Il est vrai que la responsabilité ne peut se limiter aux seuls partenaires du contrat, c'est-à-dire aux émetteurs. Nous voudrions élargir cette responsabilité aux investisseurs, qui sont les premiers à perdre de l'argent si la notation a été mal effectuée. En ce qui concerne le bien public, une réglementation est indispensable : c'est le rôle de l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF), mais elle a pour cela besoin de ressources considérables. L'autoréglementation a échoué : seule une réglementation très ferme permettrait de stabiliser les marchés de capitaux, et de réduire la volatilité qui vient du mauvais fonctionnement de l'industrie de l'évaluation.
Quant à la volatilité de la notation des pays et son impact sur le coût des emprunts souverains, le secteur de l'évaluation ne pourra pas tout résoudre. On ne pourra modifier les indicateurs de performance : c'est aux pouvoirs publics d'agir.
Il est vrai que les agences de notation sont à la fois juge et partie : elles ont contribué à la détérioration de l'économie et à l'éclatement de la bulle, tout en se faisant juges de leurs conséquences.
En tant que nouveaux entrants, nous sommes libérés de cette responsabilité historique. Aujourd'hui, de profonds changements des finances publiques s'imposent. La pénalisation des agences de notation n'est pas la solution miracle. Il faut prendre en compte leur difficulté à noter certaines dettes souveraines : entre une notation trop complaisante ou trop sévère, elles sont souvent prises entre le marteau et l'enclume.
La note de la France a baissé de façon accidentelle il y a six mois. Contre ce risque d'abus, la seule protection est la transparence dans le processus de l'évaluation. Si tout le monde est initié, il n'y a plus de jugement subjectif ni de complaisance. Si le mécanisme de l'évaluation est clair, les gouvernements sauront eux aussi à quoi s'en tenir quand ils prennent une décision.
Aujourd'hui, l'industrie de la notation est impuissante devant les problèmes budgétaires européens, même si elle a contribué au désordre actuel.