Intervention de Alain Anziani

Réunion du 11 juillet 2012 à 14h30
Harcèlement sexuel — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Alain AnzianiAlain Anziani, rapporteur :

Il fallait nécessairement viser aussi cette situation. Nous pensions utiliser l’expression de chantage sexuel, qui avait d'ailleurs été employée lors des débats parlementaires, en 1992, quand fut créée l’infraction de harcèlement. Le législateur avait alors réfléchi à la question de l’acte unique, qui, selon le ministre délégué à la justice de l’époque, Michel Sapin, devait être réprimé par la loi. Toutefois, après en avoir longuement débattu, le législateur avait estimé inutile de préciser ce point dans la loi.

Nous en avons à l’évidence payé le prix : voilà vingt ans que la discussion se poursuit devant les tribunaux pour savoir si un acte unique relève, ou non, du harcèlement sexuel. Comme vous l’avez souligné, madame la garde des sceaux, si l’on ouvre le dictionnaire, la réponse à cette question est évidemment négative, mais si l’on considère la notion elle-même, elle est positive. Voilà vingt ans que le débat se poursuit !

Madame la garde des sceaux, vous avez employé dans votre texte une formulation très intelligente : « Est assimilé au harcèlement sexuel », qui permet de ne pas brutaliser le dictionnaire tout en reprenant la notion de harcèlement. Tel est l’état du texte. Catherine Tasca, Virginie Klès et d’autres ont souhaité aller plus loin et inscrire dans la loi le terme de chantage sexuel. Toutefois, la commission des lois a considéré ce matin que cette notion n’éclaircissait pas le texte, et cet amendement auquel j’étais pour ma part favorable n’a donc pas été adopté.

Je voudrais évoquer à présent un point très précis. En effet, nous sommes toujours très attentifs aux observations formulées par les uns et les autres. Le II de l’article 1er du texte exposera-t-il les victimes à des risques de requalification de tentatives de viol ou d’agression sexuelle en harcèlement sexuel ? La discussion est ouverte, et je comprends les arguments invoqués, qui tiennent, par exemple, à l’utilisation du mot « contraintes » dans cette disposition.

Il est toujours difficile de répondre à une telle question, mais je ne crois pas que ce risque soit fondé. En effet, la tentative est parfaitement définie dans le droit français. Elle suppose un début d’exécution. Une tentative de viol, par exemple, nécessite un commencement d’exécution, qui n’a été arrêté par son auteur qu’indépendamment de sa volonté propre, selon la jurisprudence. Cela implique un contact ou une pression physique, un acte matériel et, dès lors, nous sortons du harcèlement tel que nous l’entendons.

Madame la garde des sceaux, vous avez ajouté tout à l'heure, et je vous en remercie, que, pour dissiper toute confusion, vous entendiez insister, au travers d’une circulaire ou d’une instruction aux parquets, sur la nécessité de donner aux faits leur exacte qualification pénale. Du reste, la requalification est un mal judiciaire assez répandu, concernant les infractions sexuelles, mais aussi au-delà, et il faudra un jour, si vous en êtes d'accord, que nous nous penchions sur cette question.

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