Cela veut dire aussi que les difficultés d’un ou plusieurs États membres retentissent sur les autres, et qu’il nous faut donc être solidaires. Ces deux principes se complètent. C’est l’« intégration solidaire », dont a parlé le Président François Hollande.
C’est pourquoi le Conseil européen, à juste titre, a prévu d’associer une supervision plus étroite à une solidarité plus grande. La possibilité de recapitaliser directement des banques est associée à la mise en place d’une surveillance bancaire unique dans la zone euro, sous l’égide de la BCE. Des interventions éventuelles du FESF, le Fonds européen de stabilité financière, et du MES, le Mécanisme européen de stabilité, sur le marché secondaire des titres de dettes sont associées au respect par les pays concernés de leurs engagements. Il y a ainsi un juste équilibre entre les droits et les devoirs. C’est l’« intégration solidaire » défendue par le Président François Hollande.
Enfin, le Conseil européen a esquissé un troisième rééquilibrage, qui n’est pas sans lien avec les deux autres, et qui concerne le fonctionnement du Conseil européen. Nous sommes sortis du schéma dans lequel les réunions étaient vouées à entériner les compromis préparés en petit comité entre la France et l’Allemagne, ou, plus exactement, entre l’Allemagne et la France, car ces compromis penchaient toujours du même côté. Nous sommes passés à un fonctionnement plus ouvert, dans lequel d’autres ont leur mot à dire, et c’est un progrès pour l’Europe. Bien entendu, tout le monde en convient, le couple franco-allemand est utile et même indispensable. Encore faut-il qu’il ne soit pas exclusif et qu’il ne prétende pas à lui seul faire la pluie et le beau temps en Europe ! Le couple franco-allemand doit, certes, favoriser la synthèse, sous réserve qu’elle intervienne à l’issue d’une préparation où il n’y a pas deux catégories d’États membres.
Je voudrais, pour terminer, souligner que les résultats de ce Conseil européen ont le mérite d’ouvrir une perspective et de s’inscrire dans la durée. Nous avons désormais l’esquisse de ce que sera une zone euro plus intégrée. Il y a, certes, encore beaucoup à faire pour parvenir à l’intégration financière, budgétaire et économique préconisée par le rapport Van Rompuy. Mais le mouvement est lancé. Pour le mener à bien, il ne faudra pas oublier la dernière des quatre orientations de ce rapport Van Rompuy, laquelle souligne la nécessité d’« assurer la légitimité démocratique et l’obligation de rendre compte ».
Les parlements – le Parlement européen mais aussi et, surtout, les parlements nationaux – devront être étroitement associés aux décisions. Nous nous situons en effet au cœur de leurs compétences, et nous traitons de domaines qui touchent directement nos citoyens. Le Sénat, je le rappelle, a déjà adopté une résolution sur ce sujet. D’ailleurs, je vous remercie, monsieur le président, d’avoir rappelé que, sur notre initiative notamment, un « carton jaune » vient, pour la première fois, d’être envoyé à la Commission sur un problème jugé par nous essentiel, celui du droit de grève. Cela montre que l’application du traité de Lisbonne nous donne des pouvoirs réels, qu’il nous faut appliquer de manière utile. Tel est le cas, puisqu’en cette matière de droit de grève, sur notre initiative, plus d’un tiers des parlements nationaux se sont prononcés contre la proposition de la Commission, laquelle doit maintenant revoir sa copie. Et nous entendons qu’elle le fasse dans un sens plus juste !
Je conclus en indiquant que le Conseil européen de la semaine dernière n’est pas un point d’arrivée. Le chemin à faire reste considérable, c’est entendu, mais nous avons pris un meilleur itinéraire, qui nous donne plus de chances d’arriver au but, et il me semble que c’est déjà beaucoup !