Je suis sans doute de nous trois le plus grand utilisateur des agences de notation. Celles-ci sont indispensables. Elles ont une utilité indéniable et répondent à un besoin même si le système tel qu'en partie dévoyé lors de la crise des subprimes est déséquilibré.
Travaillant pour un groupe coté, je ne saurais être hostile au marché. Cela dit, les agences de notation sont des entreprises à but lucratif, ce qui explique une partie des dévoiements constatés. En outre, les mesures d'économies au quotidien signifient que de moins en moins d'analystes déterminent leur notation de plus en plus rapidement.
La relation est déséquilibrée en raison du développement du marché, et d'une déresponsabilisation collective : tous, collectivement, nous nous sommes réfugiés, de la Banque centrale européenne au petit investisseur, derrière le confort d'une « opinion » donnée par une tiers peu évalué.
Il faut retrouver un équilibre dans le contexte d'une crise unique, qui force chacun, y compris les agences de notation, à s'adapter.
Leur méthodologie qui est un élément clé dans cette crise n'est pas stable. Trop souvent, et de plus en plus, parce qu'elles sont soumises à diverses pressions, nous ne connaissons pas la manière dont s'opèrent les contrôles que nous subissons. Exemple : Moody's a dégradé brusquement au début de l'année la notation de 114 banques européennes. Ce n'est pas anodin. Outre la notation de long terme, il y a la notation de court terme. Une vingtaine de banques sur 40 grandes peuvent passer de P1 à P2, ce qui posera un problème structurel d'accès au financement de court terme.
Sans être adepte de la théorie du complot, il y a un biais anglo-saxon très clair : leur approche est fondée sur les normes de la comptabilité d'outre-Atlantique.
Leur rôle procyclique devrait les obliger à une plus grande responsabilité.
La profession réfléchit aux agences de notation. Elles se sont construit de formidables barrières à l'entrée. Les Chinois ont essayé d'entrer sur le marché, ce n'est pas évident. De plus en plus, les agences de notation ont accès à des informations confidentielles, de la même manière que les commissaires aux comptes qui sont, eux, une profession réglementée. Entre autres données, on peut penser aux stress tests qui ne sont pas publiés ou aux refinancements auprès de la BCE. C'est en soi une barrière à l'entrée.
Cela dit, les agences de notation sont un élément structurant dans le financement des banques, donc de notre économie.