Je commencerai par vous présenter Mme Rozen Desplatz qui est en charge de la mission animation de la recherche au sein de la Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES).
Comme vous le savez, la DARES, rattachée au ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, produit et analyse des statistiques sur le travail, le chômage et l'emploi. Cette direction participe aux réflexions du ministère et, plus largement, du Gouvernement. Sur le sujet spécifique des femmes et de l'emploi, nos travaux ont été axés au cours des dernières années sur la production et l'analyse de statistiques plus que sur des analyses approfondies ou sur la formulation de conseils pour les politiques publiques.
Dans l'analyse des tableaux que je vais vous présenter, je me cantonnerai donc plus au registre du constat qu'à celui des recommandations.
Afin d'éclairer le sujet qui nous intéresse aujourd'hui, j'utiliserai les enseignements tirés de trois études publiées par nos services au cours des six derniers mois : la première dresse un panorama des évolutions sur une longue période de l'activité, l'emploi, le chômage et le salaire dans une perspective genrée ; la deuxième propose une analyse fine des écarts de salaires entre les hommes et les femmes - produite régulièrement et récemment actualisée ; enfin, je vous livrerai des éléments plus prospectifs, en me basant sur une étude que nous avons réalisée conjointement avec le Centre d'analyse stratégique sur les perspectives d'emploi et les postes à pourvoir selon les différents métiers à l'horizon 2020.
Trois aspects abordés dans ces différentes études sont susceptibles de vous intéresser : tout d'abord, des éléments de constat concernant l'emploi et le chômage des hommes et des femmes ; ensuite, les caractéristiques des emplois dans une perspective genrée, puis la question des écarts de salaires entre les hommes et les femmes.
Les chiffres concernant l'activité, l'emploi et le chômage des femmes vous sont bien connus, aussi essaierai-je de concentrer mon analyse sur les évolutions les plus récentes et de répondre, si vous le souhaitez, à des interrogations précises sur le sujet.
Même si le taux d'activité des femmes a considérablement augmenté dans les dernières décennies - puisqu'on est passé de 53 % en 1975 à 66 % en 2010 - un écart sensible demeure entre le taux d'activité des femmes et celui des hommes, toutes classes d'âge confondues. Il faut noter que cet écart peut atteindre 5 à 6 points pour la classe d'âge 25/50 ans.
Il ressort d'un certain nombre d'études que les deux principaux facteurs déterminants de cet écart sont, d'une part, la composition familiale et en particulier le nombre ainsi que l'âge du dernier enfant, et, d'autre part, le niveau de diplôme.
Ceci est valable en France comme dans les autres pays européens. L'importance de l'écart constaté entre le taux d'activité des femmes peu ou pas diplômées ayant entre 25 et 50 ans et au moins trois enfants en bas âge - évalué à 20 % - et celui des femmes diplômées sans enfants - évalué à 95 % - confirme cette analyse.
L'analyse sur une longue période fait, par ailleurs, apparaître que la progression du taux d'activité féminin a sensiblement ralenti depuis le milieu des années 1990. Alors qu'il augmentait de + 0,3 % chaque année entre 1975 et 1995, depuis cette date il augmente de moitié moins.
Ce ralentissement est dû essentiellement à la fin de l'allongement de la durée d'études depuis le milieu des années 1990 et à l'augmentation du taux de descendance pour les femmes dans les quinze dernières années.
Si l'on se livre à un exercice de comparaison internationale, on constate que le taux d'activité des femmes en France se situe à un bon niveau, juste derrière celui des pays d'Europe du Nord. Par ailleurs, il ressort des données chiffrées que la réduction de l'écart entre les hommes et les femmes est un phénomène commun à l'ensemble des pays industrialisés.
Concernant les taux de chômage, celui des femmes s'est rapproché régulièrement de celui des hommes depuis 1975, même s'il reste légèrement supérieur.
Néanmoins, on a constaté qu'en période de récession les hommes étaient plus touchés que les femmes car le chômage en période de crise touche prioritairement des secteurs où prédominent les contrats d'intérim, comme le bâtiment et l'industrie, dans lesquels les hommes sont plus nombreux.
Par ailleurs, aux États-Unis, au Japon, au Royaume-Uni et dans un certain nombre de pays nordiques, le taux de chômage des femmes est inférieur à celui des hommes. La réduction de l'écart des taux de chômage entre les hommes et les femmes s'explique essentiellement par l'amélioration tendancielle des performances des femmes en matière d'éducation et par la tertiarisation de l'économie.
Concernant le cas français, caractérisé par un taux de chômage des femmes toujours légèrement supérieur à celui des hommes, il faut distinguer les femmes actives selon le niveau de diplôme, le chômage touchant particulièrement les femmes peu ou pas diplômées.
J'en viens maintenant aux différences de caractéristiques des emplois entre les hommes et les femmes.
Comme vous le savez, les femmes occupent 80 % des emplois à temps partiel, ce qui signifie qu'environ 30 % des femmes travaillent à temps partiel contre 6 % des hommes. Il est significatif de constater que cet écart est stable depuis une quinzaine d'années et qu'il a tendance à croître avec l'âge.
Les enquêtes réalisées auprès des travailleurs à temps partiel permettent, par ailleurs, de constater qu'une plus grande proportion de femmes dit le subir. Ainsi, évalue-t-on à 9 % d'entre elles celles qui sont effectivement en situation de sous-emploi, contre 3 % des hommes.
Il faut cependant noter que le taux de temps partiel est modeste en France, comparativement au taux moyen en Europe de 40 %, ou à certains autres pays, comme les Pays-Bas, où 75 % des actifs travaillent à temps partiel.
Compte tenu de l'augmentation du nombre de femmes travaillant à temps partiel et de l'augmentation du nombre des contrats à temps partiel dans les dix dernières années, on comprend que le volume de travail des femmes s'est rapproché moins rapidement de celui des hommes que le taux d'emploi.
S'agissant de la nature des contrats (contrats à durée déterminée, contrats à durée indéterminée...), on ne constate pas de différence remarquable entre les hommes et les femmes. Ces différences existent en revanche quand on examine les secteurs d'emploi : les femmes non salariées sont proportionnellement moins nombreuses que leurs homologues masculins dans les professions libérales, alors qu'elles sont majoritaires dans la fonction publique (26 % de femmes contre 14 % d'hommes), cette forte représentation s'expliquerait notamment par une forte présence au sein de l'hôpital public.
Comme vous le savez, et ceci est à peu près constant depuis le début des années 1980, les femmes occupent encore aujourd'hui plus fréquemment des emplois non qualifiés que les hommes.
En revanche, le nombre de femmes occupant des postes d'encadrement augmente, même si leur nombre reste encore proportionnellement inférieur à celui des hommes.
En matière de mixité, ensuite, le constat reste sans appel : les métiers occupés par les hommes et les femmes restent très différents. Il y a donc peu de mixité dans les métiers, en général, et, dans certains métiers, on peut même parler de « ségrégation professionnelle ». Soulignons cependant qu'elle régresse depuis le début des années 1990 et qu'elle n'est pas propre à la France.