L'Irlande est clairement solvable, mais c'est un cas encore différent : elle a un pâti d'une bulle immobilière et de la mauvaise situation de ses banques. Quand un pays est illiquide, il faut lui prêter de l'argent. Au sein de la zone euro, nous répugnons à voir intervenir le FMI, ce qui impose donc l'intervention de la BCE. A cet égard, on peut dire que, de façon structurelle, les repo à trois ans de la BCE sont bel et bien des euro-obligations. En effet, si la BCE prête à un pays qui ne la rembourse pas, elle demandera aux États de bien vouloir régler la facture. Il existe donc une solidarité de fait des Etats à travers les prêts accordés par la BCE.
En revanche, en cas d'insolvabilité, cette politique est totalement inadaptée, comme on le constate avec le traitement appliqué à la Grèce. Il ne sert à rien de lui prêter davantage en attendant qu'elle puisse rembourser. Ses exportations sont aujourd'hui inférieures de 35 % par rapport à leur niveau d'avant la crise. Son économie s'effondre. Lui imposer une politique drastique d'austérité en lui demandant de redevenir solvable est absurde ! Il aurait fallu admettre son insolvabilité dès le début et accepter de réduire sa dette, comme le FMI l'aurait fait. La totalité de l'argent prêté à la Grèce devrait aider l'économie, mais il sert à rembourser les différents prêteurs. Au total, on atteint un degré d'absurdité tel que la France et l'Allemagne viennent de mettre sur pied une proposition consistant à mettre dans un fonds les prêts européens à la Grèce, immédiatement rendus aux anciens prêteurs, de sorte que cet argent ne contribue pas du tout à doper l'économie grecque.
Cette stratégie absurde, dans laquelle, il faut le dire, M. Trichet porte une lourde responsabilité, a pourtant été adoptée pour éviter la contagion de la crise, qui était la crainte majeure.