, le supprimer serait la pire des choses. Voyez le cas grec : la crédibilité des responsables politiques européens, qui ont juré qu'il n'y aurait pas de défaut en Grèce avant de pressurer leurs banques pour en accepter un, est en lambeaux. Pire encore, alors que la dette souveraine pouvait auparavant être regardée comme une dette senior, en Grèce, les investisseurs normaux se retrouvent aujourd'hui au rang de junior 4, c'est à dire venant non seulement après le FMI et les Etats, ce qui peut se comprendre au regard de la théorie du pompier, mais aussi après la BCE, alors que cette dernière rachète la dette grecque sur le marché secondaire dans des conditions identiques à celles des autres investisseurs. Il y a des raisons politiques à tout cela, mais quand même... De surcroît, le gouvernement grec a annoncé que les fonds de pension de son pays seraient remboursés de leurs pertes dans les trois ans à venir. Comment dans ce contexte annoncer que l'on ne notera plus les États en détresse ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion