Intervention de Marie-Noëlle Lienemann

Commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois — Réunion du 27 juin 2012 : 1ère réunion
Droit au logement opposable et diverses mesures en faveur de la cohésion sociale — Examen du rapport

Photo de Marie-Noëlle LienemannMarie-Noëlle Lienemann :

Je ne puis souscrire à la formule par laquelle vous avez terminé votre présentation : « le droit au logement opposable fonctionne bien là où l'on n'en a pas besoin, mal où l'on en a besoin ». D'accord sur la seconde partie, mais pas sur la première. C'est un grand progrès que d'avoir fait d'un droit fondamental de la personne humaine un droit réel, opposable. Je regrette seulement que cette innovation ne se soit pas accompagnée d'une exigence de moyens. C'est peut-être une différence entre notre droit républicain et la tradition anglo-saxonne.

Où le marché ne serait pas tendu, il n'y aurait pas de problème ? Mais quand il en est ainsi, c'est au contraire souvent qu'il existe des problèmes sociaux : une demande non solvable considérable. Le mouvement HLM lui-même, dont je suis membre, fait un peu l'autruche devant une situation qu'il n'a pas envie qu'on lui fasse porter seul.

Qui est demandeur de logement ? Quelle est la demande réelle ? Pour répondre à ces questions, il nous manque un observatoire. Un exemple, dans les zones rurales, l'insalubrité est massive. Ce n'est pas par les HLM que l'on résoudra ce problème, auquel nous sommes requis de répondre. Il faut donc insister sur la nécessité d'une visibilité des besoins dans la durée. J'en viens à la question du numéro unique. Je ne vais pas vous raconter ma vie de ministre, mais enfin, comment comprendre que, dans une République centralisée comme la nôtre, on ne puisse savoir quel est le nombre de demandes de logement des départements, le profil des familles, leur lieux de vie, leur niveau de ressources ? C'est inacceptable. Les besoins doivent être transparents. C'est question de volonté. Ce qui nous amène au débat sur l'aide à la pierre dans les zones tendues. Je partirai d'un exemple : au motif que les organismes HLM, en Champagne-Ardenne, disposent de fonds propres, on décrète que la région n'a plus besoin de logements sociaux et l'on transfère ces fonds à l'Île-de-France, une des régions les plus riches d'Europe. On ponctionne, en somme, sur les locataires de Champagne-Ardenne, une des régions les plus pauvres de France ! Ne ferait-on pas mieux de s'interroger sur le ratio entre niveau moyen de logement et niveau de ressources ? Certains PLUS ne mériteraient-ils pas d'être transformés en PLAI et certains PLS en PLUS ? Il y a une négociation à mener avec les bailleurs pour que le niveau des logements corresponde aux réalités de la demande. Sur le taux de la SRU, je suis d'accord, mais il y a deux stratégies, soit on passe à 25 %, soit on reste à 20 %.

Mobiliser les logements du parc privé ? Très bien, mais personne ne sait ce que sont ces deux millions de logements. J'ai fait des réquisitions : dans 80 % des cas, les logements étaient inhabitables sans de très importants travaux. Il faut donc une bonne connaissance de ce parc, et une bonne organisation des services publics locaux pour mener un travail de conviction auprès des bailleurs. On peut aussi aller jusqu'à la réquisition. Surtout, je plaide pour une garantie logement universelle...

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