Je vous remercie de votre question, madame la sénatrice.
Comme je l’indiquais tout à l’heure en réponse à M. Gattolin, ces sujets qui concernent les perspectives budgétaires 2014-2020 sont extrêmement importants, notamment au regard de l’objectif consistant à générer de la croissance.
Je le rappelle, le précédent gouvernement avait considéré qu’il fallait diminuer de 200 milliards d’euros la contribution de la France au budget de l’Union européenne. Toutefois, cette baisse devait s’accompagner d’une sanctuarisation, que nous souhaitons également, des crédits alloués à la politique agricole commune – j’y reviendrai. Avait aussi été affichée la volonté de ne pas trop minorer les crédits consacrés à la cohésion, qui permettent à un certain nombre de pays de cheminer vers la convergence et de faire de la croissance. Il restait donc finalement très peu de ressources, dans un contexte où les piliers budgétaires étaient sanctuarisés, pour faire de la croissance, de l’innovation et de la recherche.
On voit bien d’ailleurs que, sur ce point, nous évoluons sous contrainte.
Toutefois, à cette heure, je ne suis pas encore en mesure de vous dire exactement quelle sera la position de la France dans la négociation qui doit se dérouler dans les mois qui viennent et qui se prolongera jusqu’à la fin de l’année 2012, voire au-delà. Nous sommes en effet engagés dans un processus interministériel d’analyse de la « boîte de négociations » présentée par la présidence danoise, analyse qui doit être croisée avec nos propres contraintes.
Nous devons notamment faire face au cruel dilemme devant lequel nous met la Commission européenne : d’une part, elle nous dit qu’elle veille au respect par l’ensemble des pays des trajectoires budgétaires qu’ils ont présentées et que nous devons à cet égard nous conformer aux recommandations qu’elle nous adresse ; d’autre part, elle nous demande de contribuer au budget de l’Union européenne de telle sorte que, si l’on suivait ses propositions, notre contribution passerait de 18 milliards à 23 ou 24 milliards d’euros. Les deux demandes sont difficiles à satisfaire simultanément. Nous devons donc adopter une position équilibrée et raisonnable afin d’essayer, dans la cohérence, d’utiliser le budget de l’Union pour faire de la croissance.
Ce je peux vous dire d’ores et déjà, c’est que ce travail interministériel doit nous permettre d’arrêter une position susceptible de matérialiser cette cohérence.
Par ailleurs, j’ai eu l’occasion d’indiquer lors des deux conseils Affaires générales auxquels j’ai participé qu’il n’était pas question pour nous d’accepter les amendements présentés par certains États à la « boîte de négociations » au sujet des crédits alloués à la politique agricole commune. En effet, un certain nombre de textes proposés par des États membres préconisaient de diminuer massivement les aides directes à la politique agricole.
Nous pensons, pour notre part, qu’il ne faut pas affecter un secteur d’activité qui souffre déjà beaucoup de la crise. Nous pouvons envisager des évolutions comme le verdissement de la politique agricole commune, qui peut apparaître souhaitable. Nous pouvons également envisager de procéder à des réorientations au sein des deux piliers de la politique agricole commune – les aides directes et l’accompagnement du monde rural. Mais nous ne souhaitons pas qu’on touche au principe des aides directes, à leur volume et au budget de la politique agricole commune. C’est la raison pour laquelle j’ai, à plusieurs reprises, pris des positions extrêmement claires sur les amendements qui étaient proposés par un certain nombre de pays en la matière.
Quant aux crédits de la cohésion, encore une fois, nous avons bien conscience qu’ils sont importants pour la croissance. Mais il faut qu’ils soient utilisés à bon escient. C’est dans cet esprit que nous nous sommes positionnés contre le filet de sécurité et pour le filet de sécurité inversé.
Le filet de sécurité permet à un certain nombre de régions qui bénéficiaient de la cohésion, et qui ne sont pas nécessairement dans les pays de la cohésion, de préserver les deux tiers de leur dotation dans le cadre des trajectoires budgétaires à venir. Nous considérons que ce sujet doit être débattu et nous ne sommes pas nécessairement favorables à ce filet de sécurité. Le filet de sécurité inversé constitue, quant à lui, un dispositif qui permet de maîtriser l’évolution des budgets alloués à un certain nombre de pays de la cohésion en fonction de l’évolution de leur PIB.
Telles sont les précisions que je peux vous apporter cet après-midi. Elles sont, me semble-t-il, suffisantes pour vous montrer que l’on travaille, mais je ne peux pas vous en dire trop non plus à un moment où les arbitrages interministériels sont en cours.