Intervention de Odette Terrade

Réunion du 7 juillet 2008 à 15h00
Modernisation de l'économie — Article 21

Photo de Odette TerradeOdette Terrade :

L’article 21 du projet de loi fait table rase des quelques garde-fous qui subsistaient encore dans le code de commerce pour tenter d’encadrer le grave déséquilibre de la relation commerciale entre fournisseur, centrale d’achat ou distributeur.

L’article L. 441-6 du code de commerce impose deux obligations aux fournisseurs : d’une part, communiquer leurs conditions générales de vente, les CGV, à tout distributeur qui demande à les connaître ; d’autre part, appliquer les mêmes CGV à tous leurs clients d’une même « catégorie ».

Vous reconnaissez dans votre rapport, madame Lamure, l’échec des politiques successives du Gouvernement : « Le projet de loi constate l’échec de ce dispositif, qui, d’une part, n’a pas permis de contrebalancer la faiblesse des fournisseurs face aux distributeurs et, d’autre part, a eu des effets pervers dont, en particulier, le développement très important des marges arrière. Celles-ci constituent assez largement un outil de contournement de la loi et aboutissent en outre à une inflation des prix. »

La logique voudrait donc que, forts de cet enseignement, nous recherchions des solutions efficaces pour lutter contre la dictature du distributeur. Au contraire, l’article 21 se met à leur service pour leur rendre la part plus belle encore.

Mais la consécration dans les relations commerciales de l’opacité ou de la discrimination tarifaire à laquelle procède le projet de loi ne satisfait pas grand monde, et cette récidive du Gouvernement dans la prise de mesures inefficaces aux effets pervers commence même à agacer certains députés de la majorité. L’un d’eux constatait, durant les débats à l’Assemblée nationale : « Les acteurs économiques ne nous demandent pas grand-chose : ils souhaitent des règles compréhensibles et stables. Or je crains qu’avec ce titre II on ne leur apporte ni l’un ni l’autre. »

Les professionnels sont également très inquiets – sauf les grands distributeurs, qui, étonnamment se félicitent du dispositif.

Un nombre important de fournisseurs, dans divers secteurs d’activité, nous ont alertés sur le rôle que jouent les conditions générales de vente. Comment peut-il exister une concurrence libre et non faussée quand il y a, d’un côté, cinq centrales d’achat qui verrouillent le marché et, de l’autre, des dizaines de milliers de petites entreprises dont le sort dépend du bon vouloir des dirigeants, des cadres et des commerciaux de ces centrales ?

Le problème réside dans la concentration et l’existence d’un monopole de fait ; or, que ce soit à l’article 21 ou à l’article 27, vous avez décidé de l’ignorer. Tant que vous persisterez dans cette dénégation, les difficultés que nous évoquons tous les six mois ne sauront être réglées.

Comme mon collègue et ami André Chassaigne le soulignait très justement lors des débats sur la loi Chatel, la liberté que vous prônez, c’est en fait « la liberté du renard libre dans le poulailler libre ».

Pour toutes ces raisons, et parce que les amendements qui ont été déposés nous donnent peu d’espoir que le texte soit amélioré, nous voterons certainement contre cet article. Mais nous participerons très activement à sa discussion !

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