Nous respectons évidemment les décisions du gouvernement britannique. Au reste, monsieur le sénateur, j’espère que vous-même voterez en faveur de la mise en œuvre de cette taxe.
J’en viens maintenant au quatrième point de mon intervention : l’ouverture de perspectives d’évolution pour l’Union économique et monétaire. Voilà un point qui était particulièrement attendu et, sans doute, le plus difficile.
L’Union économique et monétaire avait plus que jamais besoin de nouvelles perspectives pour retrouver la confiance. Avec le mandat confié au président du Conseil européen pour élaborer, en liaison avec les présidents de la Commission, de la Banque centrale européenne et de l’Eurogroupe, une « feuille de route » assortie d’un calendrier, en vue d’une « véritable Union économique et monétaire », un pas a été franchi.
Nous attendons beaucoup d’un tel rapport, de cette commande politique du Conseil européen, en particulier des propositions concrètes pour nous permettre d’avancer vers une plus forte intégration solidaire, comme le Président de la République l’a appelé de ses vœux, autrement dit vers une union bancaire, avec une supervision intégrée, et un gouvernement économique. La France réclame depuis très longtemps cette forme de gouvernance, qui soit davantage encore au service de la croissance et de l’emploi.
Le rapport sera présenté au Conseil européen du mois d’octobre. M. Van Rompuy va travailler vite. Il appartiendra ensuite au Conseil d’adopter, s’il est d’accord avec les propositions, un échéancier précis.
Cinquième point à noter : l’accord des membres de la zone euro sur l’assouplissement des conditions d’utilisation des mécanismes financiers, qui était également indispensable à la stabilisation à court terme.
Obtenu à dix-sept et faisant l’objet d’un texte spécifique, cet accord ne fait pas partie des conclusions du Conseil européen au sens strict, mais il s’est traduit par une déclaration des chefs d’État et de gouvernement. C’est ce qui était certainement le plus attendu, tant la capacité des membres de la zone euro à trouver un accord sur le court terme était la condition indispensable à la restauration de la confiance.
Cette déclaration introduit trois innovations. Elles vont toutes dans le sens de l’assouplissement à court terme des conditions d’utilisation des mécanismes financiers mis en place pour répondre à la crise.
La première, c’est la mise en place avant la fin de cette année d’un mécanisme de supervision unique pour toutes les banques de la zone euro. Il pourrait, c’est le souhait de la France, que l’Eurogroupe devrait confirmer, du moins je l’espère, être confié à la Banque centrale européenne.
Voilà une étape extrêmement importante quand on connaît tous les grands débats qui ont eu lieu autour du rôle de la BCE. Les choses avancent. Il serait souhaitable qu’elle joue ce rôle : telle est sa vocation, finalement, et point n’est besoin de changer les traités pour cela, seule compte la volonté politique.
Dès lors que ce superviseur renforcé sera créé, le Mécanisme européen de stabilité pourra procéder directement à la recapitalisation des banques, sans devoir en passer par l’intermédiaire des États. C’est donc un moyen de couper le lien entre l’endettement des banques et l’endettement des États, d’en finir avec un cercle vicieux dont nous n’arrivions plus à sortir. Cette avancée n’est peut-être pas celle qui a été le plus mise en avant. Je voulais la souligner devant vous.
La deuxième innovation concerne l’Espagne. Il s’agit de l’abandon du statut de créancier privilégié pour les interventions du Mécanisme européen de stabilité issues du Fonds européen de stabilité financière auquel le premier doit succéder. Cette décision devrait rassurer les investisseurs dans la solidité de la dette de l’État espagnol.
La troisième concerne l’assouplissement de l’utilisation des instruments d’aide existants pour les États qui respectent leurs engagements. À l’égard des États fournissant des efforts pour redresser leurs finances publiques et respectant les règles et les recommandations européennes, c’est-à-dire décidées en commun, la zone euro a rappelé sa détermination à agir en utilisant tous ses instruments pour stabiliser les marchés obligataires.
La Banque centrale européenne, encore elle, agira comme agent du Fonds européen de stabilité financière, et bientôt du Mécanisme européen de stabilité, pour les opérations d’achat d’obligations.
Quant à la sortie de crise des dettes souveraines dans la zone euro, que j’évoque au travers de mon propos, soyons toujours vigilants et exigeants, car elle prendra du temps, mais nous avons stoppé son aggravation et inversé la tendance. Je le répète, la France, grâce au vote des Français, a contribué à ce résultat. Nous devons donc continuer à jouer notre rôle et être d’une grande vigilance, parce que la situation, notamment en Grèce, reste très fragile.
À plus long terme, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est une réflexion globale que nous devons engager sur l’approfondissement du projet européen.
Le succès du dernier sommet nous permet d’espérer une évolution vers des réponses structurelles et pérennes à la crise de la zone euro et surtout de redonner une nouvelle perspective et une nouvelle ambition à la reconstruction européenne.
Dans ce monde nouveau qui est le nôtre, l’avenir des peuples européens passe par une Europe plus forte, plus solidaire, porteuse d’un grand projet économique, social, culturel et environnemental, qui fait encore défaut aujourd’hui et décourage les meilleures volontés. Chaque État-nation demeurera, avec son identité et sa souveraineté, mais l’ambition que nous aurons su mettre en commun nous rendra plus forts ensemble. C’est en tout cas notre responsabilité aujourd’hui !