Intervention de Yves Nicolas

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 29 mai 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Yves Nicolas vice-président de la compagnie nationale des commissaires aux comptes

Yves Nicolas, vice-président de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes :

J'ai commis une erreur de langage en disant que nous étions indépendants le plus possible. La question ne se pose pas : nous sommes indépendants, et cette indépendance est d'ailleurs vérifiée au travers du contrôle qualité effectué par le Haut Conseil du commissariat aux comptes, qui est complètement indépendant de la profession dans la mesure où il est présidé par un haut magistrat.

Je tiens à mentionner que nous sommes nommés pour une durée de six ans. Même si nous sommes rémunérés par l'entreprise, notre mission nous est confiée par l'assemblée générale pour six années, et les honoraires sont, en général, définis dès le départ au moyen, la plupart du temps, d'un appel d'offres. Les choses sont donc absolument transparentes. Il existe, par ailleurs, de nombreuses mesures de nature à garantir cette indépendance.

J'évoquerai tout d'abord la rotation des signataires.

S'agissant des sociétés faisant appel public à l'épargne, ce ne sera pas le même associé signataire qui interviendra si le mandat est renouvelé. C'est un autre associé du cabinet, indépendant, qui assurera ce nouveau mandat, sauf à prendre le risque de subir éventuellement les foudres d'une sanction pénale, civile, réglementaire, voire disciplinaire.

En effet, même si nous n'aimons pas trop parler de cet aspect des choses, notre profession est très surveillée par le H3C et par les magistrats. Nous cumulons les risques car, en tant que signataires à titre personnel ou au nom d'une personne morale, nous avons à faire face à d'éventuelles poursuites pénales, civiles, en réparation, réglementaires pour ce qui concerne l'AMF s'il s'agit d'une société cotée, et disciplinaires. Nous sommes donc très encadrés.

Il est, par exemple, absolument interdit de certifier les comptes d'une entreprise dont le dirigeant serait un parent ou d'accepter un prêt d'une entreprise dont on est le commissaire aux comptes ; ce serait la meilleure façon d'être définitivement radié ! Je mets bien en exergue le fait que nous sommes l'une des professions libérales les plus réglementées et les plus contrôlées qui soient.

Au demeurant, il existe bien d'autres mesures encore. Ainsi, dans le cadre des comptes consolidés d'un groupe de sociétés, intervient - nous sommes quasiment le seul pays au monde où cela existe de façon obligatoire - le co-commissariat aux comptes : deux commissaires aux comptes signent le même rapport. Imaginez que l'un d'entre eux accepte tout à coup les faveurs d'une société, l'autre serait évidemment là pour l'en empêcher, voire, le cas échéant, émettre un rapport différent du sien ; la visibilité du problème serait alors flagrante.

Je ne vous dis pas que tout est parfait dans le meilleur des mondes, car il y a toujours des complications, mais, du fait de ces réglementations, notamment de la loi de sécurité financière que j'ai évoquée tout à l'heure, qui a été adoptée à la suite des scandales américains Enron ou WorldCom, dont vous vous souvenez certainement, notre profession est très encadrée et très surveillée.

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